… et puis la guerre. La guerre, peu importe, « on se bat toujours quelque part », comme le chantait si bien Salvatore Adamo. Aujourd'hui c'est à la frontière Turque. Où irait-elle demain semer le malheur et l'horreur ? Ce village, cette ville hier était peut-être et sûrement un lieu paisible où l'on partageait les repas, autour d'un thé que les femmes préparaient parce qu »il y avait aussi des traditions.
Dans une guerre, il y a ceux qui se battent et ces femmes qui tentent de survivre. Dans cette guerre, il y a les héros et les salauds. Il y en a dans toutes les guerres. En France, on les appellerait les collabos.
La guerre, ce sont les bombes qui dévastent tout, lèvent des tonnes de poussière, créent des incendies… et les cendres retombent sur les décombres.
Laurent Gaudé ne nous raconte pas la guerre, il nous invite à y entrer. Il est un reporter de terrain littéraire.
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Le camp des femmes. Elles sont toutes au travail : polissage et coulage de planches de bois pour la construction des cercueils.
LES FEMMES; Je scie. Je ponce. Je polis. Je cloue. Je passe au rabot. Et mes mains sont toutes calleuses de cloques qui m'étaient étrangères auparavant. Nouveaux gestes, nouvelle fatigue. La guerre, moi, je la sens là, dans les mains. Et dans ces milliers de copeaux de bois qui me tombent sur les pieds, au fil des heures, comme de la neige qui ne fondra pas. Pour nous, la guerre a l'odeur du bois. Demandez à nos hommes si la guerre sent le bois. Ils vous répondront - s'ils ont encore une bouche pour parler - que l'odeur qui les obsède c'est celle de la sueur et de la poudre. Et que le déchirement de la mitraille n'a rien à voir avec le bruit régulier du rabot sur le bois. Nos hommes, est-ce que c'est une petite dizaine d'ombres en loques, avec une arme pour deux, ces âmes errantes qui descendent parfois du front pour nous amener un des leurs et qui remontent ensuite sans avoir dit un mot, este que ce sont eux, nos hommes? Et ceux qu'ils déposent ici, méconnaissables tellement ils portent de plaies sur le corps, est ce que ce sont nos hommes aussi, ou nos fils? Tant qu'ils sont là, tant que cette armée ahurie peuple encore les ruines, la ville existe. Et nous avec. Ce sont nos hommes. Nous travaillons pour eux. Et Korée qui les regarde toutes la journée nous donne de leurs nouvelles. Elle est là-haut pour nous toutes. Si un d'entre eux tombe, Korée le voit. Personne ne meurt dans l'oubli des femmes de la ville. Et cela compte. En face ils enragent de l'existence de ce petit point noir. Leurs femmes à eux, pour rien au monde elles ne viendraient sur les crêtes des collines voir ce que font leurs hommes. Elles n'auraient plus qu'à s'accoupler à des chiens. Nous, nous ne pouvons rougir de rien. Parce que Korée regarde. Est ce que la largeur ira comme cela? oui, donne, je vais clouer. Ponce la dernière
Vendredi 13 novembre 2015, il fait exceptionnellement doux à Paris – on rêve alors à cette soirée qui pourrait avoir des airs de fête. Deux amoureuses savourent l'impatience de se retrouver ; des jumelles s'apprêtent à célébrer leur anniversaire ; une mère s'autorise à sortir sans sa fille ni son mari pour quelques heures de musique. Partout on va bavarder, rire, boire, danser, laisser le temps au temps. Rien n'annonce encore l'horreur imminente.
Laurent Gaudé signe avec *Terrasses* un chant polyphonique qui réinvente les gestes, restitue les regards échangés, les quelques mots partagés, essentiels – écrit l'humanité qui éclot au coeur d'une nuit déchirée par l'impensable. Et offre à tous un refuge, face à un impossible oubli.
le nouveau livre de Laurent Gaudé est en librairie.
Lire les premières pages : https://www.actes-sud.fr/terrasses
#litterature
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