David Goodis né le 2 mars 1917 à Philadelphie et mort dans la même ville le 7 janvier 1967,est un auteur américain de romans noirs. Véritable icône du genre en France, il reste assez méconnu aux États-Unis malgré le succès commercial de ses premiers livres et un nombre assez important d'adaptations cinématographiques de son oeuvre.
Philippe Garnier part donc sur les traces de cet auteur dont on ne connaît quasiment rien de sa biographie.
Après des études de journalisme dans une université de deuxième zone, il se lance dans l'écriture et connaît rapidement le succès avec "
Cauchemar" , (Dark Passage) paru en 1946. Ce court roman lui permet de signer un contrat avec la prestigieuse société de production Warner Bross qui lui demande d'écrire le scenario pour une adaptation cinématographique. le film est réalisé par Delmer Daves avec le couple Bogart/Bacall dans les rôles principaux. Voici donc notre auteur à Hollywood où il n'arrivera jamais à véritablement se faire un nom.
Grace à un travail minutieux aux archives de la Warner,
Philippe Garnier reconstitue en effet la carrière de celui qui semblait être à sa place par accident. Les innombrables mémos échangés permettent de se rendre compte que beaucoup de ses scénarios ont été rejetés, ou bien tellement remanié que son nom n'apparaît même pas dans les crédits. Au bout de 10 ans à la Warner seulement trois films le créditent comme scénariste : L'Infidèle (The Unfaithful), Les Passagers de la nuit (Dark Passage) et le Cambrioleur (The Burglar). Sa véritable consécration cinématographique est l'adaptation de son roman
Tirez sur le pianiste (shoot the Piano Player) par
François Truffaut qui avouera ne rien se rappeler de sa rencontre avec l'auteur.
C'est d'ailleurs cette personnalité effacée, plus que ses qualités littéraires, réelles, qui expliquent son manque de succès. Goodis n'était pas un carriériste. Au contraire il méprisait plutôt Hollywood et ses faux semblants. Lui se spécialisait dans le canular, toujours mal habillé, de costumes empruntés, rapiécés, trop grands pour lui, sur lesquels il cousait des étiquettes de grands couturiers. Il avait la manie d'inviter ses relations dans les restaurants les plus sales et miteux possibles. Il faut ici préciser que, malgré un salaire faramineux, le natif de Philadelphie rechignait à la moindre dépense, vivait dans des taudis et conduisait un vieux tacot délabré. Cette attitude semble moins relever de l'avarice que de la provocation. Il se plaisait à raconter n'importe quoi sur lui même, contribuant grandement à entretenir la légende d'un homme débauché, fasciné par les femmes noires et grosses de préférence.
Philippe Garnier tente alors de démêler le vrai du faux, exercice d'autant plus difficile qu'il semble exister autant de Goodis que de gens qu'il côtoyait. Éternel farceur à Hollywood, romantique avec certaines femmes, débauché dans les quartiers noirs et véritable soutient de famille auprès de ses parents vieillissant et de son frère schizophrène : qui était le véritable Goodis ? Certainement un peu de tout ça.
Ce qui est certain c'est que son oeuvre, sous ses apparences de romans de gare (Goodis a fait ses armes dans les "pulp" et a écrit des tonnes de western et d'histoire d'aviation sous pseudonyme), révèle une véritable sensibilité. C'est en tout cas ce que l'on en perçoit en France où ses anti-héros poursuivis par la fatalité renvoient à la philosophie existentialiste et à la contingence de l'être. Paul Wendkos, le réalisateur de The Burglar pense que c'est là que se cache la clé de son succès français : ses personnages sont pénétrés d'une mélancolie existentielle et restent capable de principes moraux en dépit de leur désillusion foncière.