Une futile audace

Rangé parmi les beaux livres de ma bibliothèque car illustré par de remarquables photographies, ce catalogue d'art est aussi d'une très grande poésie. Il nous parle de l'homme, de la nature, de l'univers et du temps qui passe; des sujets très classiques mais traités ici d'une manière audacieuse. Un homme s'immerge dans une nature exubérante, belle et capricieuse, en perpétuel mouvement. Il y fragmente, répare, recompose des pierres. Ce geste ne laisse pas le spectateur indifférent. C'est à la fois une intrusion incongrue dans une nature indemne et un soin amoureux pour ces pierres qui veulent bien se laisser recoudre avec du câble d'acier. Un geste somme toute bien futile au regard de l'impermanence des éléments et de l'inquiétante immensité de l'univers qui nous entoure. Car ces coutures laissées ainsi dans la nature finissent tôt ou tard par disparaître; "reste cependant l'élégance du geste pour tenter de donner un peu de panache et de noblesse à l'inéluctable disparition de toute chose".
Alors, violence de l'impact de l'homme sur la nature, quel qu'il soit, ou caresse d'un amant éperdu?
Publiée à l'occasion d'une exposition au Musée National de Préhistoire, cette monographie d'un artiste de land-art est une collaboration avec un archéo-antropologue. Il en résulte un cheminement littéraire entre arts plastiques, connaissances archéologiques et digressions philosophiques, où l'esthétique associée à la poésie des textes nous entraine au delà de notre considération habituelle de la condition humaine.
Une oeuvre et un ouvrage qui m'ont réellement marquée avec une belle leçon d'humilité à la clef.