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Michel Tournier (Préfacier, etc.)Pierre du Colombier (Traducteur)
EAN : 9782070372379
346 pages
Gallimard (04/11/1980)
3.72/5   331 notes
Résumé :
Ou l'histoire d'une régulation sentimentale. Édouard et Charlotte sont riches, ils mènent en un vaste domaine une existence raisonnée qui tend à la conservation de leur bonheur. Sur le désir d'Édouard, ils dérogent à leurs principes en accueillant son ami, le Capitaine, homme aux talents inemployés. S'interrogeant sur les affinités électives chères aux sciences naturelles, le trio s'en applique certains principes ; devenus A, B et C, ils se convainquent de la nécess... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (29) Voir plus Ajouter une critique
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sur 331 notes
Les sentiments amoureux s'accordent mal avec l'analyse rationnelle, échappent parfois à l'entendement...
Bien qu'il établisse une analogie entre les relations humaines et certaines propriétés chimiques, le roman « Les affinités électives », écrit par Goethe au début du 19ème siècle, est avant tout une tragédie amoureuse.

A l'issue d'un veuvage qu'ils ont connu tous deux à la même époque, Edouard et Charlotte ont convolé en justes noces et apprécient leur petite vie tranquille dans leur vaste domaine campagnard des environs de Weimar.
Ces châtelains dans la force de l'âge ont déjà une belle expérience de vie et savent que l'épanouissement d'un couple dépend des attentions du quotidien et aussi des concessions mutuelles.
Ainsi Edouard sollicite-t-il auprès de son épouse l'installation au château du Capitaine, un ami de longue date souffrant de solitude. Charlotte ne voit pas d'un bon oeil cette invitation mais finalement l'accepte non sans avoir réussi à imposer à son mari la présence auprès d'eux de sa nièce Odile dont elle se fait fort de parfaire l'instruction.

Le Capitaine est un personnage pragmatique et ses idées concernant l'organisation du domaine sont pertinentes. Charlotte apprécie la compagnie de cet être mesuré toujours à l'écoute d'autrui et qui donne son avis avec tact.
Odile est le charme incarné et fait tourner la tête d'Edouard qui a pourtant l'âge d'être son père. Celui-ci est au petits soins avec la jeune femme au point que son badinage prête parfois à sourire.

Cette situation idyllique mais pour le moins équivoque résistera-t-elle aux premiers vents contraires ?

Dans un style étonnamment moderne, loin du marivaudage de l'époque, Goethe entraîne le lecteur dans une histoire passionnelle mêlant quatre personnages sympathiques et entiers.
Je termine la relecture de ce roman incontournable quelque peu bouleversé, un sentiment identique me semble-t-il à celui ressenti voici trois décennies. Les années passent, les sensations demeurent...

Que diriez-vous d'un petit flirt avec la littérature allemande et plus si affinité ?
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Parmi les très bons romans que j'ai lu, celui-ci est probablement celui que j'ai trouvé le plus bizarre.
L'idée même d'« affinités électives », d'inspiration schopenhauerienne, constitue, à mon avis, une tendre rêverie toute à fait digne d'être prise en considération pour sa grande beauté et son originalité. Mais en lisant le roman, j'ai vraiment eu l'impression que Goethe y croyait dur comme fer à cette idée. Se serait-il laissé séduire l'esprit par la verve très jolie, très romantique et très poétique de Schopenhauer?
D'autre part, sa très lourde insistance sur des détails architecturaux directement liés au franc-maçonisme est encore plus saugrenue. Cette bizarrerie n'a pu être inclue dans le roman sans qu'un artiste aussi accompli que Goethe en soit conscient. Est-ce qu'il a vraiment pensé que son lecteur devrait s'intéresser à cela? Franchement, ça me dépasse, car ça constitue à mon avis le seul défaut de cet excellent roman qui aurait été un véritable chef-d'oeuvre autrement.
Vraiment, comme il le dit lui-même : « Les plus grands hommes sont toujours de leur siècle par quelque faiblesse. »(224)
Du reste, le roman est franchement réussi, et probablement en grande partie en fonction de l'effet d'étonnement que ses étrangetés provoquent chez son lecteur. On ne m'a jamais laissé perplexe de manière aussi grandiose.
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Lorsque Goethe publie « Les affinités électives » en 1809, trente-cinq ans après Werther, il a déjà soixante ans. On le dit ému, épris, voire même bouleversé par une très jeune femme. Passionné de sciences, il se fonde sur la théorie des affinités chimiques des éléments entre eux (d'Étienne-François Geoffroy), la transpose, et nous fait vivre avec une violence et une subtilité intactes les effets physiques et psychologiques de l'attirance amoureuse.

«- Si vous ne trouvez pas que cela prend un air pédant, reprit le capitaine, je puis me résumer brièvement dans le langage des signes. Figurez-vous qu'un certain A intimement uni avec un certain B, et qui n'en saurait être séparé par beaucoup de moyens, beaucoup d'efforts ; figurez-vous un C qui se comporte de même envers d'; mettez maintenant les deux couples en contact : A se jettera sur d'et C sur B, sans qu'on puisse dire qui a quitté l'autre le premier, qui s'est réuni le premier à l'autre. »

Édouard et Charlotte se sont enfin mariés, devenus chacun veuf et veuve, et ayant pu ainsi enfin donner libre cours à leur amour de jeunesse partagé qui s'est maintenant commué en un mariage heureux et paisible. Dans un cadre isolé, ils profitent des joies de leur château, dans l'insouciance qu'autorise leur fortune. Apres quelques atermoiements de Charlotte, qui craint la rupture de leur bel équilibre, ils accueillent à demeure deux invités, l'un d'eux ami d'Edouard, le Capitaine (personnage non nommé en dehors de son grade), un homme mesuré et sérieux en tout, et Odile la nièce de Charlotte, qui n'est pas brillante, mais qui telle un aimant attire à elle toutes les attentions.

Avec ce quatuor, « Les affinités électives » est comme une expérimentation autour de cette question : le mariage doit-il rester un objet sacré, pour le meilleur et pour le pire ? Et bien sûr, comme prévu, A va s'éprendre de C, et B de D.

Tandis que les aménagements du parc, de la chapelle, et la construction d'une nouvelle maison sur les hauteurs donnent à la propriété un aspect de plus en plus idyllique et ordonné, la force de la passion qui naît entre Édouard et Odile annonce des déchirements tragiques, entre l'impétuosité destructrice d'Edouard et l'ambivalence de la douce et céleste Odile, personnage solaire du roman ; Odile, fascinant personnage d'intérieur, qui jardine dans les serres, entretient la maison et intériorise aussi ce conflit si brutal entre sa passion pour Édouard, le centre de sa vie, et sa lumineuse bienveillance envers tous. Ce perpétuel conflit entre la liberté d'aimer et les contraintes morales sera lui résolu par Charlotte et le Capitaine, plus raisonnables et maîtrisés, mais aussi moins passionnants.

Le titre de cette oeuvre attire comme un aimant. Et ce texte de deux-cent ans qui a été tant lu et commenté, conserve effectivement tout son magnétisme. Au-delà des déchirements, de la crise du mariage typique de l'époque, il contient aussi une peinture extraordinaire de la vie mondaine sous toutes ses facettes, avec notamment ces scènes extraordinaires du divertissement des tableaux vivants, et il fascine aussi quand, par moments, le récit prend tout à coup une tournure fantastique.

« En s'avançant sur une falaise, ils virent devant eux, dans le fond, la vieille bâtisse de bois, noire, singulière, ombragée par des rochers à pic et par de grands arbres. Ils se décidèrent bon gré mal gré à descendre sur la mousse et les débris de roches, Édouard en tête. Lorsqu'il regardait en l'air et qu'il apercevait Odile le suivant de pierre en pierre, d'une marche légère, sans crainte et sans anxiété, avec le plus bel équilibre, il croyait voir planer au-dessus de lui une créature céleste. »
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Dans ce livre, les affinités entre passions s'y trouvent expliquées à la manière d'un principe chimique. Plus précisément, c'est un processus littéraire qui est décrit, celui par lequel un auteur emprunte à la réalité scientifique un matériau pour construire sa propre fiction.

Edouard, Charlotte, le Capitaine, et Odile sont les quatre personnages qui vont vivre une expérience de l'ordre des émotions et des sentiments de façon analogue à celle que peut produire les éléments chimiques entre eux…
Il y a des natures qui se rebutent naturellement où aucun contact ne peut les unir (comme l'eau et l'huile) d'autres s'attirent spontanément de manière irrépressible (dans le récit, Edouard et Charlotte forment un couple chimiquement harmonieux).
Cela étant, les natures qui se composent naturellement entre elles (Edouard et charlotte) ont aussi des rapports avec d'autres substances (en l'occurrence, ici, le Capitaine et Odile).
Et cela devient intéressant lorsque les affinités provoquent des séparations : au fil des pages du roman, Odile, la nièce (une jeune fille de seize ans) de Charlotte éprouvera de fortes attirances pour Edouard (homme d'une quarantaine d'années), et Charlotte ressentira, également, de vifs plaisirs à être avec le Capitaine (un ami d'Edouard).
L'équilibre des natures est ainsi bouleversé opérant, par la même occasion, un ébranlement du cadre des bonnes convenances : à cause des préférences réciproques insoupçonnées, des affinités irrépressibles entre Odile et Edouard, d'un côté, Charlotte/le Capitaine, de l'autre.
Ils sont attirés, l'un vers l'autre, aveuglément et avec la même nécessité que deux substances chimiques…

L'originalité du roman est « une métaphore scientifique appliquée à une intrigue psychologique ».
La nature est imprévisible, tout comme l'homme dans son évolution : tout est affaire d'occasion puisque la vie est une affaire de rencontres interpersonnelles ou intersubjectives.
En somme, l'homme n'a pas d'identité stable ou définitive.
C'est ce que nous dit Goethe à travers son roman. Il nous montre aussi l'impuissance de la raison à anticiper et à endiguer le cours des affinités passionnelles.
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Un intéressant roman qu'on pourrait juger d'expérimental qui met en évidence des théories sur les affinités dites électives dont les différentes lois sont observées sur les propriétés chimiques mais que l'auteur veut ici reporter sur les sentiments humains. Une des prouesses de ce roman est cette vivacité que l'auteur met autour de nos personnages et de leur domaine, au point qu'on oublie qu'il s'agit d'un huis-clos, je m'attendais forcement à un ennui où l'histoire s'expérimenterait que sur ces quatre individus mais non, il y a bien des surprises, des personnages qui surgissent à longueur de l'intrigue et qui continuent à donner d'autres couleurs des affinités électives...
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Citations et extraits (75) Voir plus Ajouter une citation
Si l’émeraude par sa magnifique couleur, fait du bien à la vue, si elle exerce même sur ce noble sens une certaine vertu salutaire, la beauté humaine agit avec une puissance bien plus grande encore sur le sens intérieur et extérieur. Qui la regarde ne saurait être effleuré d’aucun mal : il se sent en accord avec soi-même et avec le monde.
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Qu'il est difficile pour l'homme de bien peser ce qu'on doit sacrifier relativement à ce qu'il y a à gagner ; qu'il est difficile de vouloir le but et de ne pas dédaigner les moyens ! Beaucoup confondent même les moyens et le but ; ils s'attachent aux premiers, en perdant de vue vue le second. On veut toujours guérir le mal où il apparait ; et l'on ne se préoccupe pas du point où il prend son origine, et d'où il agit. C'est pourquoi il est si difficile de délibérer, surtout avec la foule, qui est parfaitement raisonnable dans la vie de chaque jour mais qui voit rarement plus loin que le lendemain.
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Il n’y a rien de plus maladroit et de plus barbare, dans l’éducation des enfants, comme aussi dans la conduite des peuples, que les interdictions et les défenses. L’homme est actif par nature, et, si on sait lui donner des ordres, il suit aussitôt, agit et exécute. Pour ma part, j’aime mieux supporter longtemps dans mon cercle des fautes ou des défauts jusqu’à ce que je puisse imposer la vertu contraire, plutôt que de me débarrasser de la faute, sans rien mettre de bon à sa place. L’homme fait très volontiers ce qui est bon et utile , pourvu qu’il en ait l’occasion ; il le fait pour avoir quelque chose à faire et n’y réfléchit pas plus qu’aux sottises qu’il entreprend par oisiveté et ennui.
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Les hommes pensent plutôt au cas particulier, au présent, et, à bon droit, parce qu'ils sont appelés à agir ; les femmes, au contraire, pensent davantage aux enchaînements de la vie, et à bon droit aussi, parce que leur sort, le sort de leurs familles, est lié à ces enchaînements et ce sont tout juste ces enchaînements que vous exigez d'elles.
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Nous aimons à nous figurer les choses humaines, et en particulier les liens du mariage, comme tout à fait durables ; et, pour ce qui regarde le dernier point, nous nous laissons conduire par les comédies que nous voyons répéter sans cesse, à ces imaginations qui ne concordent point avec le train du monde. A la comédie, le mariage nous apparaît comme le but suprême d’un désir différé par des obstacles pendant plusieurs actes ; et, à l’instant même où il est atteint, le rideau tombe, et cette satisfaction momentanée se prolonge en nous. Dans le monde, il en va autrement : derrière le rideau, le jeu continue, et s’il se relève, on aimerait mieux n’en plus rien voir, n’en plus rien entendre.
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Savez-vous quel livre, devenu un classique, a fait scandale parce qu'il justifierait (soit-disant) le divorce ? Alors qu'il s'agit surtout d'un roman sur la passion et les conséquences d'une rupture un peu trop franche.
« Les affinités électives » de Goethe, à lire en poche chez Folio.
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