_Les vampires de plus de deux cents ans sont-ils tous des pervers ? m’exclamais-je, exaspérée.
_J’ai plus de deux cents ans, me rappela Jean-Claude.
_C’est bien ce que je voulais dire.
_Je compte te garder pour toujours, ma petite. Je n’y songerais pas si je pensais que tu puisses m’ennuyer un jour.
_Moi, vous m’ennuieriez.
_Tu cherches à me provoquer !
Je haussai les épaules.
Ne jamais prendre le moindre risque est le pire échec de tous.
Jean-Claude m’attire. Il se peut même que je l’aime, dans le coin le plus ténébreux de mon âme.
Il éclata de rire. Son visage s’illumina de l’intérieur comme si quelqu’un avait allumé une bougie sous sa peau. Il était si beau ainsi que mon cœur se serra douloureusement.
Mais sa beauté ne me donnait pas vraiment envie de le toucher. Elle me rappelait un tigre du Bengale que j’avais vu autrefois dans un zoo. Aussi haut qu’un poney avec des yeux dorés et une fourrure orange, noire, crème et blanc nacré. A force de faire les cents pas, il avait creusé des sillons dans la terre battue de son enclos.
Je me souviens que mes doigts m’avaient démangé, tant j’avais envie de passer la main entre les barreaux pour le caresser. Il était si proche, si beau, si sauvage… Si tentant.
Je serrai mes genoux contre ma poitrine.
Le tigre m’aurait sans doute arraché la main et, pourtant, une partie de moi regrettait encore de ne pas l’avoir caressé.
Je scrutai le visage de Jean-Claude, sentant son rire caresser mon échine comme du velours. Une partie de moi se demanderait-elle toujours ce qui ce serait passé si j’avais dit « oui » ? Sans doute.
Le courage n'a jamais sauvé personne. Il augmente un peu les chances de survie, c'est tout.
Bien des femmes se plaignent qu'il ne reste pas d'hétéros célibataires. Moi, j'aimerais simplement en rencontrer un qui soit humain.
Je restai immobile quelques instants, observant le combiné.
Je n’avais pas eu le choix. Alors, pourquoi mon estomac était-il noué ? Pourquoi éprouvais-je une furieuse envie d’appeler Jean-Claude pour le mettre en garde ? A cause des marques, ou Richard avait-il raison ?
Etais-je amoureuse de Jean-Claude ?
— Vous êtes une abomination à la face de Dieu ! siffla-t-il.
— Jésus vous aime aussi, dis-je avec un sourire.
- Ce genre de massacre ostentatoire est mauvais pour les affaires. Les vampires sont bourrés de défauts, mais il faut leur reconnaître un sens pratique très développé. Personne ne réussirait à rester en vie pendant des siècles sans faire preuve d'un minimum de discrétion. Et sans être impitoyable.
- Impitoyable? répéta Dolph.
- Une question de logique. Si quelqu'un découvre ton secret, tu le tues ou tu le transformes. C'est la loi du milieu. Rien de personnel.