Cela faisait un petit moment que j'avais envie de découvrir ce roman : le titre m'attirait, me laissant entrevoir un roman apaisant, tourné vers la nature et le monde des oiseaux.
Alors, j'avoue avoir été un peu déçue lorsque je me suis rendue compte de ma méprise, car le sujet ne traite pas de ce thème, même si les oiseaux parcourent le roman en filigrane.
Heureusement, même s'il n'a pas répondu à toutes mes attentes, je me suis laissée emporter par ce court récit où la forêt et les oiseaux posent le cadre à un roman intimiste, où le texte coloré et imagé, plein de poésie, de solitude et de mystère accompagne ces pages.
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ZsaZsa, la narratrice, après la publication de son premier roman, décide de faire une pause dans sa vie. Elle a besoin de se retrouver, d'être enveloppée de calme et de silence. Elle quitte alors la frénésie de la vie parisienne, s'éloignant du même coup de son petit ami dont l'humeur sarcastique et négative devient pesante.
« Thomas est un garçon amer, négatif, corrosif, pour qui tout est déjà perdu, et de cette perte, il n'en finit pas de se repaître, dès qu'il y a de l'échec, c'est à mordre, à ronger, à venger, c'est à lui. »
Elle part vivre seule, entourée de forêts, dans les montagnes vosgiennes et elle emménage, dans une cabane au confort sommaire pour observer les oiseaux et débuter un nouveau roman.
Ce serait un roman seulement intimiste et proche du nature-writing si le mystère ne s'invitait pas sous la forme d'une japonaise que la narratrice rencontre par hasard sur Internet en lui achetant un blouson.
La romancière est tout de suite fascinée par les textes d'annonce qui dégagent autant de charme, de fraîcheur que de maladresse. C'est ainsi que débute une correspondance jusqu'au jour où Kat-Epadô se présente devant sa porte, apeurée, sollicitant son aide.
« Il s'était passé autre chose, de privé, je l'apprendrais, qui s'avançait depuis le passé, droit sur elle. »
L'auteur nous emmène alors dans une sorte de roman à suspense où la menace, invisible, réelle ou imaginaire côtoie les silences, la solitude, les pudeurs, les fêlures, les zones d'ombre et les blancs d'une vie. Deux cultures se mélangent et entre elles, le chant des oiseaux.
La fin ouverte prolonge cette idée de mystère autour de Kat-Epado et de cette échappée dans la forêt, comme si ce que nous avions vécu était métaphorique. Je pense que chaque lecteur vivra et interprètera ce texte à sa manière.
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Claudie Hunzinger nous emporte par la grâce des mots. Elle écrit avec douceur et poésie, laissant le lecteur s'imprégner de l'atmosphère calme et sereine de la forêt.
On retrouve là un cadre cher à l'auteure, la nature, les Vosges, la forêt, les animaux qui la peuplent. La forêt, de nuit, peut être un lieu angoissant mais la magie et le mystère du texte adoucissent cette crainte du noir et de l'obscurité.
L'écriture de
Claudie Hunzinger est ce qui donne le charme à ce petit roman.
Les phrases proches de la prose, sont travaillées avec délicatesse, et leur beauté, blottie dans leur écrin de verdure, se révèlent avec justesse et légèreté. Les mots s'accordent à une musicalité pour donner toute sa force au texte. La nature y est belle, généreuse, salvatrice, mais aussi sauvage, brute, inquiétante.
« Pour moi, la langue miroite comme la lune sur l'eau. Je n'arrive jamais à l'attraper. »
L'auteure donne aussi corps aux absents, au père de ZsaZsa, amoureux des oiseaux et de la littérature chinoise.
Elle entretient également le mystère et la confusion autour du personnage imprécis de Kat-Epadô.
« Sous son calme, comme sous la surface d'un lac, on devinait un paysage intérieur, imprévisible, sauvage, tourmenté. Un orgueil. Un volcan éteint. »
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Ici, nous découvrons un roman sur la peur et le silence, sur les blessures intimes et le besoin de liberté, sur la nature qui aide à panser les blessures et se reconstruire. Les oiseaux accompagnent les deux femmes de leur présence discrète mais fidèle.
L'auteur aborde aussi des thématiques autour de la littérature, l'acte d'écrire et la force des mots.
« Quand j'écris, je sais que mes mots sont déjà perdus. Cela ne me gêne pas. Ils ne sont que du sable. Si je les imprimais, ils ne seraient pas plus solides. »
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Pour conclure, j'ai savouré la poésie qui émane de la narration, les mots sont comme le souffle du vent brassant le feuillage de la forêt. C'est beau, juste, profond. J'ai apprivoisé ma crainte de l'obscurité et de la solitude.
Le texte garde une part de mystère, à l'image de cette inconnue qui tel un oiseau, se dissimule dans la texture des mots.
Un beau roman qui se déguste lentement et qui me donne envie de découvrir les autres romans de l'auteure.