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EAN : 9782070784820
224 pages
Gallimard (16/05/2007)
4.5/5   7 notes
Résumé :
On peut considérer ce livre comme le poème-testament, ou le testament poétique, de Claude Esteban. C’est un poème terrible et magnifique, écrit avant, pendant et après son hospitalisation - juste avant sa mort. L’important n’est pas ici sa construction parfaite en cinq parties, faisant alterner des récits en vers minimalistes avec des poèmes courts ou des proses poétiques, ni sa langue épurée et musicale ; c’est l’extrême lucidité de l’auteur devant la mort qui vien... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
La mort à distance est le dernier recueil, du poète Claude Esteban.
Je l'ai lu avec l'attention de qui se pencherait au chevet de son père et saurait entendre ses derniers mots. Les poètes forment une grande famille. La mort de l'un d'eux met l'humanité en deuil pour longtemps.
Il y a cette peur de la mort : "Comme on écoute aux portes, le coeur battant, et qu'on veut savoir si l'on peut s'endormir sans qu'elle revienne, l'affreuse femme aux yeux peints, l'insinuante, celle qui prend tout".
Mais aussi et surtout une conscience acérée de la vie : "Et c'est la plénitude de l'air qui frappe, ce matin, contre ma peau".
L'acceptation enfin, de l'inéluctable :
"On trouvera peut-être le mot
soleil
écrit sur une page.

Je serai déjà
loin."

Un livre de sagesse, qu'on ouvrira encore, pour apprendre, à son tour...
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La transparence de l'eau
n'est visible qu'aux âmes neuves

Elle devient pour les autres
un défi.
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« Tout avait commencé

par un balbutiement de syllabes

puis

le mot tout entier, la phrase

comme un cantique

je me souviens »P 41
Lien : https://lecturesindelebiles...
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
C'était un homme qui ne souffrait pas, ou plutôt que la souffrance avait déserté. Il allait comme un fou, il ne pensait qu'à se briser la tête contre un mur, puis une étrange torpeur s'était emparée de lui, paralysant tous les ressorts de son être. Une distance, une espèce de pellicule impalpable s'interposait maintenant entre cet habitacle de chair et ce qui pouvait l'atteindre. Il s'étonnait lui-même, il palpait son corps, il cherchait à se souvenir de chacune de ses blessures, mais très vite il perdait le fil de cette histoire lamentable qui ne le concernait presque plus. Qu'avait-il donc à faire d'autre que d'attendre, immobile, sans plus intervenir? Non, il ne souffrait pas, mais une telle constatation ne parvenait nullement à le satisfaire, il aurait voulu que l'avenir l'arrache à son incertitude, à cette irrésolution de tous les instants. Il restait là, à l'écoute des battements de son coeur, comme s'il redoutait que son coeur s'annule. Le monde, maintenant, passait trop loin pour qu'il prétende s'en approcher, participer de son ardeur par un désir, une soif, un geste. Et comme d'autres, plus exigeants que lui, mouraient de ne pas mourir, il comprenait peu à peu que la plus grande souffrance d'un homme était de n'en éprouver aucune et d'accueillir en soi, par mille démissions infimes, le triomphe du néant.
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Je m'approche de la fenêtre, je regarde la pluie qui tombe, une pluie monotone, une pluie d'hiver. Je pourrais, il faudrait sans doute, ne rien dire sinon qu'elle est toujours la même, qu'il ne me reste qu'à l'oublier. Mais cette pluie, je ne sais pourquoi, refuse mon impatience. Elle est là qui persiste, qui balafre les carreaux, qui me provoque. Elle n'a pour elle que cette manière d'obstination sans but, sans histoire. Que je l'accepte seulement, que je m'accorde à sa lenteur, elle devient comme une substance bénéfique, un fluide qui me pénètre, et dans chacune de mes fibres, je sens une plénitude et un repos, oserai-je l'écrire, une bienveillance à mon égard, une salutation silencieuse de l'eau. Chaque minute est là, suspendue pour toujours. La mort s'éloigne.

p.105
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Quelque part, on frappe à une porte
et l'on sait déjà

qu'elle ne s'ouvrira
jamais plus, quelque part

un homme se réveille et découvre
que par delà ses rêves

il ne reste rien, puis
se rendort, quelque part une fleur

monte vers le soleil
mais elle est si petite qu'un insecte

s'en empare et qu'il piétine
sa couleur

quelque part, c'est un autre
qui cherche des mots pour le dire

qui sait déjà que tout
est écrit.
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Ne garderai-je du jour que cette longue lassitude et la poussière des chemins au fond des yeux ? Je m’assiérai n’importe où, je tenterai seulement de reprendre souffle, sans hâte et comme pour mieux me souvenir. L’espoir, quand on s’arrête de marcher, devient inutile, mais le vieux désir d’être encore ne disparaît pas avec lui. Et je suis là, comme quelqu’un qui s’étonne que son corps le soutienne et le défende, ce corps meurtri, ce corps appesanti, le mien pourtant, et que je méprisais. Les grandes lois du soleil et de l’ombre nous échappent, nous mesurons l’espace aux battements d’un cœur quand il est neuf, mais que la machine au-dedans hésite ou s’emballe, les repères se dissipent et chaque pas devient une épine dans la chair. N’importe, je suis là, je regarde mes mains, je n’oublie pas qu’elles ont touché la splendeur intacte du monde et qu’il y eut des moments d’allégresse à sentir la sève trembler sous les doigts. Non, la mémoire ne se résume nullement à la somme des choses mortes entassées dans la tête. Elle est tapie au creux d’une odeur, d’une feuille froissée par la pluie, d’un murmure. Et que l’on fasse taire en soi le bruissement de la pensée, qu’on s’arrache à ce théâtre de mauvais rêves, le paysage se recompose, les formes s’animent, les couleurs recommencent à vibrer. Rien ne bouge pour celui qui se détourne, tout s’éveille au-devant de celui qui reste à l’écoute et il ne craint plus. On cherche à l’endroit d’une ancienne blessure, et c’est à peine si la peau tressaille. Et c’est à présent l’immobile qui devient une fiction, et cette lassitude d’avoir tant vécu comme une invitation à poursuivre encore.
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Elle est sublime, la petitesse
d'une goutte de rosée

saisissez-la quand elle tremble
encore sur un pétale

et que le temps s'immobilise et que l'infime
vous accorde l'infini.
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Videos de Claude Esteban (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Claude Esteban
« […] « La poésie est parole dans le temps », Machado (1875-1939) n'a pas cessé de l'affirmer. Encore fallait-il que le temps ne se résumât pas à la pression immobile du passé sur la circonstance, ni la parole au simple ressassement de l'irrémédiable. Certes Machado […] a éprouvé une manière d'attirance étrange devant la négativité et la noirceur du destin de l'Espagne. Il ne s'y est point abandonné. Ou plutôt, avec une véhémence souvent proche du désespoir, une tendresse mêlée de répulsion et de haine, il a tenté, longuement, d'en sonder les abîmes. […] La poésie - Machado, seul de sa génération, s'en persuade - n'a plus pour tâche de répertorier pieusement les ruines ; elle se doit d'inventer le futur, cette dimension héroïque de la durée que les Espagnols ont désappris dans leur coeur, dans leur chair, dans leur langue depuis les siècles révolus de la Reconquête. […] […] Nostalgique de l'Inaltérable, à la poursuite du mouvant… Par son inachèvement même, dans son échec à s'identifier à l'Autre, la poésie d'Antonio Machado atteste, et plus fortement que certaines oeuvres mieux accomplies, la permanence et la précarité d'un chemin. Hantée par le néant, elle se refuse au constat de l'accord impossible. Prisonnière du doute et de la dispersion, elle prononce les mots d'une reconnaissance. Elle déclare la tâche indéfinie de l'homme, la même soif à partager. » (Claude Esteban.)
« […] “À combien estimez-vous ce que vous offrez en échange de notre sympathie et de nos éloges ? » Je répondrai brièvement. En valeur absolue, mon oeuvre doit en avoir bien peu, en admettant qu'elle en ait ; mais je crois - et c'est en cela que consiste sa valeur relative - avoir contribué avec elle, et en même temps que d'autres poètes de ma génération, à l'émondage de branches superflues dans l'arbre de la lyrique espagnole, et avoir travaillé avec un amour sincère pour de futurs et plus robustes printemps. » (Antonio Machado, Pour « Pages choisies », Baeza, 20 avril 1917.)
« Mystérieux, silencieux, sans cesse il allait et venait. Son regard était si profond qu'on le pouvait à peine voir. Quand il parlait, il avait un accent timide et hautain. Et l'on voyait presque toujours brûler le feu de ses pensées. Il était lumineux, profond, car il était de bonne foi. Il aurait pu être berger de mille lions et d'agneaux à la fois. Il eût gouverné les tempêtes ou porté un rayon de miel. Il chantait en des vers profonds, dont il possédait le secret, les merveilles de la vie ou de l'amour ou du plaisir. Monté sur un Pégase étrange il partit un jour en quête d'impossible. Je prie mes dieux pour Antonio, qu'ils le gardent toujours. Amen. » (Rubén Darío, Oraison pour Antonio Machado)
0:00 - Titre 0:06 - Solitudes, VI 3:52 - du chemin, XXII 4:38 - Chanson, XLI 5:39 - Humour, fantaisies, notes, LIX 7:06 - Galeries, LXXVIII 7:54 - Varia, XCV, Couplets mondains 9:38 - Champs de Castille, CXXXVI, Proverbes et chansons, XXIX 10:14 - Champs de Castille, idem, XLIII 10:29 - Prologues. Art poétique. Pour « Champs de Castille » 12:17 - Générique
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