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EAN : 9782914834469
256 pages
Passage du Nord-Ouest (21/10/2011)
3.97/5   17 notes
Résumé :
"Keber était un nom que cet été-là, dans les antiques cellules de M, on prononçait avec respect ; la nuit, des histoires murmurées sur sa vie couraient de bouche à oreille et le souffle des voleurs, des faussaires et des violeurs ordinaires s'arrêtait : Keber, son béret vert sur la tête, avait dormi au Vietnam parmi les cadavres, il avait traversé les océans en bateau, à Saint-Domingue il avait fait trembler des généraux en caleçon, en Russie des femmes avaient tent... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Keber est une véritable légende.

Lui qui a bourlingué à travers le monde, traversé les océans, fait trembler les généraux, fait se pamer tant de femmes, restera gravé dans les esprits comme meneur de la célèbre révolte de Livada.

En 1975, incarcéré dans la prison de Maribor en Slovénie, Keber raconte à un autre detenu, le narrateur, l'histoire du soulevement de Livada et fait le parallèle avec le siège de Massada où les juifs tiennent tête aux romains 2000 ans auparavant :
Les faits se sont déroulés il y a plus de vingt ans dans la prison yougoslave de Livada. Jour de retransmission du match de basket USA-Yougoslavie, un maton hargneux et vicelard prend la fâcheuse initiative d'éteindre la télé avant la fin du match . Erreur fatale, une mutinerie sauvage éclate, les prisonniers fous furieux saccagent tout et s'emparent de la prison aussitôt encerclée par les forces de l'ordre. Keber est le chef de cette rebellion qui va prendre une tournure (in)attendue...

Drago Jancar, auteur Slovène est une figure nationale de la dissidence au temps de l'ex-Yougolavie. Opposant connu au régime titiste, il a d'ailleurs été condamné à un an à la prison pour "propagande en faveur de l'ennemi".

"Des bruits dans la tête" est un roman qui relate l'histoire d'une révolte en dénoncant les régimes dictatoriaux. Drago Jancar montre comment à l'intérieur même de la prison peut s'instaurer une dictature menée par les prisonniers. A leur tête, un petit fonctionnaire bibliothècaire devenu tyran, s'entoure de fripouilles de la pire espèce dont un barbier, un ancien tueur de juges qui devient tortionnaire. Les insurgés comme Keber sont les hommes à abattre.

L'auteur décrit les conditions carcérales qu'il a peut-être connu lui-même dans les prisons yougoslaves. L'obligation de rêver pour ne pas sombrer dans la folie. Il y dresse des portraits haut-en-couleurs des prisonniers politiques, des délinquants sexuels mais aussi des gardiens sadiques. Les personnages incarcérés dans la geôle filent le frisson comme Spac affuté comme une lame, Glaçon le barbier qui fait froid dans le dos, Mbrak le tyran,et Pepo la tante.
Quant à Keber, le chef de l'insurrection, un portrait d'un héros Slovène qui se rebelle contre toute forme de dictature et sort de ses gongs à chaque bruit de couverts qui racle dans une assiette et à chaque vulgarité.

La qualité de l'écriture et de la traduction, l'univers onirique et épique du héros, son amour pour Leonca et la narration du siège de Massada rendent le récit vivant et captivant.

"Des bruits dans la tête", un très bon livre Slovène qui résonne très fort dans ma tête.

Je remercie Babelio, masse critique et les éditions Libretto pour cette découverte.
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J'ai eu un peu de mal à entrer dans le récit. L'écriture est bouillonnante, part dans tous les sens. Les bruits dans la tête sont parfaitement rendues par la langue, le rythme, la construction narrative. On lit quelque chose de brouillon, qui résonne pendant longtemps.

L'histoire est belle et cruelle. La révolte de prisonniers suite à l'interruption d'un match de basket causée par un garde abjecte. Tout part de là. Keber vrille. Et c'est toute la prison qui s'enflamme. Les prisonniers errent, fuient, veulent se battre, se cacher...Keber lui a des rêves de révolte, d'insoumission. Il a toujours été fasciné par le siège de Massala en Judée au 1er siècle. Pour lui, cette révolte, ce soulèvement c'est ce siège.

Les prisonniers se rassemblent, des petits groupes se forment. Des revendications, des menaces, des lois. Keber fait partie d'un petit groupe qui pense qu'ils peuvent s'autogérer s'ils ont à leur tête quelqu'un d'instruit et de sérieux. Mrak, un sage, un bibliothécaire qui au début ne veut pas se mêler de cette histoire et rester dans sa cellule. On édite des règles, on fait des pourparlers. Et on sent que leur démarche va prendre un tour peu désirable.

Peu à peu, l'autogestion devient un enfer dictatorial...Keber voit cela mais n'abandonne pas ses rêves de révoltes.

J'ai été sincèrement touchée par le récit de Keber. À l'aide de flashbacks, on assiste à son histoire d'amour avec Leonca, histoire qui tournera mal, histoire obsessionnelle... J'ai aimé aussi qu'il n'abandonne jamais sa seule revendication, celle qui paraît comme la plus absurde aux yeux de tous et qui le fait tenir jusqu'au bout.
On s'attache très vite à certains prisonniers, on ne veut pas qu'il leur arrive quelque chose. On est petit à petit très tendu et dégoûté en voyant comment se transforme la prison et le quotidien de certaines personnes. le récit devient de plus en plus intense, jusqu'à la dernière scène qui boucle toute l'histoire.

Je serais très intéressée de savoir si ce roman a été adapté en film, tant les descriptions et la narration sont visuelles et sonores. On voit les scènes se dérouler devant nos yeux comme si on était devant un film.
Lien : https://labullederealita.wor..
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Deux prisonniers. L'un raconte. L'autre note. le deuxième n'est qu'une ombre, une plume. le premier est une légende, il s'appelle Keber. Un baroudeur, béret vert. Auteur d'un vol à mains armées. Mais surtout l'instigateur mythique du soulèvement de la prison de Livada, pendant lequel, les détenus avaient pris et gardé un bon moment le contrôle de toute la prison, encerclés par la police et l'armée. Nous suivons donc les événements de cette révolte, son histoire au jour le jour. Mais Keber raconte aussi d'autres événements de sa vie, tout ce qui l'a amené en prison, des bribes de son enfance, ses amours. Et son obsession depuis des années, la fameuse grande révolte des Juifs, et l'un de ses épisodes fameux, le siège et la prise de Massada. Un parallèle de plus en plus fort se dessine entre les événements de Livada et de Massada.

Quel livre. D'une grande richesse et complexité, plus que difficile à résumer, sans doute impossible. Plusieurs thèmes s'entrecroisent, plusieurs motifs et modes narratifs. Un côté suspens d'une grande efficacité, en ce qui concerne le déroulement de la prise de pouvoir par les détenus, et ensuite de leur encerclement, des négociations, de l'attente de l'assaut… le fonctionnement du pouvoir, en prison comme un microcosme de la société en général. Terrifiant, sans doute parce que d'une justesse chirurgicale. le goût du pouvoir, la façon dont il transforme les hommes faisant ressortir leurs aspects les plus sombres, la cruauté, la façon dont les forts dominent les plus faibles, l'incapacité de la masse silencieuse à s'organiser et de s'opposer à ses bourreaux. Mais en même temps tous les bruits dans la tête du narrateur, ses amours, ses élans, ses espoirs et rêves. Même si les rapports entre les hommes et les femmes sont plus que difficiles, à la limite de l'impossible. Et le très grand talent de l'auteur, est de faire de ce livre qui pourrait n'être que glaçant et implacable, quelque chose de poétique, et où l'espoir n'est pas absent. Une gageure, tenue de bout en bout, au plus grand plaisir du lecteur. A découvrir absolument.
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Fort, très fort, impressionnant.

C'est des années après, toujours emprisonné, que Keber, raconte à l'un de ses codétenus, pour la transmettre  à la mémoire de tous, l'histoire de l'insurrection de la prison de Livada, dans un récit que l'oralité rend syncopé.

Donc, oui, c'est le récit de cette insurrection, de minute en minute, racontée comme un thriller, cette explosion de violence insensée pour une cause perdue d'avance. Les prisonniers sont d'abord portés par l'illusion de leur improbable puissance, d'une illusoire solidarité. Et puis, de petitesses en mégalomanie, de trahison en fascination du pouvoir, l'absurde apparaît peu à peu, l'impasse se dessine, dans une haletante course aux chimères. Et par des retours obsédants sur le siège de Massada, archétype de la résistance désespérée à l'enfermement, Keber donne à son récit une belle universalité.

Mais c'est aussi l'extraordinaire portrait de Keber, cet homme dont « on prononçait [ le nom ] avec respect », Keber, auréolé d'un passé qui le hante :
« Keber, son béret vert sur la tête, avait dormi au Vietnam parmi les cadavres, il avait traversé les océans en bateau, à Saint-Domingue il  avait fait trembler des généraux en caleçon, en Russie des femmes avaient tenté de se suicider pour lui ».

Lui-même se voit tout autre, « esseulé et déglingué » :
« Bien sûr, je n'habite nulle part, c'est pourquoi je ne comprends pas tes bon Dieu et qu'ils ne me comprennent pas non plus »
.
Dans son récit halluciné de cette révolte qu'il a initiée et qui lui échappe, Keber intercale des réminiscences, des souvenirs, des rêves et des cauchemars, des fantasmes, des hallucinations obsessionnellement intriqués et répétés. Un interminable voyage dans des wagons à bestiaux dans son enfance, des missions répétées comme soldat ou mercenaire dans tous les coins du globe,  la claustration d ‘une cabine de bateau,  son amour impossible et dont il est captif pour la trop sage Leonca : sa vie entière n'a été qu'un enchaînement d'enfermements dont il garde ces « bruits dans la tête" comme autant de stigmates.

On croit lire un roman d'aventure, mais s'y camoufle une palpitante variation sur les thèmes de l'enferment, de la liberté, du pouvoir et du libre arbitre
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Entre les murs d'une prison slovène, un nom se répète d'homme en homme. Keber ! Keber est arrivé !
Keber, par qui a éclaté le soulèvement de Livada, un pénitentier du Montenegro, devenu une véritable légende mais très conscient que toute légende non relayée par l'écrit, risque avec le temps de s'effilocher dans l'oubli. Alors, chaque nuit, il dicte son histoire au narrateur, nouveau Flavius Josèphe de cette nouvelle Guerre des Juifs qui commença dans une explosion de colère, se dévoya dans la plus sinistre tyrannie avant de finir dans le sang.
Livada, Massada : la comparaison est de Kéber lui-même, qui a le sens du tragique. Mais derrière l'épopée, c'est aussi tout son passé qui se retisse autour de quelques obsessions. Un voyage d'enfance vers une patrie en ruines, au sortir de la guerre. le repos dans un port, entre les bras de deux prostituées au coeur simple, mère et fille. Un voyage en Judée. Une femme aimée - incompréhension, jalousie, trahison et remords. Et puis ces bruits qui parfois, sur un geste, un bruit, une parole, entrent en écho dans sa tête, tintement du métal contre le métal, prélude à l'explosion.

Passé peu ou prou inaperçu à sa sortie en France, Des Bruits dans la tête a pourtant bien mérité d'être ramené vers le devant de la scène par cette nouvelle édition de Masse Critique. C'est un beau roman, puissant, où le désir de paix se heurte sans cesse au chaos intérieur, où les aspirations à la liberté affrontent sans répit l'enfermement en soi et la volonté de puissance des autres.
Le dévoiement progressif de la révolte carcérale sous l'égide d'un tyranneau malsain est glaçant, autant qu'est beau - quoique parfaitement fou et brutal - l'élan de ces quelques hommes qui malgré tout cherchent à dépasser la médiocrité humiliante et brutale de leur enfermement.
Une belle découverte, qui donne envie de découvrir un peu mieux cet auteur.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Le vieux le savait, il l"avait observé dans son travail. Il savait que les pires, les plus dangereux, sont ceux qui se bouffent la rate, qui ne parlent à personne et qui soudain explosent. L’agressivité est saine. Elle protège au moins du suicide.
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Tuer un homme, c'est comme tuer un bon livre. Celui qui tue un homme tue un être raisonnable, celui qui détruit un livre, un bon livre, tue la raison même.
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Quand on pète les plombs, c'est foutu personne ne peut nous rebrancher.
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Vidéo de Drago Jancar
Drago Jancar - Six mois dans la vie de Ciril .Drago Jancar vous présente son ouvrage "Six mois dans la vie de Ciril". Parution le 25 août aux éditions Phébus. Rentrée littéraire 2016. Traduit par Andrée Lück-Gaye. Retrouvez le livre : Notes de Musique : Bach: Sonate pour violon seul No. 2, BWV 1003 & Partita pour violon. Free Music Archive. Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Dailymotion : http://www.dailymotion.com/user/Librairie_Mollat/1 Vimeo : https://vimeo.com/mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Tumblr : http://mollat-bordeaux.tumblr.com/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Blogs : http://blogs.mollat.com/
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