Dans les alentours des années 1970, dans une banlieue bourgeoise, Cecilia Lisbon se suicide, cadette d'une famille de cinq filles qui la suivront très vite dans son funeste voyage.
Seulement, l'important n'est pas comment mais pourquoi.
Des années plus tard, quelques garçons, désormais hommes, tentent de reconstituer l'histoire, afin de la comprendre.
« Et ce furent ceux qui n'avaient pas de blessures qui travaillèrent à leur propre guérison. »
Genre : Drame
Le(s) thème(s) abordé(s) : le regard des autres, l'obsession des américains pour le bonheur, la vie en banlieue, le suicide évidemment et l'adolescence et la façon de la vivre.
« Chaque seconde est éternelle. »
L'histoire se passe après une guerre, sûrement la Seconde Guerre Mondiale, ou plus récemment celle du Vietnam puisque nous nous trouvons dans les années 1970, dans une banlieue huppée du Michigan .
J'aime beaucoup tout ce qui se passe en 1900, le XXIème siècle m'est un peu trop commun, j'aime comprendre et savoir comment ils vivaient à une certaine époque seulement grâce à quelques détails dans un livre. de plus, le fait que ça se passe dans une petite banlieue restreint le terrain de l'histoire, d'un côté on se sent rassuré, mais très vite, on se sent enfermé.
« Nous savons enfin que les filles étaient des femmes déguisées, qu'elles comprenaient l'amour et même la mort, et que notre boulot se bornait à créer le bruit qui semblait tant les fascinait »
Il y a six personnages principales, les cinq soeurs Lisbon, et leur père. Je ne compte pas leur mère comme étant un personnage principale, car, à mon sens, elle a beaucoup d'importance mais l'histoire ne tourne pas autour d'elle.
« Cécilia était bizarre mais pas nous […] On veut juste vivre. Si on veut bien nous laisser. »
Il y a Cécilia (13 ans), qui disparait très vite, dès le premier chapitre, mais elle reste très présente dans l'histoire, disons que c'est un personnage principal mort.
Puis il ya ses soeurs, Lux (14 ans), Bonnie (15 ans), Mary (16 ans), Thérèse (17 ans). On pourrait penser que l'histoire tourne autour de Cécilia, même morte, mais, la vérité, c'est que Cécilia était l'entrée, la mise en bouche, le prologue, l'important, celle autour de qui tout tourne (et pas seulement les garçons) c'est Lux.
Lux est belle, drôle, espiègle, sexy, elle sait ce que les garçons aiment et fait tout pour leur plaire d'avantage, au début, c'est juste une ado rebelle qui se cherche, mais plus l'histoire avance, plus elle perd pied, elle dégringole, jusqu'à toucher le fond.
Seulement, les Lisbon sont solidaires, et bien que les trois autres soient plus discrètes dans l'histoire, elles y passent aussi.
Le père quant à lui, à son lot d'infortune, c'est un personnage très humain qui essai de vivre après chaque drame, qui relativise et tente d'offrir un tant soit peu de bonheur à ses pauvres filles, seulement, sa femme et lui n'ont pas la même notion du bonheur, et de la manière dont on peut l'offrir aux jeunes filles.
C'est en ça que Mme Lisbon fait avancer l'histoire (mais il n'y a que l'histoire qu'elle fait avancer) croyant, ou se persuadant, aider ses filles et son mari, elle les fait tous plonger un par un dans la miséricorde et la détresse.
Il y a aussi le narrateur dont on ne connaitra jamais l'identité, ce que je trouve très intelligent comme procédé, et assez amusant, car il peut être n'importe qui, et n'importe qui se permet de raconter l'histoire de ces filles, avec plus ou moins d'objectivité.
Mais personnellement, je trouve que lui, avec les informations qu'il a amassé, y parvient assez justement.
Il y aussi toutes ces personnes qui ont fait avancer son récit, grâce à des témoignages, des souvenirs ou des pièces à conviction, des gens qui n'ont fait que passer, ce qui a augmenté l'effet de « zoom » sur la famille Lison, mais il était donc assez facile de se perdre dans un nom déjà lu et de na pas retrouver en quoi il avait contribué à l'histoire.
Le titre est une chanson du groupe Cruel Crux, portant le titre « Virgin Suicide » qui le donnera au livre, Cruel Crux (groupe qui, à ma connaissance, n'existe pas, et j'ai pourtant fait des recherches) est un groupe que Lux écoutait, ce qui prouve encore qu'à mon avis, l'histoire tourne autour d'elle, puisque c'est la chanson de Lux qui deviendra le titre de leur histoire.
Une autre hypothèse quant au rapport titre/histoire, plus connotée et personnelle, et que
Jeffrey Eugénides ait voulu montrer que les suicides des filles étaient, en quelques sortes, purs et innocents, qu'elles sont « vierges » du suicide, peut-être cela voulait-il dire que c'étaient leurs premières fautes commises (sauf Lux peut-être…), de se suicider, d'où la Vierge (qui, en plus, est un symbole très récurrent du livre)
L'histoire est simple en surface : Des ados qui se suicident, à la chaine si j'ose dire, et un groupe de garçons qui observent, spectateurs horrifiés, la vie les emporter. Mais si on creuse un peu, c'est bien plus compliqué que ça en à l'air, ce livre est une vraie réflexion sur le suicide et sur l'adolescence, et la vie en banlieue, trop serrée, trop étriquée avec les codes de la bourgeoisie, être une fille de banlieue des années 70, c'est se taire et regarder les hommes défiler à notre porte.
« Pourquoi les gens font semblant d'être heureux tout le temps ? »
Tout à l'heure j'ai vaguement évoqué les thèmes abordés, parmi eux, donc, les codes de la mondanité, le suicide, l'adolescence, mais surtout, celui sur lequel je voudrais en dire un peu plus, c'est l'obsession du bonheur chez les américains, en premier lieu, on sait tous que l'Amérique, c'est le « Rêve Américain » (« chers amis, tout est possible dans le Nouveau monde ! » -Non, non, bien trop de gens y croient et y meurent…) Ensuite, et pour en revenir à notre roman, il y a un personnage en particulier qui incarne cette obsession, c'est la très chère mère des filles, qui tente de se persuader qu'elle contrôle tout, qu'elle contrôle les passions, les rêves, l'avenir, qu'elle contrôle ses filles et le monde qui les entoure. le bonheur est dans le confort pour elle, confort qui commence vite à devenir étouffant, jusqu'à être une prison.
Mais finalement, bien d'autres personnages, juste par une phrase, un geste… représente cette obsession.
L'histoire commence par la fin. Par la mort. Par le suicide de la dernière fille, donc on sait d'entrée de jeu qu'on ne doit pas s'attacher à ces filles, puisque dès les premières lignes le narrateur nous explique que c'est terminé, on arrive trop tard. Et pourtant, il est fort Jeffrey ! Il a réussi malgré tout à me faire éprouver des tas de choses, mais pire que tout, je m'y suis attachée à ces filles ! Alors que je savais comment ça allait finir, comme quoi, c'est un bon auteur.
A la fin, on a toujours rien compris, on se sent bizarre, une partie de nous y est encore, tentant désespérément de comprendre le pourquoi du comment, on a la drôle d'impression qu'il manque quelque chose « Là où les pièces manquantes manqueront à jamais »
Mais on se sent quand même soulagé, un poids en moins, pense-t-on, C'est qu'elle était plus lourde que les autres, la dernière page.
« Afin d'être éternellement seules, seules dans le suicide, qui est plus profond que la mort. »
Je n'ai pas beaucoup parlé de
Jeffrey Eugénides, pourtant, tout ça c'est grâce à lui, donc, je n'avais jamais rien lu de lui et sans doute ne relirai-je jamais une de ses oeuvres (Ou peut-être
Middlesex) c'est beaucoup de réflexions, ce sont des histoires simples qui cachent beaucoup de questions, on réfléchit à chaque page qu'on tourne, et lorsque c'est la dernière, on se sent différent, c'est particulier comme manière d'écrire, ça fait rêver tout en faisait redescendre sur Terre.
Je le dis souvent, mais il a réussit à se mettre dans la peau d'adolescents, autant heureux que préoccupés, il est parvenu à écrire un livre sur le suicide, sans que ce la soit morbide, il a su s'arrêter à la limite.
De plus, il dit des choses simples mais de manières tellement belle que ça les rend passionnates.
Mon grand-père me demande souvent « Comment tu les trouves tous ces livres ? » Pour celui ci, en fait, c'est assez tordu, je me baladais sur Facebook, en regardant les descriptions que certaines filles écrivaient et je suis tombée sur une très jolie phrase sans références, et je me suis dit « C'est trop beau pour être d'elle » et je ne m'étais pas trompée, ça venait d'un drôle de film intitulé «
Virgin Suicides » mais l'histoire ne me disait rien, mais elle était vraiment belle cette phrase ! Et un jour il est passé en VO à la télé, mais ce jour là, j'ai fait des recherches, c'était donc bel et bien un livre à la base, bonne nouvelle puisque j'adore les livres, et qui plus est, ceux qui ont une adaptation, alors je l'ai acheté, et ce livre est un des rares livres a m'avoir changé (moi ou ma manière de voir les choses). A m'avoir secoué.
« On a affaire à une rêveuse totalement déconnectée de la réalité, en sautant elle a du penser qu'elle s'envolerait. »
Merci à la jolie jeune fille qui a mis cette citation, en revanche, la prochaine fois, mets les références.
Et surtout, merci à ce merveilleux auteur, qui à l'honneur de compter parmi mes modèles d'écritures et parmi ceux qui m'ont littéralement renversé.