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EAN : 9782735112647
286 pages
Maison des Sciences de l'Homme (03/09/2009)
3.4/5   5 notes
Résumé :
Par quelles opérations un édifice ou un objet se trouve-t-il intégré au corpus du patrimoine ? Quelles sont les étapes de la «chaîne patrimoniale», depuis le premier regard jusqu'à l'éventuelle obtention du statut juri­dique de «monument historique» ? Quels sont les critères mis en oeuvre par les chercheurs de l'Inventaire pour décider que tel château, telle ferme, tel tableau d'église possède ou non une valeur patrimoniale ? Quelles émotions animent les mobilisatio... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique

Voilà un livre qui arrive à point nommé ! Paru il y a un an, – une vétille en regard de l'excellence d'un propos foisonnant, de l'étendue du champ d'investigation, de l'immuable actualité du sujet, de sa nécessaire et salutaire opportunité, et de la propension résolument didactique d'une étude très fouillée, à l'heure où tout est patrimoine – l'ouvrage de Nathalie Heinich, chercheure au CNRS et sociologue, nous invite à faire le point et tenter de voir plus clair face à la confusion, aux doutes et aux dérives générés par l'usage abusif voire intempestif de cette notion. Elle se propose de revisiter, de réexaminer la question fondamentale du patrimoine, le sens et les réalités qu'elle recouvre, son histoire, ses protocoles, ses méthodes et ses valeurs, ses fondations intellectuelles, la pérennité des valeurs constitutives de son identité et leur validité : " le bien commun", "l'héritage", le "conserver pour transmettre", et enfin de cerner les spéculations qu'alimente notre imaginaire moderne et vagabond. Serait-il, une fois encore, question de s'assurer de la légimité d'un des plus indispensables fondements de la mémoire et de l'histoire de nos sociétés ? Méthodique, Nathalie Heinich dresse un inventaire historique et technique complet, et finement commenté des façons dont s'élabore le patrimoine. La métaphore, l'image emblématique de la borne Michelin qui figure sur la couverture donne la mesure de la problématique et du postulat du livre qui nous intéresse.
La notion de patrimoine n'est pas le bloc monolithique, froid, figé, opaque et élitiste que le profane se plaît volontiers à imaginer. L'image austère et quelque peu rustique s'efface dès qu'on plonge dans ses arcanes et qu'on découvre qu'elle s'inscrit dans un processus en perpétuel mouvement, sujet aux doutes, aux questionnements et aux remises en question – un work in progress qui se pense en permanence et qui porte encore en lui les stigmates d'une histoire lourde de certitudes, de préjugés, d'antagonismes, de subjectivismes, d'avancées et de reculs, de tâtonnements erratiques, et de versatilités dogmatiques. La notion de patrimoine est tiraillée, contaminée par des considérations exogènes incertaines et douteuses : le "bon goût", les occurences historiques, l'environnement social, les considérations esthétiques, les enjeux politiques, les glissements sémantiques qui freinent, façonnent ou précipitent son évolution vers une spirale exponentielle, une ''inflation patrimoniale" effrénée, selon la remarquable formule de l'auteure. L'ordonnance calibrée des chapitres égraine dans le détail les travers des administrations de tutelle : l'inadéquation des expertises, la relativité des évaluations, le déroulé poussif des procédures, la réglementation intrusive et la déréglementation de convenance, le manque de diligence de l'action administrative, les conflits de compétences, le rôle prospectif et déstabilisant de l'Inventaire [général du patrimoine culturel], le sentiment déchirant d'infinitude et la rude expérience de l'inachevé éprouvés par les "patrimoniaux".
La quête de Nathalie Heinich s'appuye sur une enquête, une méthodologie pragmatique, qui s'inscrit dans la sociologie des valeurs que l'auteure construit en puisant dans la réalité concrète, à grand renfort de témoignages simples, voire crues Ses interlocuteurs sont les acteurs du quotidien et de terrain : agents du patrimoine, chercheurs de l'inventaire, propriétaires, élus, rumeurs. Elle réduit le périmètre de sa méthodologie à une formule lapidaire : "il s'agit non d'expliquer, mais de comprendre". Son approche est constamment émaillée de réfléxions et confidences en discordance avec la vulgate officielle, livrées sans retenue et gorgées d'informations plus que significatives.
Loin d'être un réquisitoire, l'ouvrage fourmille cependant d'observations critiques et évoque sans détour les limites de certains processus dans un effort continu pour contextualiser, illustrer, exemplariser. "Un fois de plus, contrairement à une idée reçue qui a profondément imprégné la politique culturelle, modernisation et démocratisation sont loin d'aller de pair".Pensée caustique où affleure l'indépendance d'esprit et la sagacité d'une sociologue aguerrie.
Alors faut-il repenser la fabrique du patrimoine ?
Nathalie Heinich laisse la question en suspens sans négliger pour autant son lecteur; elle ne nous abreuve pas de termes techniques et d'aphorismes verbeux. Plus le propos est savant, plus la lisibilité s'accroît. La langue est pure, déliée, châtiée. Enfin une écriture "audible"! La limpidité d'un argumentaire largement maîtrisé, l'intérêt de la méthode d' investigation, l'énoncé des idées et la progression de la pensée expriment la logique d'un raisonnement sans heurt, un cheminement intellectuel clair et parfait. Tout cela concourt à faire de ce livre une synthèse critique incontournable, un ouvrage de référence.
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Voilà un livre qui arrive à point nommé ! Paru il y a un an, – une vétille en regard de l'excellence d'un propos foisonnant, de l'étendue du champ d'investigation, de l'immuable actualité du sujet, de sa nécessaire et salutaire opportunité, et de la propension résolument didactique d'une étude très fouillée, à l'heure où tout est patrimoine – l'ouvrage de Nathalie Heinich, chercheure au CNRS et sociologue, nous invite à faire le point et tenter de voir plus clair face à la confusion, aux doutes et aux dérives générés par l'usage abusif voire intempestif de cette notion. Elle se propose de revisiter, de réexaminer la question fondamentale du patrimoine, le sens et les réalités qu'elle recouvre, son histoire, ses protocoles, ses méthodes et ses valeurs, ses fondations intellectuelles, la pérennité des valeurs constitutives de son identité et leur validité : " le bien commun", "l'héritage", le "conserver pour transmettre", et enfin de cerner les spéculations qu'alimente notre imaginaire moderne et vagabond. Serait-il, une fois encore, question de s'assurer de la légimité d'un des plus indispensables fondements de la mémoire et de l'histoire de nos sociétés ? Méthodique, Nathalie Heinich dresse un inventaire historique et technique complet, et finement commenté des façons dont s'élabore le patrimoine. La métaphore, l'image emblématique de la borne Michelin qui figure sur la couverture donne la mesure de la problématique et du postulat du livre qui nous intéresse.
La notion de patrimoine n'est pas le bloc monolithique, froid, figé, opaque et élitiste que le profane se plaît volontiers à imaginer. L'image austère et quelque peu rustique s'efface dès qu'on plonge dans ses arcanes et qu'on découvre qu'elle s'inscrit dans un processus en perpétuel mouvement, sujet aux doutes, aux questionnements et aux remises en question – un work in progress qui se pense en permanence et qui porte encore en lui les stigmates d'une histoire lourde de certitudes, de préjugés, d'antagonismes, de subjectivismes, d'avancées et de reculs, de tâtonnements erratiques, et de versatilités dogmatiques. La notion de patrimoine est tiraillée, contaminée par des considérations exogènes incertaines et douteuses : le "bon goût", les occurences historiques, l'environnement social, les considérations esthétiques, les enjeux politiques, les glissements sémantiques qui freinent, façonnent ou précipitent son évolution vers une spirale exponentielle, une ''inflation patrimoniale" effrénée, selon la remarquable formule de l'auteure. L'ordonnance calibrée des chapitres égraine dans le détail les travers des administrations de tutelle : l'inadéquation des expertises, la relativité des évaluations, le déroulé poussif des procédures, la réglementation intrusive et la déréglementation de convenance, le manque de diligence de l'action administrative, les conflits de compétences, le rôle prospectif et déstabilisant de l'Inventaire [général du patrimoine culturel], le sentiment déchirant d'infinitude et la rude expérience de l'inachevé éprouvés par les "patrimoniaux".
La quête de Nathalie Heinich s'appuye sur une enquête, une méthodologie pragmatique, qui s'inscrit dans la sociologie des valeurs que l'auteure construit en puisant dans la réalité concrète, à grand renfort de témoignages simples, voire crues Ses interlocuteurs sont les acteurs du quotidien et de terrain : agents du patrimoine, chercheurs de l'inventaire, propriétaires, élus, rumeurs. Elle réduit le périmètre de sa méthodologie à une formule lapidaire : "il s'agit non d'expliquer, mais de comprendre". Son approche est constamment émaillée de réfléxions et confidences en discordance avec la vulgate officielle, livrées sans retenue et gorgées d'informations plus que significatives.
Loin d'être un réquisitoire, l'ouvrage fourmille cependant d'observations critiques et évoque sans détour les limites de certains processus dans un effort continu pour contextualiser, illustrer, exemplariser. "Un fois de plus, contrairement à une idée reçue qui a profondément imprégné la politique culturelle, modernisation et démocratisation sont loin d'aller de pair".Pensée caustique où affleure l'indépendance d'esprit et la sagacité d'une sociologue aguerrie.
Alors faut-il repenser la fabrique du patrimoine ?
Nathalie Heinich laisse la question en suspens sans négliger pour autant son lecteur; elle ne nous abreuve pas de termes techniques et d'aphorismes verbeux. Plus le propos est savant, plus la lisibilité s'accroît. La langue est pure, déliée, châtiée. Enfin une écriture "audible"! La limpidité d'un argumentaire largement maîtrisé, l'intérêt de la méthode d' investigation, l'énoncé des idées et la progression de la pensée expriment la logique d'un raisonnement sans heurt, un cheminement intellectuel clair et parfait. Tout cela concourt à faire de ce livre une synthèse critique incontournable, un ouvrage de référence.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
"Conserver pour transmettre" : on a là la définition exacte de tout patrimoine, qu'il soit familial, national ou international. Et il suffit, dans la phrase suivante, de remplacer " dieux" ou "esprits" par "aïeux" ou "prédécesseurs" pour constater que cette analyse s'applique parfaitement à la notion, si familière, de "patrimoine" dans nos sociétés occidentales modernes : " Venons-en aux choses qu'il ne faut ni vendre ni donner, mais qu'il faut garder, par exemple les objets sacrés. Ceux-ci se présentent fréquemment comme des dons, mais des dons que des dieux ou des esprits auraient faits aux ancêtres des hommes, et que leurs descendants, les hommes actuels, doivent garder précieusement et ne doivent ni vendre ni donner. De ce fait, ils se présentent et sont vécus comme un élément essentiel de l'identité des groupes et des individus qui en ont reçu le dépôt"
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Videos de Nathalie Heinich (22) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nathalie Heinich
Il y a 5 ans, le 15 avril 2019, la cathédrale Notre-Dame de Paris prenait feu. La sidération et l'émotion dépassent alors les frontières : cet incendie est un événement mondial. Comment comprendre cette émotion partagée et l'universalité de ce trésor du patrimoine français ?
Pour en parler, Guillaume Erner reçoit : Nathalie Heinich, sociologue et directrice de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) Mathieu Lours, historien de l'architecture et spécialiste des cathédrales et du patrimoine religieux
Visuel de la vignette : Fabien Barreau / AFP
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