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EAN : 9782848191201
134 pages
Créer (06/05/2010)
5/5   4 notes
Résumé :
À l'image du village gaulois d'Astérix, le Monastier-sur-Gazeille est unique et donc universel. Il a abrité une abbaye célèbre au Moyen Âge dont l'influence s'étendait jusqu'à Turin. Il a inspiré Georges DUBY pour son Temps des Cathédrales et abrité des générations de ruraux et paysans avant que leurs enfants ne soient contraints de devenir des ouvriers voués au chômage dans des banlieues plus ou moins sinistres et que les fermes alentour soient transformées en rési... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Gérard Faure
Le petit mange-chèvre
« La vie se porte froissée »

Je devrai réserver ma critique aux auteurs que j'ai connus sur les bancs de l'école ou à ceux dont j'ai été l'assureur. Il en est ainsi de Gérard Faure, un ancien condisciple du lycée et mon père et moi-même avons été l'assureur de son père. pharmacien au Monastier. L'art d'évoquer son enfance est difficile, surtout après le petit chose, d'Alphonse Daudet ou L'enfant de Jules Vallès. Il suffit peut-être de rester simple et naturel, comme le fait Gérard Faure.

Ce ne sont pas d'antiques souvenirs, puisqu'ils se rapportent au lendemain de la dernière guerre, mais pour chacun l'enfance appartient à un monde révolu. La mémoire de l'auteur gravite autour de la pharmacie du Monastier où Antonin Faure son père exerce. D'abord la famille : sa mère irréprochable et affectueuse à l'inverse de celle de Vallès, les frères, les tantes et grands-parents paternels et maternels enveloppés dans une même tendresse réciproque. le bon pharmacien dit à ses clients désargentés : « Vous me paierez demain », ce qui veut dire jamais. À cette époque le monde rural n'a pas de garantie sociale. La population et les originaux défilent à toute heure dans la boutique et l'arrière-boutique où le pharmacien fabrique ses remèdes. Les deux médecins du bourg
sont les docteurs Cornaire et Ollier. le beau costume du Dr Cornaire rétrécit après un orage pris sur le Gerbier de Jonc et sa 2 CV prend un air bancal quand il s'assoit au volant.

L'abbaye est un autre centre, car l'école est dans le château abbatial. Les enfants y apprennent l'histoire des moines avec celle de la France. La maîtresse fabrique encore l'encre qu'elle verse dans
les encriers de porcelaine blanche. Les écoliers, des greniers interdits de l'abbatiale aux souterrains, se livrent au plaisir de faire des bêtises dans un monument historique. Sous les piles, c'est-à-dire sous les arcades du bâtiment conventuel devenu mairie dort le « Toude ». L'église rythme la vie dans les offices, enterrements, processions des pénitents et de la Fête-Dieu, avec une pincée de charme pour sa part de patois. Ce qui n'empêche pas la famille de rester laïque dans la mouvance de Laurent-Eynac. L'enfant entend le ministre, dans son jardin voisin, répéter ses discours.

La ligne de chemin de fer jamais terminée est un autre monument. Sur le pont métallique, aujourd'hui disparu, une trappe et une échelle permettent de rejoindre la passerelle inférieure et intérieure. Dans celui de la Roucoumène les enfants, parmi les chauves-souris, s'aventurent dans les piliers creux et dans le village ils apprennent a endormir les poules.

Le vocabulaire est choisi : « Que l'on puisse marcher avec de pareilles estrades » écrit-il pour les talons hauts de sa tante. « le curé était comme un oiseau qui n'aurait su s'envoler ». Les odeurs sont évoquées dont celle de l'eau « qui vient de la pierre ». Un monde où personne n'est dupe, quand le pharmacien n'est pas là, l'enfant répond : « il est chez les soeurs ». Quand on lui demande d'aller le chercher, il court au café. le récit se termine dans l'officine où le pharmacien, dans son cercueil, reçoit pour un dernier hommage clients et amis. Enfance sans barbelés, la qualifie-t-il. Ces petits éléments disparus nous rattachent au passé, chacun peut mettre un nom, reconnaître un fait et y voir le reflet de sa propre jeunesse. Alors pourquoi ce sous-titre « La vie se porte froissée » ? Cette belle préface de l'enfance rend-eIle la vie qui suit plus âpre ?

Christian de Seauve

Les mange-chèvres sont les habitants du Monastier-sur-Gazeille, en Haute-Loire.
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Ce livre est un livre drôle qui sent bon la France d'autrefois. L'auteur grâce à la jovialité de sa façon d'écrire parvient a faire imaginer aux lecteurs quel a pu être son quotidien au Monastier-sur Gazeille lieux de son enfance. Il fait aussi à travers ce livre en quelque sorte revivre l'âme des petits commerces d'autrefois. Son père était le pharmacien du village et il aime a raconté la sollicitude et la bonté de cet homme. Ce livre nous permet aussi de croiser le chemin de petits paysans qu'avec son père ils soignaient dans les fermes. On comprend aussi l'importance et la place de la réputation de chacun dans les villages de cette époque, tout y est : le médecin, le pharmacien le boucher le boulanger les repas en famille le dimanche. Mais aussi les "querelles-spectacle", la dureté du travail qui pour le pharmacien ne s'arrêtait jamais. On comprend pour finir la complicité et le rôle que les jeux d'enfants sur les différends lieux du Monastier ont joué dans la jeunesse de l'auteur. Je recommande vivement ce livre, car j'ai pris énormément de plaisir à le lire.
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Mange-chèvre ? Quel nom étrange devez-vous vous dire !
En fait, derrière ce nom qui semble un poil désuet mais charmant se cache une histoire à lire et à faire lire.

C'est un merveilleux petit récit qui peut se lire d'une seule traite.
C'est un livre plein de souvenirs et d'émotions. Il y a une odeur de campagne et d'enfance perdue. Cela rappelle un peu Pagnol tout en étant différent.

L'auteur a une plume qui se lit très facilement. Il nous fait sourire et même rire à plusieurs reprises.On visualise très bien ce qu'il nous raconte. On sent la verve journalistique.

Sincèrement, ce livre a été une très belle découverte.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
J'avais cinq ans, un tablier à carreaux rose et blanc. C'était en 1945, en Haute-Loire, au Monastier-sur-Gazeille. De ce temps-là datent mes premiers vrais souvenirs. Marqués au sceau de la guerre. Mais, alors, pour moi ce mot « guerre » restait une abstraction. Plutôt que le reflet d'une réalité douloureusement vécue ce qui, Dieu merci, n'avait pas été véritablement mon cas. Ce que je savais, que j'avais dû entendre mille fois répété : si tout avait été bien mieux avant la guerre que pendant la guerre, si tout était nettement mieux après la guerre que pendant la guerre, tout avait été mille fois mieux avant la guerre qu'après la guerre.
Je sentais confusément que la guerre avait été un épouvantable gouffre noir. Le miracle était pour moi qu'il n'eût pas englouti ma famille.

Jusqu'à l'âge de sept ans, j'ai donc porté, pour aller à l'école, des tabliers taillés dans un inépuisable coupon ? mais peut-être me semble-t-il si grand que parce que j'étais alors si petit ?? que ma grand-mère maternelle avait donné à ma mère et dans lequel celle-ci avait puisé, au fil du temps, de quoi confectionner quelques tabliers, toujours soigneusement amidonnés, et qu'elle lavait en alternance.
Ma mère avait une horreur maladive des taches et des faux-plis, une obsession maniaque de la propreté. Le rose n'était pas à l'époque une couleur dont on affublait volontiers les petits garçons, mais l'heure était encore à la pénurie dans bien des domaines, notamment vestimentaires.

Ma mère a souvent raconté l'histoire du costume du Docteur Cornaire, coupé dans un indéfinissable tissu couleur bois de rose ou lie de vin irisé. « Il brillait, il étincelait plutôt, au moindre rayon de soleil. Mais, un jour que nous revenions du Gerbier des Joncs à bicyclette, un orage nous a surpris. En arrivant à la maison, le docteur Cornaire était pratiquement en culottes courtes et sa veste avait rétréci de moitié. Le tissu ne brillait plus, s'est raidi en séchant et a viré au rouge cramoisi moiré ».

La « maison », c'était la pharmacie du Monastier. La pharmacie de mon père, seule et unique pharmacie du village. Et la seule qui put « servir » tous ces gens de la montagne, le Mézenc, le Gerbier des Joncs, la Haute-Ardèche et l'orée de la Lozère.
Elle était ouverte au plein milieu du bourg, dans la longue rue principale, au rez-de-chaussée d'une grande maison construite tout juste avant la guerre et où nous avons toujours vécu, mes parents, mes deux frères et moi. Elle est toujours là, sans mon père, parti en 1981. Toujours là, avec son carrelage noir et blanc, son mobilier de bois verni. Les comptoirs et des rangées de pots en verre ou en faïence. Dans une niche, sur le mur du fond, face à la porte d'entrée, à gauche et à droite du grand comptoir, trônent encore les bustes en plâtre doré d'Esculape et d'Hippocrate. Sur les étiquettes rouge et or de certains pots, les noms, étranges et mystérieux de certains produits : Uratropine, pastilles de Kermès, teinture de Jaborandi, Baume tranquille, feuilles d'armoise, protoxalate de fer, guimauve, huile camphrée.

Quelques pots sont encore à demi remplis de poudres multicolores et scintillantes. Il me suffit de m'asseoir à la place qu'aimait à occuper mon père, derrière le petit bureau à cylindre abritant tous ses livres et ordonnanciers, pour rendre à la vie cette pharmacie momifiée.
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Notre point de rendez-vous préféré, c’était la sacrosainte « pierre des cabinets », place de la Fromagerie : une vaste pierre blanche rectangulaire, posée au bord de la rue, et qui abritait les WC municipaux, lesquels s’ouvraient en contrebas sur la rue de la Carotte. Un jour, le Toude, une figure du pays, sortit en hurlant un flot d’injures de ce mausolée historique. Quelqu’un avait volé les tuyaux de plomb de la chasse d’eau qui, du coup, s’était, d’un seul flot, libérée sur lui. L’histoire fit le tour du Monastier en dix minutes et le Toude la raconta lui-même partout, dans les cafés surtout, échangeant quelques canons de vin contre cette histoire d’eau. Les voleurs de tuyaux courent toujours.
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