Avec «
La lettre F », je croyais entamer la lecture d'un roman jeunesse plutôt ordinaire, plutôt j'ai été immersé dans un univers pas trop lointain et intrigant. Bon, ce n'est pas un chef d'oeuvre mais ça m'a agréablement surpris. Dès les premières pages, on sent que quelque chose cloche. Serge Feneau (un adolescent, un jeune homme ?) rencontre un ancien professeur qui prononce des paroles incompréhensibles avant de mettre fin à ses jours. Puis les indices s'accumulent et on comprend : toutes les personnes dont le patronyme commence par
la lettre F sont désormais considérées comme nuisibles et doivent être éliminées.
C'est que, dans cet univers qui semblait aussi normal que le nôtre, les choix de société importants sont déléguées à un super-ordinateur (donc, pas de favoritisme ni de décisions partisanes prises uniquement dans le but de gagner des voix aux prochaines élections). Conséquemment, quand l'ordinateur suggère l'élimination des gauchers ou des rouquins, c'est qu'il doit y avoir une raison logique derrière et, surtout, une utilité. Personne ne s'y oppose. S'il propose d'éradiquer tous ceux dont le patronyme commence par
la lettre F, c'est que les avantages (inconnus pour l'instant) sont nécessaires à la société.
Pour revenir à Serge Feneau, il devient donc un fugitif et cherche par tous les moyens à rester en vie : il essaie de s'enfuir, de changer d'identité, même de se cacher en espérant que l'ordinateur revienne sur sa décision. Et que dire de la finale inattendue qui m'a complètement renversée !
«
La lettre F » est en quelque sorte une adaptation pour la jeunesse du fameux roman 1984. Cette société qui semblait si paisible au début du roman se révèle être une illusion : un système déshumanisé contrôle tout et l'individu qui sort du cadre, des règles établies, devient un hors-la-loi. Ce roman a donc beaucoup de potentiel pour amener les jeunes à réfléchir à plusieurs questions éthiques et politiques.
Son auteur,
Jean-François Somain, m'était complètement inconnu. Je ne peux pas dire que j'ai été charmé par son style, que j'ai trouvé correct, sans plus. Tout était sous mes yeux, rien à interpréter ni à confronter. Ceci dit, j'ai apprécié son « imagination sobre ». Pas besoin de présenter un futur proche rempli de gadgets inutiles ni d'univers totalement surréalistes, il est resté concentré sur l'histoire qu'il avait à raconter. Seulement pour ça, je suis intéressé au reste de sa bibliographie.