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EAN : 9782702415979
Le Masque (29/08/1997)
3.25/5   2 notes
Résumé :
Un lion à la proue et chargée de fleurs, la gondole des morts s’avance sur le Grand Canal…
Sinistre présage pour Elvire Printice…

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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
ISBN : 982702415979

Maurice-Bernard Endrèbe est le fondateur du Grand Prix de Littérature Policière français et, pour les initiés, il demeure le rédacteur de nombre de scenarii des "Cinq Dernières Minutes" et a co-dirigé l'inoublié "Mystère-Magazine." Ajoutons à cela qu'il fut aussi le traducteur de grands auteurs policiers anglo-saxons dont John Dickson Carr pour deux de ses chefs-d'oeuvre au moins : "La Chambre Ardente" et "Le Sphinx Endormi." Toute la série "Puzzle" de Patrick Quentin (alias Jonathan Stagge), au point de vue traduction, c'est encore lui.

Evidemment, ce passionné du genre policier ne put s'empêcher de mettre lui-même la main à la pâte avec un personnage aux apparences tout à fait démodées et loufoques, Elvire Prentice, dite "La Vieille Dame Sans Merci", dans une série de romans qui s'étalent de 1944 à 1977. Si le personnage de cette vieille dame détective qui va et vient comme elle veut dans la jet-set étonne au premier abord, si les romans demeurent inégaux (comme pour tout un chacun), il faut avouer que certaines intrigues sont nouées avec une rare habileté. Sincèrement, je n'ai lu d'autre de cet auteur qu'"Elvire à La Tour Monte" mais la fin de celui-ci m'avait soufflée - il faudra que je le relise d'autant que je l'ai tout à côté de moi, tout craquelé, dans l'une de mes cagettes, sous l'antique jaquette "L'Empreinte". Avec "Gondoles pour le Cimetière", qui se déroule, lui, à Venise, pendant la Biennale, j'avoue avoir été également séduite même si jaquette et silhouettes de la jet-set sont ici nettement plus modernes - et c'est bien dommage.

Pour je ne sais trop quelles raisons, Mrs Prentice est venue profiter un peu de la ville des Doges pendant l'agitation de la Biennale. Elle est accompagnée par le critique Patrice Géron et suivie, de loin, par son amie-ennemie, l'inénarrable baronne Davidsen - qu'on ne voit pas assez ici, j'ai trouvé. Enfin bref, à peine Elvire a-t-elle eu le temps d'inaugurer la chambre qu'elle a prise dans un hôtel correct mais qui n'a rien du palace choisi par la baronne Davidsen , qu'elle reçoit un coup de fil du comte Andrea Valeani, la conviant à séjourner dans son palais car, jadis, à Paris, elle a rencontré sa fille, Alba, et s'est montrée très bonne avec elle. de plus, comme chacun sait, l'hospitalité vénitienne veut ... etc ... etc ...

Le palais Valeani est superbe, surtout à l'intérieur, aussi superbe que la famille est désunie. le père est suspendu aux lèvres et à la plastique un peu trop voyante d'une "étudiante en architecture" dénommée Marie-Line Romieu, que lui aurait recommandé un ami français. La mère, fière et encore belle, s'enferme dans un mépris bien compréhensible envers un époux qu'elle aime cependant encore. La fille et unique enfant du couple, Alba, est carrément du côté de sa mère et a bravé l'autorité paternelle en épousant, en lieu et place de l'ami d'enfance titré et fortuné qu'il lui destinait, le prince Fabio Buaro, un Américain un peu sot, un peu bébête, sans grande distinction il faut bien le dire, qu'elle materne plus ou moins en tentant de faire son éducation mondaine.

Coup de théâtre dans la Ville du Carnaval européen : alors que tout le monde se trouve réuni dans l'espace réservé à la Biennale - réuni mais dispersé de-ci, de-là - Marie-Line Romieu tombe de l'abrupt Escalier d'Or du Palais ducal et se rompt proprement le cou. Il faut dire que la malheureuse portait de ces talons qu'on ne risque pas en principe sur d'aussi antiques pavés et avec lesquels on envisage encore moins d'entreprendre pareille ascension. Comble de l'horreur et de la coïncidence - car assurément, c'en est une - le cadavre est venu s'écraser devant le mari d'Alba, Anthony Johnston, qui, on le comprend, sort particulièrement secoué de l'aventure : à quelques centimètres près, il la recevait en plein sur le crâne ...

Au début, tout un chacun, la police la première, songe à un accident après tout vraisemblable. Mais, peu à peu, le vent tourne et le mot "meurtre" est prononcé. Dès le début d'ailleurs, Mrs Prentice a flairé le coup fourré. En outre, elle détient la preuve que Marie-Line était la maîtresse non seulement du comte Valeani mais aussi ... de ce gendre yankee qu'il déteste tant. Mais cette preuve ne permet en rien de désigner sans se tromper l'assassin, d'autant que, ce jour-là, sur et autour du Palais ducal, il y avait vraiment foule ...

Endrèbe avait l'habitude de faire alterner un chapitre à la troisième personne avec un autre qui, à la première, nous révélait les pensées et déductions de Mrs Prentice. C'est assez savoureux et cela joue en apparence en faveur du lecteur qui pense ainsi avoir une longueur d'avance. Mais le lecteur oublie une chose : pour conserver son avance, il ne faut pas qu'Elvire capote dans ses raisonnements, sinon, le revoilà dans les choux. Or, Mrs Prentice, en dépit de sa finesse, qui est grande et probablement en raison de son romantisme inné, qui l'est tout autant, se trompe assez souvent. L'habitué le sait et s'en délecte tout en la suivant joyeusement dans ses pérégrinations. de toutes façons, elle finira par comprendre - parfois trop tard mais qu'importe ?

"Gondoles pour le cimetière" ne fait pas exception à la règle. Ecrit de façon agréable, un peu précieusement même à certains passages, mené tambour battant, avec quelques piques ici et là pour les mondains que, cependant, l'auteur donne toujours l'air d'admirer (ce qui est parfois agaçant et un peu trop "parisien"), avec les descriptions, à la fois somptueuses et glauques, de la Cité des Doges, ce n'est certes pas un chef-d'oeuvre. Mais il vous délasse et vous intrigue tout en prenant grand soin de vous égarer un maximum autant de fois que l'occasion lui en est donnée.

Lisez-le et vous verrez bien. Il a été réédité au Livre de Poche sous une jaquette infiniment moins plaisante que l'originale. Tant pis : l'essentiel, pour nous, lecteurs, n'est-il pas de passer un moment plaisant et non dépourvu d'angoisses et d'humour ? :o)
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Passionnant de la première à la dernière ligne. On n'abandonne ce polar que l'énigme résolue.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[...] ... Il se retourna vers moi en s'efforçant de dissimuler son embarras derrière l'habituel sourire :

- "C'est un peu difficile à dire ... surtout à une dame. Enfin, à votre âge, vous connaissez la vie et vous devez comprendre que, certains jours, une fille comme Marie-Line fait mieux l'affaire qu'une femme comme Alba.

- Oui, je le comprends," assurai-je. "Ce sont des choses qu'une femme comprend très facilement quand l'homme en question n'est pas son mari. Alors ? ...

- Alors, il y avait des moments ou Marie-Line me manquait. Et comme je lui versais une mensualité, je me suis dit que ça pouvait servir à quelque chose, quoi ! Je lui ai donc écrit de venir passer quelque temps à Venise. Ca lui a fait plaisir, bien entendu, et pendant quelques jours, j'ai été enchanté car c'était beaucoup plus commode pour moi que de courir les filles d'ici. Marie-Line avait un genre très ... un genre assez ... enfin, vous l'avez vue. Bien sûr, c'était justement ça qui me ... qui me plaisait, mais tout le mal est venu de ce qu'elle s'imaginait faire comme il faut.

"Marie-Line était curieuse de la vie que je menais et elle me répétait toujours que ce devait être merveilleux d'habiter dans un palais. Moi, je ne trouve pas. Je préfère le confort qu'on a dans les States. Enfin bref, elle s'était mis dans la tête que je pourrais la présenter comme une amie de passage à Venise, ce qui lui permettrait de venir au palazzo. Avec son allure, vous imaginez l'effet que ça aurait fait ! Je ne pouvais pas le lui dire, bien sûr mais je lui ai raconté que ma femme était très jalouse et que, en me voyant lui présenter une aussi jolie fille comme étant mon amie, elle se douterait sûrement de quelque chose."

Il eut un haussement d'épaules :

- "Je pensais que ça réglait la question. Il n'en a rien été, malheureusement, et je peux dire que c'est de ma faute. Vous comprenez, j'aimais parler à Marie-Line. Avec Alba et mes beaux-parents, je préfère le plus souvent me taire car ils réussissent toujours à me donner l'impression d'être un gosse ou un imbécile. D'ailleurs, ils discutent rarement de choses qui m'intéressent. Par exemple, pour eux, le sport, ça se limite aux régates et au tennis : le rugby, pas question. (...) Avec Marie-Line, je pouvais me rattraper. Tout ce que je lui racontais l'intéressait, alors je lui racontais tout et elle n'était pas sans cesse à me reprendre, comme les autres. Seulement, elle avait bonne mémoire et les détails qu'elle apprenait ainsi ont fini par lui donner une sale idée.

- Nous y voilà !" pensai-je.

- "Un jour, elle s'est arrangée pour aborder mon beau-père, en lui disant qu'elle était une amie de M. Vièleville, venue étudier l'architecture des palais vénitiens. Comme elle était absolument inconsciente de son allure, Marie-Line n'avait pas douté un instant qu'il la croirait, et elle avait calculé que cela inciterait mon beau-père à l'emmener chez lui. Dans son esprit, c'était une combinaison épatante pour satisfaire l'envie qu'elle avait de connaître le cadre où je vivais, sans risques d'éveiller les soupçons de ma femme. Bien entendu, le père d'Alba n'a pas dû croire un seul instant à son histoire. Mais il a pensé qu'elle était la maîtresse de Vièleville et, ayant sans doute les mêmes goûts que moi, il l'a trouvée très émoustillante. (...)" ... [...]
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[...] ... - "Vous avez été si gentille avec moi, Alba, que je serais ravie si je puis vous obliger à mon tour."

Elle me regarda gravement et son visage, au modelé fin mais énergique, me parut plus minervien que jamais.

- "L'ambiance très particulière de la soirée d'hier ne vous a certainement pas échappé ?

- C'eût été difficile," dis-je sans autre commentaire.

- Jamais mon père ne s'est conduit ainsi et cela dépasse les bornes. Une seule fois ma mère est sortie de son apathie et ç'a été pour appuyer mon mariage auquel papa était opposé. C'est probablement d'ailleurs ce qui nous a amenés au point où nous en sommes. Aussi, n'ayant pas le caractère de maman, je veux tenter de mettre un terme à une situation qui, si nous n'étions pas en pleine Biennale et à une saison où les Vénitiens ont d'autres distractions que les commérages, ferait parler de nous dans tous les salons !"

L'indignation lui avait fait élever légèrement la voix, mais elle la baissa de nouveau et continua :

- "Papa nous a pratiquement fermé la bouche en prétendant que Melle Romieu lui était recommandé par son correspondant parisien, M. Vièleville.

- Oui, c'est ce qu'il m'a dit hier soir. Mais ce monsieur est son correspondant pour quoi ? La collection des timbres-postes ?

- Non, pour la Valeana, la compagnie d'export-import dont mon père est le président et qui a ses bureaux à Marghera.

- Dans quelle province est Marghera ?" demandai-je.

- "Marghera ? Mais c'est le port industriel de Venise, voyons !

- J'ignorais qu'il y eût la moindre industrie à Venise," dis-je en laissant paraître mon étonnement.

- "Vraiment ? Eh bien, détrompez-vous. A Marghera, des bateaux apportent de la matière brute et d'autres en remportent mille choses made in Italia qui sont vendues dans toute l'Europe.

- Moi qui imaginais Venise vivant uniquement de sa beauté !

- N'est-ce point une expression française que "La beauté ne se mange pas en salade ?" (...) [...]
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