Retour sur un siècle d'avancées, tantôt poussives, tantôt rapides, pour les droits des femmes. Celles-ci, mais aussi les stagnations aux sein des familles, les ruptures que cela a entrainées, vues par les femmes dans leur quotidien (mère de famille, divorcées ou non, filles de ces femmes, mais aussi militantes, chercheuses, journalistes...) qui ont commenté et contribué à instaurer plus d'égalité entre les femmes et les hommes.
C'est émouvant, révoltant, encourageant. C'est assez peu pessimiste, même si bien sûr il y a les mises en garde de retour en arrière (et il fut observé, d'ailleurs dans bien des familles pendant les mois de confinement). C'est une base pour aller plus loin encore !
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Des textes magnifiques écrits par des femmes connues ou inconnues qui nous rappellent que le statut de femme a été très lourd à porter et que nous sommes redevables à toutes celles qui nous on précédées de notre liberté d'aujourd'hui. Certaines de ces femmes méritent bien plus que tous ces blablateurs politiciens de leurs époques qui se prenaient pour le nombril du monde.
Quatre périodes sont traitées dont les titres résument parfaitement lesdites périodes concernée :
. 1900-1919, femmes oubliées
. 1920-1944, femmes de l'ombre
. 1945-1974, femmes libres
. 1975-2007, femmes assumées
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Le travail d'une femme, depuis son lever jusqu'à son coucher, est aussi dur qu'une journée de guerre, pire que la journée de travail d'un homme, parce que elle, elle doit inventer son emploi du temps conformément à celui des autres gens, des gens de sa famille et de ceux des institutions extérieures.
En une matinée de cinq heures, elle fait le petit déjeuner des enfants, elle les lave, elle les habille, elle nettoie sa maison, elle fait les lits, elle fait sa propre toilette, elle s'habille, elle va faire les courses, elle fait la cuisine, elle met la table, en vingt minutes elle fait manger les enfants, elle hurle contre, elle les ramène à l'école, elle fait la vaisselle, elle fait la lessive et le reste, et le reste. Peut-être, vers trois heures et demie, pourrait-elle, pendant une demi-heure, lire un journal.
Une bonne mère de famille, pour les hommes, c'est quand la femme fait de cette discontinuité de son temps une continuité silencieuse et inapparente.
Alors l'homme est content, ça va bien dans sa maison. L'homme du Moyen Age, l'homme de la Révolution, l'homme de mille neuf cent quatre-vingt-six.
Marguerite Duras - La vie matérielle.
Je trahirai demain pas aujourd’hui.
Aujourd’hui, arrachez-moi les ongles,
Je ne trahirai pas.
Vous ne savez pas le bout de mon courage.
Moi je sais.
Vous êtes cinq mains dures avec des bagues.
Vous avez aux pieds des chaussures
Avec des clous.
Je trahirai demain, pas aujourd’hui,
Demain.
Il me faut la nuit pour me résoudre,
Il ne faut pas moins d’une nuit
Pour renier, pour abjurer, pour trahir.
Pour renier mes amis,
Pour abjurer le pain et le vin,
Pour trahir la vie,
Pour mourir.
Je trahirai demain, pas aujourd’hui.
La lime est sous le carreau,
La lime n’est pas pour le barreau,
La lime n’est pas pour le bourreau,
La lime est pour mon poignet.
Aujourd’hui je n’ai rien à dire,
Je trahirai demain.
Marianne Cohn est née à Mannheim en 1922 dans une famille d'universitaires de gauche et d'origine juive. Elle rejoint la résistance et s'est mise à exfiltrer des enfants vers la Suisse, des enfants juifs…. Elle a été arrêtée le 31 mai 1944, alors qu'elle convoyait 28 enfants. Elle a refusé d'être libérée par la résistance, craignant une vengeance contre ses protégés. On a retrouvé son corps mutilé et martyrisé dans un charnier de Haute-Savoie. Marianne avait été violée avant d'être achevé à coups de bêche… Elle avait 23 ans
"Hitler m'a pris mon pays, ma maison, mon fiancé, mais il ne prendra jamais ma pensée... Ma pensée je la garde pour moi..." Cette phrase d'une jeune Hollandaise de 20 ans, prisonnière des bagnes nazis pendant la Seconde Guerre mondiale et codétenue de la résistante Agnès Humbert, ne pouvait que servir d'introduction à Paroles de femmes. Au cours de l'histoire, on a pu contraindre les femmes, les brimer, les malmener, les enfermer, les violenter, les réduire en esclavage ou les traiter comme des êtres humains de seconde catégorie... Mais il est une fonction humaine qui reste inaliénable, tant que l'être humain ne perd pas l'envie de vivre : celle du regard, de la liberté du regard qu'il porte sur les êtres, sur les paysages et sur les choses. C'est cette liberté du regard des femmes qui s'exprime ici à travers leurs paroles et tout au long du XXe siècle.
La guerre est finie. Il s'agit de remettre les femmes au pas... Le discours louangeur caractérisant la mobilisation des femmes pendant la guerre disparaît peu à peu au profit du thème de la femme profiteuse, invitée à rendre sa place au soldat et à retourner au foyer ou aux métiers traditionnellement féminins tels que la couture et la domesticité... Mais la guerre a néantisé plus de 10% de la population active masculine, sans compter les blessés et les mutilés; et la grande industrie qui se modernise a besoin de petites mains. Par ailleurs, couplée avec la peur du célibat et les revers de fortune des classes moyennes, la féminisation du tertiaire permet aux jeunes filles de la bourgeoisie d'exercer une profession et d'obtenir un relatif droit au travail. Mais après les pertes de la Grande Guerre, l'obsession démographique fait que l'on ne s'intéresse pas au suffrage des femmes mais au contrôle de leur ventre, pour les contraindre à être mères...
Les prolétaires de 1900 sont paysannes, ouvrières, lingères, repasseuses, couturières, commerçantes, nourrices ou domestiques. Elles se croisent à la fontaine, au lavoir, au marché... Pour les ouvriers, la "ménagère" représente un idéal de respectabilité. En 1898, la CGT, tout en souhaitant l'égalité des salaires, précise que seules sont "autorisées" à travailler les célibataires et les veuves. Les bourgeoises doivent quant à elles rester ces épouses modèles qui supervisent le travail des domestiques tout en veillant sur l'éducation morale et religieuse des enfants.
En 1906, les femmes composent 38% de la population active. Une femme mariée sur cinq travaille. La plupart sont domestiques ou travaillent à domicile mais l'école obligatoire transforme des "ménagères" en vendeuses, en dactylos, en demoiselles des postes, en sages-femmes et en institutrices...
Ecrivain, historien, ancien élève de l'école normale supérieur, ancien directeur de la Culture des Musées des Lettres et Manuscrits de Paris et de Bruxelles, Jean-Pierre Guéno est un "passeur de mémoire" qui aime retrouver les manuscrits, les sources, et les partager.
Retrouvez ici sa présentation des correspondances de Guillaume Apollinaire pendant la Première Guerre Mondiale.