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EAN : 9782702144121
220 pages
Calmann-Lévy (07/01/2015)
4.18/5   70 notes
Résumé :
Stimulée par le centenaire de la Grande Guerre, Élise Fontenaille-N’Diaye a voulu écrire sur son arrière grand-père, le général Charles Mangin, dit « le Boucher du Maroc », « le Broyeur de Noir(s) », « le Boucher de Verdun »… Alors qu’elle suit ses traces sur le Chemin des dames, avec ses troupes noires, puis après la Victoire dans la Rhénanie vaincue, elle en vient à s’intéresser à l’histoire coloniale allemande et découvre que l’Allemagne avait investi le Sud-Oues... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (25) Voir plus Ajouter une critique
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Sidérée devant mon clavier, je ne sais pas comment je vais pouvoir faire une critique de ce livre... Je l'ai reçu hier grâce à la dernière Masse critique (merci vraiment à Babelio et aux éditeurs, en l'occurrence Calmann-Levy pour ce Blue Book) et la couverture m'appelait, je ne sais pas trop comment expliquer cela. Beaucoup d'autres livres m'attendent mais non: il fallait que je lise celui-ci...
Je pense que seuls les adjectifs vont m'aider, veuillez me pardonner si mes phrases sont décousues.
Un détail qui a son importance si, comme moi, vous connaissez Elise Fontenaille pour ses romans jeunesse: ceci n'est PAS un roman, mais un récit, une enquête en quelque sorte... L'histoire d'un génocide oublié, la cruauté et l'horreur dont sont capables les hommes envers d'autres hommes. C'est terrifiant, glaçant, impitoyable, accablant, injuste, incroyable, bouleversant...
Et si l'histoire tragique et horrible des Hereros et des Namas avait été véritablement entendue à l'époque au début du 20è, tout le monde aurait su ce que les Nazis allaient faire des Juifs, des Tziganes, et de tous ceux qu'ils qualifiaient d'"Untermensch"... C'est d'ailleurs ahurissant d'apprendre que les officiers faisaient du trafic de crânes, qu'ils revendaient aux scientifiques, qui les mesuraient et affirmaient alors la supériorité incontestable de l'Homme blanc sur le reste de l'humanité.
J'ai tendance à fuir ce genre de livres d'habitude parce que je sais que ça me touchera trop et que je n'en sortirai pas indemne. C'est le cas, c'est vrai, mais à travers les frissons d'horreur, la tristesse profonde, il y a aussi la satisfaction de se dire que maintenant, je sais. Que moi, lectrice si éloignée en temps et en lieu de cette terre rouge de Namibie, je porte la mémoire de tous ces morts...
Il faut être bousculée parfois, ça remet les idées en place.
Merci.
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Qui se souvient de l'expérience coloniale allemande en Afrique Sud-occidentale, entre 1883 et 1916 ?
De cette courte période de colonialisme, dont l'issue a été la guerre mondiale et non la décolonisation, circonstance qui a retardé l'accession à l'indépendance de la Namibie jusqu'en 1990 et conservé les postes-clés de l'économie pour les minorités allemande et afrikaner jusqu'à présent, nous découvrons dans ce récit une violence inouïe, une barbarie innommable. Si cette violence en elle-même peut ne pas surprendre dans le contexte colonial, et si des pratiques similaires ont été répertoriées ailleurs, perpétrées par d'autres Européens, deux particularités la rendent cependant inquiétante : la multiplicité de liens de paternité qui, au sens littéral et générationnel, unissent cette colonisation au nazisme, en faisant de la première une véritable répétition générale de plusieurs aspects du second, et d'autre part le refoulement complet de ses exactions dans la conscience collective, se trouvant sans doute estompées par le nazisme justement.
Paternité : le premier gouverneur de la colonie africaine se nomme Dr. Heinrich Göring ; plus tard il enfantera le célèbre Hermann, après avoir attiré des colons allemands par la fausse nouvelle d'une mine d'or.
La foire coloniale de Berlin de 1896, où sont conviés et presque contraints de se déguiser « en sauvages » deux fils de dignitaires des Hereros et Namas, les principales ethnies autochtones, habituellement vêtus de redingote et chemises amidonnées, lecteurs de la presse européenne et sud-africaine en langue anglaise, connaisseurs des Evangiles et baptisés de noms bibliques depuis les quatre siècles de christianisation de leurs peuples, sera le déclencheur des théories pseudo-génétiques d'un certain Dr. Eugen Fischer, l'inspirateur du volet raciste du nazisme. Ce dernier se rendra d'ailleurs en Afrique, et sera approvisionné en cranes d'Africains trucidés, par centaines, par un certain Ralph Zürn, génocidaire et profanateur « professionnel » de sépultures. Ce dernier sera le père de l'artiste peintre et poétesse surréaliste Unica Zürn, compagne de Hans Bellmer, belle-fille d'un haut dignitaire nazi, violée par son propre frère, qui terminera son existence douloureuse par la schizophrénie et le suicide. [C'est une auteure que j'aime beaucoup : elle donne aussi un éclairage extraordinaire sur la maladie mentale et les perversions sexuelles].
La stratégie par laquelle le général Lothard von Trotha terrassera les Hereros en août 1904, en les contraignant à une longue marche dans le désert après avoir empoisonné les puits des oasis, et le successif ordre d'extermination (« Vernichtungbefehl ») datant d'octobre de la même année, préfigurent, par leur ressemblance troublante, respectivement le génocide arménien et la « solution finale » (« Endlösung der Judenfrage ») ; enfin l'organisation du camp de Shark Island constitue l'archétype parfait d'Auschwitz et autres Treblinka. Si l'on accepte pour les massacres de 1915 l'appellation de génocide, force est de noter que le premier du genre en ce siècle fut perpétré contre les Hereros.

En 1917, pour des raisons évidentes de propagande de guerre, le nouveau gouverneur britannique du Sud-Ouest africain diligente un jeune major irlandais, tel Thomas O'Reilly, juge de formation, intègre de caractère, et antiesclavagiste par conviction, d'une enquête sur les atrocités commises par l'administration précédente. Avec beaucoup de zèle, il recueillera quelque soixante-dix témoignages de rescapés de Shark Island entre autres qui feront la matière d'un Blue Book. Cependant, le major disparaîtra assez mystérieusement dès 1919 et en 1926, sous chantage allemand, tous les exemplaires de son rapport par ailleurs resté assez confidentiel seront retirés de la circulation en vue de destruction. Cet ouvrage est né de la découverte fortuite d'un exemplaire probablement unique dans une bibliothèque universitaire de Pretoria. Des extraits d'une dizaine de pages en sont reproduits. L'Allemagne refuse des excuses officielles pour les exactions, la famille von Trotha est partagée dans l'expression de sa contrition ; en 2011, 20 crânes de Hereros et de Namas ont été restitués par l'hôpital de la Charité de Berlin en son nom propre et sans représentant du gouvernement, et jusqu'en 2013 trônait à Windhoek la statue équestre « qui […] depuis 1912 honorait les soldats et civils allemands morts durant la guerre qui les opposa aux Hereros » (p. 184) : elle a été déplacée en catimini la nuit de Noël.

La leçon que je tire de cette lecture est que, encore et toujours, il faut se garder de considérer le nazisme comme une aberration de l'Histoire, comme une folie qui, du fait de son incongruité, serait unique et à jamais irrévocable. Si le colonisateur, autant que et de concert avec le colonisé, ne fait pas oeuvre de décolonisation de son esprit, des dangers variés et inattendus le guettent ; et c'est loin d'être chose faite chez nous aujourd'hui...
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Le "blue book" n'est pas un roman , c'est l'histoire d'un génocide oublié , voire caché à la face du monde .
Car il s'en est fallu de peu que ce massacre disparaisse de la mémoire collective et de l'Histoire du monde . L'Allemagne vaincue de la première guerre mondiale a menacé de faire paraître son "white book" qui relatait les exactions des Alliés dans leurs colonies , et a obtenu que tous les exemplaires de ce rapport accablant pour l'armée allemande soient détruits .
Heureusement , Elise Fontenaille-N'Diaye a réussi à obtenir ce document une nuit dans une bibliothèque universitaire de Pretoria .
Ce massacre programmé a été une répétition générale de ce que l'Allemagne allait infliger à toute l'Europe dans ses camps de la mort , remplacez Auschwitz par Shark Island , et le peuple juif par les Hereros et les Namas , qui étaient Noirs (des "kaffirs" pour les Allemands ) , donc indignes de vivre et d'occuper cette terre qui leur appartenait , l'actuelle Namibie .
Le petit juge anglais qui a rédigé le "Blue Book" , Thomas O'Reilly , a recueilli
les témoignages des rares survivants (sur 80000 Hereros , seuls 15000 ont survécu et leur culture a été anéantie ) . Des témoignages à faire dresser les cheveux sur la tête , que le juge n'a pas pu tous retranscrire , tellement l'horreur était insoutenable .
Thomas O'Reilly est décédé en 1919 , soit-disant de la grippe espagnole , sa mort arrangeait trop de monde , le témoin principal disparu , cela faisait les affaires de l'Allemagne et de l'Empire britannique .
Ces faits se sont déroulés essentiellement en 1904 , dix ans avant la Grande Guerre , et 30 ans avant les camps de la mort .
La tristesse et l'horreur que ces faits soulèvent , ne peuvent en rester là . Les criminels sont morts dans leur lit , mais nous devons aux Hereros et aux Namas de faire savoir ce qui s'est passé , qu'ils ne soient pas morts pour rien .
L'indignation et la colère ne mènent nulle part , il faut avant tout assurer la mémoire de ce génocide et de ces êtres humains disparus de l'histoire de l'Afrique sans sépulture .


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Bouleversant ce livre ! Pour qui aime L Histoire, c'est tout simplement passionnant de lire ce récit documenté avec justesse et précision.

Dans ce livre Blue book, Élise Fontenaille-N'Diaye nous raconte ce passé bien méconnu du rôle de l'Allemagne dans le sud-ouest Africain, celle qui se nomme aujourd'hui la Namibie, devenue dès les années 1884 une colonie allemande et qui fut le théâtre d'un véritable génocide contre les Héréros et les Namas. La volonté allemande étant d'anéantir une race totalement.

L'auteure, à travers ce dossier-récit, raconte cette extermination. Des hommes d'une cruauté sans nom comme Goering, le premier gouverneur, Lothar von Trotha, dit le requin, l'exterminateur, accompagné de Franz von Epp, qui fut des années plus tard, donc l'un des mentors du jeune Adolphe Hitler, ont mis à l'agonie tout un peuple, d'abord dans le désert du Kalahari puis en créant les premiers camps de concentration. Voilà comment tout à commencé. C'est là aussi que viendra enquêter Eugen Fischer, l'un des plus brillant étudiant d'Alfred Ploetz, fondateur de l'eugénisme en Allemagne. Il exposera à son retour au pays, combien le métissage mène la race blanche à sa perte et donc il faut l'empêcher par tous les moyens, y compris la stérilisation forcée des populations concernées. Ce qui va totalement influencer la pensée d'Hitler.

Élise Fontenaille-N'Diaye, dans ce récit, qui devrait être étudié dans toutes les écoles, redonne vie aux victimes et bourreaux .. les prés nazis ont fait leur premières armes là bas .... et Elle raconte aussi comment cette histoire tragique a été enterrée.
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Blue Book est le récit d'un génocide méconnu, celui des Hereros et des Namas qui s'est déroulé au début des années 1900. À travers ces événements monstrueux, on commence à entrevoir l'idéologie raciale des allemands et ses conséquences.

Ces deux peuples d'Afrique du Sud (région aujourd'hui appelée Namibie) vont subir des traitements inhumains et vont se faire massacrer sans distinction de sexe et d'âge. Je pense notamment au passage où l'auteur explique comment des allemands jouaient avec un bébé de neuf mois comme d'un ballon pour ensuite le pourfendre à la baïonnette.

La dernière partie du roman est consacrée à des témoignages recueillis par l'auteur original du compte-rendu Blue Book. Cette partie a été particulièrement dure à lire notamment à cause de la dureté des conditions de vie de ces personnes.

Je pense qu'il est important de lire ce livre pour que ces événements ne restent pas méconnus. Elise Fontenaille a su faire un prodigieux travail de documentation et de recherche iconographique ce qui rend le tout vraiment intéressant à lire.
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critiques presse (2)
LeMonde
27 mars 2015
Ce récit engagé, vivant et sensible a cependant le mérite de réveiller et de mettre à la portée du plus grand nombre une mémoire longtemps restée dans les replis de l’Histoire.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
19 janvier 2015
A partir de correspondances, de journaux et de photographies, l’auteur dresse le récit chronologique des événements qui entourent le génocide, de 1884 à 1926. Son livre n’est pourtant ni un essai d’historien ni une enquête journalistique, mais une œuvre d’écrivain.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
On n'a jamais su trop quoi en faire, de cette île inhospitalière, autour de laquelle de grands requins rôdent inlassablement. Elle est si peu faite pour l'homme qu'on l'a appelée Shark Island... C'est là qu'on parquera les derniers Hereros!
Les prisonnières et leurs enfants; les hommes sont presque tous morts. Les femmes, il en reste quelques milliers; il faut bien s'en occuper, et aussi des petits; sans cela ils vont grandir, et vouloir se venger un jour.
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Cette même année 1885 où, en France, Jules Ferry parle de races inférieures et de races supérieures, ce qui suscite l'ire mordante de Clémenceau, qui rétorque le lendemain devant l'Assemblée:
"Pour ma part, j'en rabats singulièrement depuis que j'ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande parce que le Français est une race inférieure à l'Allemand. Depuis ce temps, je l'avoue, j'y regarde à deux fois avant de me retourner vers un homme et une civilisation, et de prononcer: homme ou civilisation inférieurs".
Mais Clémenceau est bien un des rares à contester cette hiérarchie des races, qui prévaut presque partout et justifie tant d'atrocités de par le monde.
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Là, nous avons vu une vieille femme herero de cinquante ou soixante ans qui creusait le sol à la recherche d'oignons sauvages. Von Trotha était là. Un soldat nommé Koenig a alors sauté de son cheval, il a sorti son pistolet et s'est avancé vers la femme. Il lui a dit : "Je vais te tuer", et elle a répondu "Merci". Il lui a alors collé son arme sur le front et a pressé la détente.
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Lothar Von Trotha s'est déjà illustré en Chine,en réprimant avec une cruauté sanguinaire la révolte des Boxers en 1900, à la demande du kaiser.
Déjà, ce même scénario vengeur : quelques dizaines d'allemands tués et, en représailles, un déluge d acier et de feu s' abat sur des milliers de civils chinois, villageois ou paysans. Femmes, enfants, bébés à la mamelle, vieillards...
On achève les blessés par le feu ou la baïonnette, on empale les nouveau-nés, les femmes on les éviscère, on éventre les fillettes au couteau, on étripe les adolescents à la chaîne.
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« Les universités allemandes étant très demandeuses de crânes nègres pour leurs études, on a trouvé un travail autre que la pose de rails pour les prisonnières de Shark Island et de Swakopmund : une fois que l’on a pendu les hommes, on leur tranche la tête, on la confie aux captives, à charge pour elles de les faire bouillir, d’en extraire les yeux, la langue et le cerveau puis de ­racler la chair jusqu’à l’os avec des tessons de bouteilles – celles que les soldats ont vidées la veille. La plupart du temps, ces crânes sont ceux de leurs proches, de leurs frères, de leurs fils, de leurs pères, de leurs cousins. Shark Island devient l’île des mortes-vivantes. »
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