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EAN : 9782917157145
333 pages
La Volte (24/03/2011)
3.86/5   29 notes
Résumé :
Arizona, été 1965.
Fredric Brown, cinquante-huit ans. Écrivain. Myope, asthmatique, cacochyme. Aime les privés en imper, la gaudriole et les aliens narquois. N'a pas tapé une ligne depuis des mois. Alcoolique.
RogerVadim, trente-sept ans. Réalisateur. Trois mariages, deux divorces, quatre compagnes. Aime la vitesse, les liqueurs fortes, les filles toutes nues. Vit avec Barbarella.
De la rencontre des deux hommes germe le plan d'un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Roadnovel déjanté dans les chaussures alcoolisées de Fredric Brown...

Avec ce premier roman solo, venant de paraître à La Volte, de Léo Henry, créateur avec Jacques Mucchielli (et l'illustrateur Stéphane Perger) de l'univers post-industriel aux confins désertiques de « Yama Loka Terminus » et de « Bara Yogoï », nous lisons un véritable coup de maître. 246 pages de récit débridé, assorties d'un index alcoolisé aussi surréaliste que jouissif, et de précieuses « notes de conception », pour nous faire partager les derniers jours (imaginés) de l'écrivain (réel) Fredric Brown, bien connu des amateurs de SF, même s'il fut avant tout un producteur de polars, récompensé dès son premier roman en 1947 par le prestigieux prix Edgar Allan Poe.

En 1965, alors qu'Edwin Aldrin s'attelle à la colonisation américaine de la Lune, la fin du monde survient en quelques semaines,... par « dissolution » du réel, dans lequel en profitent pour évoluer plusieurs créations littéraires de Fredric Brown lui-même, et quelques « re-créations » malignes de Léo Henry... L'occasion pour l'écrivain, en compagnie de son nouvel ami Roger Vadim (oui !), à la recherche de son épouse Jane Fonda / Barbarella, obligée de se planquer car poursuivie par une association FBI / Reine Noire de Sogo, de parcourir en tous sens les régions désolées qui s'étendent entre l'Arizona et la Basse Californie mexicaine, pour une sorte de « Fear and Loathing in Las Vegas » puissance deux (au moins). On pense en effet inévitablement à Hunter Thompson (et peut-être encore davantage au film de Terry Gilliam) lorsque les deux compères, réunis dans cette virile amitié cimentée par l'excès incessant de boissons diverses, multiplient les rencontres saugrenues et pourtant si... nécessaires !

Avec de véritables « morceaux de bravoure » tels que la conception d'un crime parfait par l'auteur de polars, l'échange de joyeuses propagandes Est-Ouest à l'occasion de la conquête de la Lune (ici avancée de quatre ans), la nuit avec Barbarella, dans son vaisseau spatial, sur une aire d'autoroute, l'assaut en règle, par les « forces du Mal », d'une communauté hippie à San Diego, les tendres et... ennuyeux échanges avec l'inlassable épouse Elisabeth Brown, la délicate rencontre avec un gang de bikers anthropophages, le périple mexicain avec une chèvre amicale dans un mini-bus Volkswagen bondé, ou encore, apothéose, la longue et « sérieuse » discussion finale entre Fredric Brown et son personnage George Weaver (le héros du roman « The Far Cry », 1951), extraordinaire mise en abîme, très « tongue-in-cheek », du métier d'écrivain et de créateur.

« Il s'éveilla d'un rêve d'échecs, de mitraillade et de désolation. Un temps il s'espéra ailleurs, loin du blanc exaspérant du plafond de sa chambre à coucher. Puis il entendit, depuis le bureau, le crépitement de l'IBM, et sut qu'il était malade. »
« ... Aldrin a déclaré se réjouir, heureux par avance de prouver sous peu aux bigots et aux cancrelats que la terre n'était pas plate et qu'elle tournait bien autour du soleil. Avec son franc-parler coutumier, il a également juré de tout faire pour virer les ruskofs et autres teignes communistes de l'espace intersidéral, après qu'avec son équipe ils auront coiffé au poteau les singes volants liberticides... du patriotisme, de la gouaille et du rêve étoilé !... Nous écoutons maintenant « Muskrat Ramble » par Lionel Hampton, vous êtes bien partis pour réussir votre vie, restez calés sur 99.8, WKRP, de Cincinnati à Tucson. »
« Fred but trois petits mescals, qu'il accompagna d'un plat de poivrons grillés au riz pilaf, aux haricots et au parmesan. Il essaya de communiquer en morse avec le ver au fond de la bouteille mais, ce dernier refusant de lui donner la réplique, il finit par remercier le patron dans un idiome incertain et rentra à l'auberge finir sa nuit. »
« Et maintenant, un peu de réclame, pour éviter à nos spectateurs les plus mesmérisés de se souiller par excès de rétention urinaire. Nous sommes mercredi 3 juillet 1965, il est sept heures douze sur la côte est, et les États-Unis ont conquis l'espace ! »
« Ils ricanèrent. Malgré une vingtaine d'années de différence d'âge et une éducation diamétralement opposée, ils avaient en commun un sens du drame assez particulier. Ils connaissaient la mort et devinaient qu'elle ne valait pas un pet de chameau. »
« Partout régnait la fragrance primitive et pure de la réalité sans fond, celle du monde au-delà du rideau des apparences, déjà décrite par nombre de Grecs en toge et d'Allemands à favoris, le parfum de la compote de pommes, petite variété acide, peu sucrée, légèrement aromatisée à la cannelle. »
« Si jamais on en réchappe, faisons un film sur tout ceci. Juste pour le plaisir d'en boire les colossaux bénéfices non loin d'un volcan en éruption, le cul dans l'eau tiède d'un atoll. »

À lire et relire pour le plaisir de ces innombrables citations, digressions, boutades et autres délires, beaucoup plus finement ajustés que l'impression d'aléa baroque pourrait le laisser croire !
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1965 - Fredric Brown, écrivain déjà reconnu, connaît une panne durable d'inspiration et enchaîne cuite sur cuite, pendant que sa femme s'échine à sa biographie sur la machine à écrire, espérant ainsi lui redonner le goût d'écrire.

«Il s'éveilla d'un rêve d'échecs, de mitraillade et de désolation. Un temps, il s'espéra ailleurs, loin du blanc exaspérant de sa chambre à coucher. Puis il entendit, depuis le bureau, le crépitement de l'IBM, et sut qu'il était malade.»

De sa rencontre improbable avec Roger Vadim, cinéaste frenchie, également expert en conception de cocktails, et de leur amitié quasi-instantanée, germe dans le cerveau de Fredric Brown l'idée d'un roman et d'un crime parfait.

« Deux bouteilles de bière vinrent compléter le tableau et Brown constata, satisfait, que son vis-à-vis ne rechignait pas à s'y aboucher. En quelques secondes, la mécanique lubrifiée de son cerveau pronostiqua un futur crédible, dans lequel il ne dînerait pas avec son épouse, pas plus qu'il n'irait chercher sa voiture au Dotted Lion. Seul le lieu où ils échoueraient restait encore mystérieux, occulté par les voiles toujours flottants des possibilités. »

Le crime parfait déraille et se transforme en épopée foutraque depuis l'Arizona jusqu'au Nord du Mexique, sur les traces de Jane Fonda / Barbarella, épouse de Vadim, parcourant les routes d'une Amérique qui conquiert la lune, avec l'alunissage d'Aldrin en cette année 1965, et en même temps se détruit.
De bouteille en bouteille, les événements s'enchaînent, également imbibés de pop et de drogues hallucinogènes, science-fiction déjantée entre noir et gonzo, comme une succession de nouvelles de pulp magazines ; sortie de route sensuelle avec Barbarella, apocalypse déclenchée par des bikers cannibales, rencontre crépusculaire avec des enfants morts-vivants, traques par un FBI extra-terrestre, road-trip beatnik avec une chèvre naine en combi VW…

Nul besoin d'avoir lu l'intégrale de Fredric Brown pour que cette lecture soit jubilatoire, grâce à la virtuosité de la plume de Leo Henry, qui balaie tous les genres et sait raconter toutes les rencontres, de la plus déjantée à la plus authentique. Comme pour les bons breuvages, on en reprendrait volontiers.

«Si jamais on en réchappe, faisons un film sur tout ceci, continuait-il. Juste pour le plaisir d'en boire les colossaux bénéfices non loin d'un volcan en éruption, le cul dans l'eau tiède d'un atoll.»
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Je créditais Noir Désir d'un talent unique : savoir rencontrer dans leur musique les époques que je vivais. Un accord avec l'air du temps, avec la peur, l'ironie, la violence des jours.
Rouge gueule de bois (RGdB) m'a fait la même impression. Si notre époque part en vrille, si l'amitié veut dire quelque chose, s'il faut vivre aujourd'hui parce que tout part à la mort, alors ce livre est vrai. RGdB a raconté mes joies et mes inquiétudes, sur un rythme festif qui ne tient qu'à lui. Je n'ai de jouissance ni des voitures ni de la vitesse, mais j'ai foncé avec Brown dans la Ferrari de Roger Vadim sur les routes de l'Ouest américain, celles d'un monde précipité en hurlant vers le néant.



OK, de quoi est-il question là-dedans ? Fredric Brown, écrivain fantaisiste et alcoolique, se retrouve à errer sur les routes américaines avec le dit Vadim, celui qui découvrit Big Initials B.B.. Je craignais le roman pour initiés du genre (SF), je ne prenais Vadim pour un cinéaste très mineur, surtout préoccupé de dénuder sagement des jolies filles en surfant sur le scandale. Je n'ai pas revu mes préjugés mais j'ai rencontré deux beaux personnages romanesques, qui doivent sans doute une partie de leur mojo à avoir été inspirés de personnes réelles, et qui portent leur propre impulsion littéraire. le roman, genre road-movie, enchaîne les scènes de beuverie et de fusillades, dans un onirisme très sixties avec quelques références imbibées de LSD. Ça pourrait être n'importe quoi. Ça pourrait être inconséquent.
Et non.
Le livre tient la route, par la force de l'écriture, par le souci de vérité de cette dernière. Elle swingue, elle tranche, elle jouit et tient ensemble les deux-cent cinquante pages de ce petit roman (le reste du volume étant occupé par un index hilarant, dispensable et essentiel à l'amateur de cocktails - et par quelques notes floues de l'auteur).
Ai-je dit que c'était très bon ? Pas assez clairement ? Alors oui, voilà : rouge gueule de bois est un très bon livre. Léo Henry est très fort.
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Ce livre est l'histoire de la rencontre improbable entre l'écrivain américain de science-fiction, Fredric Brown et le réalisateur français Roger Vadim. Tous deux mettent au point lors d'une soirée particulièrement arrosée un plan pour réaliser le crime parfait, plan que Fredric Brown se met en tête de réaliser. Il est dérangée dans son élan par ... la fin du monde. S'ensuit un road trip infernal en compagnie de Roger Vadim.

" Il resta sans bouger, mimant la mort, espérant faire refluer la nausée jusqu'à ses orteils et, de là, l'amener à couler dans le lit pour s'éponger dans le matelas. "

Les deux compères, toujours fortement alcoolisés, vont vivre des aventures burlesques tout au long de leur voyage : entre la communauté cannibale ma intentionnée à leur encontre, les poursuites avec Durand Durand qui traque la femme de Vadim et les arrêts pour remplir le coffre de la Ferrari d'alcools divers et variés, ils seront bien occupés.

"Aux crocs, la tête en bas, surplombant des baquets plastique, des agents d'assurance, des sténodactylographes et des pensionnés de guerre finissaient de se vider par le cou, plus ou moins dénudés, plus ou moins ouverts. Derrière, on désossait dénervait apprêtait, on hachait menu des chairs grises et roses, écorchés ou pelées, on mettait à dégorger. On laissait à macérer, brisait des os pour en racler la moelle, on faisait sauter dans la graisse et revenir au beurre noir, on mettait au stock pour que ça faisande".

Sachez-le, ce bouquin est complètement déjanté et bourré de références inexplicables. Ce qui le rend parfois difficile à suivre. Encore que ... C'est le genre de bouquin où la lecture est plus agréable en se laissant porter par les évènements. Cela reste néanmoins ma petite déception avec ce livre, de ne pas avoir reconnu davantage les clins d'oeil (bon en même temps, ils se réfèrent à une époque où je n'étais même pas née ...). J'ai l'impression du coup d'avoir manqué un truc qui m'aurait permis de mieux profiter de l'histoire.

"Les balles tombaient de partout à la fois et, pendant cinq interminables secondes, ce sont les portes des enfers qui s'ouvrirent devant eux, dégueulant désespoir et compromission et ferraille sur le coeur d'un monde à l'agonie. "

Pour les références, l'index en fin de volume peut s'avérer utile. Notez qu'il comporte aussi un certain nombre de recettes de cocktails. Avis aux amateurs. A la suite de cet index, un vade-mecum recensant des citations, et des notes de l'auteur. On y trouve entre autre une note, page 310, qui explique certainement pourquoi le roman s'appelle Rouge gueule de bois.

"Manhattan [70, 169]
Au verre à mélange :
- 2 onces de rye
- 0.75 once de Vermouth doux
- 1 trait d'Angostura
Servir dans un verre à Martini avec une cerise au Marasquin."

Rouge Gueule de Bois est un rêve éthylique destiné aux fans de pulps et de nanars (et de Fredric Brown, bien sûr). Il est néanmoins tout à fait abordable pour les autres, si vous n'avez pas peur de murmurer "what the fuck" toutes les trois pages. Lecteurs trop sérieux s'abstenir.
Lien : http://ledragongalactique.bl..
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Mélangeant personnages de fiction et existants, ce cocktail littéraire oscille entre fable, policier, post apocalypse ou SF. Normal un grand coup de shaker et l'auteur nous livre (l'ivre ?) un étrange mélange que nous reconnaissons, c'est nous, nos souvenir, notre mémoire.
L'un d'un roman qui m'a donné le plus de plaisir ces derniers temps.
Encore un bon travail de la Volte, mais, chose étrange, la FNAC nous le mets dans le rayon policier... J'aurais jamais été le chercher là.
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critiques presse (2)
Telerama
27 juillet 2011
Ce livre est un ovni rafraîchissant, à la gloire des pulps et de la science-fiction en carton-pâte.
Lire la critique sur le site : Telerama
SciFiUniverse
15 juin 2011
Et si Barbarella, Fredric Brown, Roger Vadim et Luz se rencontraient ?
Rouge gueule de bois est le roman qui rend possible cette réunion contre nature dans un road movie éthylique complètement barré. Un bon moment de lecture et un hommage appuyé à l'auteur de Martiens, go home!.
Lire la critique sur le site : SciFiUniverse
Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Aux crocs, la tête en bas, surplombant des baquets plastique, des agents d'assurance, des sténodactylographes et des pensionnés de guerre finissaient de se vider par le cou, plus ou moins dénudés, plus ou moins ouverts. Derrière, on désossait dénervait apprêtait, on hachait menu des chairs grises et roses, écorchés ou pelées, on mettait à dégorger. On laissait à macérer, brisait des os pour en racler la moelle, on faisait sauter dans la graisse et revenir au beurre noir, on mettait au stock pour que ça faisande.
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Mais, surtout, il se voyait avec un plaisir divin en train de dépiauter, découper, chiffonner, broyer, dissoudre, pulvériser ces ramettes de feuilles qu'Elizabeth avait maculées de signes pour composer le manuscrit complet de son autobiographie, le roman-fleuve d'une vie d'épouse d'écrivain, cette interminable logorrhée à la gloire du mari, hagiographie insoutenable, rapport permanent sur son inappétence, son impuissance à poursuivre quelque œuvre que ce fût, sa mort en tant qu'artiste.
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Le temps qui reste est toujours le plus précieux.
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Les balles tombaient de partout à la fois et, pendant cinq interminables secondes, ce sont les portes des enfers qui s'ouvrirent devant eux, dégueulant désespoir et compromission et ferraille sur le cœur d'un monde à l'agonie.
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Il resta sans bouger, mimant la mort, espérant faire refluer la nausée jusqu'à ses orteils et, de là, l'amener à couler dans le lit pour s'éponger dans le matelas.
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Vidéo de Léo Henry
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L'or bleu
Entre épisodes de sécheresse, pollutions diverses et usages incontrôlés, l'eau devient un enjeu mondial majeur et les luttes à son propos se multiplient. de nouveaux procédés techniques voient le jour tandis que l'on accorde des droits aux fleuves. La solution sera-t-elle technique ou juridique ? Que nous disent les récits fictionnels de sociétés durables ? Quelles pistes pour gérer et partager l'eau de façon juste et équitable ?
Moderateur : Antoine Mottier Intervenants : Gwen de Bonneval, Léo Henry, Pascal Peu, Éric Sauquet
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