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Brigitte Allioux (Traducteur)Karine Chesneau (Traducteur)Rose-Marie Makino-Fayolle (Traducteur)
EAN : 9782742769131
127 pages
Actes Sud (15/08/2007)
4.02/5   56 notes
Résumé :
C'est une expérience limite, une plongée dans l'horreur, que retrace le poète Tamiki Hara (1905-1951) dans trois nouvelles réunies sous le titre de l'une d'entre elles, Fleurs d'été. Ces textes furent à l'origine d'un genre littéraire (la "littérature de la bombe atomique", Genbaku bungaku), qui, en raison de la censure dont il fut l'objet de la part des forces d'occupation américaines, ne connut son essor qu'au début des années 1950. (...) Hara avait quitté sa vill... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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6 août 1945, Hiroshima. Tamiki Hara est aux toilettes quand survient l'explosion. C'est à ce détail absurde et dérisoire qu'il devra sa survie. Revenu de sa stupeur, il traversera les décombres à la recherche des siens, les yeux emplis d'effroi. de cette expérience traumatisante, Tamiki Hara ne se remettra jamais car si son corps a survécu, son esprit ne peut oublier l'horreur. Il n'a plus foi en l'Homme. Alors, du fond de sa douleur, il nous écrit. Il veut témoigner, rendre un dernier hommage à tous ces corps martyrisés qu'il a vu mourir sous ses yeux.

Trois nouvelles, à la fois sobres et intenses forment le recueil "Hiroshima, fleurs d'été". La première,” Prélude à la destruction” nous dit l'angoisse des japonais dans les jours qui ont précédé l'explosion. Les B29 pilonnent alors sans relâche. Dans les familles naissent des tensions. Il y a ceux qui veulent fuir et ceux qui refusent d'abandonner leur maison, "les patriotes" et ceux qui osent enfin critiquer l'entêtement du gouvernement japonais.
La deuxième nouvelle, ”Fleurs d'été" est le récit de la journée du 6 août, telle que l'a vécue Tamiki Hara. Un style épuré, des descriptions précises et voilà que devant nos yeux se dressent des images insupportables: ” A environ deux mètres de nous, sous un cerisier qui n'avait presque pas de feuilles, deux jeunes collégiennes étaient couchées par terre. Avec leurs visages calcinés, leurs dos maigres exposés au soleil brûlant, elles gémissaient de douleur et réclamaient à boire.”
Enfin la dernière, ”Ruines” évoque "l'après-catastrophe", les corps malades qui se meurent lentement, les vies détruites par la mort des plus proches. Et la montagne, immuable. "Désormais, où qu'il aille à pied, il pouvait embrasser du regard la chaîne des monts Chûgoku et avoir immédiatement devant les yeux les îles montagneuses de la mer intérieure de Setouchi. Ces montagnes dominaient les hommes dans les décombres, qui semblaient dire, l'air incrédule: "Mais que nous est-il donc arrivé?"
Oui, qu'est-il arrivé à l'humanité ce 6 août 1945? Pourquoi cet acte effroyable a-t-il eu lieu? de toutes les espèces vivantes nous sommes la seule à vouloir ainsi exterminer nos semblables. Comment des hommes, dans leurs bureaux, ont -ils pu décider de décimer des populations entières de civils comme on détruit des colonies d'insectes?  de la libération du camp d'Auschwitz le 27 janvier au bombardement de Nagasaki le 9 août, 1945 restera dans l'Histoire l'année de l'innommable, la perte définitive de l'innocence.

Ecrit sans colère et sans haine, "Hiroshima, fleurs d'été" est un témoignage bouleversant dont la simplicité et la sincérité vous étreignent. le recueil sera censuré par les forces d'occupation américaines jusqu'en 1950, on peut aisément comprendre pourquoi. Tamiki Hara, lui, se jettera sous un train en 1951. La barbarie, comme les radiations, peut encore tuer un homme des années plus tard. Restent sa voix et sa mémoire.
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Nous sommes ici dans la fiction biographique.

Ces trois longues nouvelles à la grande puissance évocatrice plongent le lecteur avec l'ombre d'un réalisme cinglant dans les heures qui ont précédés Hiroshima et Nagasaki ..
Dans le moment T de la catastrophe et dans l'immédiatement après l'assaut nucléaire .

Il est question dans ces textes du quotidien le plus élémentaire, il ne s'agit pas d'envolées lyriques déconnectées des réalités que ces gens ont vécus , et pour certains , au coeur de la fournaise !

Des textes solides et dénués du moindre pathos pénible ou racoleur ...
Personnellement je les possède depuis que leur diffusion était encore confidentielle ( chez Dagorno ) ..
Je les parcours de loin en loin sans jamais avoir pu oublier leur incroyable force douloureuse tristement et dignement contenue .

Un must , ce recueil .
Un style réaliste et circonstancié sans emphase poétique néfaste .

Des textes qui parlent aussi du japon , de plusieurs façons anodines et sans rapports directs avec la guerre .
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« Une neige poudreuse tombait depuis le matin. Un voyageur qui venait de passer la nuit dans cette ville, attiré sans savoir pourquoi par le charme de la neige fine, s'en allait à pied en direction du fleuve. »

Certaines lectures me plongent directement au coeur du roman. Je me sens investi d'une mission, celle de m'identifier au héros d'un jour, d'une page. Il me n'en a pas fallu guère plus que ces trois lignes, pour que mon esprit se sente au coeur du Japon, me prenne pour cet hypothétique voyageur et ressente ces flocons de neige d'un blanc immaculé venus recouvrir les trottoirs de la ville, comme les pétales de cerisiers sur le parc Ueno un après-midi d'avril où la brise s'est agitée… Cette entrée en matière dans la ville d'Hiroshima pourrait être une ode à la beauté, un instant poétique pour une âme vagabonde. Sauf que l'action se situe en plein été de 1945.

Tamiki Hara propose ainsi 3 courtes nouvelles sur la ville d'Hiroshima - avant, pendant et après l'explosion de la première bombe atomique. La poésie laisse place à l'horreur, une horreur aussi pure que glaciale qui me plonge dans un regard extatique et profond de ce que peut être la terrible violence de l'humanité. Je me demande toujours comment l'Homme possède en lui autant de cruauté et d'irresponsabilité pour massacrer aveuglément ses concitoyens. Assurément, la date du 06 Aout 1945, 8h15, marquera de façon indélébile la défaite de l'humanité.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Le poète japonais nous livre son témoignage en très grande partie autobiographique sur l'horreur de la bombe d'Hiroshima.

Trois récits sur l'avant, le jour J et les mois qui suivirent, qui nous font vivre l'atmosphère dans la ville nippone.

Dans le premier, "Avant la destruction", on suit une fratrie de mars à début août 1945, à l'approche du cataclysme. On sent que leurs sentiments sont contrastés, et évoluent bien sûr au fil du temps. Confiance et presque insouciance au début, alimentée par l'atmosphère de mensonge et tromperie véhiculée par le pouvoir et l'armée....mais bientôt, l'inquiétude prend le pas, et gagne lorsqu'il faut fuir chaque nuit sa maison pour échapper aux bombardements américains...

Dans le second, "Fleurs d'été", l'auteur raconte directement son vécu du 6 août. Il a échappé à la mort parce qu'il était aux toilettes au moment de l'explosion ! Il va nous raconter son exploration de la ville dans les minutes et heures qui suivent. C'est le chaos, l'horreur absolue, la désolation et la souffrance humaine partout. Une stupeur, une hébétude, une sidération totale. Ses proches s'en sortent relativement bien dans l'ensemble.

Dans le dernier récit, "Ruines", l'auteur revient un an après sur les lieux et leurs alentours. le paysage et les constructions encore meurtries font remonter les souvenirs encore brûlants de l'événement. Les hommes et les animaux errent comme des âmes en peine. Beaucoup de blessés ont fini par mourir, d'autres voient leur santé dégradée irréversiblement.

Ces récits sont d'une force évocatrice inégalable. L'auteur est un miraculé, qui a eu la chance d'assez peu souffrir dans sa chair mais qui a vécu toute l'horreur de l'événement, et constaté le drame humain. On sent que la blessure est psychologique (il avait déjà perdu sa femme en 1944, et il se suicidera en 1951), mais il ne sombre jamais dans les larmes et le pathos. Il réussit à décrire l'indescriptible, avec une précision remarquable. C'est d'un réalisme brut, choquant, qui ne cède rien sur la qualité du style, de l'écriture.

Le lecteur est bouleversé par les images si crues de ces visages et corps qui n'ont parfois plus grand-chose d'humains, ce désespoir et cette sidération qui se lit dans des yeux d'enfants et les plaintes, toutefois presque muettes de ces vieillards mourants qui gardent malgré tout une forme de dignité toute japonaise, comme si, presque, ils s'excusaient de ce qui leur arrivaient et d'avoir à quémander une aide illusoire.

Un témoignage pour l'éternité, et une émotion pour ce pays trop souvent martyrisé et traumatisé par les ravages de l'atome.
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Tamiki Hara nous présente avec Prélude à la destruction, Fleurs d'été et Ruines le témoignage brut et bouleversant de ce qui se déroula à Hiroshima avant, pendant et après l'utilisation par l'armée américaine de la bombe atomique, ce 6 août 1945 à 8 h 15. Témoignage du côté des vaincus qui ont connu l'horreur de ce nouvel enfer rendu possible par la folie de l'homme. Texte important qui marque au delà des dates apprises dans nos cours d'histoire et de la victoire des forces du bien sur l'axe du mal.

Le pire c'est que le Japon aurait capitulé sans cette bombe et celle de Nagasaki. Mais elles étaient opérationnelles et il était important pour certains militaires et politiques américains de les tester « en vrai »… Je vous invite à regarder le documentaire proposé sur Arte : Hiroshima, la véritable histoire.

« L'arme nucléaire, c'est la fin acceptée de l'humanité. » Théodore Monod.
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Citations et extraits (31) Voir plus Ajouter une citation
Le train passa sur le pont de la voie ferrée et je pus voir le pont Tokiwa. Sur la rive atteinte par l'incendie, d'immenses arbres calcinés semblaient vouloir griffer le ciel et des masses innombrables de cendres, de tailles et formes inégales, ondulaient à perte de vue. Ce jour-là, les souffrances inexprimables des blessés sur la grève s'étaient étalées devant mes yeux et pourtant, à présent, l'eau coulait paisiblement, limpide. Et des gens qui avaient survécu avançaient en file sur le pont dont le parapet avait été emporté. Passé le parc Nigitsu, on voyait les terres brûlées du champ de manœuvre de l'est : l'escalier en pierre du Tôshôgu situé sur une petite hauteur luisait comme un fragment de l'horrible cauchemar. Dans l'enceinte de ce temple, j'avais passé la nuit au milieu d'une foule immense d'agonisants qui mouraient les uns après les autres. J'avais l'impression que ce souvenir tragique était profondément gravé dans l'escalier en pierre que je voyais là-bas.

Extrait de "Ruines".
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Ma sœur, elle, avait aperçu l'éclair de l'entrée de la maison. Elle était allée se blottir précipitamment sous l'escalier, ce qui l'avait plus ou moins protégée. D'abord chacun avait pensé que seule sa maison avait été bombardée, mais quand les gens étaient sortis des décombres, ils avaient été très surpris de voir que c'était partout la même chose... Et il était étrange aussi de voir les maisons détruites sans aucun de ces trous que font habituellement les bombes. C'était peu après la fin de l'attaque aérienne. Il y avait eu un brusque éclair accompagné d'un léger bruit comme le chuintement d'une ampoule de flash, et en un instant tout s'était retrouvé sans dessus dessous. "On aurait dit de la sorcellerie", ajouta ma sœur en tremblant.

Extrait de "Prélude à la destruction"
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Natsu no hana -les fleurs d'été .
Sur l'escalier de pierre , il y avait deux femmes accroupies . Leur visages enflés horribles , avaient presque doublé de volume , et seuls leurs cheveux indiquaient qu'il s'agissait de femmes .Tout d'abord , plus que de la pitié , elles m'inspirèrent l'horreur .
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... Et voici qu'il réfléchissait maintenant au sujet de ce frisson dont lui parlait son ami sans sa lettre : le spectacle de l'enfer, comme nul ne pouvait l'imaginer, et qui déferle en un instant. Dans ces conditions, avait-il été totalement anéanti avec la ville, à moins qu'il ne se fût décidé à revenir pour observer l'agonie de son pays natal ? L'enjeu était le même pour sa destinée. Parfois, il lui venait soudain à l'esprit que la ville était restée intacte comme s'il ne s'y était rien passé...Une idée présomptueuse et stupide.
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J’eus la vie sauve parce que j’étais aux cabinets. Ce matin du 6 août, je m’étais levé vers huit heures. La veille au soir il y avait eu deux alertes aériennes mais rien ne s’était passé. Un peu avant l’aube je m’étais déshabillé et, chose que je n’avais pas faite depuis longtemps, je m’étais couché en kimono de nuit. Je me levais et entrai dans les cabinets sans répondre à ma sœur qui, en me voyant encore en caleçon, grommela que je me levai bien tard.

Quelques secondes plus tard, je ne sais plus exactement, il y eut un grand coup au-dessus de moi et un voile noir tomba devant mes yeux. Instinctivement je me mis à hurler et, prenant ma tête entre mes mains, je me levai. Je n’y voyais plus rien et n’avais conscience que du bruit : c’était comme si quelque chose telle une tornade s’était abattu sur nous.
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