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Marie-Hélène Piwnik (Traducteur)
EAN : 9782070752652
122 pages
Gallimard (03/03/2000)
4.07/5   7 notes
Résumé :

Sandra n'est plus. Mais l'homme qui la pleure lui écrit encore des lettres d'amour. Lettres poignantes, incantatoires, afin de faire resurgir l'image de la femme aimée, afin de pouvoir la toucher, la caresser, la posséder encore, de manière fantasmatique. Ses missives adressées à la disparue parlent de la sensualité et de la violence des corps, mais disent aussi l'absence et la mort. Car bien souvent le narrateur ne parv... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Quand on entre dans les Lettres à Sandra de Vergilio Ferreira, on a un curieux sentiment de voyeurisme et on ressent une espèce de malaise qui ne cesse de s'aggraver. Probablement que parce que là où nous entraîne Paulo, le narrateur et l'expéditeur des lettres, est un chemin qu'on ne connaît pas. Une incursion dans l'intimité. Dense. Étouffante. Et pourtant, on ne peut quitter ce livre, tant il est prenant, tant l'écriture est intense et belle, et tout cela malgré l'inévitable constat auquel nous nous verrons confrontés au fil des pages.

Ces Lettres à Sandra sont celles d'un homme à celle qui n'est plus, enlevée par la maladie. Celles d'un bilan, celles d'une vie qui n'était pas celle qu'il aurait souhaitée, celles de deux solitudes. L'homme qui les écrit, en l'occurrence un écrivain, est peut-être un peu amer. Il s'est muré dans une solitude pour ce qui sera la dernière chose qu'il écrira : des lettres à la disparue. Des lettres qui n'étaient pas destinées à la publication, comme l'annonce Xana, sa fille, en guise d'avant-propos, mais qu'on lui a demandé de faire publier.

Des lettres où il se rend compte que deux êtres s'aimaient dans une certaine forme de devoir. du moins elle. Et que là où il aurait voulu légèreté, elle était toujours grave. Et que toute sa fougue, toute sa joie de vivre, l'une comme l'autre, il les a contenues toute sa vie pour ne pas déplaire à Sandra. Triste constat d'un homme qui va mourir et qui a le sentiment d'avoir échappé à la vie. Ou de ne pas avoir été celui qu'il aurait fallu à Sandra.

« Tu as toujours eu la mesure exacte des choses sans la moindre chaleur comme dans une géométrie. Tu passais devant moi et je m'enroulais dans ma douleur », écrit-il dans la troisième lettre. Et cette phrase nous blesse autant qu'elle blesse celui qui l'a écrite. Comme nous blessent aussi tant d'autres écrites par un homme qui aimait tant la musique, alors qu'elle ne l'aimait pas, qui écrivait des textes auxquels elle ne s'intéressait pas. Tout cela était si futile à côté de l'ordre d'une maison, de l'éducation d'une enfant et du regard que les autres posent sur nous de l'extérieur. Même le désir était devoir auquel elle se pliait, ça faisait partie du contrat.

Et toute sa vie, Paulo n'a fait qu'une chose : l'aimer de toute son âme et tenter de la rendre heureuse. Ces lettres nous disent qu'il n'a pas réussi. Et qu'il mourra avec ce sentiment d'échec sur une phrase incomplète. Et qu'il n'a pas plus été heureux qu'elle. Sinon à quelques reprises, dans une vie où tout les séparait, mais une vie commune et ordonnée où chacun vit l'un à côté de l'autre. Sans se demander ce que serait une autre vie.

Voilà plusieurs semaines que j'ai terminé la lecture du roman de Vergilio Ferreira et il me hante toujours. Je crois que je m'étais attachée au personnage de Paulo.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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A travers une écriture qui emprunte au roman épistolaire, c'est l'expression de l'amour éperdu et incandescent d'un homme pour sa femme décédée prématurément.
J'ai été transporté par la poésie qui se dégage des premières lettres qui scintillent d'une sincérité déchirante, lorsque le narrateur s'adresse à l'apparition fantômatique de sa femme et continue de désirer son corps terrestre qui n'est plus, l'érotisme sait se faire discret, presque évanescent.
La douleur de la séparation arbitraire nous est décrite avec une grande délicatesse et nous offre des pages que lacère la mélancolie et la nostalgie, saupoudrées avec un beau sens de la mesure, sans pathos.
... Et puis j'ai fini par trouver que le souffle s'épuisait sur les dernières lettres, bien que le livre ne compte qu'une petite centaine de pages ; l'érotisme perd aussi en subtilité au fur et à mesure qu'il prend une place plus prépondérante (sans cela, j'y aurais mis cinq étoiles). Dommage.
Reste un texte d'une rare beauté pour les deux premiers tiers.
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Vergilio Ferreira (1916-1996) est un des grands auteurs de la littérature portugaise contemporaine. Les « Lettres à Sandra » sont écrites par un vieil homme au seuil de la mort, Paulo. Il s'adresse à sa femme, qu'il a aimée passionnément, et qui est décédée depuis plusieurs années.
Ces lettres parlent d'amour, de sensualité, de vie conjugale mais aussi d'éloignement et d'incompréhension. La mémoire de Paulo restitue au plus près les émotions et les souvenirs mais parfois s'avoue vaincue par l'oubli de certains détails ou scènes.
Ce texte magnifique et d'une grande pureté, est emprunt de ferveur et de mélancolie pour évoquer un amour intense et fragile à la fois. Jusqu'à la dernière ligne, le lecteur est immergé dans ces lettres comme s'il les tenait dans ses propres mains.
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La lettre d'Amour, obsédante, sans cesse recommencée... même au delà du réel, transcendée d'une volupté non partagée... nourrie d'incompréhensions, de discordances... et l'amour persiste impudique, comme une mauvaise herbe dans l'intimité d'un paradis inaccessible, rancoeur et tristesse se répandent prisonnières et dans la retenue.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Une fois je t'ai trouvée, tu changeais de robe, cette chaleur. Et la chaleur est revenue dans mon sang, mes mains t'ont aidée à te déshabiller et dans la paume de ma main droite j'ai posé ton corps tendre et je l'ai soulevé et je l'ai étendu sur le lit. Et il était tendre et doux immaculé enfantin, bref et lumineux dans la pénombre de la chambre. Je me couche à tes côtés, je le parcours légèrement de peur de le briser. Parce que tu étais si fragile. Tes seins qui pointent, ton visage, la longueur de tes jambes. Je m'étends sur toi et dociles elles s'écartent. Et c'est horrible de plaisir profond subtil, Sandra chérie, d'entrer en toi, comment cela est-il possible ? En toi, au plus secret de toi, dans l'intimité inaccessible de ta personne. Au plus occulte et irrévélable de ce que tu es. Et je suis là répandu impétueux jaillissant dans la concavité de ton être clos. Ensuite nous nous désenlaçons, je m'étends à nouveau à tes côtés, tu me regardes un instant et tu souris. (p. 45-46)
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Je voulais te dire que je ne suis jamais arrivé à me coucher au milieu du lit depuis que tu es morte. Je me couche de mon côté, qui est le gauche, et je laisse ton côté pour toi. Parce qu'il est possible que tu reviennes et que j'occupe un peu de la place qui t'appartient. C'est ta place, tu es tournée vers l'extérieur. Et par les nuits plus froides tu te lovais contre moi, ton corps frileux épousant le creux de ma chaleur. Mais parfois la chaleur montait en moi et je te touchais dans ton sommeil pour te réveiller sans te réveiller, je ne sais. Et tu te réveillais vraiment, tu avais le sommeil léger, et tu me disais d'un ton bref pas aujourd'hui. Mais d'autres fois tu roulais lentement sur toi-même et je sentais ton bras autour de mon cou, ma main doucement crispée le long de ton corps, à l'intérieur du pyjama ton corps, et je te déshabillais lentement et le miracle terrible se produisait comme s'il se produisait pour la première fois. Sandra chérie. Dire ton corps enfantin, tes seins naissants, le lieu de notre rencontre dans l'inaccessible, ton petit cri quand nous le rencontrions. Et la lassitude finale - comme je t'aime. (p. 55-56)
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la passion qui s'est usée et avait presque perdu son nom
se reconstruit aussitôt dans l'intouchable de l'imaginaire...
...
C'est ainsi que je comprenais les histoires que l'on raconte sur les amants qui se tuent pour que leur amour soit éternel. Mais en moi il n'y a pas aujourd'hui de passion, ainsi ou autrement nommée, ne reste que mon envoûtement triste et tendre.
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Et un jour je t'ai demandé si tu avais gardé ces lettres. Tu m'as regardé avec un sourire bref et réprobateur. Je les ai déchirées, naturellement, as-tu dit, et pourquoi les aurais-je gardées ? J'aurais voulu les relire, les avoir, ai-je dit. Pour récupérer ce que j'ai été en elles et ce qu'il y a eu en elles de toi. ( p. 31)
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Je me rappelle quand tu as refusé ma photo que je t'apportais pour t'éblouir et que je suis resté avec elle dans la main, humilié, bouleversé comme ce qu'il y avait en moi d'enfant dont tu n'aurais pas accepté la fleur qu'il t'offrait. (p. 51)
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Video de Vergilio Ferreira (1) Voir plusAjouter une vidéo

Vergilio Ferreira : Lettres à Sandra
Olivier BARROT présente le livre de Vergilio FERREIRA, "Lettres à Sandra", depuis le cimetière PRADO Reposo de Porto. Il en lit quelques extraits ; images de femmes, portraits.
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