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EAN : 9782290354599
91 pages
Librio (09/11/2006)
3.91/5   107 notes
Résumé :
Pourquoi se dire "fou" ? Dans ce roman hybride où se côtoient apostrophes au lecteur, méditation sur soi et autobiographie, Flaubert offre le bilan désenchanté d'un premier amour impossible.
Alors que la folie apparaît ici comme un état de "grande santé," celle qui préserve du conformisme abêtissant, l'auteur y raconte la naissance de sa vocation d'écrivain.
En transformant la folie en normalité, en recyclant et détournant les discours conventionnels, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Oeuvre de jeunesse, Les mémoires d'un fou est un récit en partie autobiographique de Flaubert, écrit en 1838, et publié à titre posthume en 1901. Flaubert y évoque, du haut de ses 17 ans, une certaine lassitude, voire même un dégout, de la vie. Il nous raconte ses années de collège,ses premières vacances en Normandie, ses premières réflexions sur l'amour.

Peu habituée à lire des mémoires, j'ai absolument et totalement pris en grippe Flaubert au cours de mes années de lycée, après avoir passé 4 heures par semaine 10 mois durant à écouter ma prof s'esbaudir sur la vie (étriquée de la névrotique) de Madame Bovary, et la voir rougir lors de ces fameuses scènes de la calèche, quand la femme mariée y retrouve l'un de ses amants. Deux mois à relire l'histoire de la calèche... c'est long, surtout quand on a 16 ans et un amoureux dont les yeux et le sourire sont à se damner !
Bref, en toute bonne foi, et en essayant de mettre de côté mes a priori, j'ai essayé de me plonger dans ces mémoires écrites à 17 ans. J'ai été étonnée du recul pris par Flaubert pour évoquer des évènements qui, au final, datent à ce moment-là presque d'hier ! Ses descriptions sur les premiers évènements de cette toute jeune vie sont émaillées de réflexions sur la religion, la culpabilité, l'écriture, l'art, et bien sur, l'amour et les femmes. J'ai été frappée par l'évocation récurrente de thématiques telles que le bien et le mal (quelques années plus tard, il sera jugé pour outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes moeurs à la sortie de l'illustre Madame Bovary !!) ou l'inutilité de chaque chose. Enfin, j'ai trouvé étonnant qu'on puisse être si désabusé à 17 ans. On découvre en Flaubert un jeune homme sensible et intelligent, qui porte sur les choses, les gens et les évènements un regard plutôt réaliste. Mal à l'aise dans le monde tel qu'il le perçoit, il préfère s'attacher l'adjectif de "fou" pour s'en démarquer.
Quoiqu'il en soit, et bien que l'ouvrage soit court (à peine 90 pages dans l'édition lue), j'ai trouvé que l'ensemble manquait un peu d'unité, de "liant" entre les différents sujets évoqués et dans la façon dont ils étaient évoqués. Quant à la prose de l'auteur, on y trouve entre autre les phrases à rallonge, où les apartés s'ajoutent joyeusement aux multiples propositions entre les non moins nombreuses virgules, un phrasé précis et réaliste, que l'on admire et que moi, je déteste...J'ai personnellement trouvé ces Mémoires d'un fou pompeuses autant que verbeuses, avec tout de même de jolies formulations et des idées intéressantes sur l'océan et l'art.
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Dix sept ans, vraiment?! Cela a beau être Flaubert, le grand Gustave, le martyre du style, je suis éberluée, que dis-je, émerveillée de découvrir que déjà à un si jeune âge sa plume était d'une telle tenue, d'une telle finesse, d'une telle richesse et que de surcroît ce tout jeune homme portait déjà sur le monde un regard distancié d'une acuité et d'une profondeur inouïe.
Si la relation de son amour foudroyant à quinze ans pour une belle femme mariée est délicieuse (je ne me lasse pas de lire ces plumes masculines de jadis tombant d'inanition pour une gorge de femme à peine entrevue), ce qui m'a véritablement emballée dans ce court texte autobiographique est l'évocation d'un Flaubert adolescent hors du monde, ultra-sensible, dénigré par ses pairs, habité de poésie et bouleversé de questionnements sidérants d'intelligence sur la vacuité de la vie, et plus encore la société des hommes.
C'est une âme supérieure qui se dégage de ces pages, et magnifié par l'hypersensibilité et la fougue de la jeunesse, c'est bouleversant.
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Oeuvre de jeunesse de Gustave Flaubert, ce livre n'est pas un roman. Il s'apparente plutôt à un essai, un recueil de souvenirs et de pensées. Il est écrit trop précocement pour avoir valeur de "Mémoires". Quoi qu'il en soit l'auteur nous offre ses pensées et opinions sur la vie, le monde, les arts, l'amour. Il nous dit son isolement et ses difficultés à côtoyer ses contemporains, à aimer même ou à s'intéresser à l'amour. Il évoque ses lectures, Byron, Goethe... et en cela me semble encore perdu dans le romantisme. Assez torturé aussi il évoque l'âme, l'au-delà, la mort, le devenir d'un corps et de son esprit. Evoluant peu à peu, je veux dire en cela, prenant de l'âge, il connaîtra son premier amour platonique, puis découvrira, sans passion, l'amour charnel. Flaubert est alors un homme en devenir, un jeune homme qui se cherche, et désespère un peu de se trouver, de faire sa place. Une autobiographie assez pessimiste, une méditation sombre, voilà ce que nous offre l'auteur. Certains passages sont merveilleusement rédigés. Les chapitres s'enchainent sans avoir toujours de rapports entre-eux, mais je n'y vois cependant pas là l'oeuvre d'un fou, simplement d'un jeune homme qui s'interroge sur la vie et la place de l'homme dans la société du XIXe siècle et de l'homme dans l'univers. Une ébauche prometteuse de l'écrivain qu'il est devenu.
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Il pourrait me semble-t'il y avoir deux interprétations, deux grilles de lecture, selon le ressenti du lecteur, ses propres émotions. D'abord, on pourrait y lire le portrait purement romantique d'un jeune homme souffrant du « mal du siècle » pour reprendre les mots De Musset, soit l'inadaptation du personnage à la société de son époque. le Narrateur a une âme d'artiste, de poète, comme tant d'autres modèles littéraires de la première moitié du XIX ème siècle, sous les plumes des romantiques : Chatterton de Vigny, Anthony de Dumas... le personnage d'Anthony est d'ailleurs cité.
Il cherche sa voie, puisque le monde ne reconnaît pas la singularité de son génie et se complaît dans la bêtise et la médiocrité. Ainsi, quand le Narrateur cherche à séduire une femme, il veut lui parler littérature, mais ne rencontre que des idées toutes faites, sans originalité. de même, les peintres reproduisent tous le même paysage, sans que le talent créatif ne s'exprime.
Le Narrateur n'est donc pas à sa place dans la société, que ce soit parmi les autres collégiens, parmi les vacanciers, parmi ses complices de débauche qui veulent boire sans se soucier de son récit sentimental, et ne veulent pas écouter ses amours de jeunesse. Il perd donc peu à peu ses illusions sur l'Art, sur l'Amour qui n'est qu'une communion des corps, sur l'amitié... Il n'est pas « fou », il est lucide sur la réalité des choses et des sentiments, il a perçu la réalité profonde des choses. Or, ce personnage romantique ne m'a pas trop convaincue, car déjà lu ailleurs, car manquant d'originalité, car trop sentimental justement, rêveur plutôt qu'actif. Il est peut-être trop jeune aussi, encore un adolescent, n'osant donc pas aborder une femme et préférant les fantasmes solitaires. Et que certains passages semblent clichés du romantisme ! Promenades au clair de lune, mains frôlées, blondeur d'une petite fille...
Oui, ce Narrateur pourrait sembler être un héros romantique typique. Cependant, Flaubert n'est pas de la même génération que ces « enfants du siècle » pour reprendre à nouveau les mots De Musset, il est né un peu plus tard, son père n'est pas un officier napoléonien comme les pères de Dumas, Hugo, Vigny... le romantisme n'est donc plus tout à fait dominant en littérature. C'est pour cela que j'ai trouvé une deuxième interprétation possible, de l'humour, de la distance ironique qui pourrait presque être une parodie du romantisme.
En effet, à chaque passage émouvant – larmoyant même selon moi, le Narrateur introduit une distance, dans la mesure où en quelques mots, il semble se moquer de la poésie sentimentaliste qu'il utilisait juste avant. Par exemple, après plusieurs pages à décrire la beauté idéale de Maria, il évoque son mari, un gros moustachu, ou qu'il rappelle que l'amour n'est qu'un accouplement de corps, que les hommes sont semblables aux « bêtes ». Il met sur le même plan le plaisir de l'amour physique avec celui ressenti par la dégusation d'un « plum-pudding ».
Néanmoins, les passages que j'ai préférés sont ceux sur la Normandie, chère à mon coeur et à celui de Flaubert. C'est la Normandie du milieu du XIX ème siècle, le « désir du rivage » pour reprendre la belle expression du titre de l'historien Alain Corbin s'installe. Flaubert décrit donc une Normandie qui accueille ses premiers « touristes » - le mot est anachronique, avec des bains de mer, des plages de varech, des enfants qui jouent sur les galets. La mer devient « sublime », elle est contemplée par des promeneurs, ce n'est plus seulement quelque chose qui effraie ou qui permet de trouver du profit. Son état entre en harmonie avec les sentiments des personnages.
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Une claque, une gifle, un coup qui nous frappe le coeur. Mémoires d'un fou est un spectaculaire petit chef-d'oeuvre qui saura fermement saisir l'âme des Lecteurs les plus sensibles et les plus attachés au monde poétique.

Mémoires d'un fou est un récit assez ironique lorsque le Lecteur sait à quel point Gustave Flaubert se plaît à se moquer ouvertement du romantisme et de ses thèmes chéris, dans Madame Bovary. Ainsi, curieusement, nous retrouvons un auteur qui semble avoir été bercé par les mots délicieusement romantiques de Byron, Goethe, Rousseau ou encore Musset : en effet, Flaubert confesse qu'il préfère s'adonner aux rêveries, aux extases et à l'imagination, plutôt que de vivre dans un monde en ruine et dans lequel il pense n'avoir aucune place. Un discours qui pourrait totalement s'appliquer à cette chère Emma Bovary et qui suppose qu'Emma est en réalité Gustave...

Enfin, le Lecteur pourra s'étonner du style de l'auteur, déjà riche et empli de ce singulier phrasé qui lui est propre, puisque au moment de la rédaction des Mémoires d'un fou, Flaubert est un tout jeune adolescent ! Il appréciera aussi la savoureuse et exquise poésie qui l'habite.
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Citations et extraits (48) Voir plus Ajouter une citation
Oui, je meurs, car est-ce vivre de voir son passé comme l'eau écoulée dans la mer, le présent comme une cage, l'avenir comme un linceul ?
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Et maintenant si rieur sur tout, si amèrement persuadé du grotesque de l'existence, je sens encore que l'amour, cet amour comme je l'ai rêvé au collège sans l'avoir, et que j'ai ressenti plus tard, qui m'a tant fait pleurer et dont j'ai tant ri, combien je crois encore que ce serait tout à la fois la plus sublime des choses, ou la plus bouffonne des bêtises! Deux êtres jetés sur la terre par un hasard, quelque chose, et qui se rencontrent, s'aiment, parce que l'un est femme et l'autre homme! Les voilà haletants l'un pour l'autre, se promenant ensemble la nuit et se mouillant à la rosée, regardant le clair de lune et le trouvant diaphane, admirant les étoiles et disant sur tous les tons: je t'aime, tu m'aimes, il m'aime, nous nous aimons, et répétant cela avec des soupirs, des baisers; et puis ils rentrent, poussés tous les deux par une ardeur sans pareille car ces deux âmes ont leurs organes violemment échauffés, et les voilà bientôt grotesquement accouplés, avec des rugissements et des soupirs, soucieux l'un et l'autre pour reproduire un imbécile de plus sur la terre, un malheureux qui les imitera! Contemplez-les, plus bêtes en ce moment que les chiens et les mouches, s'évanouissant, et cachant soigneusement aux yeux des hommes leur jouissance solitaire, pensant peut-être que le bonheur est un crime et la volupté une honte.
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Oh!... la triste et maussade époque. Je me vois encore errant, seul, dans les longs corridors blanchis de mon collège, à regarder les hiboux et les corneilles s'envoler des combles de la chapelle, ou bien couché dans ces mornes dortoirs éclairés par la lampe, dont l'huile se gelait. Dans les nuits, j'écoutais longtemps le vent qui soufflait lugubrement dans les longs appartements vides, et qui sifflait dans les serrures en faisant trembler les vitres dans leurs châssis; j'entendais les pas de l'homme de ronde qui marchait lentement avec sa lanterne, et, quand il venait près de moi, je faisais semblant d'être endormi et je m'endormais en effet, moitié dans les rêves, moitié dans les pleurs.
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Comment aurait-elle pu, en effet, savoir que je l'aimais, car je ne l'aimais pas alors, et, en tout ce que je vous ai dit, je vous ai menti ; c'était maintenant que je l'aimais, que je la désirais, que, seul sur le rivage, dans les bois ou dans les champs, je me la créais là, marchant à côté de moi, me parlant, me regardant. Quand je me couchais sur l'herbe, et que je regardais les herbes ployer sous le vent et la vague battre le sable, je pensais à elle, et je reconstruisais dans mon cœur toutes les scènes où elle avait agi, parlé. Ces souvenirs étaient une passion.
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[Incipit.]

Pourquoi écrire ces pages ? À quoi sont-elles bonnes ? - Qu'en sais-je moi-même ? Cela est assez sot, à mon gré, d'aller demander aux hommes le motif de leurs actions et de leurs écrits. - Savez-vous vous-même pourquoi vous avez ouvert les misérables feuilles que la main d'un fou va tracer ?
Un fou ! cela fait horreur. Qu'êtes-vous, vous, lecteur ? Dans quelle catégorie te ranges-tu ? dans celle des sots ou celle des fous ? - Si l'on te donnait à choisir, ta vanité préférerait encore la dernière condition. Oui, encore une fois, à quoi est-il bon, je le demande en vérité, un livre qui n'est ni instructif, ni amusant, ni chimique, ni philosophique, ni agricultural, ni élégiaque, un livre qui ne donne aucune recette ni pour les moutons ni pour les puces, qui ne parle ni des chemins de fer, ni de la Bourse, ni des replis intimes du cœur humain, ni des habits moyen âge, ni de Dieu, ni du diable, mais qui parle d'un fou, c'est-à-dire le monde, ce grand idiot, qui tourne depuis tant de siècles dans l'espace sans faire un pas, et qui hurle, et qui bave, et qui se déchire lui-même ?
Je ne sais pas plus que vous ce que vous allez dire, car ce n'est point un roman ni un drame avec un plan fixe, ou une seule idée préméditée, avec des jalons pour faire serpenter la pensée dans des allées tirées au cordeau.
Seulement je vais mettre sur le papier tout ce qui me viendra à la tête, mes idées avec mes souvenirs, mes impressions, mes rêves, mes caprices, tout ce qui passe dans la pensée et dans l'âme; du rire et des pleurs, du blanc et du noir, des sanglots partis d'abord du cœur et étalés comme de la pâte dans des périodes sonores, et des larmes délayées dans des métaphores romantiques. Il me pèse cependant à penser que je vais écraser le bec à un paquet de plumes, que je vais user une bouteille d'encre, que je vais ennuyer le lecteur et m'ennuyer moi-même ; j'ai tellement pris l'habitude du rire et du scepticisme, qu'on y trouvera, depuis le commencement jusqu'à la fin, une plaisanterie perpétuelle, et les gens qui aiment à rire pourront à la fin rire de l'auteur et d'eux-mêmes.
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La « Correspondance » de Flaubert, c'est à lire en poche chez Folio.
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