Contrairement à
Delphine de Vigan qui parlait de sa mère en commençant par sa disparition et en déroulant sa vie,
Gwendoline Hamon nous parle ici des derniers jours de sa mère, Caroline, à partir du moment où la terrible réalité de sa fin annoncée lui est révélée, jusqu'à sa mort. Une mère extravagante, au destin singulier, fille d'artiste, mère très jeune, un mari, puis des amants, une vie un peu fofolle, une mère aux yeux de sa fille absolument pas comme les autres.
Comment dire à celle qui est si importante pour vous qu'elle va mourir, alors qu'elle repousse même la connaissance de sa maladie, ignorant ou feignant d'ignorer que ce qu'elle a est réellement grave ? Une mère insouciante, terriblement jeune pour mourir, à peine 58 ans, qui a déjà eu un cancer, dont elle avait annoncé la rémission. Qui ne veut pas se soigner, qui est certainement en plein déni de sa maladie, comme souvent devant la terrible réalité de la mort prochaine. Mais une mère qui est attirée par toute sortes de charlatans et de guérisseurs qui ne pourront rien pour elle mais en qui elle a confiance et vers qui elle se tourne. Une mère qui pratique le pendule pour mieux comprendre ou découvrir les gens avec qui elle vit, qui donne des prénoms indiens bizarres à ses petits-enfants, une mère si différente que c'en est difficile de vivre avec elle et de se construire « normale » !
Et puis sa fille Zélie, ses filles, qui savent, qui veulent rester auprès de leur mère pour ses derniers jours de vie, mais qui ne veulent rien lui révéler. Les filles donc, et les amis, qui continuent à agir comme si la vie était là, normale, sereine, évidente. Aussi décalées dans l'approche de la mort que l'a été cette mère dans sa vie. Etrange, fascinante, singulière, aimante et aimée.
Pas facile, de ne rien montrer mais d'être présente, de ne rien exprimer mais de vouloir faire passer tout l'amour et tout ce qu'on a à dire sans le dire. Pas facile de conserver intacte l'image de la mère aimée tout en la voyant se détériorer en jour en jour sous les effets inéluctables de sa maladie.
Difficile de faire son deuil, alors que l'on a attendu la mort, si rapide et pourtant si lente, quelques semaines finalement, de cette mère irremplaçable. Chaque jour menant à une fin inéluctable et annoncée, mais toujours inacceptable lorsqu'il s'agit de ces êtres auxquels on tient tant.
Un beau récit, malgré le sujet qui peut sembler de prime abord bien difficile.