D'une tristesse infinie, ce livre. Je l'ai terminé avec ce sentiment très fort de tristesse… pour ce que je viens de lire mais surtout pour l'auteur, qui, à mon avis, a loupé son objectif.
Ça commence pourtant bien, avec , bien entendu, le sujet tragique des migrants, de leur exploitation par des passeurs, de leur vie qu'ils risquent pour chercher un
Eldorado fictif, qui va les emprisonner la plupart de temps et les renvoyer chez eux. le ton est alerte, l'histoire intéressante, une femme rescapée après son passage périlleux en Méditerranée, retrouve l'un des sauveteurs / policiers, dont le but est double : écumer les mers autour de Catane et de l'ile de Lampedusa, sauver les vies de ces êtres en perdition, parfois échouer à sauver, puis les mettre en détention provisoire.
Déviation, page 45, avec deux frères, et leur dialogue qui sonne vraiment faux : Mon frère, j'ai mal à ce pays que je vais quitter, mon frère. Larmoyant et pas convaincant. le sujet qui aurait pu nous intéresser est dévié… et va rester dévié tout le long du livre, par un discours politiquement correct, mais comme à distance de son sujet. Les personnages sont fades, correctement fades, sans épaisseur, dans un voyage dont le but est de passer à l'Ouest, le Maroc et l'enclave espagnole de Ceuta. Pourquoi
Laurent Gaudé , dont l'écriture est remarquable, se fourvoie t il dans cet imbroglio d'itinéraire dont apparemment il ne connaît rien ? Alors il noie le poisson, invente des sentiments de culpabilité, de la part de celui qui aurait pu être le héros ( et , oui, on aime les héros, et aussi les contre héros, mais pas les pauvres types qui vont à la casse ) et de la part de ceux qui veulent survivre. Quel dommage, écrire si bien- en particulier sur la mer, ou sur la prise de conscience de celui qui manque une marche, se perd de vue lui même , est absent de lui sans que personne ne s'en rende compte, et décide de changer cette non vie pour une autre - et se perdre dans les eaux des bons sentiments. Car la littérature n'est pas une énumération de bons sentiments. Livre aussi vite oublié que fermé, à part la sensation de tristesse.