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EAN : 9782258097094
276 pages
Presses de la Cité (06/06/2013)
4/5   6 notes
Résumé :
La Guyane, de nos jours. Il y a Frantz, l'Amérindien, piroguier, qui dans l'ombre attend son heure pour sauver sa forêt, aider son peuple, "du moins ce qu'il en reste". Thomas, l'ex-riche homme d'affaires, exilé volontaire histoire de faire oublier ses affaires véreuses et reconverti en tenancier du bar du Caïman noir…

Sofia, la prostituée brésilienne, prête à tout pour rentrer chez elle… Alia, la brillante scientifique fascinée par les insectes para... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
On se souvient peut-être que Joris, le héros du livre d'Alain Agat Negropolis, apatride en métropole comme dans sa Guadeloupe d'origine, envisageait un nouveau départ dans cette Guyane où tout semblait possible. C'est ce que pense sans doute un grand nombre d'individus rassemblés par Denis Humbert dans le Bar du Caïman noir, où un évènement tragique vient de se produire.

À partir de là, le roman se déploie sous la forme d'une analepse polyphonique, conduisant à la révélation de cette soirée fatale. À travers des archétypes, Denis Humbert brosse le portrait d'une Guyane complexe dont on connait, chez nous, peu de choses. À peine sait-on encore qu'elle fut implacable terre d'exil, tout juste nous souvenons-nous que de son sol décollent les fusées européennes.

Le bar du Caïman noir est un western, qui ressemble beaucoup à Deadwood sans le côté épique et héroïque que pouvait lui apporter la présence de légendes amerlocaines. Ici, de pauvres hères venus du Brésil et travaillant pour des maîtres invisibles saccagent la forêt vierge et polluent les eaux pour trouver l'or. Tentant d'échapper, tant aux rares opérations de police qu'aux fréquentes attaques de voleurs, souvent misérables garimpeiros comme eux, leur activité contribue à un implacable climat de violence. La torture et le meurtre sont chose courante, les corps, pour autant qu'on les cherche, pouvant disparaître de mille façons.

Dans leurs cloaques, ils ont besoin de vivres et d'équipements que leur fournit Thomas – homme d'affaires déchu ayant fui la métropole pour se refaire une virginité – car cette fièvre de l'or ne peut tourner sans une ronde de profiteurs, d'édiles corrompus, de gendarmes inefficaces [1]. Ni sans femmes pour le repos du travailleur... alors “ on ” les importera du Brésil ou on prélèvera dans les tribus autochtones des adolescentes émerveillées par l'argent facile. Sofia, métisse brésilienne qui sert désormais au Caïman noir et est devenue la favorite du patron, a connu les conditions inhumaines de ces camps. Elle qui poursuit le rêve de retourner au pays s'occuper de sa jeune soeur fera tout pour ne pas être contrainte d'y retravailler.

La haine de Frantz, bâtard amérindien qui apporte aux clandestins, par voie d'eau, les marchandises de Thomas, embrasse tous ceux qui ne sont pas indigènes, depuis le colon blanc jusqu'aux descendants de l'esclave marron, en passant par le Hmong installé durant le Plan Vert [2]. Lié intimement au fleuve, à une culture qui se délite sous ses yeux et à laquelle il n'a pas eu vraiment accès, Frantz est complexe et paradoxal. Son désespoir créera les conditions de la déflagration et il saura faire de l'avide Caporal Bob, un ancien légionnaire, l'instrument de sa vengeance du seul contre tous. Ce dernier ressemble un peu à ces libérés du temps de la Pénitentiaire, qui n'avaient pas le droit de rentrer en métropole et pourrissaient sur place dans la moiteur, la nonchalance douceâtre d'un pays qui n'avait rien pour eux.

Enfin, le Bar du Caïman noir déroule l'idylle entre Alia – brillante chercheuse spécialisée dans les parasites et issue des cités de la banlieue de Paris – et Simon – consultant cynique que s'arrache le monde des affaires –, qui vont peut-être trouver à Régina la solution à une impossible histoire d'amour traînant entre eux depuis leurs quinze ans. Illustrant l'aspect rédempteur du pays, cette partie romantique m'a semblé la plus convenue et donc la moins intéressante du roman.

Denis Humbert nous invite à suivre ses personnages durant l'année qui précède la soirée tragique du Caïman noir, dont le lecteur découvrira avec ravissement les tenants et aboutissants. Son écriture, sobre et efficace, qui passe de l'un à l'autre tout en montrant leur évolution, est parfaitement addictive. le Bar du Caïman noir est un bel hommage à cette Guyane qui est aussi – caprice colonial persistant – la France (et y résiste à sa façon). Un bout de France livré à la folie des hommes depuis quatre siècles, bien loin du paradis tropical (en librairie le 5 juin 2013).

Lien : http://leventsombre.cottet.o..
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Denis Humbert a plein de très bonnes idées dans ce roman. D'abord le titre de ses chapitres : "Un an avant le jour où c'est arrivé", puis, "Huit mois avant le jour où c'est arrivé" jusqu'au dernier intitulé logiquement : "Le jour où c'est arrivé". En tout, dix chapitres en comptant le petit prologue : "Le lendemain du jour où c'est arrivé". Et voilà le lecteur ferré, conscient qu'il va se passer quelque chose. le suspense, même s'il n'est pas le ressort principal du livre monte progressivement.
Ensuite, le paysage, la moiteur du climat, la forêt amazonienne, le coin perdu au bout de nulle part, un bar improbable comme on peut en voir dans de vieux films états-uniens, en bois dans lequel viennent se réfugier des hommes et des femmes en attente de changement ou bien au contraire des gens qui n'attendent plus rien de leur vie
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
... cet endroit n'était rien d'autre qu'un cloaque putride, un mouroir marécageux infesté de moustiques. [...) Il faudrait s'en accommoder. Serrer les dents et faire bonne figure, supporter cette moiteur perpétuelle et ce sentiment d'être en train de glisser dans le conduit d'un vide-ordures. (p.78)
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... En Europe, lorsqu'on parle d'or, on pense au luxe, aux bijoux ou même aux cours de la bourse. Huit mille kilomètres plus à l'ouest, en Guyane, on voit les choses différemment. On pense orpaillage clandestin, pollution des fleuves et délinquance... (p.227)
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"Les pieds sur la rambarde de la varangue, dans sa
villa de location en bois construite sur un abattis en
pente douce au bord du fleuve, un verre à la main et les
yeux sur les eaux mauves du couchant, il s’était senti
une âme de découvreur de nouveaux horizons. C’est ce
que l’on ressent au début ; comme des liens qui se
délient et l’impression d’être à un carrefour d’où
partent tous les renouveaux. La multiplication infinie
des possibles."
(Le bar du caïman noir)
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