AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Nastasia-B


On peut reconnaître toutes les qualités ou tous les défauts qu’on voudra à ce roman, force est de constater que peu sont ceux qui peuvent se targuer d’avoir contribué aussi décisivement à la préservation d’un patrimoine que l’on dit, désormais, mondial. Aujourd’hui, j’ai décidé de ne pas trop vous parler du roman (un certain nombre d’entre-nous s’en sont déjà chargés admirablement), mais plutôt de son impact culturel actuel.

Outre le fait qu’il s’agissait d’une des premières fois où un monument tenait autant lieu de véritable personnage principal d’une œuvre de fiction (Zola par la suite s'inspirera beaucoup de la méthode pour bâtir son roman Le Ventre De Paris, en y faisant même, à un passage, clairement référence), on peut affirmer qu’il a marqué le retour en grâce du monument dont il est question dans le cœur des Parisiens.

À telle enseigne que cette cathédrale, croulante, misérable, en fin de vie, expirante, lourde, massive, poussive, telle qu’on peut la deviner sur le daguerréotype de 1840, dont le principal espoir d’avenir était une destruction en bonne et due forme, à telle enseigne, disais-je, que les autorités, suite au succès du roman, ont reconsidéré la question, et finalement entrepris la fantastique restauration menée à bien par le très controversé (mais à sa façon génial) Eugène Viollet-le-Duc.

Les principales contributions (il y en a d’autres) de cet architecte à l’édifice est l’adjonction de la fameuse flèche qui est maintenant si « typique » de Notre-Dame ainsi que des non moins célèbres chimères qui s’étalent sur toutes les cartes postales. Encore un lien entre littérature et patrimoine, vous savez sûrement que si Viollet-le-Duc a été mandaté pour cette rénovation, c’est avant tout parce qu’il était l’ami d’enfance de Prosper Mérimée, lequel était en charge à l’époque, des monuments historiques.

J’ajouterai encore que, face au succès de la restauration de Notre-Dame de Paris, il a été entrepris, sous l’impulsion de Viollet-le-Duc mais réalisée par ses deux élèves Paul Gout et Édouard Corroyer, une autre non moins fameuse restauration et adjonction de flèche, à savoir celle de l’Abbaye du Mont-Saint-Michel. On a du mal à se figurer désormais le Mont sans cette fameuse flèche, or, elle est extrêmement récente.

Imaginez, donc, Notre-Dame sans sa flèche ni ses chimères, imaginez même qu’elle pourrait ne plus du tout exister, imaginez le Mont-Saint-Michel sans sa flèche, et imaginez que tout cela, tout ce patrimoine si emblématique de la France, nous le devons incontestablement à l’impulsion décisive qu’a constitué ce roman de Hugo.

À tous les amateurs d’histoire de l’art, et je sais qu’ils sont nombreux sur Babelio, sachez que nous lui devons tout cela, et que, rien que pour ce détail, ce roman a un immense mérite. Il y en a bien d’autres, car cette fiction historique se lit avec grand plaisir.

Bien évidemment, on peut reprocher, de temps en temps à notre Victor national de faire un peu trop grincer les violons ou d’en faire un peu trop, mais, dans l’ensemble, il sait toujours se tenir sur la délicate ligne de crêtes tendue entre grandiloquence et kitsch, entre poésie et too much, même si, dans cet exercice de funambule au long cours, il pose de temps en temps le pied sur l’un ou l’autre terrain. Mais malgré tous ces " mais ", j'arrive encore à beaucoup aimer ce roman et je ne m'en cache pas.

Et pour conclure, je dirais que, par l’écriture de ce livre, Victor Hugo a réussi la prouesse de métamorphoser, de transfigurer la cathédrale Notre-Dame de Quasimodo qu’elle était en Esmeralda qu’elle est devenue. Et rien que pour cela, chapeau l’artiste et merci.

Vous noterez que ceci est la vision éminemment partiale d’une amoureuse du patrimoine, avec toutes les déformations de regard que la partialité entraîne, c’est-à-dire, bien peu de chose, un pet de chimère, ou une chiure de pigeon sur le crâne chauve de la statue de Viollet-le-Duc de la flèche de Notre-Dame de Paris.
Commenter  J’apprécie          23716



Ont apprécié cette critique (176)voir plus




{* *}