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EAN : 9782070443703
192 pages
Gallimard (23/06/2011)
3.59/5   43 notes
Résumé :
Il y a la peine, qui ravine,

il y a le froid qui gagne,

quelquefois c'est comme si l'on n'avait plus de peau,

seulement la pierre des os :

une cage de pierre avec au centre un foyer froid,

une espèce de geôle où l'on ne sait

s'il y a encore à délivrer,

et la clef heurtant les barreaux

fait un bruit dur et mat.



La pei... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Jacottet appartient à une génération qui, âgée d'une vingtaine d'années en 1945, a commencé d'écrire dans des temps de détresse, dans un monde où les valeurs humaines avaient déjà été à ce point bafouées que certains se demandaient s'il était légitime d' « écrire un poème après Auschwitz » (Adorno).
« Leçons » et « Chants d'en bas » sont deux livres de deuil. le poète y engage une méditation sur la parole affrontée à la mort. Comment parler de la mort ?...
(Extrait du dossier de l'édition de 2011)

Je connais très peu la poésie française de l'après-guerre. Jacottet est une révélation. le poète parle effectivement de la mort, se questionne sur le pouvoir de la parole face au temps qui passe, au vieillissement, au pourrissement. Ses mots sonnent comme des claques. Dans son lexique, on retrouve souvent les mots : hiver, mort, vieux… Influence de la guerre encore proche ?
Ces textes me font penser à Trackl, dans leur noirceur, mais aussi dans cette interrogation sur l'humain, sur le sens de l'existence et la pérennité de nos vies.
Le dossier sur l'oeuvre est très complet. Et je me rends bien compte, avec humilité, que mes pauvres impressions sont bien loin de ce qu'une analyse poussée du texte peut apporter.
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Ce recueil est un Folio plus, donc avec une partie pédagogique, « recommandée pour les classes de Lycée », (mais pas interdite aux retraités!), contenant, d'une part les poèmes de A la lumière d'hiver, précédés de ceux de Leçons et de Choses d'en bas; et d'autre part, un dossier comportant une mise en perspective d'un tableau avec le recueil de poésie puis un commentaire consacré à la poésie contemporaine, à l'oeuvre de Philippe Jaccottet, et aux poèmes présentés dans le livre.

Si je n'ai pas été convaincu par la présentation d'un tableau dans la veine symboliste de Hodler, peintre suisse de la fin du 19ème siècle, qui sert de point de comparaison avec l'oeuvre du poète (d'origine suisse) Philippe Jaccottet (je trouve que l'on aurait pu en trouver d'autres tout aussi pertinents, voire plus, de van Gogh, O'Keefe, …), l'analyse de l'apparition du vers libre dans la poésie contemporaine, mode d'expression majeur de Jaccottet, puis des courants de la poésie française, puis de l'oeuvre de Jaccottet qui s'inscrit dans le courant « sensible », et enfin des poèmes du recueil, tout cela est très bien fait, très clair.
Et cela même si la classification m'est apparue réductrice et que des poètes importants soient oubliés, tels Andrée Chedid, François Cheng ou Jean-Michel Maulpoix.

Mais revenons à ce qui est essentiel, c'est-à-dire les poèmes de Leçons, Chants d'en bas, À la lumière d'hiver.
C'est peu de dire qu'ils sont tous magnifiques, sur le fond comme sur la forme.

Ce sont des textes en vers libres marqués par la difficulté d'écrire l'énigme de la mort, d'autant plus quand il s'agit d'un proche qui ne sera pas nommé, mais dont sait qu'il est le beau-père de l'auteur dans Leçons, et sa mère dans Chants d'en bas.
La souffrance de la descente vers la mort, l'affaiblissement progressif du corps, la conviction qu'il n'y a rien qu'un cadavre ensuite, et rien d'autre, tout cela est dit dans un langage qui cherche à s'approcher de la vérité, mais qui se méfie des images faciles, de donner dans l'excès, le pathos.
Mais, pourtant, malgré la séparation du deuil, le poète trouve aussi dans l'être absent une lumière qui l'accompagne dans les moments et les gestes de la vie quotidienne.
Et aussi, et j'ai retrouvé ici ce qui m'avait marqué dans d'autres recueils poétiques de Philippe Jaccottet, et surtout ici dans A la lumière d'hiver, l'expérience merveilleuse et toujours renouvelée du contact avec la Nature, même si elle peut se révéler hostile, inquiétante par sa puissance, telle la montagne. Mais aussi aller dans son jardin, voir la neige recouvrir le paysage, et à tout instant se laisser porter par la vie des êtres vivants et inanimés qui vous entourent, ressentir l'instant présent.

Il y a là, avec d'autres mots, d'autres phrases, cette attitude méditative, cette ouverture au monde, cette sérénité que j'ai trouvé chez Andrée Chedid, François Cheng, et bien d'autres poètes.
Mais il y a, c'est sûr, cette prosodie si particulière de Jaccottet, cet agencement des vers libres qui met en relief certains mots, crée un effet de surprise, ou d'attente.
J'en mettrai quelques exemples dans mes citations.
Il y a cette façon unique de tourner autour du sens, d'accepter l'énigme, un façon de sembler vous dire: « Je cherche à vous dire l'indicible, je ne trouve pas, mais je vous invite avec moi sur le chemin », une telle économie de mots, tout cela est extraordinaire, presque mystique.

En conclusion, une triade de recueils poétiques impressionnante par sa beauté austère, par sa puissance dans l'approche du deuil, et par delà aussi, du sens à donner à la vie.
J'ai lu dans d'autres commentaires de cette oeuvre que les lectrices et lecteurs la trouvent difficile, voire hermétique.
Personnellement, je trouve que cela participe à sa beauté.
Et puis, après tout, je me dis que si les jeunes élèves de lycée ont ce recueil à leur programme, c'est que l'Éducation Nationale pense (mais elle peut se tromper, comme souvent) qu'il leur est accessible.
Alors, nous qui avec l'âge, devenons de plus en plus entourés par les chers êtres absents, ne pouvons qu'être sensibles à ce que cette oeuvre s'efforce de nous dire.
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Ce recueil A la lumière d'hiver m'a permis de découvrir Philippe Jaccottet et sa poésie en vers libres.J'ai apprécié la sensibilité, le lyrisme de certains poèmes (« raisins et figues », évoquant à la fois les lumineux vergers , les vignobles de la Drôme provençale et le souffle pesant de la mort ), je n'ai pas saisi le sens profond d'autres vers qui sont restés, pour moi assez ombreux, . Il me faudra donc approfondir la connaissance de ce poète , peut être, plus tard, par l'étude de L'Effraie .

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En entrant dans ce recueil, on pénètre comme dans une sorte de temple étrange où le recueillement, l'intime, l'émotion feutrée font partie du décor intérieur. Si les références religieuses, bibliques sont nombreuses, elles revêtent plutôt des symboles agnostiques où la pure croyance est absente, mais pas le doute, le mystère, la méditation philosophique qui semblent être des cheminements poétiques analytiques sur l'existence et la mort. Car on sent bien que face aux énigmes insolubles de la vie, le poète cherche des réponses, cependant ces dernières restent hermétiquement absconses et devant ce défi que lui oppose le destin, l'auteur refuse de s'enfermer dans une religion, croyance quelconque, préférant l'abnégation simple, parfois dure de la vie, acceptant cette sombre lumière sans espérance qu'est la condition humaine.
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Poursuite de ma découverte de la poésie dans le cadre du challenge "PoéVie :La poésie c'est la vie " ....
Suite à son décès récent, pléthore d'hommage et de citations de Philippe Jaccottet son apparus dans les médias attirant mon attention et me donnant envie d'en savoir plus.
J'ai pu lire que P. Jaccottet était un poète "moderne" s'interrogeant sur son rôle, ses limites.
3 écrits dans ce recueil. "Leçons" avec la confrontation à la mort en trame de fond, "Chants d'en bas" et "A la lumière d'hiver", autre recueil de deuil à la limite de la mort et de la lumière. Je n'ai pas été sensible à cette poésie ayant eu quelques difficultés avec ces vers "libres". Mais il me reste un autre recueil pour en découvrir plus et revoir mon avis. A suivre ...
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Raisins et figues
couvés au loin par les montagnes
sous les lents nuages
et la fraîcheur :
sans doute, sans doute...

Vient un moment où l'aîné se couche
presque sans force. On voit
de jour en jour
son pas moins assuré.

Il ne s'ait plus de passer
comme l'eau entre les herbes :
cela ne se tourne pas.

Lorsque le maître lui-même
si vite est emmené si loin,
je cherche ce qui peut le suivre :

ni la lanterne des fruits,
ni l'oiseau aventureux,
ni la plus pure des images ;

plutôt le linge et l'eau changés,
la main qui veille,
plutôt le cœur endurant.

(Leçons)
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Toi cependant,

ou tout à fait effacé
et nous laissant moins de cendres
que feu d’un soir au foyer,

ou invisible habitant l’invisible,

ou graine dans la loge de nos cœurs,

quoi qu’il en soit,

demeure en modèle de patience et de sourire,
tel le soleil dans notre dos encore
qui éclaire la table, et la page, et les raisins.
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Il y a la peine, qui ravine,

il y a le froid qui gagne,

quelquefois c'est comme si l'on n'avait plus de peau,

seulement la pierre des os :

une cage de pierre avec au centre un foyer froid,

une espèce de geôle où l'on ne sait

s'il y a encore à délivrer,

et la clef heurtant les barreaux

fait un bruit dur et mat.



La peine a pris racine avec des cordes jaunes

comme l'ortie

et le visage s'est assombri.

Il est des plantes si tenaces

que le feu seul peut en avoir raison.
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Un simple souffle, un nœud léger de l'air,
une graine échappée aux herbes folles du Temps,
rien qu'une voix qui volerait chantant
à travers l'ombre et la lumière,

s'effacent-ils, : aucune trace de blessure.

La voix tue, on dirait plutôt, un instant,

l'étendue apaisée, le jour plus pur.

Qui sommes-nous, qu'il faille ce fer dans le sang?
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" Mais chaque jour, peut-être, on peut reprendre
le filet déchiré, maille après maille,
et ce serait, dans l'espace plus haut,
comme recoudre, astre à astre, la nuit..."
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Vidéo de Philippe Jaccottet
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