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3,71

sur 2072 notes
Il y a un certain temps que je voulais découvrir Matthias Enard, mais « Zone » son précédent livre me semblait être une sorte d'ovni littéraire
( plus de 500 pages je crois, en une seule phrase) du coup j'avais remis l'expérience à plus tard.
Et bien je dois avouer que «Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants », me fait regretter ma frilosité. de par l'histoire tout d'abord, aussi étonnante que méconnue, un Michel-Ange aveuglé par son travail, tellement loin des manigances faite sur sa personne et des enjeux que sa décision amenait. Et puis bien sur par l'écriture agréable, fluide d'Enard, bien au-dessus d'un grand nombre de ces confrères, précise, poétique, imagée. Alors même si la brièveté du roman est son seul défaut, le voyage sur les pas du célèbre italien sur les rives du Bosphore vaut largement le détour. C'est sur, je reviendrai vers vous Monsieur Enard.

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Je ne vous parlerai pas de batailles, de rois et d'éléphants...Mathias Enard en est infiniment plus capable que moi !

A travers ce que je qualifierai de long poème, à la manière d'une histoire chantée au Moyen-Age, il nous narre les quelques semaines passées à Istanbul par Michel-Ange, censé construire un pont sur la Corne d'Or. En effet, blessé par le pape Jules II, qui ne le paie pas, il s'en va à la rencontre du sultan Bajazet qui lui a proposé de dessiner ce fameux pont.
Et là-bas, la douceur de vivre le rattrape, lui, l'ascète, le travailleur infatigable, le bourru.
Une amitié se crée avec le beau et ambigu poète Mesihi de Pristina, qui lui fait découvrir tous les trésors de la ville...et les bouges. Mais Michel-Ange s'en défend, malgré lui. Malgré lui aussi, il est attiré par une jeune musicienne et danseuse andalouse, mais jamais il ne la touchera, ou à peine une caresse sur le bras.
Cette Andalouse mystérieuse nous livre, à mon sens, les plus beaux passages : « Je sais que les hommes sont des enfants qui chassent leur désespoir par la colère, leur peur dans l'amour ; au vide, ils répondent en construisant des châteaux et des temples. Ils s'accrochent à des récits, ils les poussent devant eux comme des étendards ; chacun fait sienne une histoire pour se rattacher à la foule qui la partage. On les conquiert en leur parlant de batailles, de rois, d'éléphants et d'êtres merveilleux ; en leur racontant le bonheur qu'il y aura au-delà de la mort, la lumière vive qui a présidé à leur naissance, les anges qui leur tournent autour, les démons qui les menacent, et l'amour, l'amour, cette promesse d'oubli et de satiété. Parle-leur de tout cela, et ils t'aimeront ; ils feront de toi l'égal d'un dieu. Mais toi tu sauras, puisque tu es ici tout contre moi, toi le Franc malodorant que le hasard a amené sous mes mains, tu sauras que tout cela n'est qu'un voile parfumé cachant l'éternelle douleur de la nuit. »

Qu'il y ait eu un complot, qu'il se soit commis un meurtre, que le pont soit construit ou pas, on s'en moque...Ce qui reste après la lecture de ce livre, c'est une indéfinissable atmosphère, ouatée, musquée. Difficile de quitter un ouvrage qui nous parle de batailles, de rois et d'éléphants...
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Michel Ange à Constantinople et ses amours platoniques avec une belle andalouse, comment résister à un pareil programme? Rien que le titre éveille l'envie de partir à sa suite.

Mathias Enard a imaginé la présence de Michel Ange en Turquie, contrarié qu'il est dans ses relations romaines avec le pape Jules II, pour construire un pont sur le Bosphore. de là, une féerie poétique se développe où les femmes tiennent une place de choix, particulièrement celle qui va séduire le grand maître.

Tout autour, ce sont les parfums de l'Orient, sa douceur et sa violence, tout un ensemble totalement différent de ce que l'on peut vivre à Rome. On a du mal sans doute à imaginer Michel Ange dans cet Orient insaisissable, mais le charme prend et la magie poétique de l'auteur exalte ce voyage improbable.

Pas d'action trépidante, mais une multitudes de nuances dans cette lecture imprégnée de réalisme et de mystère. Poésie, architecture, arômes orientaux, amour sont la palette de ce petit livre écrit simplement et avec talent. Une très belle découverte.
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Si la vie est une succession de parenthèses, celle qui mena Michel-Ange à Constantinople en 1506, le transforma à tout jamais.
Le puissant pape guerrier Jules II lui doit de l'argent lorsque le sultan Bajazet lui propose de concevoir un pont sur la Corne d'Or, après avoir rejeté les dessins de Léonard de Vinci. C'est flatteur mais renforce la pression sur les épaules de Michel-Ange
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants ressemble à un conte tout à la fois sombre et lumineux, empreint de mystère, La lecture de ce court roman est un véritable délice. Les phrases sont brèves, ciselées, simples et poétiques. Ce portrait intime d'un artiste en proie aux doutes, aux pressions politiques et à la tyrannie de l'amour et du désir, est fascinant. de multiples rencontres jalonnent son séjour, fortes, belles et inquiétantes…
Tourner les pages de ce livre, c'est comme sentir un extrait de parfum qui vous embarque dans un voyage étonnant, celui De La Renaissance et de la création d'une oeuvre.
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L'identité d'un écrivain se trouve dans ses allées et venues, sa pensée est une pensée de la traversée.
Mathias Enard aime les traversées !
Celle de l'est et de l'ouest.
Celle de l'islam et de la chrétienté.
Celle de l'artiste et de l'homme.

Il part de la découverte d'un fait méconnu dans la vie de Michelangelo pour construire un récit délicieusement épique où il emmène le sculpteur florentin en Turquie au sein de l'Empire ottoman où de vrais personnages vont se côtoyer.
Dans ce court roman choral a trois voix, ce sont trois parties d'un triangle qui donneront le rythme et les couleurs à la narration : la Turquie, l'Andalousie et l'Italie.

On découvre la personnalité complexe de Michelangelo, dont l'orgueil et la vanité n'avaient d'égal que son talent : démesuré.
A cette période le sculpteur florentin souffre profondément de ne pas être reconnu à sa juste valeur.
Des années de peine, de travail acharné ne lui ont toujours pas apporté la reconnaissance qu'il désire. Humiliations, manigances et intrigues de cour sont monnaie courante dans la vie d'un artiste.

Immensément talentueux, mais obscur à lui-même, son physique ingrat le poussait à chercher dans la beauté la manière d'exprimer ce qui lui faisait péniblement défaut.
La beauté des lignes d'un paysage, les traits d'une femme ou d'un homme, il les reproduisait dans ses dessins et sculptures cet idéal tant recherché.

Son séjour/aventure dans l'Empire ottoman allait marquer et influencer durablement sa peinture.
Les couleurs des étoffes, la moiteur des saisons, l'odeur des épices, l'ivresse de la danse et de la musique, seraient des constantes dans certains détails de ses oeuvres.

On ne quitte qu'à regret ce récit presque trop court, au rythme languide.

Michelangelo est-il vraiment allé en Turquie ?
On n'en saura jamais !
L'important que ce Mathias Enard l'y a amené !


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Et bien.. à vrai dire.. il faut vraiment que je lise ce Mathias Enard dans un autre texte, on m'en a dit grand bien, mais là j'ai trouvé que c'était vraiment .. un peu court?
Je dois reconnaître que cette lecture a sans doute pâti de mes lectures parallèles, mais j'ai eu beaucoup de mal à m'y intéresser..
J'aimais beaucoup le titre. J'ai découvert dans la note de fin qu'il provenait de Kipling, Au hasard de la vie: : "Puisque ce sont des enfants, parle-leur de batailles et de rois, de chevaux, de diables, d'éléphants et d'anges, mais n'omets pas de leur parler d'amour et de choses semblables."
C'est ciselé, travaillé, peut être trop..
Quant au côté métaphorique du pont, je l'ai enjambé sans doute un peu rapidement..
Bref. Michel- Ange m'énervait, j'aimais bien le singe mais il est mort trop vite .
Je suis tout à fait consciente d'avoir fait progresser l'art du commentaire littéraire d'un grand pas, oups, désolée, mais en parcourant toutes ces critiques qui disent grand bien de ce roman,je me dis simplement que j'ai dû complètement passer à côté..
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D'abord il y a ce titre, éminemment poétique et qui convie mythe et réalité à se rencontrer, s'apprivoiser, pour finir par se transcender. C'est un peu ce qui se passe quand les visions de l'artiste rencontre la matière de la création. Quand le burin de Michel-Ange rencontra le marbre de Carrare et en fit le David, ce chef-d'oeuvre de la sculpture.

Alors que l'Europe, à commencer par les états italiens, a depuis quelques décennies entamer la mue qui la fit passer du moyen-âge à la renaissance, Michelangelo di Lodovico Buonarroti Simoni, dit Michel-Ange, est déjà un immense artiste, reconnue pour ses sculptures et ses peintures. Il est l'égale de Léonard de Vinci, de vingt ans son aîné, et le grand rival de Raphaël et de Bramante.

En 1506, alors qu'il travaille à la réalisation du tombeau du pape Jules II, il décide de répondre favorablement à l'invitation de Bayezid II, dit le juste, Grand Turc et sultan de l'empire Ottoman. Méprisé par "le pape guerrier", qui tarde à le payer et ne lui fournit pas l'aide matérielle nécessaire à son travail, Michel-Ange se rend à Constantinople, plus par esprit de vengeance que par intérêt pour la commande qui lui est faite. le Grand Turc souhaite, en effet, que l'artiste dessine les plans d'un pont qui reliera les parties asiatique et européenne de la ville. Quelque année auparavant le grand Léonard s'y était essayé mais le projet n'avait pas été retenu...Trop ambitieux, trop difficile techniquement. Comme le perçoit d'emblée Michel-Ange, de Vinci n'avait pas comprit la nature symbolique, voire politique d'un tel ouvrage.

Bien sur, ce voyage n'est que pure fiction (bien qu'il existe un dessin d'un pont réalisé par Michel-Ange). C'est en effet à Florence que l'artiste se réfugia, après la brouille avec le pape, et non à Constantinople. Pour autant, Mathias Enard se sert de ce prétexte pour nous faire découvrir, sensuellement, presque charnellement, une des plus grande cité de l'époque. Encore fortement imprégnée de culture grecque et latine, refuge des musulmans chassés de la péninsule ibérique, suite à la Reconquista, et, désormais, occupée par les turcs, Constantinople présente un aspect cosmopolite, à cheval entre orient(s) et occident que l'auteur rend à merveille. Une autre réussite est la vision de "son" Michel-Ange, travailleur, disgracieux mais génial, austère et étranger à l'amour. C'est pourtant bien l'amour qu'il va découvrir sur les rives de la Corne d'Or : l'amour d'une ville d'abord, et l'amour charnelle ensuite, dans les bras d'une belle danseuse andalouse.

Bien que l'auteur s'attache à mettre en lumière le caractère tolérant et cultivé de l'Islam, tel qu'il est conçu à l'époque, les tensions restent vives entre musulmans et chrétiens, à tel point que, bien que reconnue, tout le monde ne voit pas d'un bon oeil qu'un "infidèle" soit l'architecte de ce pont. Mais Michel-Ange, enfermé qu'il est dans ses visions et son art, reste aveugle et sourd aux machinations politiques et c'est in extremis qu'il se sortira indemne de ce voyage aux frontières de deux mondes.

Doté d'une écriture fluide et très poétique ce roman, à l'instar d'une douce rêverie, se révèle agréable à lire bien qu'il pêche, par moment, par excès de symbolisme.

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Parle-leur de la splendeur de Rome et des merveilles de Constantinople.
Parle-leur de ces voyages. de ces tissus, de ces parfums et de ces épices.
Parle-leur de Gênes, Florence et Venise. de ces étals, de ces échanges cosmopolites.
Parle-leur de toutes ces villes flamboyantes. de ces beautés de la Renaissance.
Parle-leur de ces marbres blancs, de ces glaises et de ces pigments. de ces offrandes de la Terre.
Parle-leur de ce sultan érudit et visionnaire. de ces trésors du monde ottoman.
Parle-leur de ce Pape guerroyeur et coléreux. de ce tombeau.
Parle-leur de cette beauté andalouse. de cette sensualité assassine.
Parle-leur de l'ivresse des sens. Des sentiments refoulés. de l'Amour de l'Art.
Parle-leur de ce pont qui reliera dans l'éternité les civilisations, les cultures et les hommes.

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants si tu veux…

Mais parle-leur !

Parle-leur de l'artiste de génie, de ses colères légendaires, de ses amours tourmentées, de son don intemporel…

On parle de Michel-Ange ici. Pas de Mickey Mouse ni d'Odette Toulemonde.

Burine-le dans ses ombrages ! Polis-le dans ses lumières ! Fais-nous voyager dans les couleurs de Constantinople et dans l'âme de cet artiste !

Tout cela m'a malheureusement manqué... L'écriture de Mathias Enard est propre mais un peu trop policée à mon goût. L'intrigue est intéressante et repose sur de nombreux faits réels, bien documentés, mais le côté romanesque ne m'a pas suffisamment emporté.

Tout s'y prête pourtant : l'homme, la ville, la période… Pas facile de s'attaquer à un personnage comme Michel-Ange. J'avais déjà été déçu par Léonor de Récondo et son Pietra Viva, qui abordait un autre pan de la vie de l'artiste, précédant celui évoqué par Mathias Enard. Cette période ottomane de Michel-Ange m'aura toutefois davantage plu, par son intrigue et les quelques chapitres où Mathias Enard donne voix à sa belle andalouse, passages magnifiquement écrits mais dont la sensualité des mots ne se prolonge pas suffisamment dans le reste du roman.

Allez, Actes Sud, vous avez en stock d'autres auteurs capables de s'attaquer à ce personnage. Qu'en penseraient Jérôme Ferrari ou Laurent Gaudé ?


(Merci pour m'avoir fait découvrir ce livre, Patricia... Même s'il m'a manqué quelque chose dans cette lecture, j'ai passé un bon moment en compagnie de l'artiste)
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Déjà le titre et la couverture de ce livre sont magnifiques.
le jeudi 13 mai 1506, Michel-Ange débarque à Constantinople invité par Bajazet le sultan.
Michel-Ange a quitté Rome, malgré l'interdiction du pape, fâché que celui-ci ne lui accorde pas l'argent frais promis.
le sultan lui offre une somme faramineuse pour un mois, pour projeter, dessiner et débuter le chantier d'un pont pour traverser la Corne d'Or.

Beau voyage que celui de se retrouver avec Michel-Ange qui doit faire un chef-d'oeuvre mais n'a pas d'idée et découvrir la ville avec son ami poète Mesihi.

Michel-Ange aime les histoires et moi aussi j'ai aimé cette histoire si bien écrite!
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Si je vous dis : littérature française contemporaine. Oh oui, oui, oui, vous l'avez. de petite taille et bien portant, très tôt je me retrouve en proie à une calvitie précoce. du fait de mon physique atypique, on me surnomme dans mon entourage proche le « George R. R. Martin made in France, les lunettes et la casquette en moins ». Vous dites ? Mathias Enard ? Ettttt c'estttttt gaaaaaagné. Cadeaux. Les encyclopédies FrancoMickey vous offrent un petit billet tout en décontraction – et à lire sans modération - sur son roman phare « Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants ».

Vous savez que j'aime le 7e Art, et si vous ne le saviez pas vous n'aviez qu'à lire ma petite description sur mon profil. Non mais oh, faut s'intéresser un peu à ses petits camarades. du coup l'analogie entre les deux univers m'est apparue comme parfaitement adaptée. Lire un Mathias Enard c'est un peu comme regarder un Terrence Malick. Ce n'est pas toujours très nerveux ni passionnant, c'est (très) imprégné de notes philosophiques, parfois à la limite du nébuleux d'ailleurs, et que vous soyez sensible ou non aux thématiques mises en avant, vous ne pouvez pas vous empêcher de trouver le charme opérant sublime. En d'autres termes ? Peu importe la destination, ce qui compte c'est de faire partie du voyage.

La plume de l'auteur n'a nulle part ailleurs sa pareille. A la fois délicate, raffinée et poétique, l'envoûtement est tel que les pages glissent entre nos mains telle l'eau dans son lit. Hop, hop, hop, je vous vois venir avec vos « Azy il se la raconte avec son terme savant ». J'ai juste employé le terme hydrologique précis car vous le savez j'aime la… Eh oh, qui a gueulé « Oh la ferme » ? Un peu de respect voyons. Jaloux va. Je disais donc, la prose de M. Enard est littéralement enchanteresse, quasi hypnotique. Il pourrait vous parler de la reproduction des éléphants au Zimbabwe que vous trouveriez cela subjuguant. Tiens, à ce propos il y a un documentaire sur Netflix… Ok, ok j'ai compris calmons-nous.

Bon, malgré tout, il y a tout de même une petite ombre au tableau. Les moins aguerris ou les moins ouverts d'esprits pourraient rester sur le carreau et, comme on le dit communément dans le langage familier « se faire chier ». Car on le sait tous, la beauté ne fait pas tout, enfin ou presque. Cela étant, à mon humble avis d'expert en hydrogéologie, je recommande cette lecture au plus grand nombre sans distinction, ne serait-ce que par respect pour un si grand talent. Bon allez, j'ai un Batman qui m'attend. Ouais, après un Malick j'ai toujours besoin de me faire un DC ou un Marvel pour refroidir la turbine. Ici, c'est pareil.
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