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Chantal Philippe (Traducteur)
EAN : 9782878582291
251 pages
Viviane Hamy (06/04/2006)
4.06/5   26 notes
Résumé :
Livius Maxim, le héros de La Forteresse, rejoint volontairement l'armée, dans une sorte de fuite en avant afin d'échapper à son indécision et à la complexité de ses sentiments : il n'arrive pas à choisir entre deux sueurs, Cecilia - au lourd secret -, et Antonia. Son passé, comme l'Histoire, rattrape constamment sa vie, dont il entrave et détourne le cours. Quinze jours avant d'être démobilisé, le lieutenant Livius fait l'objet d'une mutation inattendue vers une loi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Livius, jeune lieutenant yougoslave, s'apprête à quitter l'armée dans deux semaines, après une dernière mutation. Mais alors qu'il est conduit à son nouveau poste, il est pris en otage par deux militaires qui l'emmènent dans une forteresse entourée de montagnes, au milieu de nulle part…un lieu inconnu, absent de toutes les cartes de géographie.

Et son étonnement ne fait que commencer. L'hiver règne déjà en ce lieu isolé, aucune discipline militaire n'y est appliquée, la cantine sert des plats dignes d'un restaurant 3 étoiles, mais tous semblent condamnés à ne plus jamais repartir. Lieu coupé du monde mais aussi du temps, Livius est régulièrement transporté dans sa vie passée dont il revit les scènes comme si il y était. Son enfance solitaire avec son père, sa rencontre avec Antonia, Cécilia et leurs parents Fabrio et Maria-Luisa, leurs liens secrets avec cette famille. Puis retour dans cet étrange lieu avec ses hommes chargés de le défendre contre de fantomatiques ennemis, sans aucun lien avec le monde réel, incapables de savoir ce qu'ils font là et depuis combien de temps. Jusqu'au jour où le colonel décide de reprendre les choses en mains…

Un roman à l'atmosphère étrange et très poétique, s'interrogeant sur le sens de la vie, le manque de liberté, les notions fluctuantes de vérité et de réalité, la faculté des humains à s'inventer des réponses aux questions qu'ils se posent, tout en dénonçant l'absurdité d'un régime politique arbitraire et autoritaire…Envoutant.
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Dans la veine du "Désert des Tartares" de Dino Buzzati et du "Rivage des Syrtes" de Julien Gracq, "La Forteresse" nous entraîne dans une garnison de frontière, bastion fortifié, unique rempart contre un ennemi invisible.
Le personnage principal, Livius Maxim, s'aperçoit bien vite que la discipline militaire n'est pas de rigueur et que le seul ennemi qui menace les habitants du fort est le temps. le temps de l'ennui, le temps du passé ressassé, un temps excentrique qui semble ne s'écouler pour personne de la même manière. Les soldats de la forteresse élaborent diverses théories pour expliquer ces distorsions du temps, mais aucune ne parvient à satisfaire Livius...

Le roman de Robert Hàsz ressemble étrangement aux deux chefs d'oeuvre cités plus haut, et pourtant l'auteur réussit un coup de maître en traitant de façon originale un thème mille fois exploré : la perception du temps qui passe, un temps loin d'être linéaire et objectif , mais lesté de souvenirs et mesuré à l'aune du vécu.
Robert Hàsz signe ici un excellent roman.
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Un gros coup de coeur pour ce récit se situant à mi-chemin entre le réel et l'onirique.

L'époque et le pays où tout se déroule ne sont pas précisément identifiables.
On sait que c'est une période contemporaine : ça se passe après la course aux étoiles, les protagonistes sont en jean et pull-over etc. ; et on imagine volontiers un pays de l'Europe de l'Est : on y cuisine du poulet au paprika, le règne est celui d'un maréchal ... (En fait, ex-Yougoslavie).

Dans ce pays imaginaire on a un accès à la mer. D'ailleurs, comme beaucoup d'images dans ce livre, l'accès à la mer est utilisé de façon très symbolique puisqu'il évoque de façon récurrente l'évasion, l'incertitude des horizons et l'infini sans retour. L'image du miroir comme porte secrète (vers soi-même, le passé ou vers le coeur de l'énigme) est aussi régulièrement présente.

Mais peu importe de mettre un nom et une date précise c'est au final très secondaire.

L'auteur raconte l'histoire de Livius, brillant étudiant en lettres à l'université, orphelin de mère, confronté à l'hermétisme d'un père diplômé d'histoire (le lien présent-passé marque énormément le personnage) ainsi qu'à des secrets de famille révélés au fur et à mesure du déroulement du fil narratif.

Livius fréquente une famille du même village, dont deux filles, Cécilia et Antonia font naître en lui des sentiments plutôt flous. Leur mère, Maria-luisa, voit déjà en ce jeune homme un gendre responsable tandis que leur père, Fabrio, un marin bedonnant se pose comme une figure plus sensible et plus compréhensive – plus complice, une autre image paternelle.

La relation Père – fils est analysée de façon soignée. le père biologique s'éloigne peu à peu tandis que le père affectif se rapproche.

De même les relations sentimentales sont délicatement décortiquées, l'image de la femme est tantôt celle de la mère (la mère tendre qui appartient au souvenir, la mère intimidante et fascinante de Cecilia et Antonia) tantôt celle de l'amante (la femme tendre, la femme révoltée) ou encore celle de la fille.

Livius abandonne l'université et demande à être mobilisé entre autre par besoin d'éloignement. Affecté d'abord à Negrov, il se trouve muté, 15 jours avant sa démobilisation, au sein d'une garnison isolée au bout du monde, dans une immense forteresse qui fait figure de piège.

Il n'a jamais rien vu de tel. Une discipline militaire réduite à sa plus simple expression, pas d'armes, des repas qui n'ont rien à voir avec les rations classiques.

Mais il y a quelque chose qui cloche (...)

http://lelabo.blogspot.com/2006/06/robert-hasz-la-forteresse.html
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Maxim Livius est à l'armée, à 15 jours d'être libéré. Mais il est tout d'un coup muté dans une étrange forteresse, dans laquelle ni la discipline militaire, ni même le fonctionnement du temps ne semblent être ce qu'ils sont ailleurs. Chacun donne une interprétation différente de ce qui se passe. Et Maxim ne peut s'empêcher de sombrer dans un sommeil dans lequel il revit des épisodes marquants de son existence. Il essaie de comprendre et de briser les enchaînements des évènements.

C'est très bien écrit et construit, on retrouve un peu l'inspiration de Buzzati, Gracq, voire Lem, mais j'ai un peu la sensation que ce ne sont que des références assumées plus qu'un véritable désir de suivre ces écrivains sur leur terrain. D'autant plus que l'ensemble ne manque pas d'un humour au second degré subtil. Entre l'évocation émue de ses souvenirs, et l'absurdité des lois militaires, se dessine en arrière fond la partition de la Yougoslavie, dont l'auteur est originaire, et les affres de la guerre civile, c'est donc finalement bien plus ancré dans le réel et le présent que les auteurs précédemment cités. Ce que je trouve vraiment réussi, c'est la façon dont l'auteur arrive à jouer sur plusieurs registres, utiliser les influences sans les imiter, mais pour en faire quelques chose de personnel, parler de sa propre expérience. Une vraie inspiration et maîtrise.
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Robert Hasz est né en 1964 en Voïvodine,minorité hungarophone de la Yougoslavie.Mais ça c'était à sa naissance. Depuis c'est devenu compliqué dans ces coins là et il a choisi de vivre en Hongrie.La mort du Maréchal et l'explosion balkanique ont maintenant fait de la Voïvodine une province autonome de la Serbie où on dénombre six langues officielles.Ca doit être pratique..Ne confondez pas avec le Kosovo ni le Montenegro,et encore moins avec l'une des trois entités de la Bosnie.Suis-je assez clair?Le pire est que tout ça n'est pas sans rapport avec La forteresse.

L'éditeur évoque Kafka,Borges,Gracq,Buzzati,ce qui fait beaucoup.Mais Robert Hasz est loin de démériter dans ce pays des confins pas mal fréquenté en littérature.Livius,à la veille dêtre démobilisé est muté là-bas,à la forteresse dans la montagne,près de la frontière.Quelle frontière,on ne sait pas.Et quels drôles de militaires.Pas d'armes dans cette caserne,mais les mets les plus succulents et les vins les plus fins au mess.Des véhicules hors d'usage.Des subordonnés à qui leurs supérieurs demandent de les tutoyer.

Pas de courrier non plus.Officiers et soldats patientent sans révolte,c'est ainsi.On creuse bien un tunnel,une belle excavatrice erre de ci de là.Evidemment on pense à Dino et à un autre lieutenant,mon frère Giovanni Drogo.Mais une fantaisie frissonne ici qui n'était pas de mise au Fort Bastiani.Les quelques personnages, peu hiérarchisés,autre différence notable avec le désert des Tartares,finissent par découvrir une porte au fond d'un entrepôt fantôme.Paranoia,un Ordre semblerait dicter sa loi,mais rien n'est sûr.Je vous laisse là,mais quand même ça m'inquiète bien un peu.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je n'en avais plus la force, poursuivit-il, j'avais surtout perdu la foi, je ne voyais pas l'intérêt de poursuivre des études, il me suffisait de regarder mon père pour voir ce que peut faire de nous cette fausse certitude, cette conscience mensongère entretenue par les autres qu'on sait tout, qu'on est au-dessus de tout, simplement parce qu'on a des diplômes. Les diplômes nous masquent le monde, rétrécissent notre vision, nous enferment dans un cadre, parce qu'ils prescrivent toujours ce qu'il faut faire, ce qu'il convient de croire ou de soutenir. Je ne veux pas être spécialiste d'un unique domaine, je préfère ne m'y connaître en rien, ou bien tout savoir, d'ailleurs la vie parle d'autre chose, et moi, j'aime Antonia.
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Le colonel le fusilla du regard :
- Que veux-tu dire par là ?
- Simplement que nous sommes depuis des années dans la phase "finale" de l'exécution de l'Ordre, mais personne n'a jamais redouté cela au point de faire disparaitre les armes. Ou de saboter nos plans d'une autre manière. C'est nouveau.
-Tu oublies le lieutenant Vajlo.
- Ah oui, reconnut le capitaine, mais lui, c'était autre chose. Personne ne l'a enlevé, lui. Il a disparu.
- Comme ça, tout seul, hein ?
- Oui, tout seul, c'est possible.
- C'est ridicule, personne ne déserte ici.
- Et pourquoi pas ? demanda soudain Livius.
Les deux autres le regardèrent.
- Mais pour quelle raison s'enfuir ? demanda le colonel d'un air incrédule.
- Simplement parce qu'on en a assez de tout, dit Livius en haussant les épaules, assez d'être enfermé, assez de ne pas pouvoir écrire ni recevoir de lettres de chez soi, assez d'être coupé du monde extérieur....
Le colonel secoua la tête :
- Ce ne sont pas des raisons suffisantes pour déserter.
- Pourquoi ?
- Parce que ça suffit !
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- Les hommes s'ennuient, répondit Livius avec impatience. Cela ne leur fera pas de mal d'astiquer les fusils et de faire un peu d'exercice. Au moins ils auront de quoi s'occuper.
Le chef cuisinier secoua son imposante tignasse en le considérant d'un air triste :
- Ça me fait de la peine d'entendre cela précisément de votre bouche. Pour autant que je sache, vous êtes un homme instruit et cultivé, j'ai même entendu que vous étiez allé à l'université,
n'avez-vous pas étudié l'histoire ? Si on leur met des armes dans les mains, les hommes en feront usage tôt ou tard.
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— Autrement dit, il a eu des visions ?
— Ce n'est pas si simple...
— Je l'aurai parié, marmonna Livius pour lui-même.
Pungarnik se tourna tout à fait vers lui et poursuivit à mi-voix :
— Mon lieutenant, pense que nous ne vivons pas dans un seul et même monde. Si tu as un tant soit peu d'imagination, et j'espère pour toi que c'est le cas, sinon tu auras du mal à comprendre quoi que ce soit ici, pense que chacun d'entre nous a apporté ici son petit monde à lui, son passé, ses souvenirs, ses désirs, ses peurs ; nous trimballons tout cela comme un sac à dos, mais bien sûr, tout est en nous, j'ai parlé du sac à dos juste à titre de comparaison, et parfois ces mondes, ou ces souvenirs, ces désirs, je ne sais pas comment les appeler, s'échappent du sac, prennent une forme bien réelle et se mettent à vivre autour de nous...
Livius l'interrompit :
— Tu veux dire que ce ne sont pas de simples illusions ? Des jeux sensoriels ?
— Pourquoi est-tu si certain que la réalité elle-même n'est pas un simple jeu des sens ?
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— Quelle sorte de réalité est-ce, si je suis le seul à la voir ?
— Ta réalité, répondit Pungarnik en pointant le doigt sur lui, telle que tu l'as créée, telle que tu la conserves en toi. Le monde que tu gardes en toi sous forme d'images, avec ses couleurs, ses sons et ses odeurs, tel que tu l'as enregistré. La réalité telle que tu la connais, puisqu'il n'y en a pas d'autre pour toi. De même que tu ne connais pas la mienne, par exemple, je ne sais pas à quoi ressemble la tienne.
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Robert Hasz : La Forteresse
Olivier BARROT, depuis le café "Le Rostand" à Paris, présente le livre "La Forteresse" (éditions Viviane HAMY) de Robert Hasz (photo), traduit du hongrois par Chantal Philippe. Edgar REICHMANN, collaborateur du journal "le monde" parle de ce livre.
Dans la catégorie : Littérature hongroiseVoir plus
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