La sémantique n'a pas su convaincre jusqu'à présent : elle s'est fait dépasser par la linguistique et n'a pas su définir les frontières et les méthodes de sa recherche. C'est que ce Greimas propose de faire ici.
D'abord il ne s'agit pas de s'intéresser aux raisons qui lient la chose au mot : c'est du ressort de la philosophie de la perception ou de la connaissance. La sémantique ne doit s'intéresser qu'au couple signifié-signifiant et se désintéresser de la signification. le problème étant bien sûr que parler de mots avec des mots risque de tourner à la tautologie. Il s'agit alors de créer un métalangage qui soit normalisé pour parler des mots.
Partant du fait que le choix d'un mot se fait au détriment d'un autre mais sur une ligne commune, on en déduit que le mot n'est que la somme de ses propriétés et que le mot se choisit par rapport à un autre mot sur une base de disjonction et de conjonction, c'est-à-dire une antonymie. Les "mots" sont dits lexèmes. Dans une relation antinomique, ils sont chacun associés à un caractère spécifique dit sème. La catégorie sémique subsumme les deux sèmes. C'est la catégorie sémique qui organise la conjonction. Indépendammant de la relatin antinomique, un lexème est donc caractérisé par une liste de propriétés, qui sont la collection des sèmes qui lui sont associés.
Ceci dit, le discours est vivant et rien de tout cela n'est figé. Selon les contextes, on emploira un morphème ou un autre sans lien "logique", mais seulement sémantique. Autrement dit, si je dis "chien" plutôt que vache, ce n'est pas seulement parce qu'un lien unit le truc poilu devant moi au mot chien, mais parce que les sèmes de chien (petit, langue pendante, griffes aux pattes, etc), correspondent mieux que vache (corne, sabot, etc). Ne me demandez pas en quoi j'associe ces trucs aux pattes à des griffes plutôt qu'à des sabots, j'imagine qu'on est ici dans la philosophie de la perception. Donc je dis chien. Mais je peux dire (que ce soit vrai ou non) que mon voisin est un chien. le lexème est en effet dans le discours un sémème, une manifestation particulière qui associe un noyau sémique à un sème contextuel (en l'occurrence, mon voisin ne serait pas sympa - à moins que justement il soit fidèle, à voir selon, précisément, le contexte). le métalangage sémantique est constitué de ces sèmes, qui n'ont donc pas de valeur dans le discours, mais dans l'analyse sémantique. Les catégories sémiques sont au niveau supérieur ou sémiologique. Une combinatoire entre sèmes nucléaires et classèmes crée des milliards de sémèmes que la langue n'épuise pas.
L'idée est d'effectuer l'opération pour toutes les langues possibles dans le but de déterminer la structure de la formation du discours humain. Les connaissance ne permettant pas de réaliser pour le moment ce travail, il est du moins possible pour le moment d'analyser les énoncés textuels par ce biais en remplacement des analyses logiques et syntaxiques.
Commenter  J’apprécie         40
Ouvrage fondamental pour qui étudie la linguistique, mais pour le commun des mortels, c'est pour le moins ardu et il est difficile de rester éveiller en le lisant.
Commenter  J’apprécie         40
En tenant compte de telles attitudes béhavioristes, il était devenu courant de considérer la sémantique elle-même comme n’ayant pas de sens. Et pourtant, comme le remarque justement Jakobson en parlant de ceux qui disent «que les questions de sens n’ont pas de sens pour eux: quand ils disent «pas de sens», de deux choses l’une: ou bien ils savent ce qu’ils veulent dire, et par le fait même la question du sens prend du sens, ou bien ils ne le savent pas, et alors leur formule n’a plus de sens du tout»
L'abstraction est certainement un appauvrissement du contenu, mais c'est en même temps le prix qu'impose la communicatin pour garantir la pertinence de la signification transmise. Au lieu de la déplorer, comme le font certaines philosophies "concrètes", il nous faut l'accepter comme une nécessité ; après l'avoir constatée, il ne reste qu'à se réjouir qu'elle rende possible la construction de philosophies, mêmes "concrètes".
Tout exposé scientifique, oral ou écrit, aussi épuré soit-il, comporte toujours tantôt une certaine quantité de bruit, nécessaire pour faire passer l’information, tantôt au contraire, des éléments elliptiques, des sous-entendus dont l’ampleur n’est jamais précisée ni uniforme.
La structure est le mode d'existence de la signification, caractérisée par la présence de la relation articulée entre deux sèmes.
Le monde ne peut être dit humain que dans la mesure où il signifie quelque chose.
European Semiotics 5/5 - University of Helsinki ...