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EAN : 9782361660147
97 pages
Editions des Busclats (01/03/2013)
3.4/5   15 notes
Résumé :
La fascination qu’exercent tatouages et tatoueurs sur le narrateur l’a conduit à dessiner pour l’un d’eux, son ami Dimitri. Mais il a longtemps résisté à offrir sa peau aux poinçons et à l’encre. C’est une phrase latine sur les heures qui passent Vulnerant omnes, ultima necat, (toutes blessent, la dernière tue), qui le fera changer d’avis et bouleversera son existence. Dès que Dimitri la lui tatoue sur la poitrine, il devient un autre homme dans ses rapports aux fe... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Le narrateur est fasciné par les tatouages. Il en dessine pour Dimitri, son ami qui est artiste tatoueur. Lors d'un voyage en Italie, le narrateur découvre une devise inscrite sur un cadran solaire : Vulnerant omnes, ultima nequat. Cette phrase l'obsède et le charme tellement qu'il décide de sauter enfin le pas et de se faire tatouer, juste sur le plexus solaire. « Étrange impression d'être marqué comme le bétail, et en même temps se sentir distingué, protégé par ce signe-talisman. Tel un croyant que le prêtre aurait béni. » (p. 27) Passés les premiers jours d'euphorie où l'homme n'a de cesse d'arborer son tatouage auprès d'éphémères conquêtes, voilà que l'encre s'efface et que l'inscription disparaît. Et peu à peu, c'est le sang du narrateur qui s'éclaircit et blanchit. « Mon Vulnerant me rendrait-il moins fort ? » (p. 34)

Quelle étrange histoire que cette angoisse de la peau blanche ! L'auteure dessine une calligraphie épidermique au pouvoir macabre. le talisman que le narrateur s'est appliqué à même la peau ne porte pas bonheur : rien ne conjure le temps, ni n'empêche les choses de s'effacer et de disparaître. En inscrivant dans sa chair une devise prophétique, l'homme s'est fait l'objet de mesure de son propre temps. « Tatouer devient un art performatif, le tatoueur en action crée la réalité. » (p. 87) Ainsi, la disparition presque oulipienne des premiers mots du tatouage renvoie l'homme à sa nature mortelle, jusqu'à la folie.

Ce roman très court lance de nombreux filets, mais j'ai le sentiment que certains sont revenus à vide ou ont échoué en haute mer. Je n'ai pas vraiment réussi à relier tous les aspects de cette histoire. Mais j'ai été tout simplement fascinée par ce tatouage éphémère et la prise de conscience qu'il occasionne chez le héros. Moi qui serais bien incapable de marquer ainsi ma peau, frileuse devant un tel engagement charnel, j'ai oscillé entre horreur et admiration devant l'homme qui se fait inscrire sa destinée sur le plexus.

Un grand merci à l'auteure qui m'a proposé de lire son livre et qui l'a joliment dédicacé. Un petit mot sur les Éditions des Busclats : elles proposent à des auteurs reconnus de sortir de leurs sentiers battus littéraires le temps d'un texte court. Je ne connais pas encore d'autres textes de Stéphanie Hochet, je ne peux donc pas apprécier la différence, mais je vais m'empresser d'y remédier.
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Depuis toujours, le narrateur est fasciné par les tatouages mais il n'a jamais réussi à enfreindre le tabou familial et à marquer sa peau irrémédiablement. Il a trouvé dans son amitié avec Dimitri, un talentueux tatoueur, une façon d'approcher ce monde qui l'attire tant. Il dessine pour lui et parfois s'entraîne à manier encres et poinçons. Au cours d'un voyage en Italie, le hasard le met en présence d'une phrase qui le décide à sauter le pas : Vulnerant omnes, ultima necat. Désormais c'est cette phrase qu'il affichera fièrement sur son plexus solaire. Heureux d'exhiber son corps enfin tatoué, il enchaîne les conquêtes dans le seul but de le dévoiler et de susciter l'étonnement, l'admiration et les questions des femmes qu'il séduit. Pourtant, très vite, il déchante. Cette marque censée être indélébile s'efface progressivement et il tombe malade. Tout se passe comme si l'encre du tatouage s'infiltrait et se diluait dans son sang.


Cela commence comme une banale histoire de tatouage pour se transformer au fil des pages en récit fantastique. le tatouage du narrateur n'est pas une simple trace sur sa peau, il s'insinue sous son épiderme pour prendre possession de son sang. le tatoueur passe du statut d'ami à celui de personnage inquiétant, de rôdeur au pouvoir peut-être maléfique. le narrateur pensait que cette trace indélébile sur sa peau le rendrait invulnérable mais la phrase choisie avec tant de soin s'efface peu à peu pour ne laisser qu'un message prophétique : "ultima necat", la dernière tue. Obsédé par son tatouage, comme Dorian Gray par son portrait, comme Maupassant par son Horla, le narrateur glisse lentement vers la folie...
Une belle écriture au service d'un roman intrigant, troublant même, mais dont on ressort perplexe, sans en comprendre le message. La plume est belle, à découvrir peut-être avec un autre livre.
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Le sang et l'encre se mêlent sous l'aiguille du tatoueur. La fascination que crée cet art chez le narrateur est un leitmotiv qui hante ses jours et ses nuits . Ses dons en dessin l'ont naturellement conduit à créer des modèles que Dimitri reproduire sur les épidermes consentants. de là à sauter le pas, la réflexion est longue pour le jeune homme. La décision est prise lorsque le choix s'impose, lors de la contemplation d'un cadran solaire où est inscrit : Toutes blessent, la dernière tue, et sur le seul endroit possible, le plexus..solaire.

Le geste accompli ouvre des portes interdites : la souffrance du corps soudain révèle se mêle à une angoisse plus profonde, alors que le tatouage semble vivre tel un intrus sur ce corps malade. La suspicion n'est pas loin de la paranoïa , les amours et les amitiés sont chaotiques.

C'est un curieux récit où le lecteur est un simple témoin, non convié au au partage. C'est peut-être cela que l'on appelle « ne pas entrer dedans ». Les confidences nombrilistes de ce narrateur perturbé m'ont laissée de marbre.

C'est heureusement court, et c'est à peu près la seule raison qui m'a incitée à poursuivre.
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Sang d'encreStéphanie Hochet -
Éditions des Busclats ( 97 pages – 11€)
A force de livrer ses dessins à des tatoueurs, le narrateur a franchi le pas: oser souffrir pour se faire tatouer ce « signe talisman », son « vulnerant » par Dimitri, reconnu dans « le Paris tatoué ». Fascination qui remonte à l'adolescence , mais étouffée car « tabou familial ». le narrateur confie l'importance de la décision, qui engage pour la vie, aussi « symboliquement fort » que le mariage, « un mariage pour la vie ». L'exergue de Flannery O'Connor met d'ailleurs en garde sur un plaisir qui peut s'avérer éphémère, alors que le motif tatoué sera indélébile. La page d'ouverture familiarise le lecteur avec l'univers d'un tatoueur et distille des recommandations.


Stéphanie Hochet radiographie les relations amoureuses du narrateur: « un jeu de domino ». Il reconnaît ne s'être jamais investi, fuyant les responsabilités.
Penserait-il gagner en assurance et davantage séduire en arborant sur son torse une phrase latine, débusquée sur un cadran solaire, au cours d'un voyage en Italie?
Si un livre peut changer la vie d'un lecteur, voilà le corps du narrateur«  embelli », métamorphosé, différent par ce tatouage. Marqué à l'égal des bêtes.
L'exhiber va tourner à l'obsession, persuadé que son « moi profond » s'y cache.
L'homme justifie sa « frénésie de rencontres », ce besoin de « rapprochements intimes », de se déshabiller, de s'offrir à « elles », rattrapé par le démon de midi.
Se dévoiler au détour d'un tatouage , pour celui qui a accès à plus d'intimité, fait penser au protagoniste d 'Amélie Nothomb, dans Une forme de vie. Ne suggérait-elle pas au soldat de transformer son corps en oeuvre d'art, selon la tendance 'body art'.
Si l'adage: « Dis moi ce que tu lis, je te dirai ce que tu es. » permet de sonder les goûts de quelqu'un, le protagoniste déplore de ne pas être compris à travers ce « chiasme », à portée philosophique. Son tourment semble provenir du fait qu'une partie de la phrase qui « profane » son torse s'est estompée et en devient incompréhensible. Doit-il s'en ouvrir à Dimitri? Comment supporter cet aléa alors que cette inscription est devenue « la pièce la plus intéressante » de son corps?

La confiance qu'il vouait à Dimitri est ébranlée. Il s'interroge sur leur amitié et prend de la distance avec lui. Ses nuits sont polluées par des rêves prémonitoires.
Dimitri devient « l'ange diaboliquement homme et femme », capable de le trahir.
le voici taraudé par la bribe de maxime restante: « la dernière tue ».
Ne serait-elle pas maléfique? Trouvera-t-il le remède pour éradiquer toute trace?
Le narrateur reconnaît sa lassitude, son exaltation dura « le temps d'un éclair » , « ce plaisir, cette élection ont existé mais si brièvement » . Il s'en explique ouvertement à celui qu'il considère comme un ennemi à vaincre, celui qui lui inocula la maladie L.
Les paroles proférées se font menaçantes : « Ta malédiction vit ses derniers moments » et annoncent un dénouement, un embrasement digne du Ku Klux Klan.
A noter que chez Stéphanie Hochet tout va par trois: Marie, le prénom sacré de l'infirmière répété trois fois, ainsi que l'exclamation libératrice qui clôt ce petit opus: « Je suis sauvé! ». La rédemption passait-elle par cet acte?

L'auteur développe une réflexion sur les raisons qui peuvent amener à tatouer son corps, sur l'impact d'un tatouage et le pouvoir du tatoueur sur le client.
N'est-il pas «l'artiste  démiurge qui s'immisce dans l'existence de ses clients »?
La romancière dresse l'historique de l'art du tatouage, racontant le monde ( fresque de Lascaux, mode des marins) , décline tout un éventail de motifs et souligne la difficulté de rendre l'impalpable, l'indicible, l'intangible, comme « le vent dans le cerisier en fleurs ». Elle rappelle que faute d'ADN , les tatouages étaient utiles pour la police. Elle décoche une flèche à l'encontre de notre société de consumérisme, pointe la cruauté des gosses et notre mode du zapping qui affecte les relations humaines.

Elle soulève alors une question universelle, à savoir quelle trace on laissera, tissant la métaphore de l'écriture. Ce qui n'est pas sans rappeler Georges Perec pour qui écrire, c'est « laisser, quelque part, un sillon, une trace, une marque ou quelques signes ».
Ses interrogations quant à l'oubli de certains auteurs et de leurs écrits font écho à celles de Bernard Foglino qui évoquent dans Celle qui dort le cas des écrivains qui se volatilisent, ou sombrent dans la folie, ajoutant: « C'est fragile, ces animaux ».

Stéphanie Hochet ancre son récit en Italie, comme dans son roman précédent, décline l'ars amatoria d'Ovide, convoque Pavese et encre cet opus dans le paysage littéraire. Elle offre à son protagoniste un destin flamboyant: « Lumière foudroyante ».
Si le tatouage n'a pas comblé l'attente du héros, Stéphanie Hochet aura eu l'art de nous intriguer par ce récit, et de nous déstabiliser quant au dénouement.
Avec ce neuvième opus à son actif, nul doute que la romancière laisse son empreinte.
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Un texte court, dense, l'épaisseur des pages, des mots. Eloquent. Pas une rhétorique, une réflexion, des phrases aiguisées qui font mouche et l'art du portrait. L'écriture comme l'aiguille du tatoueur pointant tous les paradoxes du tatouage – sacrifice et talisman -, dessinant sur cette narration à la première personne les lignes d'une vie parvenue au temps de la question au présent sur le passé dans le futur. La question de l'empreinte, de ce qui survit.

Toutes blessent, la dernière tue. le narrateur s'interroge sur le féminin de cette phrase. Les mots se mêlent dans son esprit, des prénoms et la maladie insinuée dans son sang qui habitent ses heures. Qui habille ses heures ?

Le tatouage pour donner du sens, tracer le sens, l'écrire, l'inscrire, à défaut de l'entendre ou de le dire, le dévoiler dans l'intimité; une nudité au-delà du corps comme la formule de sa singularité, une incantation.

» A quoi bon mettre son propre corps à contribution si tout le monde se reconnaît dans ce que vous avez tatoué ? »

Le regarder vraiment, au delà des apparences, ce narrateur. En affichant ce tatouage qu'il porte en croix sur la poitrine, c'est sa croix qu'il porte, attirant le regard sur l'endroit du corps où se trouve le coeur… Parce que au-delà de cette nudité qu'il exhibe, il attend un message en réponse à son message, attend qu'on le lise, qu'on l'écrive aussi; un homme en quête de traces qui se marque pour poser ses marques face à l'attente et l'éphémère.

Une histoire de peau et de sang, de mémoire de peau et de sang qui se lit d'un souffle. Touchée.
Lien : http://www.lire-et-merveille..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je n'avais cessé d'y penser. Depuis au moins vingt ans. La tentation avait crû avec les années. Le tabou qui l'entourait ne l'avait pas affaiblie, au contraire. Sans ce tabou familial, j'aurais plus vite cédé, tourné la page. Ça n'aurait pas mérité que je m'y attarde. Le tabou a hypnotisé le fantasme.
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« Tatouer devient un art performatif, le tatoueur en action crée la réalité. » (p. 87)
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« Étrange impression d’être marqué comme le bétail, et en même temps se sentir distingué, protégé par ce signe-talisman. Tel un croyant que le prêtre aurait béni. » (p. 27)
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J’en saurai plus sur toi quand j’aurai vu. Avec quelle image, quelle phrase profanes-tu ta peau ? Qu’est-ce qui vaudrait bien la peine de durer autant que ton propre corps, de se décomposer avec toi ?
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« Mon Vulnerant me rendrait-il moins fort ? » (p. 34)
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Vidéo de Stéphanie Hochet
L'écrivaine Stéphanie Hochet s'est plongée dans les "années perdues" de William Shakespeare, cette période au cours de laquelle le dramaturge disparaît en laissant femme et enfants. Son roman "William" revient sur ces huit années mystérieuses et fait des liens avec le passé de l'écrivaine. Elle est l'invitée de Géraldine Mosna-Savoye et Nicolas Herbeaux.
Vignette : duncan1890 / Getty
#shakespeare #littérature #secret
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