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Critique de DawnG


Lecture effectuée dans le cadre d'un challenge sur le blog de lecture L'île aux Livres, je n'avais pas entendu parler de ce livre avant que J'ai Lu le propose au Club et ça aurait été dommage, je serais passée à côté d'une excellente lecture !

Susan Fletcher est une auteure que je souhaitais découvrir, bon, je pensais que je serai amenée à lire d'abord La fille de l'Irlandais, mais le destin en a voulu autrement.

J'avoue il est assez difficile (enfin moi j'ai trouvé) de se mettre dedans, parce que le style oral de Corrag est pas mal déstructuré. Imaginez une jeune fille sans éducation, au XVIe siècle, qui a vécu le plus souvent seule, dans la campagne anglaise, qui s'exprime comme elle pense, avec des gestes, un peu comme si elle n'était pas toute seule dans sa tête. Au début, c'est l'impression qu'on a, puisqu'elle ne s'entretient pas encore avec le révérend Leslie. Il faut donc s'habituer à sa façon de parler, décousue avec les idées qui se mélangent. On comprend ensuite ce qu'elle voulait dire parce qu'elle raconte à Charles les choses dans l'ordre chronologique et de façon petit peu plus ordonnée. Donc, on s'habitue et le récit va en s'améliorant du point de vue de la compréhension. En tout cas, pour moi, une fois dedans, ça se lit plutôt bien et j'ai eu rapidement envie de savoir comme l'histoire de Corrag et celle qu'elle nous raconte allaient finir.

Corrag a été élevée par sa mère Cora, elle n'a pas de père et elles vivent en retrait de la ville, dans une maison près d'un lac, légèrement beaucoup dominée par la nature. Cora est vue comme une sorcière, comme sa mère avant elle, et la première chose qu'elle dit à sa fille c'est qu'elle en est une aussi. Voilà dans quel contexte va grandir cette petite fille. Devenue femme, Corrag reste petite et fluette, on la "traite" souvent de gueuse, de sorcière. Mais est-elle vraiment une sorcière, qui envouterait les gens par ses mots et userait des plantes pour tromper son monde? Ou bien est-elle uniquement un être incompris, vivant avec la nature, un être que personne n'a jamais cherché à connaitre et à comprendre ?
Corrag sera amenée à fuir l'Angleterre et à trouver refuge en Écosse. Elle se sent attirée par les hauteurs, par les Highlands, par son climat froid, ses paysages sauvages et ses habitants que beaucoup considère comme des barbares. Ce n'est pas la violence qui l'attire mais va se sentir proche de ces gens qui sont comme elle, des marginaux.

Tout cela et bien plus encore, on l'apprend de Corrag même, qui raconte en plusieurs après-midi au révérend Leslie, sa vie, son enfance, son arrivée dans les Highlands et sa rencontre avec les MacDonald. Celle a qui Cora a demandé de ne jamais aimer parce qu'aimer c'est souffrir, ne fera pourtant que cela toute sa vie, aime sa mère, la nature, les animaux, lui… Et oui, elle a vu des choses en Écosse et oui, elle dira tout ce qu'elle sait à cet homme qui la regarde d'abord comme une étrangère, comme une sorcière, comme le Mal incarné et qui progressivement va comprendre beaucoup de choses sur elle, sur les Écossais et sur lui-même.

Même si au début, j'ai eu du mal à dissocier Corrag de sa façon de s'exprimer, je me suis progressivement attachée à elle, à son histoire. J'étais triste pour elle, pour le sort qu'on lui réserve, révoltée de penser que certaines choses se passaient vraiment comme ça.

Le récit est ponctué par des lettres de Charles à son épouse, qui est restée avec leurs fils en Irlande. Ces lettres sont belles, on découvre un homme qui doute, qui se questionne, qui écoute l'avis de sa femme, qui cherche à comprendre. Corrag est-elle emprisonnée pour sorcellerie ou il y a-t-il autre chose ? Je n'ai pas tout de suite apprécié Charles, sa passivité et sa façon d'être borné à la religion m'ont irrité, puis on apprend des choses sur lui, sur sa famille, il adore son épouse, il change progressivement et on apprend à l'apprécier.

J'ai vraiment beaucoup aimé cette histoire, même si j'aurai préféré une fin différente. Bien entendu, je ne dirai pas comment cette histoire se termine, j'aurai aimé un peu plus de, comment dire, cohérence peut-être, mais bon, c'est presque un détail. Parfois, sur la fin, j'ai trouvé que cette jeune fille qui ressemble à une fillette quand même, faisait des choses peu cohérentes avec son gabarit, m'enfin, c'est un là encore peut-être juste moi qui chipote.

Un bûcher sous la neige, est une belle histoire avec des thèmes intéressants comme la différence, la tolérance, l'acceptation. C'est aussi un aperçu historique d'une Angleterre en transition, avec un peuple protestant qui craint un futur roi Catholique. Un livre sur les oppositions aussi entre foi/nature; Lowlands/Highlands, catholique/protestant; Angleterre/Écosse; barbares/civilisés. Où se situe la frontière entre les deux camps? Qui est préférable à l'autre ? Qui connait-on vraiment ? Les apparences sont trompeuses et personne ne peut être complément tout blanc ou tout noir.

Le gros plus, dans ce récit, fût pour moi, c'est les descriptions de la nature, et surtout de cette Écosse sauvage, au temps changeant, capricieux, des grands espaces aux tons vert, rouille, orange et marron. Des cascades, des rochers, des lochs, des monts,… Une immense sensation de liberté, d'espoir et pourtant ancré dans un sens de l'honneur et des traditions. Une invitation au voyage. Les descriptions sont belles et poétiques, un émerveillement qu'on partage avec Corrag. On a vraiment l'impression d'y être et de sentir le froid, les odeurs de tourbes et le vent.

Il faut donc essayer de passer la barrière du style au début et si l'histoire vous embarque, alors, je pense que comme moi, vous passerez un excellent moment avec ce livre. Par contre, dans le cas, contraire, la moindre chose pourrait vous faire lever les yeux aux ciels. Avec le recul, personnellement, je trouve même que c'était un pari osé mais réussi de faire parler une jeune fille étrange, qui peut s'embrouiller, aller trop vite d'un côté, ou détailler à l'extrême la nature qui l'entoure. Parce que c'est bien ce qu'on doit retenir de Corrag, elle est "nature", les plantes sont sa vie, son univers, elle ne connait que ça. Et rendre tout ça, sa façon de parler, comme si les idées émergeaient trop vite pour elle, ça n'a pas dû être quelque chose de facile à faire et à traduire.

J'ai donc beaucoup aimé ce roman et il m'a donné envie de lire d'autres livres de Susan Fletcher, notamment la fille de l'irlandais,que pas mal de membre du challenge Irlande et Littérature irlandaise, ont lu.
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