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Critique de Nastasia-B


INCOMPARABLE ! sorte d'Objet Littéraire Volant Non Identifié. Voilà les premiers mots qui m'étaient venus à l'esprit lorsque je refermai jadis ce livre. Je n'avais jamais rien lu de comparable à l'époque. Désormais, avec quelques années de plus au compteur, j'arrive mieux à percevoir d'où Gabriel Garcia Márquez a puisé son style et son énergie littéraires.

On sait la dette que Garcia Márquez reconnaît avoir contractée auprès de Franz Kafka et son Réalisme Magique doit sans doute effectivement beaucoup au monde surprenant du Tchèque. Mais, selon moi, son inspiration provient surtout d'autres auteurs latino-américains comme le grand nouvelliste uruguayen Horacio Quiroga, qui, dans ses contes aime à injecter un peu de surnaturel, tel que pouvait le faire Maupassant dans ses nouvelles fantastiques.

Mais surtout, le grand inspirateur de Garcia Márquez, c'est indubitablement et avant tout le Mexicain Juan Rulfo et son roman Pedro Páramo. On y retrouve en miniature toute l'architecture de Cent Ans de Solitude : un même lieu sur lequel évoluent beaucoup de personnages à des époques différentes, sur plusieurs générations, la confusion volontaire entre le " réel " et le rêve, la notion de destin, etc., etc.

On y retrouve même jusqu'à l'incipit, jugez plutôt. Juan Rulfo écrit à un moment : « Le père Rentería devait se souvenir bien des années plus tard de la nuit où la dureté de son lit l'avait tenu éveillé puis forcé à sortir. » Gabriel Garcia Márquez débute quant à lui son roman par la formule : « Bien des années plus tard, face au peloton d'exécution, le colonel Aureliano Buendia devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l'emmena faire connaissance avec la glace. »

Bref, peu nous importe ici qui a inspiré quoi même si l'apport de Rulfo est criant. Disons plutôt que ce livre aurait pu s'appeler " Histoire (sur)Naturelle de la Colombie ". L'auteur y dépeint et y peint une fresque digne de la tapisserie de Bayeux qui s'étale sur plusieurs générations de la famille Buendia (c'est une saga au sens propre, je ne sais plus le nombre exact de générations mais environ 5 ou 6).

Ce qui frappe, outre le style et sa maîtrise cyclique et chronologique impeccable, outre l'ampleur, la densité, outre le nombre et la diversité des références, outre les considérations coloniales, outre les aspects historiques véridiques, outre l'incroyable tempérament des personnages, outre l'originalité du propos, outre le lyrisme, outre tout, ce n'est pas l'étonnante synthèse que l'auteur a réussi à faire du destin de la Colombie, alias le ville de Macondo dans le roman, non, ce n'est pas cela qui frappe l'inconscient du lecteur, ce sont surtout ses subtiles inclusions de surnaturel qui passent sans surprendre et deviennent presque naturelles à nos yeux, mystifiés de toutes parts.

Je ne classerais probablement pas le chef-d'oeuvre de sortilèges de Gabriel García Márquez dans la catégorie de ceux qui m'ont le plus fait vibrer, mais je reconnais avoir vécu auprès de lui de très bons moments littéraires. J'en garde un souvenir bienheureux car je sais qu'il fait partie de ceux dont on se dit : « Je n'en lirai pas cinquante de cette trempe-là. » Mais tout ceci n'est que mon avis, un parmi tant d'autres, c'est à dire, pas grand-chose.
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