15 octobre 1941 – Déjeuné avec (le colonel) Speidel, chez Sacha Guitry, avenue Élisée Reclus. Devant la maison, en terrain appartenant à la ville, se dresse le buste de son père, le comédien Lucien Guitry ; dans le jardin, un torse de femme, œuvre de Rodin, soulevé d'un tourbillon d'allégresse.
En guise de salutation, Guitry me tendit un carton contenant trois lettres – l'une d'Octave Mirbeau, l'autre de Léon Bloy, la troisième de Debussy, les trois auteurs dont nous avions parlé lors de notre première rencontre, il me pria d’accepter ces autographes pour ma collection. Le billet de Bloy, surtout, est beau, avec ses observations bien personnelles et son écriture unique, monumentale.
2337 – [Le Livre de poche/biblio n° 3041, p. 49]
Vincennes, 30 mai 1941 - A midi, au Ritz, avec le colonel Speidel, Güninger et le comte Podewils. Güninger, qui fait depuis longtemps partie de mes lecteurs, je dirais même de mes disciples les plus doués, tient que vivre à Paris m'aide à me maintenir plus que ne le feraient mes occupations habituelles. Et il est bien possible, en effet, qu’il se cache pour moi dans cette ville non seulement des dons particuliers, mais aussi des sources de travail et d'activité efficace. Elle est toujours, et dans un sens presque plus essentiel encore que naguère, la capitale, symbole et citadelle d'un grand style de vie transmis par les siècles, et aussi de ces idées qui rallient toutes les intelligences, et qui, de nos jours, font défaut précisément aux nations.
669 - [Le Livre de poche/biblio n° 3041, p. 30]
Paris, 2 novembre 1941 - Quand des hommes combattent sur un plan supérieur, spirituel, ils intègrent la mort dans leur stratégie. Ils acquièrent quelque chose d'invulnérable ; la pensée que l'adversaire veut leur destruction physique n'est, par conséquent, plus effrayante pour eux. (...)
Une sorte d'horrible triomphe se mêle alors au carnage. Il y a des hommes dans l'histoire où des hommes saisissent la mort comme un bâton de commandement. Dans le procès des Templiers, par exemple, où le Grand Maître de l'Ordre montre soudainement le vrai rapport entre lui et les juges - ainsi un navire laisse tomber son camouflage et s'offre, avec ses pavillons et ses canons, au regard stupéfait. Le soir même, il fut brûlé vif, mais on posta des gardes, dès cette nuit, à l'endroit du bûcher pour empêcher le peuple d'y venir chercher des reliques. La poussière elle-même fait peur aux tyrans ; elle aussi doit disparaître.
687 - [Le Livre de poche/biblio n° 3041, p. 56]
Paris, 24 juin 1941 – Depuis trois jours déjà, nous sommes en guerre, avec la Russie ; étrange, comme cette nouvelle m'a peu affecté. A vrai dire, dans une époque comme celle-ci, la faculté d'enregistrer les faits devient limitée ; nous risquerions , sinon, de ne leur offrir qu'un certain vide.
2350 - [Le Livre de poche/biblio n° 3041, p. 40]
9 juin 1941 – En ce pays, la connaissance de la littérature porte encore sur son ensemble, elle est considérée comme un tout harmonieux, alors que chez nous, ce sont, dans le meilleur cas, les individualismes, les membres séparés, que l'on nomme.
2341 - [Le Livre de Poche/biblio n° 3041, p. 33-34]
À travers les différents ouvrages que l'auteur a écrit pendant et après ses voyages à travers le monde, la poésie a pris une place importante. Mais pas que ! Sylvain Tesson est venu sur le plateau de la grande librairie avec les livres ont fait de lui l'écrivain qu'il est aujourd'hui, au-delàs de ses voyages. "Ce sont les livres que je consulte tout le temps. Je les lis, je les relis et je les annote" raconte-il à François Busnel. Parmi eux, "Entretiens" de Julien Gracq, un professeur de géographie, "Sur les falaises de marbres" d'Ernst Jünger ou encore, "La Ferme africaine" de Karen Blixen.
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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