(...) si Fernand Braudel a bien écrit un ouvrage intitulé "L'Identité de la France" le concept d'identité culturelle est souvent accueilli avec méfiance dans notre nation républicaine. Beaucoup craignant que derrière elle se cachent puis se développent soit une vision essentialiste aux relents politiques extrémistes rappelant celle de l'entre-deux-guerres qui fut un des socles de Vichy, soit, paradoxalement, une justification théorique du multiculturalisme. L'identité est à l'évidence une "valeur" qui se prête à toutes les mystifications et instrumentalisations, mais c'est également une notion à part entière en sciences humaines et sociales, notamment en sociologie, ethnologie et psychologie.
(et aussi en gastronomie...)
Le terme "gastronomie" se popularisa peu après le développement du restaurant à Paris et la chute de l'Ancien Régime, en 1801, grâce à un ouvrage de Joseph Berchoux qui le "réinvente". (...) de 1806 à 1833 le chef Antonin Carême fait paraître ses principaux ouvrages. Le discours gastronomique est par conséquent fondé pendant la période où se réalise la synthèse entre certaines traditions d'Ancien Régime qui persistent et les bouleversements charriés par la Révolution.
Si Jean-Anthelme Brillat-Savarin (...) n'a pas "inventé" la gastronomie, sa Physiologie du goût, parue en décembre 1825, peu avant sa mort, constitue un sommet du discours gastronomique du XIXe siècle. Si s'alimenter est un besoin naturel, il est nécessaire aussi de penser cet acte quotidien sur lequel ce littérateur sensualiste a "beaucoup à dire". L'historien Pascal Ory démontre que la "Physiologie du goût", qui doit impérativement être lue au miroir des idées philosophiques, politiques et sociales de son époque engage en effet des éléments fondamentaux.