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Jean Harambat (Autre)Aurélia Dib (Autre) Leconte de Lisle (Traducteur)
EAN : 9782330176785
160 pages
Actes Sud (19/04/2023)
  Existe en édition audio
3.92/5   3327 notes
Résumé :
Et le divin Ulysse émergea des broussailles. Sa forte main cassa dans la dense verdure un rameau bien feuillu qu'il donnerait pour voile à sa virilité. Puis il sortit du bois. Tel un lion des monts, qui compte sur sa force, s'en va, les yeux en feu, par la pluie et le vent, se jeter sur les boeufs et les moutons, ou court forcer les daims sauvages ; c'est le ventre qui parle. Tel, en sa nudité, Ulysse s'avançait vers ces filles bouclées : le besoin le poussait... Qu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (229) Voir plus Ajouter une critique
3,92

sur 3327 notes
L'Odyssée, c'est un peu comme les fables De La Fontaine ou Les Aventures de Pinocchio : tout le monde connaît… ou croit connaître, sans même avoir besoin de lire les originaux. Et pourtant, oui, pourtant, combien pourraient être surpris(es) celles ou ceux qui ne l'ont pas encore lue !

C'est donc à vous que je m'adresse, vous qui ne l'avez pas lue mais pensez déjà tout connaître. À vue de nez, comme ça, quel volume représente, sur les 24 chants que compte la narration, les fameuses péripéties d'Ulysse, depuis Troie jusqu'à l'île de Calypso, celle où il reste scotché huit longues années avant de pouvoir rentrer au bercail ?

Allez, allez, dites, pour voir… Eh oui, seulement 4 malheureux chapitres sur 24, dont un exclusivement réservé au voyage souterrain dans le royaume d'Hadès, donc disons 3 seulement. (Mais de quoi parle-t-il, alors, dans tout le reste ? That is the question, et j'y reviens plus bas.)

Ainsi, l'épisode des Lotophages ? catapulté en à peine plus d'une demi-page ! Celui des Lestrygons ? expédié en 2 pages. Celui des Sirènes ? torché en à peine une page et demie. Charybde et Scylla ? Moins encore. Eh oui ! ça ne traîne pas la narration à ce moment-là, une poignée de vers ici ou là et le tour est joué (plus tard c'est un peu différent, certains passages, non liés au périple sont même un brin longuets). À propos, aviez-vous retenu que la première mésaventure d'Ulysse était l'épisode chez les Cicones (pas si connes que ça, d'ailleurs), dans l'actuelle partie orientale de la Grèce ?

À titre de comparaison, vous qui n'avez peut-être jamais entendu parler du porcher Eumée. Quel volume occupe-t-il, lui, d'après vous, dans ce poème épique ? Réponse : depuis la fin du chant XIII jusqu'à la fin du chant XVII, soit environ 70 pages. Étonnant, non ?

Et Alcinoos ? Vous connaissez Alcinoos, je suppose ? Car lui non plus n'a pas un rôle anecdotique. Deux chants et demi (soit environ 35 pages) lui sont presqu'entièrement consacrés dans L'Odyssée. D'ailleurs, savez-vous exactement ce que signifie le mot « odyssée » ? J'en croise beaucoup qui s'imaginent que ce mot voudrait dire « périple », « voyage », « aventure », que sais-je ?

Eh bien non : de même que L'Iliade évoque simplement ce qui s'est passé en Ilion, l'autre nom de Troie, L'Odyssée fait uniquement référence à Odysseus, le nom grec de son personnage principal, latinisé plus tard en Ulysse. « Odyssée », en somme, ça veut juste dire « ce qui est arrivé à Odysseus ».

Je ne sais pas si je vous ai convaincus de vous aventurer à lire L'Odyssée, si ça n'est déjà fait, mais permettez-moi encore de vous mentionner certains apports étonnants à notre culture occidentale. Peut-être vous arrive-t-il de dire « à tes souhaits » lorsque l'un de vos proches éternue ? Eh bien c'est à l'Odyssée que vous le devez, très certainement.

En effet, cela fait référence au moment précis où Pénélope, dans le chant XVII, fait le voeux qu'Ulysse revienne afin de punir les prétendants à sa succession de leurs divers abus et où Télémaque éternue bruyamment, ce qui était considéré, à l'époque, comme un bon présage à propos de ce qui venait d'être souhaité.

Autre chose. La tradition de la « baguette magique », ça vient d'où ? Oui, c'est vrai, pourquoi donc une baguette serait-elle le véhicule de la magie de quelqu'un ? Harry Potter ou la fée de Cendrillon se soucient-ils de savoir d'où vient ce prodige ? Eh bien je vais vous le dire, moi, car c'est bien la question centrale du XXIème siècle, c'est Athéna, alias Pallas — jamais lasse d'ailleurs —, qui, lorsqu'elle se pique de vouloir métamorphoser quelqu'un, le touche de sa baguette, et bing ! voilà notre beau, notre fort Ulysse transformé ipso facto en vieillard loqueteux. Et va que je te le retouche avec ma baguette, et re-bing !, le v'là à nouveau tout pimpant, tout fringant, à bomber le torse dans son slip Athéna. (Hermès aussi possède une baguette dans le chant XXIV, mais comme c'est du prêt-à-porter haut de gamme, elle est en or celle-là, vous comprenez !)

Qu'en est-il de la tradition du fantôme, du spectre ? Là encore, je crois que cette représentation doit à peu près tout à L'Odyssée. En effet, c'est lors du séjour souterrain au royaume d'Hadès et de Perséphone qu'on perd ses formes, en tout cas, que l'image demeure mais plus le contact physique. C'est ce que constata Ulysse en essayant d'étreindre le fantôme de sa défunte mère Anticlée.

À ce propos, les tenant(e)s de la cause féministe, celles ou ceux qui professent que de tout temps les femmes ont toujours été négligées, négligeables, s'interrogent-ils sur la signification de toutes ces hordes de femmes puissantes qu'Ulysse rencontre en pays d'Hadès, ou même, plus largement, plus généralement, sur l'étonnant pouvoir qu'elles possèdent dans la totalité de ce récit mythique : d'Athéna à Circé, de Calypso à Idothée, d'Arété à Pénélope en passant par Nausicaa, sans oublier les sabots d'Hélène ni le trousseau d'Euryclée ?

Car c'est troublant, n'est-ce pas, dans cette société ô combien machiste de la Méditerranée antique de voir combien tout tourne autour des femmes et surtout de leur pouvoir. (Je l'avais déjà constaté à propos des tragédies d'Euripide, majoritairement centrées sur des personnages féminins, ou d'une comédie comme Lysistrata d'Aristophane.) Je ne vais prendre qu'un seul exemple parmi les divinités ; chez Hadès, on ne nous parle jamais du maître des lieux, ni d'un éventuel sentiment positif ou négatif qu'il inspirerait, par contre, tous ont le trouillomètre à zéro sitôt qu'ils évoquent Perséphone. Parmi les mortels, au sein des multiples griefs faits aux irrévérencieux prétendants entassés en son palais pendant son absence, Ulysse reproche surtout (aux chants XX et XXII) aux princes d'avoir violé ses servantes. Étonnant, non ? Et je pourrais de la sorte multiplier les exemples, sur l'intégralité du mythe.

Il y a encore des tas d'autres questions soulevées par la lecture de L'Odyssée. Pourquoi nous précise-t-on tout le temps que le bateau d'Ulysse a la proue bleue ? Pourquoi Ulysse distingue-t-il tant les peuples « mangeurs de pain » des autres ? Pourquoi les mensonges d'Ulysse et d'Athéna sont-ils si nombreux, si fréquents, et présentés si positivement, quand Télémaque, lui, n'a jamais besoin de recourir au mensonge (sauf par omission) alors que tout l'y pousserait ? Pourquoi Idothée aiderait-elle Ménélas à entourlouper son propre père Prothée ? Et en quoi ce vieux transformeur subaquatique, digne de faire pâlir Merlin l'enchanteur et Madame Mim réunis, serait-il mieux au courant qu'un autre de ce qui empêche le frangin d'Agamemnon de rentrer au bercail ?

Aussi, plutôt que de vous donner de quelconques interprétations sur ces questions-là, j'aime autant titiller votre curiosité afin de vous inciter, si tel n'était pas le cas, à venir vous frotter à ce monument de la culture occidentale, en vous précisant encore que l'un des grands rêves de nos bien-aimés dirigeants de Google, Amazon ou Tesla, savoir, le véhicule autonome sans pilote, était déjà formulé dès les origines, ici, dans L'Odyssée, car c'est précisément la spécialité des Phéaciens, qui s'avèrent capables d'affréter des bateaux rapides, fiables et… sans personne pour les diriger !

Non, moi, ce qui m'intéresse, quand je lis L'Odyssée, c'est d'essayer de comprendre la fonction du mythe, à qui il s'adresse et ce qu'on espère de lui. Car vous conviendrez que si l'on s'encombre de perpétuer un récit mythique, c'est que l'on en attend quelque chose, un quelconque effet sur l'auditoire auquel il s'adressait, n'est-ce pas ?

Tout mythe fondateur, ancien comme moderne (nos deux derniers mythes fondateurs modernes sont la Révolution française et la Seconde guerre mondiale) s'appuie sur des faits réels, plus ou moins manipulés, entortillés, bidouillés, le tout dans le but de donner une ligne de conduite claire à ceux qui s'en réclament ultérieurement.

Ainsi, je comprends mieux pourquoi celui qu'on baptise, pour faire simple, « Homère » (car il est certain que plusieurs auteurs, sans doute sur plusieurs siècles ont remanié ce mythe, qui avait déjà probablement eu une longue carrière exclusivement orale auparavant) a choisi de ne pas s'appesantir sur le volet « surnaturel » du mythe mais de faire la part belle, au contraire, aux actions auxquelles tout un chacun pourrait s'identifier.

De la sorte, ce qui ressort, selon moi, c'est la ligne de conduite que professe l'épopée : si vous êtes une femme, soit vous êtes de haut rang et vous vous identifiez à Pénélope, ce qui veut dire que vous êtes fidèle, pas comme cette traînée de Clytemnestre qui a trompé Agamemnon et l'a fait zigouiller en douce. Si vous êtes une domestique, votre modèle absolu, c'est Euryclée, la servante dévouée et incorruptible jusqu'à la mort, pas comme ces souillons qui ont couché à droite à gauche avec tous les prétendants pendant que le boss était de sortie. En somme, c'est tout à fait du même ordre que l'ancestral proverbe : « Quand le chat n'est pas là les souris dansent. »

Si vous êtes un homme, même chose, voici les exemples à suivre et les contre exemples : pour les humbles, l'exemple, c'est le porcher Eumée, le gars travailleur, honnête et fidèle à son patron. Si vous êtes un puissant, vous vous devez d'être magnanime, accueillant et généreux, tel que l'est Alcinoos. Ça vous dit quelque chose ? Comprenez-vous mieux pourquoi ceux-là tiennent tant de place dans la narration et non les épisodes dont tout le monde parle, du Cyclope, de Circé, de Calypso, d'Éole et tutti quanti ?

De sorte que, même si, comme Ulysse, vous avez accompli des prodiges, vous devez toujours rester humble, tel que lui l'est à son retour, transformé en gueux par les bons soins d'Athéna. Vous devez être méfiants et ne rien vous croire acquis d'avance car tout le monde cherchera à vous escroquer, vous spolier votre richesse chèrement gagnée, vous devrez prêcher le faux pour savoir le vrai afin de tester la loyauté de vos proches. Bref, un vrai programme digne d'un syndicat patronal de PME ! En somme, le Ulysse moderne, ce serait une sorte de Jean-Baptiste André Godin, le capitaine d'industrie sympa, qui créa les poêles du même non et les cités ouvrières à dimension humaine. D'ailleurs, il n'est pas exclu que ce dernier fût un lecteur assidu de L'Odyssée, mais je n'en ai pas la preuve formelle.

Le contre exemple, ce sont bien évidemment les infidèles, les envieux, les irrévérencieux prétendants, ces parasites qui dilapident le bien d'autrui et qui, s'ils périrent par les armes, ne jouiront jamais du culte ni des sépultures merveilleuses telles que celles qui furent édifiées pour l'exemple absolu de la mort « digne », savoir, celle d'Achille, d'où ce rappel au dernier chant de l'épopée.

Pour conclure, outre, comme je l'avais mentionné dans ma réflexion à propos de L'Iliade, l'apologie de l'installation de comptoirs grecs un peu partout en Méditerranée afin de civiliser moindrement tous ces odieux peuples qui ne mangent même pas de pain (et qui ne révèrent donc pas les dieux de l'Olympe, ce qui est bien pire encore, convenons-en, et ce qui justifie certainement une bonne vieille colonisation en règle), cette Odyssée me semble revêtir un aspect social important dont le message pourrait se résumer ainsi : ayez confiance en vos dieux, en vos rois (ce qui revient au même, car les mauvais rois seront châtiés par les dieux, tels que le furent les prétendants), ils sont tous bons et ils en ont vu plus que vous. Surtout ne déviez pas du droit chemin qu'ils vous dictent, bref, ne soyez pas séditieux, quoi !

Je dois reconnaître que ce n'est pas nécessairement le genre de message dont je raffole, moi qui n'affectionne ni dieu ni maître, mais la lecture de L'Odyssée va, bien évidemment, au-delà, ô combien, de son message immédiat. La culture en a retenu les anecdotes, la traduction en altère forcément une bonne part. Personnellement, j'ai lu celle de Philippe Jaccottet, que je pense assez sensationnelle et qui nous invite à considérer ô combien on perd par rapport à la mélodie, la prosodie, la psalmodie initiales.

D'un point de vue narratif, même si ça n'est de loin pas le souci primordial des auteurs, la construction de la première moitié est fort intéressante, puisqu'on débute le poème au moment où Ulysse est encore au plus loin de chez lui chez la nymphe Calypso, où Télémaque n'en peut plus de voir ces goinfres de pourceaux de prétendants se vautrer de façon menaçante dans ce qui lui revient de droit et surtout, de ne pas savoir si, oui ou non, son père est bel et bien mort. On comprend donc que la tension narrative est tout de suite présente et que les péripéties d'Ulysse apparaîtront ultérieurement sous forme de flash-back. La seconde moitié de la narration m'est apparue beaucoup, beaucoup plus poussive, et, partant, moins plaisante.

J'en termine, Ô mer, en te jetant cette bouteille à vis, où l'avis s'enroule dans tes rouleaux, mais, n'étant que mien, tel l'esquif misérable après la houle de Zeus, le fracas de Poséidon et la baguette tragique d'Athéna, atomisé façon puzzle, il ne signifie certainement pas grand-chose.
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Le vrai problème que j'ai avec la mythologie grecque, c'est que depuis toujours je ne parviens pas à retenir les noms ; je les mélange tous.

De ce handicap naît rapidement un ennui latent qui plombe ma lecture. La longue "Odyssée" d'Ulysse pour rentrer dans sa patrie et rejoindre (enfin) sa chère épouse Pénélope (qui pelotonne depuis vingt ans en essayant de ne pas se faire peloter par ses prétendants) n'échappe pas à cette règle, hélas.

Hormis le plaisir de découvrir les détails de certains épisodes que je connaissais jusque là trop superficiellement (le chant des sirènes, la nymphe Calypso, l'ensorcellement de Circé, la duperie du Cyclope, etc.), je n'ai pas particulièrement adhéré à cette épopée.

Pour ma part, je l'ai lu parce qu'on le tient légitimement pour un classique fondateur de notre civilisation et pour enrichir ma culture générale ; c'est d'ailleurs très utile, notamment pour visiter les expositions d'art avec un oeil éclairé (en tout cas plus éclairé que celui de Cyclope une fois qu'Ulysse lui a fait son affaire).

Le seul hic, c'est que j'en ai déjà oublié les 3/4.
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Ulysse est un grand prétentiard, imbu de sa personne qui s'aime beaucoup, beaucoup. Evidemment il adore raconter ses exploits à qui mieux mieux et il est légèrement mégalo, il parle de lui à la troisième personne. Ainsi il se vante d'avoir eu de multiples conquêtes féminines : Nausicaa, Calypso, Circé et de nombreuse autres femmes, toutes folles de lui à l'entendre. Féminines certes mais pourtant certaines mauvaises langues parmi sa troupe, prétendent qu'à propos de femme, c'est lui Ulysse qui tenait ce rôle quand les marins restaient trop longtemps en mer à la recherche du chemin du retour. Un adepte donc du : "A voile et à vapeur". Ça s'appelle l'adaptabilité !
Parmi les exploits dont il est très fier, ce sadique a crevé l'oeil d'un pauvre cyclope végétarien qui ne faisait pas de mal à une mouche. Ça n'est pas très très gentil!
Ensuite Ulysse s'est promené aux Enfers, s'amusant caché derrière les piliers, à faire peur aux pauvres âmes en peine en leur criant "bouh ! ". Quand Hadès a été mis au courant, il a viré ce grand imbécile à coup de fourche dans le derche.
Comme autre exploit, Ulysse s'est attaché à un mat pour entendre le fameux chant des Sirènes, chant soi-disant mortel, mouais, bof, bof. Puis lui-même, pour faire connaître sa belle voix s'est mis à chanter " Vous les femmes, vous le charme ! " et alors là, ça été radical, toutes les Sirènes se sont suicidées.
Après dix ans, Ulysse qui était nul en navigation, a enfin retrouvé son chemin et a rejoint sa terre natale. Malgré la légende, Pénélope n'avait pas suivi d'abstinence sexuelle, elle avait couché avec quelques prétendants très craquants qui tournaient autour d'elle, elle aurait eu tort de se priver. Elle accueillit donc le grand m'as-tu-vu avec circonspection. Pour finir, le chien d'Ulysse est venu pisser sur ses godasses en signe de dédain.
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Amorce de petit débat et clin d'oeil à Gwen21 qui est restée imperméable à "L'Odyssée" : la lecture enchanteresse (Circé... Nausicaa... Calypso...) de "L'Odyssée" d'HOMERE traduite par ce bon Victor Bérard m'apportera toujours cent-mille fois plus de bonheur qu'un ennième bouquin de Foenkinos, Nothomb, Angot, Legardinier, Khadra, etc. etc.... (sans présager de ce que nous lisons tous...) .

J'assume donc ici mon statut de Béotien définitif (ou d'insulaire de l'île d'Ithaque).
J'écouterais donc sagement à mon tour le "couseur de mots", ce "dérouleur de chants", l' "achik" ("amoureux") ou "rhapsode" ("interprête") immémorial - Cf. les beaux romans du kurdo-turc Yachar KEMAL : l'être aujourd'hui mystérieux que fut Homère, rhapsode ou aède...

M'assierai donc parmi la foule autour du type à la cithare, qui psalmodie ses chants épiques, sans discontinuer... Trois jours et trois nuit, s'il le faut ! On alimente le feu de brindilles pour tenir chaud à l'Aède.

"Aède" : celui qui savait faire chanter la langue.

Circé et ses "charmes", Nausicaa "aux bras blancs", Calypso "la bouclée" ne quittant plus sa grotte... où elle retient "prisonnier Ulysse" ("prison océane" d'avant la "prison aérienne" de la fée Viviane pour Merlin l'enchanteur...)

Je ne crois d'ailleurs pas à la notion (trop pratique et potentiellement mystificatrice) d' "auteur" mais bien plutôt à celle d'artiste. Artiste, oui, pratiquant un ART littéraire qui "devrait" être effectivement "pure exigence esthétique"...

"Ecrire beau" : pas à la portée du premier venu... et les étals de nos libraires et des grandes surfaces débordent actuellement "plutôt" de paralittérature que de belle et plaisante Littérature... La forêt de pacotille de la paralittérature (si extensive et toujours plus envahissante...) pourra un jour finir par cacher à nos sens anesthésiés et fatigués l'Arbre immémorial de la Littérature... A nous de veiller affectueusement sur ce bel Arbre : notre héritage d'humanité, bien sûr !

Amicalement à tous.
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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Je me suis lancée dans la lecture de L'Odyssée parce que mes deux enfants, dans leurs cursus respectifs, sont en train de l'étudier et que j'avais envie de participer à leurs conversations !
Et alors que je ne m'y attendais pas, j'ai été vraiment surprise et amusée.
Surprise par la construction narrative, Homère est terriblement moderne, il a su enchâsser des récits dans les récits, faire des retours en arrière, il y a des reprises, des anticipations. Quand je pense à la façon dont Chrétien de Troyes écrira quatre siècles plus tard… je suis scotchée…
Et amusée par l'absence de sagesse, le côté enfantin de ces hommes et ces Dieux. Calypso qui joue les vierges outragée parce qu'on lui vole son joujou, Ulysse, alors qu'elle l'emprisonne sans vergogne depuis sept années, Ulysse qui par orgueil (ou préjugé 😉) révèle au cyclope qu'il vient d'éborgner… euh… comme il n'y avait qu'un oeil, qu'il vient d'aveugler, son nom, ce qui évidemment lui vaudra la colère de Poséidon (c'est le papa du cyclope), les prétendants qui ont inventé le loft avant l'heure, un endroit où on ne paie rien, ou on vit à l'oeil en fainéantant dans la joie et l'allégresse et où on s'étonne ensuite d'être massacré par le légitime propriétaire des lieux… Parfois, je crois que certains élèves de grande section pourraient leur en apprendre à tous !
L'histoire commence alors qu'Ulysse a déjà vécu toutes ses périlleuses aventures, il est prisonnier chez la déesse Calypso. Il se morfond sur la plage, parce que seul et sans bateau il ne peut pas rentrer chez lui… enfin il se morfond, tout est relatif, le fait d'être prisonnier de Calypso ne l'empêche pas d'honorer la déesse, le soir, dans son lit !
Puis Homère nous entraîne sur l'île d'Ithaque, on découvre le désespoir de Télémaque, le fils d'Ulysse, face à la horde de prétendants qui vit nonchalamment chez lui, en pillant toutes ses richesses et ses réserves.
Il va prendre la mer, pour tenter d'avoir des nouvelles de son père. N'oublions pas que personne ne sait s'il est mort ou vivant. Il reviendra sur son ile natale après l'arrivée d'Ulysse.
Pendant ce temps Athéna fait les doux yeux à papa Zeus et obtient de lui la libération d'Ulysse. Calypso de mauvaise grâce lui indique comment il peut construire un radeau. Et le voilà sur les flots. Il arrive chez les Phaéciens et après leur avoir caché son identité (c'est un gars prudent Ulysse qui aime bien tester avant de se dévoiler), il dit qui il est et raconte ses péripéties : les Cicones, les Lotophages, les Cyclopes, Eole et la bourse pleine de vents, les géants cannibales, Circé, les enfers, les sirènes, Charybde et Scylla, l'île d'Héllios où la totalité des compagnons d'Ulysse mourront, de nouveau Charybde et Scylla et le naufrage d'Ulysse sur l'île de Calypso.
Puis les Phaéciens décident d'aider Ulysse, ils le couvrent de présents et le raccompagnent sur Ithaque. Là il commence par se cacher de tous sous les traits d'un vieux mendiant en haillons, il veut vérifier l'état d'esprit de ceux qu'il a quitté vingt ans plus tôt. Enfin (j'ai cru que ça n'arriverait jamais, tellement le teasing est intense à la fin), aidé de son fils Télémaque, du porcher et du bouvier, il massacre la totalité des prétendants. Et Athéna interviendra pour que les familles de ces hommes ne se vengent pas.
Pour terminer ce petit billet, je dirai que j'ai beaucoup aimé cette lecture, je craignais qu'elle soit difficile, ça n'a pas du tout été le cas, et je l'ai vraiment trouvée divertissante.
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critiques presse (1)
Sceneario
17 novembre 2014
Les trois artistes, à travers de somptueux tableaux, font à leur manière revivre la légende d'Ulysse. C'est ainsi que nous voyons le Cyclope, Calypso, les sirènes, Circé et bien d'autres passages célèbres de cette Odyssée. Chaque illustration mérite de s'y attarder de longues minutes tant c'est fabuleux !
Lire la critique sur le site : Sceneario
Citations et extraits (161) Voir plus Ajouter une citation
" Gens d'Ithaque, cessez ce pénible combat !
Au plus vite, sans plus de sang, séparez-vous !"
Ainsi dit Athéna, et la peur verte les [les pères des prétendants assassinés par Ulysse] saisit.
Des mains des hommes effrayés les armes s'envolèrent,
toutes tombèrent sur le sol à l'ouïe de la voix divine.
Ils se sauvèrent vers la ville, voulant vivre.
Ulysse l'endurant poussa un effroyable cri,
se ramassa et, comme l'aigle des hauteurs, bondit.
Mais le fils de Cronos fit tomber sa foudre fumante
aux pieds de la déesse aux yeux étincelants, sa fille ;
et Athéna, aux yeux brillants dit à Ulysse :
"Fils de Laërte, enfant de Zeus, industrieux Ulysse,
contiens-toi : interromps ce combat trop égal
de crainte que l'Assourdissant cronide ne t'en veuille !"
Ainsi dit Athéna. Il obéit, son cœur se réjouit,
et Pallas Athéna, fille du Porte-égide,
qui avait emprunté l'allure et la voix de Mentor,
institua entre les deux partis un durable traité [de paix].
(Fin de l'Odyssée, v.531 à 546, Chant XXIV, trad. Philippe Jaccottet]
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κτείνῃς ἠὲ δόλῳ ἢ ἀμφαδὸν ὀξέι χαλκῷ,
ἔρχεσθαι δὴ ἔπειτα λαβὼν ἐυῆρες ἐρετμόν,
εἰς ὅ κε τοὺς ἀφίκηαι οἳ οὐκ ἴσασι θάλασσαν
ἀνέρες, οὐδέ θ᾽ ἅλεσσι μεμιγμένον εἶδαρ ἔδουσιν·
οὐδ᾽ ἄρα τοί γ᾽ ἴσασι νέας φοινικοπαρῄους
oὐδ᾽ ἐυήρε᾽ ἐρετμά, τά τε πτερὰ νηυσὶ πέλονται.
σῆμα δέ τοι ἐρέω μάλ᾽ ἀριφραδές, οὐδέ σε λήσει·
ὁππότε κεν δή τοι συμβλήμενος ἄλλος ὁδίτης
φήῃ ἀθηρηλοιγὸν ἔχειν ἀνὰ φαιδίμῳ ὤμῳ,
καὶ τότε δὴ γαίῃ πήξας ἐυῆρες ἐρετμόν,
ῥέξας ἱερὰ καλὰ Ποσειδάωνι ἄνακτι,
ἀρνειὸν ταῦρόν τε συῶν τ᾽ ἐπιβήτορα κάπρον,
οἴκαδ᾽ ἀποστείχειν ἔρδειν θ᾽ ἱερᾶς ἑκατόμβας
ἀθανάτοισι θεοῖσι, τοὶ οὐρανὸν εὐρὺν ἔχουσι,
πᾶσι μάλ᾽ ἑξείης. θάνατος δέ τοι ἐξ ἁλὸς αὐτῷ
ἀβληχρὸς μάλα τοῖος ἐλεύσεται, ὅς κέ σε πέφνῃ
γήραι ὕπο λιπαρῷ ἀρημένον· ἀμφὶ δὲ λαοὶ
ὄλβιοι ἔσσονται. τὰ δέ τοι νημερτέα εἴρω.

alors prends une rame bien faite et va,
jusqu'à ce que tu arrives chez des hommes
qui ignorent la mer et mangent leur pitance sans sel;
ils ne connaissent donc point les vaisseaux aux flancs rouges,
ni les rames bien faites, qui sont les ailes des vaisseaux.
Je vais t'en dire une preuve bien convaincante, qui ne t'échappera pas.
Quand, te rencontrant, un autre voyageur
dira que tu portes un battoir à vanner sur ta robuste épaule,
alors, plante en terre ta rame bien faite,
offre un beau sacrifice à Poseidon,
un bélier, un taureau, un porc en état de saillir les truies;
puis reviens à ta maison sacrifier des hécatombes sacrées
aux dieux immortels qui habitent le ciel immense,
à tous, sans en omettre aucun.
Pour toi, la mort te viendra hors de la mer, très douce :
elle te prendra quand tu seras affaibli par une vieillesse opulente;
autour de toi, tes peuples seront prospères.
Voilà ce que je te prédis en toute vérité. »

Homère, Odyssée, Chant XI
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Ἄνδρα μοι ἔννεπε, Μοῦσα, πολύτροπον, ὃς μάλα πολλὰ
πλάγχθη, ἐπεὶ Τροΐης ἱερὸν πτολίεθρον ἔπερσε·
πολλῶν δ’ ἀνθρώπων ἴδεν ἄστεα καὶ νόον ἔγνω,
πολλὰ δ’ ὅ γ’ ἐν πόντῳ πάθεν ἄλγεα ὃν κατὰ θυμόν,
ἀρνύμενος ἥν τε ψυχὴν καὶ νόστον ἑταίρων.

Ô Muse, conte-moi l’aventure de l’Inventif :
celui qui pilla Troie, qui pendant des années erra,
voyant beaucoup de villes, découvrant beaucoup d’usages,
souffrant beaucoup d’angoisses dans son âme sur la mer
pour défendre sa vie et le retour de ses marins
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Ulysse alors, courant au fils de Damastor, le tue à bout de pique ; Télémaque, en plein ventre, atteint Liocritos, un des fils d'Evénor, et la pointe s'en va ressortir dans le dos.

Il s'abat sur la face et son front bat le sol... Et voici qu'Athéna, déployant du plafond son égide qui tue, terrasse leurs courages. A travers la grand'salle, ils fuient épouvantés : tel, un troupeau de bœufs qu'au retour du printemps, lorsque les jours allongent, tourmente un taon agile. Mais Ulysse et les siens, on eût dit des vautours qui, du haut des montagnes, fondent, le bec en croc et les griffes crochues, sur les petits oiseaux qui tombent dans la plaine en fuyant les nuages ; les vautours les massacrent ; rien ne peut les sauver, ni bataille ni fuite, et les hommes aussi ont leur part du gibier... C'est ainsi qu'en la salle, assaillis de partout, tombaient les prétendants, avec un bruit affreux de crânes fracassés, dans les ruisseaux du sang qui courait sur le sol.

347 - [Folio n° 254, p. 428]
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Les Nymphes
Les Nymphe sont des divinités de la nature: ce sont de belles jeunes filles (sens premier du mot numphè en grec) qui vivent dans les eaux, les forêts et les montagnes. Ainsi les Grecs distinguaient-ils les dryades (nymphes des arbres), les naïades (nymphes des sources et des cours d'eau), les néréides (nymphes de la mer) et les oréades (nymphes des montagnes et des grottes).
Ces divinités sont généralement bienfaisantes, protectrices de la jeunesse, surtout des jeunes filles et des fiancées. Elles peuvent être les suivantes d'une grande divinité comme Artémis, la déesse de la chasse, ou d'une nymphe d'un rang plus élevé, comme Calypso. Elles habitent dans des grottes où elles passent leur vie à filer et chanter.
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Vidéo de  Homère
HOMÈRE — L'idéal héroïque de l'Iliade selon Jean-Pierre Vernant (France Culture, 1981) L'émission des "Chemins de la connaissance", par Marie-France Rivière, diffusée le 9 janvier 1981 sur France Culture. Présence : Jean-Pierre Vernant.
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