Une octave fort diminuée, une écriture hors de portée. La clé étant de ne pas se tromper de clavier.
Bref, pas de quoi crier au loup.
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« Si l’amour ne peut être partagé, Que je sois celui qui aime le plus. » Wystan Hugh Auden
Je me souvenais encore de sa façon enfantine et gourmande de parler des femmes, d’évoquer l’espèce comme l’ultime territoire inconnu et redoutable à conquérir, une catégorie de mammifères pour laquelle il éprouvait, comme beaucoup d’hommes, un mélange de convoitise, de supériorité et de terreur.
Sous le soleil de Rome, j’eus brusquement la tentation de mettre mes pas dans ceux de cet immense musicien, de suivre son exemple, son art prodigieux d’avoir vécu intensément, joyeusement, inlassablement –voyages, amours, rencontres. La vie de Liszt vous faisait croire aux contes de fées, à la justice immanente, aux récompenses d’un destin génial et d’une œuvre éclatante. Il a accompli la forme parfaite d’un mouvement unique, sa vie et son œuvre dans la même inventivité, et les deux dans le compagnonnage de Dante, mais aussi de Byron, Goethe, Shakespeare ou Raphaël. Et puis Liszt, ce fut aussi le besoin pressant d’une retraite, de solitude, de recueillement et c’est à Rome, justement, entre le Forum et le Vatican qu’il était venu les chercher, pour assouvir dans cette aspiration sa soif d’être libre – et alors d’être bon.
« Il faut beaucoup d’années pour devenir jeune », disait Picasso.
Une rencontre, c’est un coup de dés nécessairement vainqueur. Il triomphe de tant d’incertitudes qu’il s’affirme comme la preuve d’un destin, au lieu de cette quête à tâtons, cet exercice de taupe, cette recherche aveugle d’une combinaison gagnante qu’on voudrait nous donner à croire.
Quelle que soit la distance qui sépare, il y a des gens qui ne vous ont jamais quittés et que vous ne quittez jamais.
Même au bout du monde, aux antipodes ou aux tropiques, on reste toujours prisonnier de ses angoisses. L’enfer, ce n’est jamais les autres ; l’enfer, c’est soi-même : la seule personne à laquelle on ne peut échapper.
Entre les hommes, ce n’est pas parce que le lien est établi qu’il est d’une intensité réciproque – ou qu’il restera toujours également vécu. Rien n’est jamais acquis, rien ne nous est dû, et plus la relation avec l’autre est une relation rare – et quelle merveille, quelle rareté, quel privilège que cette relation avec le loup-, plus elle est fragile, incontrôlable.
Là, je trouve le désir, je trouve la jouissance, je trouve le plaisir, le sexe et même l’amour propre : l’autofascination, le narcissisme jusqu’à l’autodestruction. Je trouve aussi le cri, l’angoisse, la solitude. Mais l’Amour ? L’Amour avec un grand A. Je crains qu’il soit passé de mode et, à tout prendre, ça me va très bien : notre siècle a inventé d’excellents manuels pratiques pour sa forme contemporaine…. L’hygiène a triomphé de l’amour.
L’amour exige de chacun qu’il l’ait lu, qu’il l’ait vu, qu’il l’ait admiré à l’œuvre avant de commencer, pratiquement, à aimer ou, alors, il s’exprimera sous sa forme la plus fruste, la plus faible dans le rapport qui devrait, justement, rester le plus sublime : le couple. L’Amour doit préexister à l’amour.
En amour, comme en musique, je laisse sa part au silence. Ces silences vécus de façon absolue qui composent l’Instant et qui, alors, deviennent plus grands que le temps, plus grands que l’éternité : ils sont son éloge même.
La tristesse naît de ce que l’on court après les choses. Après la vérité, après la musique, après le paradis. On les cherche à l’extérieur de soi où elles n’existent pas alors qu’il s’agit de plonger à l’intérieur de notre être, dans la transparence de l’âme pour les trouver. La fêlure par laquelle la tristesse se faufile, c’est celle par laquelle vous aurez laissé entrer le monde des apparences et des futilités. Vous serez triste quand, par routine, par paresse, vous cesserez de creuser, de fouiller votre cœur et votre âme jusqu’au point de gravité. C’est dans cette quête perpétuelle que l’on peut devenir de plus en plus sobre, de plus en plus simple, abandonner les fioritures pour comprendre, chercher et saisir l’essentiel – cet art suprême qui permet de tout ressaisir à la fois. C’est alors qu’on trouve son style, et trouver son style, c’est prendre les armes contre la mort. C’est même la seule arme qui permette, efficacement, de défendre la vie, et la lumière.
Dans la musique du seul mot Afrique, on entendait le barrissement de l'éléphant, le feulement du guépard et le rugissement du lion, et encore l'immense craquement du sol sous la cuisson du soleil ; même le vide devait y être vivant. L'Afrique, c'était le chant primaire de la planète Terre.
"Lorsqu'on part, on n'abandonne par ses pensées dans une consigne. Même au bout du monde, aux antipodes ou aux tropiques, on reste toujours prisonnier de ses angoisses. L'enfer, ce n'est jamais les autres ; l'enfer, c'est soi-même : la seule personne à laquelle on ne peut échapper."
"Pour un regard, toutes les choses du monde naissent ensemble. Pour la branche, le poids de l’instant, c’est le poids de l’oiseau."
L'art tutoie l'âme car c'est à l'âme qu'il s'adresse. Il y a une puissance rédemptrice de l'art : il renouvelle la religion- ce lien à l'Amour, à qui on peut donner tous ses autres prénoms: création, joie, compassion.
Helene GRIMAUD plays Brahms piano sonata No.3 - 3st mov