AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,3

sur 359 notes
Chronique de la mort annoncée d'un couple ou la "guerre des Rose" dans une version beaucoup moins comique que celle laissée par Michael Douglas et la savoureuse Kathleen Turner.
Le jeu des ombres est un roman glaçant et palpitant à la fois mettant en ombres chinoises toute la noirceur de l'âme humaine tel un drap blanc inondé d'une lumière froide et paralysante.
Irène et Gil, Indiens métis d'Amérique du Nord ont ce statut un peu bancal de n'appartenir véritablement à aucune des deux communautés. le roman met bien en valeur cette dualité.
De leur amour sont nés trois enfants qui seront les témoins de leur déchirement.
Peut-on encore appeler amour une relation où l'autre est nié?
Irène, muse et modèle de son peintre de mari ne se sent plus qu'un objet dans le couple. le seul lien qui la lie désormais à son époux est l'alcool sur fond de violence.
Quand un jour, elle s'aperçoit que Gil lit son journal intime, Irène le subtilise pour en écrire un autre, perlé de mensonges dans le but de manipuler son mari et de hâter la rupture.
Mais dans le jeu pervers qui s'instaure aucun des deux protagonistes n'est blanc comme neige...
Par moments, il m'a fallu poser le livre pour reprendre haleine!
Le jeu des ombres: un jeu auquel on peut se brûler les ailes et le coeur ...
Commenter  J’apprécie          650
Une couverture intrigante, un résumé aguicheur, la promesse était belle juste avant de se muer très rapidement en désir d'en finir au plus vite.
La Chorale des maîtres bouchers était vraiment saignant, le Jeu des Ombres me laissera juste un souvenir fugace.

Irene et Gil. Mariés, trois enfants.
Elle s'épanouit dans l'écriture, lui dans la peinture en s'inspirant à l'envi de sa femme, sa muse.
Mais les apparences sont trompeuses et les artistes fusionnels d'hier ne sont plus.
Irene s'épanche journalièrement dans son petit agenda rouge fortuitement découvert par son mari. Qu'à cela ne tienne, possédant plus d'un tour dans son sac la bougresse, un second, de couleur bleu lui, continuera de retranscrire ses sentiments qui se délitent pendant que le premier manipulera honteusement sa chère moitié . La curiosité est un vilain défaut...

Sur le papier, ça a de la gueule.
Puis presque immédiatement, c'est moi qui l'ai faite.
Un thriller psychologique qui aurait pu atteindre des sommets. Et c'est celui de l'ennui qui s'est très vite détaché .
Jeu du chat et de la souris malsain, certes, mais manquant cruellement de coups de griffes.
Un tempo anémique, une narration saccadée retraçant alternativement l'historique du couple et son actuel jeu de dupes.
Erdrich brode sans jamais intriguer.
A la lecture d'un tel plaidoyer pro divorce, je m'attendais à un final susceptible de sauver ce qui pouvait encore l'être. J'en ris encore, arf, arf, arf, mais jaune histoire d'être bien raccord avec l'ensemble du récit. En totale contradiction avec le propos, cet épilogue ridicule m'achève tout comme monsieur Seguin qui se le fit prêter par son dadet d'Alphonse.
Empathie proche des prévisions de croissance de l'hexagone, rythme de croisière qui s'amuse plus du tout pour le coup, Erdrich, à la plume paradoxalement délectable, ne m'aura pas fait rêver ce coup-ci, ce sera pour une autre fois.

Bref, ce jeu des ombres ne m'aura pas amusé plus que ça....
Commenter  J’apprécie          528
Un roman riche en analyses entre l'art de peindre, la création...et la vie amoureuse, de couple , le mari, artiste-peintre et son épouse, son modèle, sa "Muse" et" Objet" de son inspiration...

"On lui avait déconseillé de peindre sa femme. ce serait dur pour leur mariage. Mais il avait commencé avant qu'ils ne soient mariés. (...) Et puis, même lorsqu'ils se disputaient, il était en paix quand il peignait Irène. Elle était là devant lui et il n'avait pas à se demander ce qu'elle en train de faire.D'ailleurs Hopper avait peint Jo, Rembrandt avait peint Saskia, puis Hendrickje. Wyeth avait peint Betsy et bien sûr Helga; Bonnard avait peint Marthe; il y avait l'immense et dévorant Picasso; de Kooning, Kitaj et Hohn Curtin avaient peint leurs femmes. C'était une façon d'atteindre l'autre essentiel, l'essence inconnue, et peindre était aussi un acte d'amour ébloui. "(p.41)


Arriverais-je un jour à lire Louise Erdrich... ? vous pouvez avoir une vraie curiosité pour un écrivain et que rien ne se passe comme vous le souhaitez, jamais...que les circonstances , vos propres réticences bloquent de façon continue...Que cela bloque toujours quelque part... Alors j'essaye de me dire, pour me consoler, qu'il fallait que le bon moment arrive !!...
J'ai commencé ce livre en 2012, l'ai pris et repris, en 2015... et je le
reprends en ce mois de juin 2019... en souhaitant l'achever cette fois...

Roman de qualité... nul doute là-dessus, mais pour la einième fois, j'abandonne... du mal à m'expliquer ces résistances... car tous les thèmes sont proches de mes curiosités... ??

Le style est plaisant, tonique, dense; les sujets tout à fait attractifs : Les Arts, les techniques picturales, les sources d'inspiration, l'ambiguïté et la complexité des rapports de couple, surtout lorsque l'un est peintre, et l'autre écrivain...la dangereuse tentation vis-à-vis de "l'épouse-modèle" considérée comme un objet d'étude, la possessivité du mari-artiste, son contrôle constant... qui semble avoir outrepassé, envahi le territoire intime de son "épouse-modèle."....

"Mais voici le plus révélateur: tu voudrais me posséder. Et mon erreur : je t'aimais et t'ai laissé croire que c'était possible." (p.24)

"Gil songea qu'Irène tentait peut-être de lui adresser un message en relatant et en dénaturant cette histoire. Lui volait-il quelque chose en la peignant ? Fabriquait-il une sorte de copie d'elle habitant une autre dimension que celle des tableaux ?
Avait-il mis tant de son être dans une image d'elle qu'il avait créée, qu'il
affaiblissait ou diminuait la "vraie Irène" ?" (p. 51)

Alors, pourquoi, cela ne fonctionne pas, pourquoi je ne parviens pas vraiment à m'immerger dans l'univers de Louise Erdrich ?.... Mystère ....
Sans doute, trop de digressions qui interrompent chaque fois
l'intrigue centrale; comme si j'étais "coupée dans mon élan "?

Surtout ne pas tenir compte de cette chronique inachevée... Je souhaite vivement que la prochaîne tentative soit la bonne, enfin, car je me sens fautive... sans pouvoir vraiment cerner la cause de mes "décrochages"!!!... le déclic finira bien par survenir, avec un autre état
d'esprit, un "lâcher-prise", je ne sais ?!!!


**** Une petite sollicitation envers les camarades "babéliotes", "Fans" de
Louise Erdrich... Quel serait le texte le plus significatif pour aborder
et se familiariser avec son univers ??!!

****Relecture partielle 15 juin 2019- abandonné le 10 juillet 2019
Commenter  J’apprécie          494
Ce n'est certainement pas le premier livre de Louise Erdrich qu'il faut lire si l'on souhaite découvrir cette auteure.
Irène est mariée à Gil, un artiste peintre de renom. Elle lui a servi de modèle depuis ses débuts. Ils ont trois enfants, Florian, Riel et Stoney. Elle tient un journal dans un carnet rouge que lui a offert Gil. Lorsqu'elle s'aperçoit qu'il le lit en cachette, elle décide de commencer un autre journal, celui-là dans un carnet bleu qu'elle range dans un coffre à la banque et de se servir du premier pour le manipuler, notamment en y consignant des aventures amoureuses imaginaires…
Si le prétexte à cette histoire avait pu susciter un quelconque intérêt, le tournant que lui donne Louise Erdrich le fait vite s'égarer et nous perdre dans des anecdotes ennuyeuses.
Il y a dans ce récit de nombreux points communs avec la biographie de l'auteure. Ainsi les trois enfants du roman, Louise Erdrich en a eu trois avec son mari Michael Dorris, l'instabilité psychologique de Gil et son suicide, il en a été de même avec Michael qui s'est asphyxié avec un mélange de drogues et d'alcool et bien d'autres similitudes.
« le jeu des ombres » est un peu comme une auto psychanalyse de l'auteur, une façon d'exorciser les faits marquants de sa vie. C'est plus un livre qu'elle a écrit pour elle-même que pour ses inconditionnels lecteurs et lectrices.
Je n'ai pas trouvé la « prodigieuse maîtrise narrative » de Louise Erdrich à travers cet ouvrage, dont la maison d'édition s'enorgueillit en quatrième de couverture…
Traduction d'Isabelle Reinharez.
Editions Albin Michel, Terres d'Amérique, 253 pages.
Commenter  J’apprécie          480
'Le jeu des ombres"est l'histoire intense, la montée en puissance glaçante, d'un drame familial et le naufrage d'un amour ;
Le roman s'ouvre sur une découverte :la narratrice se rend compte que son mari lit secrètement son journal de"couleur rouge".Elle décide de se venger et d'utiliser ce carnet profané comme une arme à seule fin de manipuler son mari tandis qu'elle écrit dans un"nouveau carnet bleu", son véritable journal intime.
Une troisième voix s'insère au sein de la double narration pour décrire avec acuité , finesse et maîtrise absolue les évènements qui jalonnent puis précipitent la rupture du couple.
Gil est un peintre célèbre grâce aux portraits qu'il réalisa d'Irène dans toutes les positions et à toutes les étapes de leur vie ;tandis que sa femme qui a arrêté sa carrière pour permettre à son mari de s'épanouir dans son art, n'en finit pas d'écrire une thèse sur "George Catlin, "peintre des Indiens d'Amérique" Ils ont trois enfants.
Gil, taciturne, exalté, charmant parfois, colérique et jaloux se persuade que sa femme le trompe.
Il y a de la manipulation dans ce double jeu mortifère,une vengeance qui couve entre ces deux êtres qui s'aimérent intensément.
Irène, perverse, haineuse, dissimulatrice, insaisissable, animée d'une rage maussade s'éloigne de plus en plus.
Leur union est fracturée, douloureuse, malsaine.
Ni les enfants, ni les souvenirs, absolument plus rien ne parvient à re-cimenter ce couple en état de guerre larvée, ces êtres brisés .
Cette narration à trois voix souligne l'ambivalence des sentiments qui mène au mensonge, à la violence, à l'indifférence glacée......
Ce naufrage familial est raconté avec une puissance et une virtuosité impressionnante .
Cette passion destructrice est décortiquée à l'aide d'une écriture nerveuse et efficace.
Le passage sur la rencontre avec la psy est jubilatoire.
La haine, la lassitude et la violence remplacent l'amour fusionnel.
Le dénouement est surprenant.Louise Erdrich avec "le jeu des ombres" joue au chat et à la souris avec le lecteur , détecte les fissures béantes d'un couple, traque la déliquescence des sentiments......
J'avais adoré "La chorale des maîtres bouchers".
Ce roman dérangeant, noir, à l'atmosphère pesante , lu d'une traite , me laisse un peu perplexe.

Commenter  J’apprécie          405

Ce roman est est l'histoire d'un couple : lui est peintre, elle est sa muse et son modèle.
Mais elle veut le quitter , malgré lui .
Nous sommes témoins de ce huis clos familial, petite tribu, où la destruction est machiavéliquement mise en place et orchestrée par elle.
Elle laisse trainer un faux journal intime, véritable arme de destruction psychologique, qu'elle rédige consciencieusement et dans lequel elle invente et dévoile tout ce qui peut rendre fou son mari.
Une belle découverte que cette écrivaine américaine.
Issue d'une famille " de sang mêlé" avec une mère Ojibwa, un grand père chef de la tribu Chippewa de Turtle Mountain, élevée dans une réserve du Dakota du Nord, ce qui explique ces passages extrêmement intéressants sur la culture amérindienne.
On apprends à mieux connaitre Georges Catlin, peintre du 19eme siècle spécialisé dans la représentation des indiens d'Amérique et dont beaucoup de tableaux sont à la National Galerie de Washington et qui m'avaient subjuguée, lors d'un voyage.

L'écriture est très belle, très douce tout en réserve et en nuance , à l'image du titre, le jeu des ombres, auquel enfant, nous avons tous un peu joué...
Un beau livre que je recommande.
Commenter  J’apprécie          324
Un couple en tiraillements, l'implacable jeu des masques et des luttes pouvoir.

Elle soupçonne que son mari contrôlant lit son journal intime. Elle décide donc d'écrire un journal spécialement pour lui, où elle raconte des aventures sexuelles fictives. Elle tient aussi son vrai journal, mais s'assure qu'il ne sera pas lu par son époux.

Il est peintre et a rencontré sa femme doctorante en histoire de l'art. Elle est devenue sa muse, le modèle pour ses toiles qui la présentent dans des oeuvres parfois érotiques. C'est un homme possessif, il aime ses enfants, mais il est aussi jaloux d'eux, de ne plus avoir toute l'attention de sa femme.

Aux histoires d'amour/haine d'un couple, s'ajoutent les réflexions sur l'art ainsi que sur l'identité et la propriété de l'image de soi lorsqu'une personne devient un tableau. de plus, l'origine de la femme amène l'exploration de l'« indianité » dans la société américaine.

Une analyse psychologique fine, un bon roman, mais plus noir que rose, pas vraiment une lecture pour la Saint-Valentin.
Commenter  J’apprécie          281
« Si Gil ne savait pas qu'elle savait qu'il lisait son journal, elle pouvait y écrire des choses visant à le manipuler. Et même à lui faire du mal. Elle se dit qu'elle commencerait par un simple essai, un hameçon irrésistible. »


Irrésistible, en effet, et Gil comme le lecteur n'hésiteront pas à s'accrocher à cet hameçon dont l'efficacité ne tient qu'à la curiosité de la victime. Alors que le poisson croit avoir tiré le gros lot, il ne se doute pas qu'en réalité il est lui-même l'objet d'une belle pêche qu'il précipite d'autant plus qu'il se pense seul maître à bord.


Irene vit en couple avec Gil depuis de nombreuses années. Leur relation se noue autour d'un lien de subordination : d'abord modèle pour le peintre que sera son futur mari, Irene a peut-être cru un instant que le don de son image ferait d'elle une personne à part entière, reconnue pour ses qualités propres. Il n'en est rien et alors que Gil peint son amérindienne d'épouse par amour-propre et pour la gloire, celle-ci se réifie peu à peu en devenant la chose du peintre. Ses origines amérindiennes deviennent objet de consommation artistique tandis que son identité se subordonne à celle de Gil : au cours des vernissages, et même auprès de son mari, il est préférable qu'elle continue à porter cette image de « panthère» qui lui sied si bien.


« Elle était élancée, grande, brune de peau, et ne savait pas s'exprimer. Un marchand d'art l'avait comparée à une panthère, ce que Gil avait répété des semaines durant, mais Irene avait aimé se croire séduisante, enfermée dans son silence, plutôt que muette et empruntée. »


L'ultime affront est reçu lorsqu'Irene s'aperçoit que Gil lit son « agenda rouge » au sein duquel elle note toutes ses pensées et réflexions. Pour s'amuser un peu, mais aussi pour catalyser une rupture qui devient chaque jour plus nécessaire pour Irene, celle-ci commence l'écriture d'un « agenda bleu », véritable journal intime dont Gil ne soupçonne pas l'existence, tout en continuant à rédiger les pages de son « agenda rouge », simulant l'ignorance qu'elle a des intrusions de son mari et ajoutant sciemment des paragraphes qui devront susciter le malaise et le doute chez son lecteur.


Bâtissant son roman autour de ce jeu de manipulation, Louise Erdrich met en place une ambiance malsaine, digne d'un polar dans lequel les coups de poignard se portent dans le dos. Derrière l'image publique d'un couple d'artistes fusionnel se cache l'image familiale –dont sont surtout témoins les trois enfants- de parents qui transforment la froideur de leurs sentiments mutuels derrière un simulacre de respect, pour ne rien dire de cette image intime du couple qui virevolte de l'amour à la haine sans jamais trouver le juste milieu. L'hypocrisie déborde de toutes parts : c'est celle de Gil qui étouffe sa famille de cadeaux pour se permettre de porter la main sur chacun de ses membres lorsque la frustration l'étouffe ; c'est celle d'Irene qui n'arrive pas à exprimer sa volonté de rupture autrement qu'en ayant recours à un jeu puéril ; c'est celle du monde artistique qui ne veut pas ouvrir les yeux sur l'exploitation de l'image d'une civilisation subordonnée aux impératifs commerciaux. Innocents parmi tous, les enfants essaient de démêler le vrai du faux parmi cette cacophonie de discours discordants. Si la manipulation et les non-dits semblent ne susciter que la haine et le dégoût chez Gil et Irene, elle devient terreur pour ces enfants perdus entre le vrai et le faux. Louise Erdrich ne les oublie pas et nous montre l'arsenal défensif déployé par chacun d'entre eux pour se blinder contre la violence du silence qui ne demande qu'à éclater.


C'est dans cette tension toujours soutenue que Louise Erdrich nous fait parcourir le Jeu des ombres sans que nous sachions jusqu'où les manigances d'Irene nous conduiront. Si les incursions dans les pages de ses agendas sont finalement peu nombreuses –elles constituent à peine un dixième du roman-, la narration à la troisième personne permet de balayer les psychologies de chaque personnage de cette famille silencieuse et de nous livrer des informations pertinentes sur la culture amérindienne, afin que nous puissions mieux comprendre le sentiment de dépossession d'Irene.


Même si l'on peut être déçu de voir que le jeu des agendas, mentionné comme élément moteur de cette histoire, n'occupe finalement qu'une place dérisoire dans le Jeu des ombres, l'aspect ludique du roman ne faiblit jamais un instant. On croit connaître la supercherie, on se prend d'amitié pour cette pauvre Irene, on commence à mépriser Gil… pour finir par se rendre compte que, pas mieux que lui, on s'est laissé prendre à notre tour au jeu de Louise Erdrich. le dénouement est surprenant –mais décevant- et se conclut dans une pirouette qui n'apporte rien à toute l'histoire dont on vient de s'imprégner. Pire, cette conclusion donne l'impression de réduire à néant les interventions d'Irene. Consolons-nous du mieux que possible : peut-être Louise Erdrich s'est-elle également fait piéger par ses personnages et se sera-t-elle laissée conduire par eux plus loin que prévu ? On imagine alors que sa conclusion bancale n'aura été qu'un moyen de se rendre à nouveau maîtresse de l'écriture de son roman, au prix d'une perte de fantaisie certaine.
Lien : http://colimasson.over-blog...
Commenter  J’apprécie          200
Elle c'est Irene, lui c'est Gil.
Lui peint, elle pose. Pour lui, exclusivement.
Elle l'obsède, il l'étouffe : entre eux deux l'issue semble inéluctable...

Pourtant jadis ils se sont aimés, longtemps la muse a transcendé l'artiste, mais qu'en est-il aujourd'hui ?
À l'heure où Louise Erdrich s'immisce dans l'intimité de ce couple à la dérive, que reste-il de cette passion ancienne ?
Quand, comment et pourquoi le chaos adviendra-t-il ?
À quel jeu (d'ombre) Irene joue-t-elle en tenant simultanément deux journaux intimes, dont elle sait que l'un est lu en cachette par Gil (le carnet rouge, celui qu'elle falsifie pour attiser la jalousie de son époux) ?

Autant de questions qui m'ont d'abord laissé envisager un drame tendu et addictif, mais qui hélas n'ont pas complètement produit l'effet attendu.
En lieu et place des deux personnages que j'espérais complexes mais dont je comptais bien réussir à décrypter les turpitudes, les rancoeurs et les ressentiments, l'auteur m'a plutôt proposé deux portraits relativement brouillons, deux êtres aux personnalités confuses mais pareillement détestables, qui tout au long du roman se sont livrés à un jeu malsain de manipulations, de vengeances et de coups bas, de vrais conflits et de fausses réconciliations sans qu'il me soit jamais permis, sinon de prendre parti pour l'un d'eux, au moins de pouvoir les comprendre, de saisir la nature exacte de leur relation...

Heureusement le style de Louise Erdrich, dont on m'avait plusieurs fois vanté les mérites, est à la hauteur de sa réputation.
La construction du récit, un brin déstructurée, mélange allègrement des fragments des fameux carnets rouge et bleu, des scènes de disputes entre Irene et Gil, des épisodes lointains de leur vie de couple ou encore des réflexions sur l'hérédité, l'ascendance amérindienne de la famille (thématique si chère à l'auteur !).
On y trouve enfin de jolis passages sur la peinture, et plus généralement sur le processus de création artistique, devenu peu à peu la source principale de l'affrontement permanent que se livrent les deux protagonistes ("Peu importait qu'Irene soit en colère. En fait, c'était mieux. Quand ils étaient heureux, quand Gil pouvait compter sur son adoration quotidienne, les tableaux semblaient virer à l'insipide. Il devait combattre le sentiment de satisfaction. Au fur et à mesure qu'elle s'éloignait de lui, les tableaux devenaient plus forts. le violent désir qu'il avait d'elle leur donnait vie. Dans ses tableaux, il mettait son chagrin, la nature insaisissable d'Irene, l'avidité de son étreinte, le rejet d'Irene, l'amertume de son espoir, la rage maussade d'Irene. Il avait pris conscience que plus leurs rapports étaient tendus, plus son travail en bénéficiait.")

Voilà dans les grandes lignes la teneur de ce roman pesant, qui offre une vision glaçante du couple, de l'incommunicabilité entre les êtres, des secrets que chacun dissimule et des soupçons mortifères qu'ils engendrent.
L'histoire cruelle d'un glissement de l'amour à la haine, une longue errance dans un no man's land d'indifférence entre deux blocs d'aigreur ("Gil avait un mur. Irene avait un mur. Entre les deux murs existait une zone neutre, intacte, une étendue sauvage où se trouvait tout ce qu'ils ne savaient pas et ne pouvaient imaginer sur l'autre [...] un espace semblable à la zone démilitarisée entre les deux Corées.")

Personne n'a tort, personne n'a raison, aucun des deux belligérants n'aura su me rallier à sa cause.
Malgré la plume efficace de Louise Erdrich, figure emblématique de la littérature américaine, j'ai fini par me désintéresser du conflit larvé entre Irene et Gil.
Un partout balle au centre, et en qui me concerne, fin de partie et retour aux vestiaires.
Commenter  J’apprécie          193
Un roman totalement déroutant qui prend comme point de départ le journal intime d'Irene, ou plutôt LES journaux intimes d'Irene, l'un dont elle sait qu'il est lu en cachette par son mari, l'autre qu'elle enferme dans un coffre à la banque, et où elle raconte la "vérité". Manipulations, quotidien frisant la folie (le mari, Gil, est un peintre violent, Irene picole, le tout avec des racines amérindiennes mal digérées), envies de divorce, portrait des enfants, voilà ce roman. Au final, le filon du journal intime est relativement peu exploité, c'est dommage. le rythme est lent et haché à le fois, assez déstabilisant.
Je ne saurais dire si ce roman m'a plu ou non, loin de m'ennuyer il m'a tout de même laissé une sensation de gêne, c'est assez violent psychologiquement je trouve. Mais très bien vu, très bien écrit, acéré à souhait !
Commenter  J’apprécie          190




Lecteurs (658) Voir plus




{* *}