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Le talent de Pierre Jourde éclate dès les premières pages de ces festins secrets. Son écriture est ébouriffante, anxieuse, frénétique. Elle prend le lecteur par la main et l'emmène loin, dans des territoires inconnus, aux frontières du réel, dans les tréfonds de l'âme humaine. Cet endroit que Jourde appelle Logres nous semble aussi familier qu'irréel. Là, angoisses et cauchemars sont au rendez-vous. On y passe un moment pas forcément toujours agréable, mais de ce malaise, on en ressort plus fort, plus vivant. le tout est très précis, à la limite de la surenchère lexicale.
Ce livre est un véritable remue-ménage de l'esprit.
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Le premier grand roman de Pierre Jourde. Un vrai festin littéraire, en effet.

Publié en 2005, "Festins secrets" fut sans doute le roman de la révélation pour Pierre Jourde (c'est en tout cas par là que je l'ai découvert à l'époque), pour cet écrivain jusqu'alors surtout connu pour ses talents de critique authentique, et malgré - déjà - l'écho et la polémique suscités par sa troisième fiction, "Pays perdu", en 2003.

À la relecture, plus encore qu'en première approche, il est saisissant de constater à quel point l'exigence et le talent littéraire ici à l'oeuvre permettent à l'auteur de sublimer son propos "de base"...

Oui, le regard du narrateur, professeur de collège encore tout gorgé de passion de l'enseignement et de la littérature, muté dans cette sombre ville de province, très vite confronté à la double horreur sociale - élèves perdus et abrutis, bourgeoisie perfectionnant l'art de l'hypocrisie jusqu'à des sommets inégalés -, dresse un constat noir, virulent, voire provocateur, de la déliquescence d'une société et de la fermentation inexorable de ses pires miasmes.

Mais utilisant toutes les ressources d'une panoplie technique et narrative de très haute volée, ce narrateur particulièrement peu fiable, et l'irruption contre toute incrédulité d'éléments quasiment fantastiques, dressent avant tout le chemin d'une exploration du Mal contemporain, thème de prédilection pour un auteur par ailleurs professeur et critique pointu, fin connaisseur du XIXème siècle tardif et de l'écriture de la décadence, comme le soutiennent bien entendu son "Empailler le toréador" ou plus encore son "Littérature monstre".

La puissance de ce roman demeure, huit ans après, au delà de l'intense plaisir qu'en procure la lecture foisonnante, de dénicher le Mal à sa racine, qui n'est pas, contre toute attente politiquement correcte, d'ordre moral (ou presque marginalement), mais avant tout dans le triple manque d'exigence, d'ambition et d'honnêteté intellectuelle, engendrant de fait l'horreur économique, et donc l'horreur morale... On est en réalité infiniment loin des procès en "réaction" trop souvent intentés à l'auteur par une critique complaisante se voulant politisée mais se contentant une fois de plus d'accompagner la chute en sauvegardant ses petits privilèges personnels...

Cette exploration se poursuivra, pour notre plus grand bonheur, dans les romans ultérieurs de l'auteur, pour culminer, à date, avec le monument que constitue "Le maréchal absolu" (2012).

"Festins secrets" est une lecture nécessaire.
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Que demande-t-on à un romancier ?
1) de raconter une histoire de façon passionnante. Peu importe s'il pioche pour cela dans sa vie personnelle pourvu que le lecteur ne s'en rende pas compte et que le projet dépasse l'habituelle ambition (très) bornée de la contemplation hypnotique de son seul nombril.
2) de posséder un style qui mérite ce nom et dont on puisse se souvenir.
3) Eventuellement, de rendre un hommage, discret ou pas, aux écrivains dont les textes ont nourri le romancier.
4) et si, en plus, le romancier parvient à "coller" aux questions sociales du moment, alors là, il n'est pas loin de pouvoir prétendre à rejoindre le club des Très Grands.
Eh ! bien ! Pour moi, la chose ne fait aucun doute : Pierre Jourde et "Festins Secrets" remplissent largement les trois premières parts - et même la quatrième - de ce contrat.
Au départ, un homme - Gilles Saurat, professeur de collège - en route pour un premier poste dans la ville de Logres (tout un programme, ce nom). Il sommeille à demi au fond d'un train sur laquelle la nuit tombe. En face de lui, un petit homme qui, jadis, lui aussi, fut professeur à Logres. Une conversation - ou plutôt un monologue - s'engage. L'ancien professeur est intarissable sur Logres, ses notables, son lycée, sa racaille. Mais à vrai dire, Saurat n'écoute qu'à moitié - quand encore il écoute ...
... ...
(Non, je ne vous raconterai pas tout ce qui se déroule dans ce train qui semble rouler à l'aveugle. Mais un conseil si vous vous décidez à lire ce roman : soyez attentif à TOUT. Wink)
... ...
Le voilà sur le quai, puis hors de la gare, à la recherche de la maison de Mme van Reeth chez qui il a loué une chambre. Mme van Reeth est veuve d'un homme d'affaires qui se doublait d'un collectionneur d'érotiques du XVIIIème. Une aubaine peut-être pour Saurat qui doit préparer sa thèse ...
Sur l'ensemble, une nuée de voiles opaques, de la pluie, froide, obstinée, des ombres qui vont, qui viennent, qu'on croit déjà connaître et qui, pourtant, à bien les regarder, ne vous disent plus rien, des voix mêmes ...
Dès le début, quelqu'un d'ailleurs s'adresse à Saurat comme s'il le regardait vivre - ou comme s'il l'avait déjà vu vivre ? ...
On pense bien sûr à Kafka, à ces villes glauques qui hantent des romans comme "Le Golem" ou "La Cité de l'Indicible Peur" ou encore certains films muets allemands. On pense aussi à "La Foire des Ténèbres" de Bradbury et à tous ces films dont le héros se rend compte trop tard qu'il fait partie d'un mystérieux spectacle. On pense en fait à beaucoup de choses mais le coup de maître de "Festins Secrets", c'est d'allier cette richesse romanesque et culturelle à un portrait précis de notre société dans ce que celle-ci a de plus noir.
Avec un courage que je trouve admirable, dans une langue qui semble toute simple et pourtant très travaillée, sans jamais sombrer dans le jargon pédantesque qui est le propre de tant d'universitaires contemporains, Pierre Jourde aligne un par un les dangers qui guettent le XXIème siècle : la violence banalisée, la violence pratiquée au nom du respect d'une religion rétrograde, la violence excusée par les médias et les "intellectuels" au nom de principes qui datent de l'immédiate après-guerre et qui ne sont plus en phase avec les réalités économiques et sociales de notre pays ; le racisme le plus abject justifié par la politique israélo-palestinienne et absous par la gauche bien-pensante ; la volonté de nier l'être humain, notamment quand il est de sexe féminin ou trop faible pour se défendre - un procédé bien connu des nazis, Jourde a le cran d'établir le parallèle ...
Il vise, il tire et il fait mouche. C'est du grand art.
Croyez-moi : lisez "Festins Secrets" qui restera dans notre littérature non seulement en raison de ses qualités techniques ou de sa façon d'évoquer les problèmes de société tout en tenant son lecteur en haleine mais aussi parce que, en ce début des années 2000 et depuis déjà trop d'années, les vrais romans se font rares en France et que celui-là en est un - oui, un sacré bon roman ! ;o)
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« Je m'apprête à publier du vécu (Le Voyage du canapé-lit, en janvier) mais je suis travaillé par l'envie de revenir à la veine du roman légèrement bizarre que j'ai longtemps creusée : Festins secrets, Paradis noirs, le Maréchal absolu ou L'Heure et l'ombre. »
Trois des quatre romans évoqués par Pierre Jourde dans cette citation m'ont toujours fait l'effet d'appartenir à une même famille très particulière de l'étrange. Ce sont trois livres où les frontières entre réel et rêve, souvenir et réalité, réalisme et fantastique se brouillent, trois romans qui cultivent une impression d'irréalité et une atmosphère d'ombre et d'illusion qui les rapproche à mes yeux d'un certain symbolisme belge. Comme les tableaux de Spilliaert ou Degouve de Nuncques, Paradis noirs, Festins secrets et L'Heure et l'ombre plongent le lecteur dans une torpeur cotonneuse où les ombres et la brume semblent cacher des arrière-mondes. Ces ouvrages composent à mes yeux une fratrie spectrale, unie par des ressemblances et des obsessions communes, liée par des jeux de miroirs et un entrelacs de mots et d'images. [...]
Lien : http://cdilpantoine.blogspot..
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Pierre Jourde écrit très bien, je n'en disconviens pas, mais la peinture qu'il fait des êtres et de la province est vraiment trop glauque pour être crédible. On veut bien croire que la France profonde regorge de notables corrompus, de paysans dégénérés ou mutilés par les machines et les animaux, mais de là à en faire tous des organisateurs de ballets roses et des criminels, y faut pas pousser la mémé dans les orties quand même !
On comprend aisément, à le lire, qu'il n'a pas aimé sa première nomination comme jeune prof dans une ville de l'est de la France, que la ruralité lui pèse, mais il en remet de telles couches dans la "glauquitude" que l'on a envie de lui dire qu'en en faisant trop, on décrit un pays et une société qui n'existe pas...

Pierre Jourde n'aime pas grand chose, ni le landernau littéraire parisien, ni la province. Son oeuvre, tant fictionelle que critique, manque parfois d'humanité, d'empathie et de tendresse envers ses personnages, les lieux et les auteurs qu'il pourfend.
C'est dommage, car il y a vraiment une écriture et un talent
Lien : http://jcfvc.over-blog.com
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bienvenue à Logres, petite ville apparemment ennuyeuse, insignifiante, où rien ne semble se passer au regard du narrateur, un prof qui vient d'y être envoyé. Oui mais voilà, derrière les rideaux se dissimulent tout ce que l'homme a de plus ignoble : groupes sectaires, parties fines avec des enfants, sacrifices peut-être, voire cannibalisme qui sait. Durant ces 500 pages, Jourde nous fait entrevoir le côté noir de l'homme, mais aussi de la société,avec une critique cinglante du système éducatif, des pertes de valeurs ou de l'administration. Un roman très fort.
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Livre dérangeant et obsédant. On y rejette ce nihilisme permanent qui ne laisse entrevoir aucune fenêtre d'espoir ou un simple rayon de lumière dans cette obscurité étouffante. On suffoque, rejette, critique et pourtant l'on poursuit la lecture. A la fois fasciné, curieux de cette étrangeté à mi-course entre le réel et le rêve, où toute frontière a été effacée. Même la plume parachève ce contraste désobligeant où alterne le plus précieux et le plus lourd. du grand art c'est certain. Une fin qui reste tout de même en deçà de la noirceur que l'on attendait tout en se refusant d'admettre qu'elle nous avait aspiré.
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Gilles est muté à Logres pour son premier poste d'enseignant. Il loge chez Mme Reeth où tout semble d'un autre temps. Il y rencontre la bourgeoisie de la ville et découvre ses secrets : séances d'érotisme, vente d'enfants, cannibalisme... Une salle renferme aussi une collection ancienne de livres érotiques. Quant au mari de Mme Reeth, le collectionneur, il a disparu. Cette maison ressemble à un labyrinthe et quel que soit l'endroit où Gilles se hasarde, on ignore toujours si on est dans le rêve ou dans le réalité.
Le métier d'enseignant est décrit dans toute sa splendeur. Gilles est lui-même un enseignant plein de naïveté, croyant pouvoir transmettre son savoir à ces jeunes délinquants menaçants. Là on retrouve le 21ème siècle en pleine face.
L'auteur en profite pour critiquer notre société et notamment le milieu enseignant, ses formateurs, les couloirs kafkaïens de l'académie où l'on se perd...
J'ai attendu en vain une réponse jusque la fin du roman par rapport aux différentes intrigues mais cela est resté flou. Un roman sombre et jamais très clair.
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Écriture +++; Atmosphère étouffante. tellement que j'ai calé au bout de 200 pages
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