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Bruno Boudard (Traducteur)
EAN : 9782752904959
277 pages
Phébus (10/03/2011)
3.58/5   18 notes
Résumé :
Vid Cosic est un jeune Serbe de Belgrade, charpentier de métier, venu chercher un travail à Dublin.

Dès son arrivée en Irlande il noue une amitié, très alcoolisée, avec un avocat, Kevin Concannon, à qui tout semble réussir, mais qui est résolu à taire le chaos familial dans lequel s’est déroulée son enfance. Immigré doué pour l’espoir, un peu naïf, Vid Cosic croît en l’avenir de l’espèce humaine et ne songe qu’à faire le bien autour de lui.
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Hugo Hamilton possède un réel talent pour explorer le thème universel de l'exil, de la solitude des immigrés et des réactions de rejet qu'ils peuvent subir leur rappelant incessamment qu'ils ne sont pas d'ici…ceux que Tahar Ben Jelloun décrit comme « des invités qui ne veulent déranger personne ».

Vid Cosic fait partie de ceux-là : il a quitté la Serbie avec sa besace de menuisier pour l'Irlande, terre d'accueil des migrants après avoir été une terre d'exil pour Londres. Armé d'une solide volonté de reconstruire sa vie et de s'enraciner à Dublin, il prend très vite conscience de la difficulté à être un habitant ordinaire en accumulant des petits boulots jusqu'à sa rencontre fortuite avec Kevin Concannon, avocat fantasque. de cette rencontre nait une amitié aussi soudaine que fraternelle, animée par le désir commun de garder enfouis leurs souvenirs d'un passé douloureux, un père parti pour l'un et des parents tués dans un accident de voiture pour l'autre.
Profondément altruiste et crédule, Vid voit son rêve d'appartenir à la communauté prendre des airs de réalité lorsque Kevin lui présente sa famille et lui confie les travaux de rénovation de la maison familiale. Grande demeure dans laquelle Vid va très vite découvrir l'intimité et les secrets des Concannon. Il tente alors d'y ancrer son histoire mais elle lui échappe très vite. Littéralement happé par les problèmes de cette famille qui ne lui attire que des ennuis, Vid réalise l'illusion de sa condition et de l'affection que semblaient lui porter chacun de ses membres. On ne lui pardonne rien car il ne fait pas partie des leurs.

L'auteur fait de Vid un fin observateur de la société irlandaise face à ce qui a été appelé le « miracle irlandais » : il dépeint la réalité de cette terre où « la brume flotte au-dessus de la mer et remonte dans les rues » avec des effluves de sel portées par le vent, une terre qui peut susciter un sentiment d'hostilité pour celui qui est étranger aux moeurs du pays, aux subtilités de la langue et ne maîtrise pas suffisamment les usages pour éviter la franchise du candide. C'est un constat qui sonne comme une vérité universelle et se reflète à travers les malentendus et les maladresses. Cette incompréhension renvoie sans cesse Vid à ses insuffisances et le conduit à se retrancher derrière une espèce de "politesse de l'immigrant", un dévouement sans commune mesure à faire le bien en oubliant sa propre révolte. L'ostracisme est insidieux.
Ainsi au-delà de la fiction, c'est l'occasion pour Hugo Hamilton de dresser le portrait avec intelligence de ces gens venus d'ailleurs en quête d'un avenir meilleur ou voulant laisser derrière eux le passé. Pour Vid : le passé est nébuleux et douloureux qu'une balle a recouvert d'amnésie, il s'échine à renier cette mémoire dans un pays paradoxalement riche de légendes qu'il tente de connaître, un pays où les gens et les lieux ont une mémoire vivace. Cette mémoire qu'elle soit cadenassée ou nostalgique s'impose fortement dans le récit sans être étouffante.
Pour autant ce n'est pas un roman sombre, l'auteur use d'un style détaché qui rejette tout misérabilisme, il porte un regard lucide qui écarte les faux-fuyants et les subterfuges propres aux romans à l'intrigue un peu faiblarde. Il y a un réel sens de la narration et un foisonnement romanesque très bien maîtrisé dans "Je ne suis pas d'ici" au point que la lucidité de l'auteur refuse de compromettre l'espoir de Vid d'apprendre les banalités du quotidien des gens d'ici. Même si le désarroi guette celui qui court tête baissée après son rêve de vie meilleure et tisse les noeuds de l'intrigue, Vid n'abandonne jamais.
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Cela fait quelques années que je ne suis pas d'ici non plus. J'ai beau changer de région régulièrement, chercher une petite place qui deviendrait mienne, c'est mission impossible. Et pourtant je n'ai pas changé de pays, je parle parfaitement la langue de ce pays, j'ai la même religion, les mêmes défauts et qualités que mes congénères. Mais je ne serai jamais d'ici et si je retourne dans ma région natale je ne serais plus d'ici. Alors avoir un point de vue objectif, humoristique d'un étranger qui parle mal le dialecte régional et l'anglais en général, qui ne connait ni les coutumes ni les habitudes des irlandais et qui va faire confiance aux premières personnes rencontrées ce qui lui vaudra un séjour en prison est… Jouissif. Oui d'accord, je pourrais pleurer sur le sort de Vid mais il raconte tellement bien ce qui peut vous arriver si vous partez ailleurs. Un livre bourré d'humour sur le sort d'un étranger.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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Hugo Hamilton, pour ceux qui ne le saurait pas, est un "sang mêlé" : irlandais de père, allemand de mère. Autant dire qu'en matière de quête d'identité, d'émigration, de préjugés tenaces, de xénophobie, et de racisme il sait de quoi il parle. Père nationaliste, mère ayant fui l'Allemagne nazie, il s'est pourtant vu traité de nazillon etc pas ses compatriotes irlandais pour qui il était un étranger malgré un père plus Irlandais que la majorité des Irlandais.

L'Irlande qui était jusque-là une terre d'émigration et non d'immigration a vu les choses changer avec l'apparition du Tigre celtique. Pour un petit pays comme celui-ci (4 millions d'habitants en République d'Irlande), ce fut une donne nouvelle et aussi une crainte de voir déferler chez eux tant de gens des pays de l'Est (essentiellement) en quête d'une vie meilleure.

Ainsi, Vic le héros qui ressemble à un Candide serbe, tente coûte que coûte de s'adapter à son pays d'adoption, lui qui n'a plus de famille. Il n'est pas chômeur, il est charpentier et trouve du travail sans problème. Il est poli, gentil et sociable. Il se lie d'amitié avec un certain Kevin, avocat irlandais dont la mère a une maison avec travaux à faire (même si à ses yeux, il n'en voit pas l'utilité). Il est grassement payé pour ce qu'il fait (au point de se demander comment les gens peuvent à ce point jeter l'argent par les fenêtres). Il est serviable. Kevin, que dès le début du roman, on juge un peu trop amical pour être totalement honnête ne tarde pas à dévoiler son vrai visage. Et là, ça craint...

Alors Vic ne comprend pas parce que "d'après ce qu'on [lui] avait raconté, les Irlandais avaient toujours été les innocents à qui on avat fait subir des horreurs par le passé. Ils n'avaient jamais voulu faire de mal à qui que ce soit. Ils étaient aimés de tous partout dans le monde. Alors chaque fois qu'un crime était jugé devant une cour, c'était un choc de constater que les Irlandais s'infligeaient aujourd'hui des choses qui ne seraient jamais venues à l'idée d'aucun oppresseur."

Vic essaie à tout prix de comprendre les codes de ce pays, de lire entre les lignes même s'il s'y casse les dents. Les autochtones, parfois de manière totalement maladroite, lui posent des questions qui reviennent à lui demander s'il est de ceux qui ont perpétré le génocide dans son pays. Mais dès que les choses tournent au vinaigre pour Vic, ses pseudo-anciens amis en font d'emblée et sans complexe un criminel contre l'humanité. Heureusement, tout n'est pas si noir et Vic rencontre tout de même des mains secourables. Ce qu'il apprendra en Irlande, c'est que les secrets de famille sont ce qu'ils sont, comme partout ailleurs dans le monde. Et que dès que ça sent trop le roussi, les pseudo-amis mais vrais traitres vous lâchent.
L'Irlande est comme le reste des pays du monde et les gens y sont comme partout ailleurs.

Hugo Hamilton écrit ici un roman corosif sur l'Irlande contemporaine tout en montrant qu'ici, c'est comme ailleurs : les humains valent ceux des autres pays. de part et d'autre, il s'attache à détruire les images d'Epinal. En prime, j'ai particulièrement apprécié l'écho tout le long de l'histoire, de l'énigme de celle qu'on appelle "la noyée de Furbo" dont le cadavre a été retrouvé à Inishmore, la plus grande des îles d'Aran où elle aurait donné le nom à un lieu-dit, Bean Bhaite (la noyée en gaélique). Sans doute elle aussi, une femme victime de l'intolérance.

J'affectionne particulièrement le style de Hugo Hamilton : très simple et sans fioritures mais à la tonalité à la fois cocasse, dramatique et lyrique.

Un roman qui parlera à n'importe quel expatrié, je pense.


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Challenge ABC 2014/2015
Légendaire hospitalité irlandaise...
Vic Cosic, charpentier de son état, serbe d'origine, tente sa chance à Dublin. rencontre un avocat fort sympathique, et après une soirée bien arrosée, "couvre" son nouvel ami. Alors qu'il pense s'intégrer dans cette famille irlandaise, il déchante bien vite, de secret de famille en disputes alcoolisées.
Il reste un roman sur l'Irlande des années fastes, la désillusion des amitiés superficielles, la difficulté d'intégrer un nouveau pays, une nouvelle culture et de maîtriser les subtilités d'une langue.

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"Portrait incisif et cocasse d'un émigré sur le sol irlandais" indique la quatrième de couverture de Je ne suis pas d'ici. Incisif, le mot est faible ; cocasse, le terme est vraiment mal choisi, à côté de la plaque. Hugo Hamilton narre à la première personne les difficultés d'adaptation d'un jeune serbe, de bonne volonté, mais dont l'incompréhension du fonctionnement des conventions sociales dublinoises va amener tout un tas de complications, jusqu'à la tragédie finale. "Adopté" par un avocat, camarade de beuverie, il va se trouver embringué dans une histoire de famille douloureuse et inextricable, qui lui rappelle son propre passé à Belgrade, servant de détonateur involontaire à une série d'actes de violence qui le laisseront meurtri et, paradoxalement, l'aideront à faire l'apprentissage de l'intégration à son nouveau pays. le roman est d'une richesse folle, sur moins de 280 pages, décrivant aussi bien par le menu le travail de son héros, il est menuisier, que déterrant une vieille légende mortifère, dont plus aucune trace ne subsiste. L'admirable crescendo de la dernière partie laisse pantois : comme une descente aux enfers, contée avec une intensité digne d'un thriller aux accents épiques. Il y a dans Je ne suis pas d'ici des pages admirables sur la condition de l'immigré, sa solitude, sa rage naïve d'être enfin accepté, en dépit de son accent et de la mauvaise réputation de son pays d'origine. On ressort de cette lecture le coeur en bandoulière et l'âme chancelante. Un grand Hugo Hamilton.
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critiques presse (1)
Lhumanite
02 juillet 2011
Le récit de ses aventures multiples s’élargit à une dimension à la fois épique et politique. 
La réussite est remarquable. On se trouve là dans 
le tout meilleur d’une littérature de l’intranquillité, installée sur les failles du présent.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Personne ne pratique l’amitié comme vous la pratiquez dans ce pays. Elle déboule de nulle part. Sans demi-mesures. Tout ou rien. J’ai connu des endroits où l’amitié se cultive patiemment, avec un soin jaloux, comme le jardin d’un balcon. Ici, on a l’impression qu’elle pousse à l’état sauvage.
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Il avait dû espérer plus en rentrant au pays. Il avait dû espérer être progressivement accepté, pour finalement, avoir l'impression d'être, au contraire, encore plus un exilé ici, sur le pas de sa propre porte, qu'il ne l'avait été n'importe où dans le monde. Le retour, c'est une illusion, seule existe la fuite en avant.
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Vous avez une drôle de façon de pratiquer les choses ici.
Comme l’amitié, par exemple.
Personne ne pratique l’amitié comme vous la pratiquez dans ce pays. Elle déboule de nulle part. Sans demi-mesures. Tout ou rien. J’ai connu des endroits où l’amitié se cultive patiemment, avec un soin jaloux, comme le jardin d’un balcon. Ici, on a l’impression qu’elle pousse à l’état sauvage.
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Elle rit mais la plaisanterie n’était pas de moi. C’était une phrase que Kevin m’avait dite quand nous étions allés pêcher ensemble. Je copiais des expressions de ce genre chez les autres, mais j’avais beau m’exercer, jamais elles ne paraissaient naturelles dans ma bouche. Chez moi, c’était toujours de la seconde main.

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J’ai connu bien des solitudes, dans ma vie, mais la pire des solitudes vient de ce qu’on a fait soi-même.
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