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Didier Bazy (Préfacier, etc.)
EAN : 9782266152181
128 pages
Pocket (23/06/2005)
  Existe en édition audio
3.69/5   4612 notes
Résumé :
Rodrigue et Chimène sont sur le point de se marier mais une grave querelle oppose leurs pères : à la suite d'une rivalité, le Comte, père de Chimène, gifle don Diègue, père de Rodrigue. L'affront ne peut être réparé que par la mort du Comte, mais don Diègue, trop vieux, remet son épée à Rodrigue pour venger son honneur. Rodrigue doit alors faire face à un douloureux dilemme : perdre Chimène ou son honneur. Que fera Rodrigue ?
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sur 4612 notes
Aujourd'hui, je prends le risque — et ce n'est pas si fréquent —, je prends le risque, disais-je, de m'en venir vous parler d'une toute fraîche nouveauté, d'un colis posé encore tout fumant sur les étals et sur lequel personne, à ma connaissance, n'a encore levé le voile. C'est courageux, vous noterez…

C'est encore un peu tôt puisque nul n'en a, à ce jour, beaucoup entendu parler, mais je me hasarde à prédire à cette tragi-comédie en cinq actes un petit succès temporaire, une gloire éphémère voire une mode provisoire, le temps de quelques soirs. Il se pourrait même trouver des gens, une ou deux par ci par là, pour venir la voir et l'applaudir hors de nos frontières, mais là je m'avance sans doute un peu trop.

Trêve de plaisanterie, c'est sérieux la critique, passons vite à la pièce. Car s'il est un chef-d'oeuvre en ce monde, si ce mot n'est pas totalement vide de sens, s'il recouvre bien une réalité discernable, à quelle oeuvre mieux qu'à celle-ci s'appliquerait-il davantage ?

Le Cid, le fantastique Cid. Tu es mon élu, Cid, je reste collée à toi comme à une glu, Cid, je ne suis plus moi depuis que je t'ai lu, Cid, à chacun de mes pas tu me suis, Cid. Oui, le Cid ou la quintessence de la traduction. Car on peut disserter sans limite sur les mille et une façons de traduire ou de ne pas traduire telle ou telle oeuvre du domaine étranger. En l'occurrence ici, comment traduire en français une pièce en vers du siècle d'or espagnol ?

Et voilà qu'intervient le génie de Pierre Corneille car, mieux que traduire, il y a transcrire. Et c'est ce qu'a réussi avec succès Molière avec son Dom Juan, transcrit de Tirso de Molina ; Jean Racine avec ses Plaideurs, transcrit d'Aristophane ou, plus récemment, Antonin Artaud avec le Moine, transcrit de Lewis ou encore Les Possédés d'Albert Camus, transcrit de Dostoïevski.

À l'heure actuelle, les auteurs n'osent plus trop ; on veut des traductions qui collent parfaitement (comme si c'était possible !) à la matrice dont elles sont issues, et l'on est déçu, fatalement, car c'est une gageure ; alors on critique le traducteur ou l'on souligne l'incomparable valeur de l'original face à l'oeuvre traduite.

C'est une tendance actuelle mais qui évoluera peut-être, du moins l'espère-je. (C'est joli, n'est-ce pas, ce pied d'espère-je que je laisse pousser comme une mauvaise herbe au milieu de mes phrases, vous ne trouvez pas ?) On sait aussi qu'on a, depuis quelques années, quasiment laissé tomber la VF dans le cinéma ou les séries télévisées, alors même que c'était la VF de qualité qui pouvait transcender des films ou des séries pas nécessairement géniaux par ailleurs. (Je pense notamment à Starsky et Hutch, Amicalement Vôtre ou même Goldorak dont la VF est considérée comme très supérieure à la VO.)

Eh bien dans ce registre de la transcription, le maître incontesté, celui qui a laissé à jamais sa patte, c'est indéniablement le Cid de Corneille, transcrit de Guillén de Castro.

L'original, malheureusement et incompréhensiblement trop peu connu, était déjà très bon. Mais la transcription française de Pierre Corneille est un pur joyau, l'un des plus hauts degrés jamais atteints par un texte en français, une langue d'une beauté, d'une musique et d'un rythme à tomber en pâmoison. La seule chose d'ailleurs que j'aurais à lui reprocher, c'est justement de trop souvent omettre de préciser qu'elle est une transcription de l'espagnol et non une création originale depuis la page blanche.

Permettez-moi de revenir quelques instants sur les origines espagnoles de ce chef-d'oeuvre. Guillén de Castro y Bellvis écrit entre 1605 et 1615 Las Mocedades del Cid, littéralement La Jeunesse du Cid, une pièce à caractère autant historique que légendaire à propos du personnage réel de Rodrigo Díaz de Vivar. Celui-ci a réellement existé au XIème siècle et il est une figure importante du Moyen Âge espagnol, notamment de la Reconquista. Ce surnom de « cid », altération de l'arabe « seyid » et signifiant seigneur lui fut attribué par les Maures eux-mêmes suite à de nombreuses défaites qu'il leur infligea. Cette pièce était normalement suivie d'une seconde, intitulée Las Hazañas del Cid qu'on traduirait en français comme Les Exploits du Cid.

La première pièce de Guillén de Castro est particulièrement réussie et figure en bonne place dans cet ensemble que l'on nomme " le Siècle D'Or " espagnol et je comprends aisément qu'elle ait très favorablement impressionné l'ami Pierre Corneille, car j'avoue que moi-même, quand je l'ai lue, j'y ai pris grand plaisir. Même certaines figures de style du texte francophone, passées depuis lors à la postérité telle la fameuse litote : « Va, je ne te hais point. » ou des chiasmes savoureux sont eux aussi déjà présents dans le texte initial.

Donc, la tâche était difficile pour se hisser à la hauteur d'une telle dramaturgie, d'un tel texte de base. Mais c'est pourtant ce qui a dû galvaniser notre noir volatile normand car jamais je crois, il n'a atteint lui-même un tel niveau de perfection stylistique. On ne compte plus les vers ou les tirades qui ont désormais quasiment valeur de proverbes. Permettez-moi juste de vous en citer quelques uns :

Vers 434 : À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.

Vers 406 : La valeur n'attend point le nombre des années.

Vers 236 : Ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !

Vers 81 : L'amour est un tyran qui n'épargne personne.

Vers 393 : Qui ne craint point la mort ne craint point les menaces.

Vers 410 : Et pour leurs coups d'essai veulent des coups de maître.

Vers 963 : Va, je ne te hais point.

Vers 290 : Va, cours, vole, et nous venge.

Etc., etc., etc.

Maintenant examinons quelle en est l'intrigue. C'est l'archétype du choix dit " cornélien" mais qui en fait, comme je viens de vous le dire, n'a rien de Corneille mais fut livré tel quel par de Castro y Bellvis mais dont l'auteur a perçu la richesse et qu'il resservira, entre autre, dès sa tragédie suivante, Horace.

Don Rodrigue aime Chimène et Chimène aime Don Rodrigue. Jusqu'ici tout va bien. Don Rodrigue est le fils de l'illustre Don Diègue, un vaillant guerrier qui a beaucoup fait pour le roi de Castille, du temps de sa jeunesse mais qui commence à accuser quelque peu le poids des ans. Chimène quant à elle est la fille de l'actuel plus grand guerrier du royaume, un certain Comte de Gormas, comparable par sa fougue et sa vaillance au vénérable Don Diègue mais dans la force de l'âge, pour sa part.

Et ces deux hommes, d'accords sur le principe du mariage de leur progéniture respective, sont pourtant si bouffis d'orgueil l'un et l'autre que lorsque Don Diègue reçoit un privilège du roi, le Comte s'en offusque car il considère que c'est lui qui mérite cet honneur, un peu à la manière d'Ajax qui devint fou de voir les armes d'Achille attribuées à Ulysse plutôt qu'à lui après tout ce qu'il avait fait lors du siège de Troie.

Si bien que le Comte de Gormas donne une claque à Don Diègue, pour bien lui signifier son mépris. le vieux soldat aimerait bien dégainer son épée mais il n'a plus la force de soutenir un combat face au géant lion de Gormas. Son honneur est meurtri comme jamais, c'est la honte, c'est la mort que seul un juste châtiment peut laver.

C'est donc à son fils, Don Rodrigue qu'il demande de laver l'affront fait à son grand âge et à sa valeur d'autrefois. Rodrigue, la mort dans l'âme, car il sait ce qu'il lui en coûtera, accepte de défier l'ombrageux guerrier père de Chimène. Et contre toute attente, c'est lui qui terrasse le plus grand guerrier du roi de sorte que l'honneur de son père est rétabli mais, du même coup, il voit son amour lui filer entre les doigts.

En effet, comment Chimène pourrait-elle aimer et épouser celui qui a transpercé le coeur de son père ? Mais en même temps, se venger de lui, c'est tuer son véritable amour. Faut-il ajouter une mort atroce sur une mort horrible ? Dans un cas comme dans l'autre, elle y perd quelque chose, soit l'honneur, soit l'amour, soit les deux. Chimène sera-t-elle comme le Héron jamais satisfait De La Fontaine ? Que choisir ? (ou 60 millions de Lecteurs consommateurs)...

Outre la merveille de l'écriture, outre la valeur de l'intrigue, outre le cachet d'une époque, outre tout ce qui fait de cette pièce un vibrant chef-d'oeuvre, permettez-moi encore d'aborder deux autres points qui font écho au théâtre espagnol de ce fameux siècle d'or.

En effet, le Cid, c'est aussi une réflexion sur la tragédie de l'âge. On se doute que Don Diègue, lui qui fut si fort, lui qui fut si grand est humilié de ne pouvoir répondre seul aux fanfaronnades du Comte. Être obligé d'aller quémander l'aide de vos enfants parce que votre bras tremble et que vos jambes sont débiles, comme c'est dégradant.

C'est pourtant la tragédie ordinaire que vivent nombre de personnes âgées qui se découvrent un jour, l'ombre d'elles-mêmes. Souvent, elles n'ont pas trop vu cela venir, car cela s'est fait très progressivement, mais un jour on prend conscience, et ce jour-là on pleure. Ce thème fut repris par Tirso de Molina dans son célèbre Abuseur de Séville avec le personnage du Commandeur trucidé par Don Juan dont il ne respecte pas même le tombeau.

Enfin, je voudrais en terminer en évoquant un personnage délicieusement ambigu, à savoir, l'infante Doña Urraque, secrètement folle amoureuse de Rodrigue et donc jalouse de Chimène. On se dit qu'elle est capable de faire capoter le mariage, non pas pour elle-même, puisque son statut lui interdit une union avec quelqu'un d'aussi modestement élevé socialement que Rodrigue, mais juste pour ne pas qu'une autre puisse jouir du loisir de partager la vie de celui qu'elle aime.

C'est exactement le thème d'une pièce tout à fait contemporaine de L'Enfance du Cid, intitulée le Chien du Jardinier de Lope de Vega. Lequel chien du jardinier, comme dit la fable d'Ésope, « ne mange pas de chou et ne permet pas qu'on en mange »... Mais je m'aperçois que cet avis est déjà beaucoup plus long que je ne l'avais déCIDé, il a poussé mieux qu'une mauvaise herbe sans herbiCID alors que manifestement, il ne signifie pas grand-chose face à ce texte géant que rien n'oxCID.

P. S. : le fameux vers 434 (À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.) est très vraisemblablement lui aussi un emprunt, à Sénèque cette fois, qui dans son de Providentia avait fait dire à un gladiateur fâché d'avoir à combattre trop faible partie : « Eum sine gloria vinci qui sine periculo vincitur. » Preuve encore, s'il en était besoin, du remarquable talent de transcripteur de Pierre Corneille.
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Le Cid, tragicomédie archiconnue s'il en est. Tellement qu'il m'a fallu me résoudre à l'étudier au collège-lycée. J'ose donc poser LA question : qui n'a jamais déclamé le « Je ne te hais point » qui a rendu célèbre la figure de style méconnue qu'est la litote ?
Pour revenir à l'oeuvre proprement dite, Corneille, dans son style épique et tragique qu'on lui connaît, peint un drame classique : un amour menacé. Celui de Rodrigue et Chimène tient l'ensemble de la pièce à bout de bras et par des tirades mythiques. L'amour contrarié, la vengeance ourdie de longue date, d'atroces dilemmes moraux en toutes circonstances : que peut-on demander de plus ou de mieux pour aborder en profondeur les relations individuelles et les sombres sentiments de l'espèce humaine qui font du drame un magnifique élément de théâtre ?
L'intrigue se noue de manière attendue en respectant la fameuse « règle de trois » du théâtre classique français, celle des trois unités, d'action, de temps et de lieu. Si l'ensemble est classique au sens historique comme au sens stylistique, l'effet produit par cette pièce est en revanche au-delà du commun tant les enjeux nous empoignent le coeur et l'esprit sans daigner les lâcher avant le dernier mot.

Le mot de « référence » n'est pas donc volé ici. Pierre Corneille rend une copie parfaite avec cette oeuvre, parfois oubliée, mais jamais déconsidérée, c'est mérité.

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Deux 4ème au total, la seconde fut plus efficace que la première, maman était fière, l'honneur était sauf (ainsi soit-il). Cette année là je fus élu à l'unanimité membre éminent du « branlétériat » et en tant que tel, je me faisais une joie de lire cette grande pièce de théâtre dont je n'avais jamais entendu parlé et sur ce dernier point je faisais honneur à ma toute nouvelle nomination.

Nous avions hérité mes petits camarades et moi d'une jeune professeur de français, jolie à souhait, mais un peu "messe du dimanche" sur les formes et la mode. Il faut reconnaitre qu'elle était quand même moins nase que l'autre binoclarde dépressive de l'année d'avant.

Enfin bref, sortez le CID acte 1 scène 1
Ô Rodrigue, Ô Chimène…

Moi : pssssssitt psittttttttttttt
Future choupette : Quoiiiiiiiii

Moi : C'est quoi ton nom ?
Future choupette : Depuis 6 mois tu ne le connais pas ??

Moi : 6 mois déjà… bon alors c'est quoi ?
Future choupette : Choupette

Moi : Quoi tu es une meuf ?
Future choupette : Connard…

Prof messe du dimanche : Un commentaire M.Hugo
Moi : Oui Choupette est une meuf, et de face je me disais que ce n'était pas très flagrant…

(Rire général), oui j'étais cruel à cette époque et je prie chaque jour notre seigneur de pardonner mes offenses comme nous pardonnons bla bla bla…

Acte II
Ô Rodrigue, Ô Chimène… Ô Badi (celle là je peux l'a supprimer si nécessaire)

Moi : Putain c'est toujours la même chose cette pièce...
Mon meilleur pote de tous les temps à la vie à la mort : ouep c'est clair,
mais je crois qu'il y a eu un mort ??

Moi : cool, sinon comment ça se passe avec ta meuf, vous avez couché ?
Mon meilleur pote de tous les temps à la vie à la mort : Mais non putain, ça me vénère, j'ai quand même le droit de mettre mes doigts dedans, un truc de psychopathe...

Moi : Tropppppppppppppp cool "sa mère" (expression très en vogue à l'époque)… une vraie cochonne ta "Chimène..."
Mon meilleur pote de tous les temps à la vie à la mort : ouep c'est clair…

Prof messe du dimanche : Un commentaire M.Hugo
Moi : Oui madame mon meilleur pote de tous les temps à la vie à la mort est encore puceau "sa mère (très en vogue j'ai dit)

(Rire général), il faut garder à l'esprit que mes camarades avaient le même âge que moi…

Acte V

Les actes III et IV ne me semblent pas indispensables pour cet avis, à l'époque non plus d'ailleurs, bien sur j'ai relu cette pièce un plus tard et je dois reconnaitre que la maturité a su me convaincre que finalement les actes III et IV étaient tout de même importants, mine de rien.

Ce qu'il faut retenir c'est la rencontre avec ma "Chimène". Pour dire la vérité nous nous étions jamais adressés la parole cette année là et pendant les 4 années suivantes non plus…

Aujourd'hui ça fait 13 ans qu'on ne s'arrête plus… comme quoi des fois la vie est pleine de surprise.

Je n'ai jamais revu mon meilleur pote de tous les temps à la vie à la mort depuis la 4ème, pourtant il n'est pas mort : dédicace à lui et toute la 4ème 2.

Une pensée particulière pour Corneille aussi. (Paix à son âme parce que lui il est bien clamsé)

A plus les copains
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Le dilemme cornélien ou l'art de s'empoisonner l'existence quand les amours s'épanouissent et les petits oiseaux gazouillent.

Adolescente, par détestation solidaire avec ma soeur ainée en proie à un enseignant aux tendances sadiques, je m'étais refusée à jeter la moindre oeillade sur le volatile classique, lui préférant le tubercule tout aussi classique. J'ai dévoré Racine et dédaigné Corneille. Lorsque ma propre fille commença à suer sur l'apprentissage d'une tirade (devinez laquelle) , je décidai d'entonner le Cid, à voix haute, sans peur et sans reproche, jouant tous les rôles.
Une tirade déconnectée de son contexte me paraissait un exercice aussi vain que rébarbatif. Face donc à ma pré-adolescente, j'entamais la tragi-comédie avec le coeur d'une mère qu'aucun obstacle n'arrête.

Mais que diable allais-je faire dans cette galère? Non, ça c'est une autre pièce et ce n'est pas Corneille. Et ce ne fut pas une galère. Plutôt un plaisir. Même si… Chimène m'a considérablement agacée.

Chimène aime Rodrigue qui l'aime. Ils sont jeunes, beaux, de noble extraction et sentent bon le sable chaud. Mais la comédie romantique trébuche en raison d'une querelle gériatrique. le papa de Chimène se dispute avec le papa de Rodrigue, lequel est méchamment souffleté. La santé chancelante mais l'honneur rougeoyant, le papa mande son rejeton afin que justice lui soit rendue.Le petit Rodrigue trucide donc celui qui aurait pu être son beau-papa. Entre amour et honneur, sentiment et devoir familial, on ne barguigne pas.
Chimène prend le même chemin que son amoureux et demande au roi sa tête, lequel envoie l'amoureux en entier chasser le Maure. Il en revient auréolé de gloire. Encore plus légionnaire que jamais (l'odeur de sable chaud, hum), Chimène succombe davantage mais mais mais… Rodrigue reste l'assassin de papa. le devoir reste le devoir. Elle veut obtenir justice quitte à gâcher sa vie. Don Sanche qui aime Chimène sera son champion. Un duel est organisé par cette idiote de Chimène qui a un talent fou pour créer des situations inextricables. Elle épousera le vainqueur. Donc soit elle épousera l'assassin de papa (qu'elle aime), soit elle épousera l'assassin de son amoureux (qu'elle n'aime pas). On comprend qu'elle motive Rodrigue pour combattre, la petite hypocrite.
Au final, Rodrigue sort vainqueur. Chimène peut donc l'épouser en respectant sa parole. Son honneur est sauf.
Et ben, non! Elle chipote, elle tergiverse. Oui mais non. Je ne peux pas. Mon papa… Il faut que le roi lui ordonne de se marier avec Rodrigue après un délai de un an.

Combien les héroïnes raciniennes me touchent davantage!
Je me plais à imaginer que l'Infante, sensible aux charmes de Rodrigue, aura mis à profit les douze mois d'ergotage de Chimène. Je ne suis pas soumise à l'unité de temps.
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Quelle pièce de théâtre froide et vénale de pouvoir ! Quand on y pense, ils étaient assez barbares à cette époque là !

Tout commence avec une discussion animée entre le roi et Don Diègue dont ce dernier reçoit un petit soufflet bien placé. Dieu, qu'a-t-il osé faire ?! Partant sous les menaces, l'offensé se rendit chez son fils, lui donnant l'ordre d'aller sauver l'honneur de leur famille en tuant ce comte qui a osé lui manquer de respect. le gamin comprit qu'il n'avait pas le choix et sentit même le courage de le faire mais quand le nom de la personne tomba ... Il se fit souffleter aussi, de façon imaginaire ! Il devait tuer son futur-beau père, au risque presque sûr de perdre sa bien-aimée ! Oualala, que faire ? Tant pis, allons le tuer ... L'honneur de la famille prime avant tout. C'est ce qu'il fit. Les rumeurs courts et s'éloignent jusqu'aux oreilles de cette bien-aimée, Chimène qui ne veut pas croire en cette situation désastreuse qui, quelques heures auparavant, était tout autre. Perdue, effrayée et complètement colérique, elle se rend sur les terres où son père est mort. le sang est répandu, sa haine monte contre celui qui avait emprisonné son coeur. Il fallait qu'elle aille voir le roi. Elle y alla et demanda la mort de Rodrigue, ce gamin qui n'avait écouter que la voix de son père et des valeurs familiales. Elle veut qu'on l'immole mais elle est triste, parce qu'elle l'aiiiiime. La vengeance prend le dessus sur les sentiments et Rodrigue, ivre de honte, va à la rencontre de la femme qu'il aime, pour qu'elle le tue de ses propres mains. Mais elle ne peut pas, elle en est incapable et donc, partant triste de ne pas être mort, Rodrigue se retrouve avec son père, l'élément déclencheur orgueilleux qui a déclaré tout ce bordel, qui lui dicte LA solution pour la reconquérir et ainsi reconquérir le roi qui trouvait normal qu'on l'immole. « Agis en guerrier et va niquer tout ses maures qui arrivent sur nos terres ». D'accord, il y alla. Briser des têtes et répandre des corps morts pour gagner le coeur d'une femme, c'est tout a fait faisable ! Et il le fit ! WOUAW, c'est devenu le CID ! Il devient LE guerrier que tout le monde redoute, qui fait trembler les familles à l'annonce de son nom.
Mais attention, Chimène n'est pas très contente bien sûr. Il est devenu le VIP de Séville, le mec qu'on vénère dans toute sa splendeur et cela ne lui convient pas. Elle veut qu'il souffre psychologiquement et à la fois, elle veut avoir sa tête entre ses mains pour venger son père.
Ok, un deal se fait ... Un DUEL proposé par Chimène. Celui qui coupera la tête de l'homme qu'elle aime, elle le fera sien. (J'ai éclaté de rire à cette scène). Don Sanche se propose, éperdument amoureux de la femme, c'est pour lui une occasion en OR. Donc bon, plus tard, Don Sanche se rend chez Chimène avec une épée ensanglantée ... Et là, elle s'emballe ! Comment a-t-il osé tué celui qu'elle adorait ??!! Elle réclame justice .... Elle va trouver le roi (dont je suis certaine n'en pouvait plus de cette femme!) et il lui annonce que son Rodrigue, être chérit qui en bave des tonnes, n'est pas mort. Outragée, elle se demande pourquoi la mort de son père n'est-elle pas vengée mais elle est tout à la fois soulagée de le savoir en vie ... Donc, ça se termine en « Chimène a un an pour sécher ses larmes pendant que Rodrigue aille se proclamer roi chez les Maures avant qu'ils ne se marient » ... Et voilà, c'est terminé et heureusement pour Chimène, car d'une manière ou d'une autre, je crois que je l'aurai étranglé pour qu'elle se taise. Déjà, je ne comprend pas comment le Roi a pu rester stoïque face à un comportement si lunatique et si ... bête. Si j'avais été à sa place, je lui aurai flanqué une chaussette puante dans la bouche pour qu'elle se taise pendant des heures après s'être évanouie !
Dans cette pièce, je plains deux personnes ... le gentil toutou qu'est Rodrigue pour tout ce qu'il subit (si nous n'avions pas un peu de compassion pour lui, se serait dommage quand même) et pour l'Infante qui ne cesse de pleurer un amour qu'elle n'aura jamais ... Haaa, cette oeuvre m'a retourné sur bien des émotions ! Heureusement que son caractère poétique a réussit à ne pas me faire péter un plomb en milieu de lecture, que je suis entrain d'écrire maintenant ... pfiou ! Retenir son souffle durant toute l'histoire fut très difficile ...
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Ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !
N' ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
Mon bras qu'avec respect tout l'Espagne admire,
Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi, Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
Ô cruel souvenir de ma gloire [... ]
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ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !
N'ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
Mon bras qu'avec respect toute l'Espagne admire,
Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi,
Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
ô cruel souvenir de ma gloire passée !
Oeuvre de tant de jours en un jour effacée !
Nouvelle dignité fatale à mon bonheur !
Précipice élevé d'où tombe mon honneur !
Faut-il de votre éclat voir triompher le comte,
Et mourir sans vengeance, ou vivre dans la honte ?
Comte, sois de mon prince à présent gouverneur ;
Ce haut rang n'admet point un homme sans honneur ;
Et ton jaloux orgueil par cet affront insigne
Malgré le choix du roi, m'en a su rendre indigne.
Et toi, de mes exploits glorieux instrument,
Mais d'un corps tout de glace inutile ornement,
Fer jadis tant à craindre, et qui, dans cette offense,
M'as servi de parade, et non pas de défense,
Va, quitte désormais le dernier des humains,
Passe, pour me venger en de meilleures mains.
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LE COMTE : Te mesurer à moi ! qui t’a rendu si vain,
Toi qu’on n’a jamais vu les armes à la main ?
DON RODRIGUE : Mes pareils à deux fois ne se font point connaître,
Et pour leurs coups d’essai veulent des coups de maître.
LE COMTE : Sais-tu bien qui je suis ?
DON RODRIGUE : Oui ; tout autre que moi
Au seul bruit de ton nom pourrait trembler d’effroi.
Les palmes dont je vois ta tête si couverte
Semblent porter écrit le destin de ma perte.
J’attaque en téméraire un bras toujours vainqueur ;
Mais j’aurai trop de force, ayant assez de cœur.
À qui venge son père il n’est rien d’impossible.
Ton bras est invaincu, mais non pas invincible.

Acte II, Scène 2 : (v. 407-418).
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DON DIÈGUE : Je te donne à combattre un homme à redouter :
Je l'ai vu, tout couvert de sang et de poussière,
Porter partout l'effroi dans une armée entière.
J'ai vu par sa valeur cent escadrons rompus ;
Et pour t'en dire encor quelque chose de plus,
Plus que brave soldat, plus que grand capitaine,
C'est…
DON RODRIGUE : De grâce, achevez.
DON DIÈGUE : Le père de Chimène.
DON RODRIGUE : Le…
DON DIÈGUE : Ne réplique point, je connais ton amour ;
Mais qui peut vivre infâme est indigne du jour.
Plus l'offenseur est cher, et plus grande est l'offense.
Enfin tu sais l'affront, et tu tiens la vengeance :
Je ne te dis plus rien. Venge-moi, venge-toi ;
Montre-toi digne fils d'un père tel que moi.
Accablé des malheurs où le destin me range,
Je vais les déplorer : va, cours, vole, et nous venge.

Acte I, Scène 5 : (v. 276-290).
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L'INFANTE : Quand je vis que mon cœur ne se pouvait défendre,
Moi-même je donnai ce que je n'osais prendre.
Je mis, au lieu de moi, Chimène en ses liens,
Et j'allumai leurs feux pour éteindre les miens.
Ne t'étonne donc plus si mon âme gênée
Avec impatience attend leur hyménée :
Tu vois que mon repos en dépend aujourd'hui.
Si l'amour vit d'espoir, il périt avec lui :
C'est un feu qui s'éteint, faute de nourriture ;
Et malgré la rigueur de ma triste aventure,
Si Chimène a jamais Rodrigue pour mari,
Mon espérance est morte, et mon esprit guéri.

Acte I, Scène 2 : (v. 101-112).
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Vidéo de Pierre Corneille
Lecture par l'auteur
Rencontre animée par Marie-Madeleine Rigopoulos
« Ce livre est un ensemble de nouvelles autobiographiques, classées par âge de la vie, de la petite enfance à aujourd'hui. Ces nouvelles sont souvent, pas toujours, des mésaventures dans lesquelles j'éprouve peur et honte, qui me sont assez naturelles et me donnent paradoxalement l'énergie d'écrire. Scènes de gêne ou de honte, scènes de culpabilité, scènes chargées de remords et de ridicule, mais aussi scènes, plus rares forcément, de pur bonheur, comme celle qui donne son nom au livre, Célidan disparu : personnage à la fois pusillanime et enflammé d'une pièce de Corneille que j'ai jouée à mes débuts d'acteur, dont je découvris lors de l'audition pour l'obtenir, qu'il me révélait à moi-même, et faisait de moi un acteur heureux. »
Denis Podalydès
À lire – Denis Podalydès, Célidan disparu, Mercure de France, 2022.
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