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Monsieur Lecoq tome 0 sur 3
EAN : 9782702497531
763 pages
Le Masque (18/06/2003)
3.74/5   53 notes
Résumé :
Un crime odieux a été commis dans un infâme bouge parisien baptisé La Poivrière. Après Une longue filature, l'inspecteur Lecoq arrête un saltimbanque prétendant s'appeler Mai. Le policier se demande alors si ce curieux individu ne pourrait être le duc de Sairmeuse, mêlé à une ancienne et ténébreuse affaire.
L'enquête nous entraîne à rebrousse-temps vers le théâtre d'un complot entre deux familles et aux sources d'une énigme passionnante qui s'impose par l'an... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Les éditions Voolume sortent de l'oubli des vieux classiques de la littérature policière et m'ont permis une fois de plus de faire une très belle rencontre, j'apprécie beaucoup cette démarche à l'heure où les nouveautés forment un embouteillage dans ce domaine. Ce roman est lu par Loïc Richard, j'avais déjà eu l'occasion d'écouter ce brillant comédien dans d'autres livres audio et une fois de plus j'ai été épatée par sa faculté de modifier sa voix selon le personnage interprété, qu'il s'agisse du héros, de la veuve Chuppin ou de tous les autres personnages du roman. Il sait vraiment nous immerger complètement dans cette enquête qui se passe durant le Second Empire, un agréable voyage dans le temps. Emile Gaboriau est le père du roman policier français, son personnage a inspiré ceux de Sherlock Holmes, Arsène Lupin et Maigret, malheureusement, contrairement au détective anglais et au gentleman cambrioleur, Lecoq a sombré dans l'oubli, espérons que les Editions Voolume lui donnent une nouvelle jeunesse, car c'est vraiment un policier à découvrir.

Une équipe de la sureté parisienne fait sa ronde de nuit dans les quartiers malfamés près des barrières quand ils entendent des hurlements venus de la souricière, un bouge du coin, ils s'y précipitent. Lecoq regarde par le trou du volet avant que son chef n'enfonce la porte. Ils y découvrent deux cadavres, un mourant et un homme retranché derrière une table, le pistolet à la main, qui se prétend innocent. le mourant incrimine un certain Lachner avant de rendre son dernier souffle. le chef Gévrol décrète que l'affaire est résolue et il arrête le seul survivant ainsi que la tenancière. Mais Lecoq est persuadé que l'affaire est bien moins simple qu'il n'y paraît, il doit garder l'auberge avec un collègue en attendant les autorités judiciaires le lendemain. Il en profite pour lancer sa grande enquête avec son vieux collègue le père Absinthe, il comprend que le tueur avait un complice et que deux femmes, sans doute de la bonne société, se sont enfuies juste avant leur arrivée. le chef se moque de lui mais sa théorie séduit le commissaire qui le laisse enquêter sous la direction d'un juge d'instruction. Leccoq est persuadé que le tueur n'est pas ce qu'il prétend, à savoir un saltimbanque nommé Mai qui s'est trouvé à la souricière par hasard après s'être perdu dans le quartier, mais qu'il appartient aux plus hautes sphères de la société. Il s'engage donc un bras de fer entre les deux hommes. Lecoq finira par le démasquer, mais on découvrira sans doute ses motivations dans le tome 2 que je suis impatiente de découvrir.

Gaboriau nous plonge dans les tout premiers balbutiements de la police moderne, Lecoq suit les empreintes des fugitifs dans la neige, arrive à remonter leur piste, interroge les témoins, mais il y a peu de procédés scientifiques encore. Il fait toutefois un moulage des traces, se déguise aussi pour filer son suspect. Mais il s'agit surtout de déductions et de logique. La galerie de personnages est très élaborée et convaincante, c'est une plongée dans le Paris d'il y a plus d'un siècle et demi. On y découvre les bouges infâmes, les femmes violentées (malheureusement peu de changement sur ce plan), un fossé énorme entre les riches et les pauvres et pour finir le palais d'un duc, tout cela en suivant une procédure judiciaire très élaborée. Outre le charme de cette enquête tranquille, ce roman a un grand intérêt sur le plan historique. Malgré son ancienneté ce livre est plein de rebondissements et on ne s'y ennuie pas du tout, Lecoq doit affronter d'innombrables obstacles, dont son obstination parvient toujours à triompher. le père Absinthe est aussi un sympathique vieux flic, plein de bonne volonté, même si son penchant pour l'alcool ne manque pas de poser quelques problèmes à son jeune collègue.

Un superbe polar que je vous recommande chaleureusement, un grand merci à Netgalley et aux Editions Voolume, dont j'apprécie toutes les publications.

#monsieurlecoq1 #NetGalleyFrance !
Lien : https://patpolar48361071.wor..
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Un voyage dans le temps pour découvrir cet ancêtre des polars, un récit qui met en scène un jeune enquêteur qui relève des indices, un véritable précurseur de la police scientifique.

Dans ce roman publié pour la première fois en 1869, le héros est aussi un détective qui ne dort plus, obsédé par la piste à suivre. C'est fascinant de constater que ces traits de personnalité de ce Lecoq sont tout à fait semblables à ceux des héros de nos polars modernes. Il faut ajouter que les oeuvres de Gaboriau ont même inspiré sir Conan Doyle pour la création de son Sherlock Holmes !

La deuxième partie est fort différente, elle place le lecteur dans un contexte historique et raconte l'origine du meurtre à travers des troubles sociaux du dix-neuvième siècle, va-et-vient d'insurrections et de répressions. Cette section m'a un peu déroutée, car venant de l'autre côté de l'Atlantique, je n'avais jamais réalisé à quel point l'histoire de France comporte des moments où les Français se battent contre un ennemi si proche : d'autres Français…

Finalement, même si elle date d'un autre siècle, la prose de Gaboriau n'a rien de vieillot. Malgré une partie historique un peut longuette, l 'intrigue est pleine de rebondissements et réjouira les amateurs de polars d'aujourd'hui comme elle a séduit les lecteurs d'autrefois.
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En 1869, devançant d'une petite vingtaine d'années le célèbre détective britannique sherlock Holmes, monsieur Lecoq aime à penser que découvrir le coupable d'un crime est un jeu d'enfant.
Deux cadavres dès la première page, un troisième dans la suivante qui sont, bien entendu, des morts violentes : pistolet puis poignard et poison en sont les instruments.
Il y a dans ce livre de quoi contenter tout amateur de roman policier.
Emile Gaboriau, son auteur, est généralement considéré comme le père de ce genre littéraire. Il eût, avant de devenir à Paris le secrétaire de Paul Féval et de découvrir le journalisme, une vie mouvementée qui le mena jusqu'en Afrique dans un régiment de hussards.
Quel est donc ce monsieur Lecoq ? Il aurait pu être le grand-père d'Arsène Lupin, mettant au service de la police la même ingéniosité et le même dynamisme.
C'est un policier moderne et atypique qui ne cesse de prendre des risques et de compromettre à tout instant sa carrière, n'hésitant pas à faire évader son coupable pour mieux le confondre et se débarrassant par le ridicule des
embûches tendues par la jalousie et l'incompréhension de ses collègues.
Lecoq est un vrai personnage. Il est jeune, fougueux, brillant, ambitieux. On pressent, qu'en des jours lointains, il deviendra préfet de police.
Jeune homme, il gagnait sa vie comme secrétaire d'un astronome et imaginait, durant ses loisirs, des crimes parfaits, des meurtres impunis et des cambriolages impeccables. A l'aveu des fâcheuses rêveries du jeune homme, le vieux sage épouvanté lui dit : "Devenez policier, sinon vous serez bandit..."
Ainsi monsieur Lecoq entra dans la police....et le lecteur d'aujourd'hui peut le suivre, grâce au talent d' Emile Gaboriau, dans une série d'enquêtes où l'énigme n'est qu'un prétexte. L'action, pleine de rebondissements se déroule sous la Restauration. L'Empire est mort mais les excès de la nouvelle monarchie vont contribuer à créer la légende "napoléonienne".
Tout aspire, ici, au plaisir du lecteur, dans ces nouveaux mystères de Paris....
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Émile Gaboriau est un écrivain du XIXème siècle considéré comme le père du roman policier français. Sir Arthur Conan Doyle lui-même le citait en exemple !
Il fut l'un des premiers à mettre en scène des policiers et des magistrats dans de longues intrigues complexes inspirées des sujets favoris des romans-feuilletons très en vogue à l'époque…

Grâce aux éditions VOolume, je découvre le premier tome de Monsieur Lecocq, intitulé le Meurtre… Un découpage qui reflète l'édition originale séparée en deux partie, « L'Enquête » et « L'Honneur du nom ». Je m'interroge cependant sur le non-respect du titre dans cette réédition : affaire à suivre pour la suite de l'histoire !

Pour créer le personnage récurrent de Lecocq, Émile Gaboriau s'est inspiré du chef de la sûreté François Vidocq.
Ici, il fait ses premiers pas d'enquêteur hors-pair, à la démarche observatrice et déductive, avec le rôle-titre. Jusque-là, il apparaissait comme un personnage certes prometteur, mais toujours secondaire… En effet, dans L'Affaire Lerouge, il n'était qu'un comparse et n'avait qu'un petit rôle dans Les Esclaves de Paris. En revanche, il aura la vedette dans le Crime d'Orcival et le Dossier 113.

Une scène de crime spectaculaire : par une sombre nuit d'hiver, dans un cabaret de triste réputation, des policiers qui faisaient leur ronde découvrent trois cadavres tandis qu'un homme à l'air féroce et déterminé les tient en joue, prêt à s'enfuir. C'est grâce au seul sang-froid d'un jeune agent, Lecoq, que l'on parvient à maitriser et arrêter Mai, celui que tout accuse… Mais est-il réellement coupable ? Quel secret protège-t-il ?
Un héros attachant : Lecoq est un jeune homme fougueux, brillant et ambitieux qui vient juste d'entrer dans la police ; il espère imposer son propre système d'enquête, basé sur l'analyse des faits et la déduction. Il comprend vite que cette affaire est loin d'être un simple règlement de comptes entre truands et demande à être chargé du dossier.

L'écriture est alerte, enlevée… le récit et ses imbrications sont captivants même si certaines péripéties coulent de source devant le manque de réactivité de certains policiers, par exemple. Les lecteurs découvrent les coulisses de la justice avec des descriptions convaincantes des geôles parisiennes et des procédures.
Personnellement, j'aime beaucoup l'ambiance, les études de moeurs subtilement glissées dans la narration, l'atmosphère de rivalité et/ou de coopération entre les enquêteurs et les magistrats sur fond d'ambition ou d'arrivisme ou encore de solidarité entre collègues et de corporatisme. En ce qui concerne la tonalité du roman policier proprement dit, tout est profondément logique et pragmatique : tout s'explique par la raison et aussi parfois, par la psychologie.
Les coups de théâtre et les rebondissements se succèdent jusqu'au terme de ce premier livre où l'on ne s'ennuie jamais… Les filatures et les courses-poursuites s'enchaînent, les protagonistes se déguisent et se griment tandis que les lecteurs, à l'instar de Lecoq, échafaudent des théories…
Il faut savoir cependant que c'est dans le deuxième opus seulement que toute la lumière sera faite sur cette énigme.

Toujours grâce aux éditions VOolume, je découvre le deuxième tome de Monsieur Lecoq d'Émile Gaboriau, intitulé L'Honneur du nom…

Si le premier volet racontait une véritable enquête policière avec toute une série de péripéties tenant les lecteurs en haleine, où les coups de théâtre et les rebondissements se succédaient avec des filatures, des courses poursuites, des déguisements, etc. et où l'inspecteur Lecoq échafaudait toutes sortes de théories sur les tenants et aboutissants de la scène de crime spectaculaire du début de cette histoire, ce deuxième opus rompt totalement la trame policière initialeet nous plonge dans une complexe histoire familiale, sur fond de vérité historique.

J'ai beaucoup apprécié le contexte social et politique mis en lumière autour de la situation des royalistes nobles exilés sous la révolution et l'empire dont les biens avaient été acquis, au titre de biens nationaux, par des roturiers…
En effet, Émile Gaboriau nous plonge dans l'intimité de deux familles, les de Sairmeuse et les Lacheneur et son récit nous fait remonter aux sources de haines tenaces nées dans le contexte tumultueux de la Restauration, des haines tellement profondes qu'elles auraient conduit, une génération plus tard, l'un des membres les plus éminents de la société à risquer sa position pour commettre un terrible meurtre.
Ayant audio-lu le premier tome, il y a plus de six mois, j'ai eu un peu de mal à raccrocher les évènements décrits au personnage mystérieux de Mai, quitté à la fin du premier tome. Je me suis laissé prendre par L'Honneur du nom comme s'il s'agissait d'une histoire à part entière, une romance plutôt bien écrite et contextualisée malgré quelques longueurs.

Les dernières pages, qui relient cette très longue parenthèse à l'enquête initiale m'ont paru un peu trop rapidement plaquées…
Je ne suis donc pas convaincue par le découpage narratif choisi par Émile Gaboriau…

La version audio de ce roman, lue par Loïc Richard, est agréable à écouter. Sans doute me suis-je habituée à la voix et au débit de ce narrateur à qui je reprochais parfois d'en faire un peu trop ou d'accentuer le côté suranné des romans anciens.

Il est bon de s'aventurer encore de nos jours dans les romans policiers du XIXème siècle. Émile Gaboriau est un nom à connaître en tant que précurseur de la fiction policière moderne.

Lien : https://www.facebook.com/pir..
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Situation de départ : lors d'une ronde à la barrière d'Italie, lieu particulièrement mal famé de Paris, des policiers sont attirés par des cris dans un bouge. Là deux hommes sont étendus morts, un troisième ne tarde pas à les rejoindre. Une femme, la cabaretière se cache la tête sous son tablier, un autre homme en travers de la porte d'une petite salle qui offre une issue de secours pointe son pistolet sur les policiers et prononce une phrase étonnante : « Perdu ! C'est les Prussiens qui arrivent. »
Pour l'inspecteur Gévrol la chose est simple, c'est un règlement de compte entre coquins.
Mais un jeune policier, intrigué par la phrase, ne croit pas les choses si évidentes. Ce jeune policier, c'est Lecoq, qui deviendra monsieur Lecoq.
Pour comprendre cette scène, il faudra se transporter en province et remonter jusqu'à certains évènements de la Révolution et à leurs conséquences au retour des émigrés. Mais il n'est pas si facile de faire le lien entre quelques personnages de cette époque et de celle des meurtres.

Il y a en quelque sorte deux livres en un seul : le roman policier et cette longue analepse qui ressemble plutôt à un roman historique. Gaboriau est surtout apprécié pour la qualité de ses enquêtes mais je n'ai pas trouvé que la partie historique soit à dédaigner.
Les descriptions de personnages n'échappent pas aux clichés. Peut-être est-ce d'ailleurs volontaire pour ne pas égarer les lecteurs de ce nouveau genre le roman judiciaire. Et cela a été à mes yeux un charme de plus.
Le Masque, éditeur de la collection Labyrinthe qui publie des romans historiques à suspense a eu raison de ressortir ceux de monsieur Gaboriau.


Lu dans le cadre du challenge ABC 2014 - 2015
Et dans le cadre du challenge Pavés
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Tout en parlant, elle attachait des regards enflammés à une mauvaise photographie suspendue au mur et qui représentait un affreux garnement à l’œil louche, à la bouche grimaçante à peine ombragée d’une légère moustache, portant des mèches de cheveux bien collées aux tempes. C’était là Polyte.
[…..]
C’était bien, de la tête aux pieds, de la casquette de toile cirée aux pantoufles de tapisserie à dessins voyants, c’était bien l’homme du portrait que la pauvre Toinon-la-Vertu enveloppait de ses regards passionnés.
Seulement, le portrait était flatté.
La photographie n’avait pu fixer l’expression de basse astuce de ce visage de coquin, l’impudence du sourire, la lâche férocité de l’œil fuyant. Elle n’avait pu rendre ni le teint flétri et plombé, ni le clignotement inquiétant des paupières, ni les lèvres minces, pincées sur des dents courtes et aiguës.
Du moins devait-il lui être difficile de surprendre son monde.
Le voir, c’était le juger à sa valeur.
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Le 20 février 18..., un dimanche, qui se trouvait être le dimanche gras, sur les onze heures du soir, une ronde d'agents du service de la sûreté sortait du poste de police de l'ancienne barrière d'Italie.
La mission de cette ronde était d'explorer ce vaste quartier qui s'étend de la route de Fontainebleau à la Seine, depuis les boulevards extérieurs jusqu'aux fortifications.
Ces parages déserts avaient alors la fâcheuse réputation qu'ont aujourd'hui les carrières d'Amérique.
S'y aventurer de nuit était réputé si dangereux que les soldats des forts venus à Paris avec la permission du spectacle, avaient l'ordre de s'attendre à la barrière et de ne rentrer que par groupe de trois ou quatre.
C'est que les terrains vagues, encore nombreux, devenaient, passé minuit, le domaine de cette tourbe de misérables sans aveu et sans asile, qui redoutent jusqu'aux formalités sommaires des plus infimes garnis....
(extrait du premier chapitre du volume paru à "La bibliothèque mondiale" en 1954)
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C’est là précisément ce que se disait M. Segmuller. Mais il n’était ni surpris ni ébranlé par tant de présence d’esprit.

— Résumons-nous, dit-il. Persistez-vous, prévenu, dans vos affirmations ?

— Oui, monsieur.

— Eh bien !… je suis forcé de vous le dire, vous mentez.

Les lèvres de l’homme tremblèrent très-visiblement, et il balbutia :

— Que ma première bouchée de pain m’étrangle si j’ai dit un seul mensonge.

— Un seul !… attendez.

Le juge sortit de son tiroir les clichés coulés par Lecoq et les présenta au meurtrier.

— Vous m’avez déclaré, poursuivit-il, que les deux femmes avaient la taille d’un cuirassier… Or, voici les empreintes laissées par ces femmes si grandes. Elles étaient « noires comme des taupes, » prétendez-vous ; un témoin vous dira que l’une d’elles, petite et mignonne, a la voix douce et est merveilleusement blonde.

Il chercha les yeux de l’homme, les trouva et lentement ajouta :

— Et ce témoin est le cocher dont les deux fugitives ont pris la voiture rue du Chevaleret…

Cette phrase fut pour le prévenu comme un coup d’assommoir ; il pâlit, chancela et fut contraint, pour ne pas tomber, de s’appuyer au mur.

— Ah !… vous m’avez dit la vérité !… poursuivit le juge impitoyable, qu’est-ce alors que cet homme qui vous attendait pendant que vous étiez à la Poivrière ? Qu’est-ce que ce complice qui, après votre arrestation, a osé pénétrer dans le cabaret pour y reprendre quelque pièce compromettante, une lettre, sans doute, qu’il savait être dans la poche du tablier de la veuve Chupin ? Qu’est-ce que cet ami si dévoué et si hardi, qui a su feindre l’ivresse, à ce point que les sergents de ville trompés l’ont enfermé avec vous ? Soutiendrez-vous que vous n’avez pas concerté avec lui votre système de défense ? Affirmez-vous qu’il ne s’est pas assuré ensuite le concours de la Chupin ?…

Mais déjà, grâce à un effort surhumain, l’homme était redevenu maître de soi.

— Tout ça, fit-il d’une voix rauque, est une invention de la police !…

Si fidèle qu’on suppose le procès-verbal d’un interrogatoire, il n’en rend pas plus l’exacte physionomie que des cendres froides ne donnent la sensation d’un feu clair.

On peut noter les moindres paroles ; on ne saurait traduire le mouvement de la passion, l’expression du visage, les réticences calculées, le geste, l’intonation, les regards qui se croisent, chargés de soupçons ou de haine, enfin l’angoisse émouvante et terrible d’une lutte mortelle.

Pendant que le prévenu se débattait sous sa parole vibrante, le juge d’instruction tressaillait de joie.

— Il faiblit, pensait-il, je le sens, il s’abandonne, il est à moi !…
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Mais déjà, grâce à un effort surhumain, l’homme était redevenu maître de soi.
– Tout ça, fit-il d’une voix rauque, est une invention de la police !…
Si fidèle qu’on suppose le procès-verbal d’un interrogatoire, il n’en rend pas plus l’exacte physionomie que des cendres froides ne donnent la sensation d’un feu clair.
On peut noter les moindres paroles ; on ne saurait traduire le mouvement de la passion, l’expression du visage, les réticences calculées, le geste, l’intonation, les regards qui se croisent, chargés de soupçons ou de haine, enfin l’angoisse émouvante et terrible d’une lutte mortelle.
Pendant que le prévenu se débattait sous sa parole vibrante, le juge d’instruction tressaillait de joie.
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– Eh bien !… vieux, cria Gévrol, avez-vous à nous raconter un bon gros mélodrame, bien noir et bien mystérieux ?
– Je n’ai rien à raconter, moi, répondit le bonhomme, sans retirer la pipe soudée à ses lèvres, je suis trop bête, c’est connu… Mais monsieur Lecoq pourrait bien vous apprendre quelque chose sur quoi vous n’avez pas compté.
Ce titre : Monsieur, dont le vieil agent de la sûreté gratifiait son camarade, déplut si fort à Gévrol qu’il ne voulut pas comprendre.
– Qui ça… fit-il, de qui parles-tu ?
– De mon collègue, parbleu !… qui est en train de finir son rapport, de monsieur Lecoq, enfin.
Sans malice, assurément, le bonhomme venait d’être le parrain du jeune policier. De ce jour, pour ses ennemis aussi bien que pour ses amis, il devint et resta Monsieur Lecoq. Monsieur, en toutes lettres.
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