La nouvelle éponyme, "
Les Boîtes de ma femme ", tout comme la seconde , intitulée " Ma femme évanescente " mettent en scène des protagonistes masculins dépassés par la dimension intime de leur couple. En effet, ils se comportent comme on leur a appris qu'un homme devait se comporter dans un couple traditionnel, et malgré cela leurs femmes ne semblent pas heureuses. Mais pourquoi ? Ces couples, qui ne sont pas de couples amoureux, mais des couples formés pour perpétuer la tradition et s'assurer que quelqu'un veille sur notre solitude. Or l'affection, la confiance et la communication ne sont-elles pas les garantes d'un couple solide ?
L'auteure coréenne, avec beaucoup d'ironie et un regard grinçant et sans concession met en scène l'aliénation d'individus formant une entité devenue artificielle dans nos sociétés modernes. En plus de l'incompréhension, il est aussi question d'adultère bien sûr, car il semble que notre recherche du bonheur et la recherche de l'amour partagé avec quelqu'un en qui on peut avoir totalement confiance sont indissociables. Dans un pays qui a légalisé l'adultère en 2015 (information entendue dans un reportage mais à vérifier), comme pour mieux cacher les morceaux brisés sous le tapis et où les individus ne peuvent pas complètement s'émanciper de la pression de la tradition néo-confucéenne (valeurs en décalage total avec le capitalisme brillant et sauvage que connaît la Corée du Sud) il y a de quoi devenir schizophrène ! Mais à cela, l'auteure préfère utiliser l'humour.
Le ton des deux nouvelles suivantes ("
Les Beaux Amants" et "On n'avait pas pensé à l'imprévu") est plus sentimental, et m'a un peu moins plus. Pourtant ces nouvelles sont sans doute les plus universelles du recueil : l'autopsie de la mort des sentiments dans un couple et la culpabilité causée par un évènement imprévu ; puis la vie qui reprend et les mêmes choses se répètent. Certes, l'analyse psychologique assez fine m'a plue, mais ce n'est pas celles que j'ai préféré. Il en faut pour tous les goûts !
Quant à la dernière, elle fait une synthèse des précédentes avec un schéma narratif un peu différent. Il est d'abord question de deux soeurs, l'une attachée aux valeurs traditionnelles, l'autre qu'on dirait plus ambitieuse, ouverte sur le monde et préoccupée par ses études. Et pourtant...
Dans ce recueil composé de cinq nouvelles, l'auteure explore et interroge les relations de couple en ce début de 21ème siècle dans un pays bouleversé par des changements structurels, sociaux et légaux qui ont été extrêmement rapides et ont ainsi créés un décalage commensurable avec les mentalités individuelles. le tour de force d'
Hee-Kyung Eun c'est d'avoir réussi à aborder ce sujet en mettant en scène uniquement la vie privée et intime de ses personnages.
C'est l'envers des K-dramas qui est mis ici en avant, ainsi l'auteure est presque une porte-parole des mouvements sociaux des jeunes, et des jeunes femmes qui élèvent leurs voix en Corée du Sud ces dernières années.
Une découverte très intéressante, et je lirai volontiers d'autres oeuvres de l'auteure.