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EAN : 9782369560388
240 pages
Editions Intervalles (23/08/2016)
3.92/5   6 notes
Résumé :
François Sauval est un capitaine d’industrie et un aventurier qui accumule les records dans l’espoir de marquer son époque. Il fait venir auprès de lui un écrivain pour bâtir sa légende, avant de relever un ultime défi : acquérir un territoire pour y fonder un État.

Chassée de chez elle voilà des siècles et s’amenuisant aux confins de l’Amérique centrale, la tribu des Charahuales semble condamnée à disparaître avec sa langue ancienne et sa cultu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Un roman a double entrée : d'abord celle du scribe de François Sauval chargé de noter tous ses exploits, de le suivre à chaque instant de sa vie pour transcrire ses faits et gestes. François Sauval vise à l'éternité et veut à défaut de vivre éternellement qu'on se souvienne de lui longtemps. Ensuite, l'histoire de la tribu des Charahuales, chassée de ses terres et dont la langue sera transcrite par un prêtre alors qu'elle est déjà quasi décimée, puis d'autres passionnés de linguistique interviendront pour tenter de la sauver.

Comme à chaque fois que je lis un roman de MIkaël Hirsch, je note quasiment toutes les pages, tant je suis sous le charme de son écriture. Cette fois-ci, il écrit sur l'effacement de soi. Jusqu'où l'homme peut-il renoncer à être lui-même pour survivre ? Jusqu'à quel prix est-il capable de se vendre pour s'oublier ? Notre société étant de consommation à outrance, tout est régi par l'argent, le pouvoir d'achat, les signes extérieurs de bonne santé financière. le narrateur s'enfonce, lui, de plus en plus dans le renoncement de soi qu'il cultivait déjà avant sa rencontre avec François Sauval : "Une fois passées les premières décennies, tout ce qui constitue sa propre personnalité finit par lasser prodigieusement. Je m'étais beaucoup ennuyé en ma propre compagnie, traînant un corps usé dont personne ne voulait plus et une conscience d'occasion. Lorsque l'accablement s'installe, on cesse d'être un objet de désir pour qui que ce soi." (p.11) Dit comme cela, cette partie du roman pourrait paraître déprimante, or elle ne l'est pas car -nouveauté chez le romancier- l'humour, l'ironie ou la dérision sont assez présents, : "A la mort de mon père, j'emportai avec moi tout le legs familial, cinquante-trois boîtes de Doliprane qui occupaient la totalité de l'armoire à pharmacie et qui constituaient la dernière valeur disponible dans l'appartement presque vide.(...) Pendant les années qui suivirent, à chaque nouvelle migraine, je prenais un cachet en me disant que je dilapidais sottement l'héritage paternel (...) jusqu'au jour où il ne resta plus rien. (...) Ce jour-là seulement, je fus orphelin." (p.47/48). Dans cette même partie, le narrateur est en totale opposition avec François Sauval, qui lui, veut laisser une trace, accéder à la toute puissance, son argent qu'il dilapide sans compter dans ce but unique devra l'y mener. Il ne doute pas, avance, écrase tout ce qui le gêne : l'ambition ultime, suprême contre l'abandon, l'effacement.

Mikaël Hirsch écrit aussi sur la disparition d'un peuple, de sa culture et surtout de sa langue. Il remonte le temps pour en raconter l'histoire et commence par ses légendes : le serpent noir du commencement donne naissance à des jumeaux, Sue et Chia. "Sue, le soleil, tira une flèche dans l'oeil de son frère Chia, qui fut condamné à errer dans le ciel et devint l'étoile du matin. Sue se baigna ensuite dans l'eau douce, Uma, et son reflet engendra les ombres qui peuplèrent immédiatement la terre. Les ombres étaient libres d'aller et venir, glissant sur le sol." (p.22) Quand nous étions des ombres -nsut nani aakarka, dans la langue qui disparaît- est un propos qui revient dans la bouche des anciens ; quand nous étions forts... ou quand nous étions, tout simplement..

Le roman de Mikaël Hirsch est beau, fort et puissant par ce qu'il raconte et oppose avec brio. Il est dense, le romancier excellant dans l'art de condenser en 180 pages ce que d'autres écriraient en 500. Il est intelligent, érudit sans être pédant. Un ouvrage de grande qualité, d'une maîtrise totale, époustouflant. J'ai la sensation que l'écrivain se lâche un peu -et ça lui va bien-, qu'il ose beaucoup plus que dans ses romans précédents qui, tout en étant très bons, étaient un peu plus "retenus". L'humour en est une preuve, mais ce n'est pas la seule.

Comme à chaque fois que j'ai très envie que vous découvriez un roman que j'ai adoré, j'ai le sentiment d'avoir écrit un billet brouillon, tant pis, si vous en retenez qu'une chose eh bien retenez de lire Mikaël Hirsch absolument. Vous ne lirez pas l'un de ces romans "habituels" de la rentrée littéraire. Non , vous aurez de l'originalité, de l'intelligence et une langue sublime, des phrases d'artisan-écrivain -mais au moins un Meilleur Ouvrier de France-, de la belle ouvrage. Un grand romancier. Un grand livre.
Lien : http://www.lyvres.fr
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Reçu lors de Masse Critique, au passage merci à la fois à Babelio et les éditions Intervalles, j'ai apprécié ma lecture. Ce court mais dense roman dépeint avec un humour acide et un pessimisme froid la nature humaine.
On suit donc le double récit d'un homme obsessionnel, François Sauval, par le narrateur et la longue et inexorable chute de la tribu des Charahuales du Honduras à travers beaucoup d'anecdotes historiques ou sociétales. Il parait important de mentionner que l'on voit les actions de François Sauval du point de vue d'une autre personne, en l'occurrence son ‘'scribe moderne'', et donc de fait un point de vue s'installe. Surtout que ce narrateur ne se dépeint pas lui-même comme une personne convenable, dans le sens comme ‘'tout le monde''. Cette espèce de mal-être, de vision noire de l'humanité sera présente tout le long du roman. François Sauval, dans sa quête de grandeur, se révèle au final tellement vain, détaché de tout, futile et complétement absent de sa vie. Quelle ironie de penser qu'à partir de tout, il ne laissera rien et surtout qu'en parallèle une tribu disparait sans avoir les moyens de continuer à survivre.

Et puis d'avantage que la disparition d'un peuple, la thématique tourne autour de la perte d'un langage, d'une culture linguistique et donc la mort d'un pan de l'humanité. Au nom de quoi ? Ce à quoi tente de retracer le roman. La réponse à cette question étant vaste, aucune raison n'est apportée, on comprend que cette fin n'est qu'une succession de faits, de tragédies, de conquêtes… qui amènent à ce constat. Un désastre lent que l'on sent irrémédiable.

J'ai pour ma part trouvé un livre sur la solitude, un pessimisme profond sur la nature humaine. Ce rêve d'un mégalomane de laisser à tout prix une trace dans l'Histoire quitte à ne prendre considération de rien, à ne pas apprécier sa vie. On sent un mal-être, un manque de repère, une perpétuelle quête dénuée de sens. L'auteur fait cet intéressant parallèle entre la recherche d'éternité d'un individu et la perte de toute une culture d'une tribu.

Bien mené de bout en bout, on suit sans mal les pérégrinations de ces deux êtres torturés et perdus, à la recherche de grandiloquence et d'éternité. Tout était plus simple quand nous étions des ombres
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Quand nous étions des ombres, c'est d'abord deux histoires en parallèle. Qu'ont-elles à faire ainsi l'une à côté de l'autre, un chapitre sur deux? C'est tout le mystère. Car si l'on se doute que la croisée est imminente, qu'ont à voir un biographe et son sujet en mal de tout, et le destin des amérindiens Carahuales au coeur du Honduras? Rien et tout à la fois. Les personnages et leur histoire sont le résultat d'un monde moderne qui leur échappe et qui les rejette de son indifférence. Tandis que tout un peuple s'efface, qu'un morceau de Culture humaine disparaît avec lui dans l'ignorance la plus totale; un magnat cherche à tout prix à entrer dans L Histoire, alors qu'aujourd'hui plus rien ne se grave dans le marbre...
Une histoire de désespoirs entre futilité d'égo et naufrage culturel.

Ce n'est que maintenant que j'écris cet avis que je peux donner un sens à ma lecture. Jusqu'ici j'avais apprécié ma lecture, prise par la belle écriture de Mikaël Hirsh, mais n'y trouvant pas d'idée à en retirer, j'avais arrêté de me questionner sur le sens et m'étais laissée bercer par la forme.
Car oui, c'est un beau roman, que l'on continue presque malgré soi. Ensuite c'est à chacun d'y comprendre ce qu'il veut...
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je viens enfin poster ma contribution concernant ce livre "Quand nous étions des ombres". Merci à Babelio et aux éditeurs, je ne connaissais pas cet auteur.
Je dois à la vérité de dire que je n'ai pas réussi à "entrer" dans le livre.
J'en ai lu une partie, mais je peine à continuer.
Le texte est bien écrit, les mots, les phrases s'enchainent avec une certaine profondeur, et pourtant... je ne parviens pas à le lire. Il ne m'arrive que bien rarement de ne pas finir un livre, le sujet m'intéresse, mais je n'accroche pas. La façon dont est dépeint le chevalier d'industrie qui veut laisser une trace absolument, (quelle que soit la façon de le faire, au détriment ou pas de quelqu'un ou quelque chose) est précise, cynique souvent mais on y sent une réalité. Celle d'une époque qui glorifie ce type de personnage, et qui peut tout en la déplorant, laisser mourir une culture, une société, un être. Je vais continuer ce livre. Je reprendrais cette lecture, et peut-être parviendrais-je à le finir. A ce moment-là, je reviendrais ici poster une autre critique.
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Vidéo de Mikaël Hirsch
Le Réprouvé de Mikaël Hirsch sur webtvculture .Décembre 1954. Alors que Simone de Beauvoir reçoit le prix Goncourt. Louis-Ferdinand Céline vit reclus dans un pavillon de banlieue. Un jeune coursier des éditions Gallimard raconte? Un roman tendre et cruel sur le milieu littéraire et les années 50.
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