L’Occident est victorieux ; il n’existe pas d’autre système économique que le capitalisme. Les pauvres gens d’Europe centrale et orientale l’ont appelé de leurs vœux pendant des décennies. Ils croyaient qu’avec l’effondrement du « socialisme réel », ils allaient entrer dans le royaume de la liberté, de la prospérité, de la sécurité et de la justice. Ils s’étaient empressés de voter à droite, pensant que la droite représentait le conservatisme, la sécurité, le bien-être individuel, l’ordre social et moral fondé sur les valeurs traditionnelles. Mais non, la droite représente le marché, la compétition, les contraintes productivistes, la passion du profit et l’amour du gain, l’écrasement des plus faibles, le démantèlement de la Sécurité sociale et des services publics, le chômage pour un tiers, bientôt peut-être pour la moitié des actifs de l’ex-RDA, entre autres. Ils ont été délivrés de l’ordre totalitaire ? C’est bien. Et maintenant, « la liberté pour quoi faire ? ».
Le capitalisme ne s’accommode pas d’un ordre social stable. Cette constatation se trouvait déjà dans le Manifeste communiste : « Tout ce qui est solide se dissout dans l’air » ; ce qui résiste au changement sera impitoyablement balayé. La sécurité, la stabilité, le salut ne peuvent avoir d’existence qu’imaginaire, mythique, religieuse. La nation, le sentiment national, le nationalisme remplissent le vide qu’a laissé la disparition de l’ordre social-communautaire enraciné dans la tradition. L’« identité » disparue avec cet ordre ne peut plus exister que sous la forme d’une auto-affirmation vide de contenu, d’un « nous c’est nous » : le Bien c’est nous, le Mal vient d’eux, ils sont coupables, eux, de la perversion des mœurs, de la décadence de la nation, de la disparition de la cohésion national-communautaire. Protégeons-nous contre eux, faisons de notre identité les murs d’une forteresse imprenable.
Serge Audier
Si l'écologie a pour objectif d'étudier les rapports entre un organisme et le milieu naturel, et se donne à cette fin les outils d'une science, elle ne peut ignorer les facteurs qui influent sur ces rapports complexes, lesquels ne sont pas « naturels » mais tiennent à des données sociales, culturelles, économiques, politiques. Aussi, de l'intersection de l'écologie et des sciences sociales ou économiques, est née l' « écologie politique », terme forgé en 1935 par le physiologiste américain Frank Thone mais utilisé surtout à partir des années 70. Impulsée par les travaux pionniers de l'anthropologue Eric R. Wolf, de Michael J. Watts, de Susanna Hecht, du philosophe Hans Jonas ou, en France, d'André Gorz, l'écologie politique a connu un essor considérable, et a déjà une « histoire ».
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