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EAN : 9782913588967
280 pages
Mango (17/10/2008)
3.87/5   57 notes
Résumé :
Pierre Jourde et Eric Naulleau persistent et signent dans leur entreprise de nuisance littéraire. Enfin une version revue et augmentée de leur pastiche du Lagarde et Michard, dans laquelle ils s'amusent à épingler, avec une certaine ironie, des écrivains remarquables et remarqués. Si l'on retrouve leurs cibles de toujours : Marie Darrieussecq, Alexandre Jardin, Camille Laurens, Bernard-Henri Lévy, Philippe Labro, Christine Angot, Philippe Sollers... viennent enfin s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Pour me guérir de ma panne de lecture et de mes déceptions de ces dernières semaines, rien de tel qu'un ouvrage peau de vache et langue de vipère. le sous-titre de cet ouvrage est le petit livre noir du roman contemporain, mais ses auteurs le présentent comme le volume manquant de la collection des Lagarde & Michard. Ils se posent en archéologues de la littérature, à une époque où celle-ci serait morte depuis des décennies. Leur ouvrage est donc un hommage essentiel : « Les textes qui figurent dans ce recueil, aussi incroyable que cela puisse paraître aujourd'hui, ont bel et bien été écrits, relus, publiés et vendus. C'étaient d'autres moeurs. » (p. 8)

Vous l'aurez compris, le second degré est de rigueur. Si vous en êtes dépourvus, euh… tant pis ! En portant ironiquement aux nues des écrivains controversés, Pierre Jourde et Éric Naulleau pointent ce qui les exaspère dans la littérature contemporaine. Et pour que le lecteur saisisse pleinement ces (nombreux défauts), les deux auteurs trublions proposent à la fin de chaque chapitre des exercices de réécritures ou d'argumentation. « Rétablissez la syntaxe normale. Profitez-en pour réviser les règles de l'indirect libre. » (p. 20)

Devant le succès commercial de Marc Levy, ils estiment qu'« il n'est pas imaginable que tant de millions de gens puissent avoir un goût déplorable. L'histoire le prouve. » (p. 9) Passons à l'autofiction : « Quant à la vacuité, le lecteur de Christine Angot ne perd en effet rien pour attendre. » (p. 27) Pour ce qui est d'Anna Gavalda, les auteurs portent un jugement définitif sur son écriture : « Encore une expression toute faite. Très important pour donner à un texte cette allure sympa, simple et franche qui attire toute de suite la sympathie. Surtout pas la moindre difficulté. Il faut que ça coule tout seul. » (p. 47 & 48) Finissons avec Alexandre Jardin : « Comme beaucoup de grands écrivains, Alexandre Jardin n'a pas de biographie : sa vie est dans son oeuvre. » (p. 133)

Et ils en ont autant pour Madeleine Chapsal, Philippe Labro, Philippe Sollers, Bernard-Henri Lévy, Marie Darriessecq, Camille Laurens, Patrick Besson, Florian Zeller, Emmanuelle Bernheim et Dominique de Villepin. Il paraît que c'est snob de dire du mal de Musso et consorts. Mais en quoi est-ce snob de dire qu'on préfère un rumsteck à l'échalote plutôt qu'une tranche de jambon blanc allégé et pauvre en sel ? Pierre Jourde et Éric Naulleau n'ont pas de tels complexes et ils nous rappellent que la littérature doit avoir du corps et qu'il est de bon goût d'être fine bouche.

Voilà un ouvrage très drôle et particulièrement féroce qui rappelle au lecteur qu'il ne doit pas se fier aux sirènes corrompues de la grande distribution éditoriale. Pour ma part, je sais que je peux toujours revenir vers mes chers classiques du 19° siècle. La littérature y est bien vivante.

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Pour celles et ceux qui se plaignent de l'aridité de l'actuel paysage littéraire français, en tous cas tel que nous le révèlent les grandes maisons d'édition, ce "Précis de littérature du XXIème siècle", qui parodie avec verve le mythique "Lagarde & Michard" (en plusieurs volumes) de notre studieuse jeunesse, est incontournable.

Avec un sadisme et une allégresse que Voltaire ne renierait pas, Pierre Jourde et Eric Naulleau tirent à boulets rouges sur leurs têtes de turc favorites (essentiellement Christine Angot, BHL et Philippe Sollers) en leur adjoignant de nouvelles cibles, comme Philipe Labro, Patrick Besson, Anna Gavalda et Marc Lévy (entre autres).

"Répétitif", ont dit certains. "Réac'", en ont aboyé d'autres en montrant les dents (du moment qu'on s'attaque à la bien-pensance, en France et de nos jours, on est fatalement réactionnaire, c'est comme ça, tenez-vous-le pour dit. ) "Ah ! c'est facile, de se moquer !" a conclu le choeur des âmes généreuses (comme s'il y en avait au sein de ce qui s'autoproclame la "République" des Lettres.)

Mais dans ces conditions, pourquoi rit-on tellement en assistant à ces mises à mort où la gaieté le dispute à une cruauté bien réelle ?

Tout d'abord parce que Jourde et Naulleau ont du talent. de la première jusqu'à la dernière page, leur "Précis ..." en est bourré, serti dans une ironie dévastatrice de la plus belle eau et mis encore plus en valeur par une culture qui ne pourra que réveiller de doux souvenirs chez tout littéraire authentique.

Ensuite parce que l'écrasante majorité des auteurs cités arborent en public, et notamment sous la loupe grossissante des caméras de télévision, un "Moi" hypertrophié, la morgue insoutenable de la créature qui se croit d'élite sans l'être le moins du monde et l'incroyable condescendance du Monsieur ou de la Madame Je-Sais-Tout-J'Ai-Tout-Vu-Et-Vous-Etes-Des-Cloches. Ajoutez à cela que certains membres de ce noble aréopage se permettent d'enseigner ou d'avoir enseigné ... la littérature (consternant, n'est-ce pas ? ).

Enfin et surtout parce que, dans la culture de notre pays, la littérature, les livres et plus encore les romans relèvent du Sacré, de la Magie, de l'Intangible. Or, les auteurs (ou prétendus tels) abondamment cités par Jourde et Naulleau n'arrêtent pas de blasphémer. A la place de ce roman tant aimé, ils ont dressé cette idole infernale qu'ils nomment (pompeusement) "autofiction" et à laquelle ils ne sacrifient, sachez-le bien, que parce qu'il est beaucoup plus facile, quand on dispose d'un ego hyper-narcissique et de très peu d'imagination, d'écrire sur les frémissements de son nombril et les variations de son transit intestinal que d'imaginer une intrigue cohérente et passionnante, avec des personnages qui vous empoignent le coeur et ne le lâchent plus.

Alors, forcément, quand on voit tout ce beau monde, qui s'avance d'ordinaire sous la lumière des projecteurs à un train digne d'un chef d'Etat en visite protocolaire - quand on voit tout ce beau monde, disais-je, s'étaler dans la poussière du ridicule, quand on voit leurs énormes fautes de grammaire, leurs phrases "à la Duras", la tonne de clichés qu'ils offrent comme dialogue (ou monologue) à leurs personnages, l'allure de limande-sole des personnages en question (trois idées dans la tête mais pas plus : elle éclaterait), le tout saupoudré d'une auto-complaisance qui, en l'espèce, constitue le seul trait remarquable de leur oeuvre ...

... on rit. Parfois même aux éclats. Très souvent, l'envie irrésistible de faire partager sa joie est telle qu'on court chercher un ou plusieurs auditeurs et qu'on lui lit l'extrait du "Précis ..." qui a déclenché notre hilarité. On en arrive d'ailleurs à penser que Jourde et Naulleau devraient songer à une édition audio tout en regrettant que Pierre Desproges ou Claude Piéplu ne soient plus là pour nous la faire savourer dans sa plénitude.

Pour vous consoler, sachez que vous trouverez bientôt quelques extraits choisis de cet indispensable ouvrage dans notre rubrique adéquate. D'ici là, tâchez de vous le procurer : dans un siècle (et peut-être avant), "Le Précis de Littérature du XXIème Siècle", par Pierre Jourde & Eric Naulleau, vaudra beaucoup plus que l'édition la plus rare de Philippe Sollers, Madeleine Chapsal ou BHL. ;o)
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Approximation, décontextualisation, moquerie, démontage, insinuation, contournement, détournement, lourdeur, légèreté, dédain, férocité, subtilité, farce, tous les moyens sont bons pour Pierre Jourde et Eric Naulleau « dans leur entreprise de nuisance littéraire ».

Il s'agit d'un pastiche « du » Lagarde et Michard, d'où le titre un peu prétentieux « Le » Jourde et Naulleau. Les autoproclamés « tontons flingueurs de la littérature » reprennent la forme du manuel classique : introduction historique et biographique, extraits de textes avec notes, puis questions et parfois corrigé de l'exercice. Mais avec nul sérieux : il s'agit de nous faire rire d'auteurs contemporains jugés légers, prétentieux, maniaques, complaisants ou nombrilistes.

La méthode est faite de second degré et d'ironie constante, ils semblent avoir repris la devise du petit journal : « sans la liberté de flatter il n'est point d'éloge blâmeur ». L'usage des notes de bas de page est particulièrement redoutable : ils font admirer toutes les faiblesses, questionnent les choix douteux, inventent des articles critiques aux titres invraisemblables.

Je ne sais pas si la méthode s'appliquerait partout, mais la façon dont ils questionnent toute rhétorique (définie comme discours volontairement différent de la manière attendue de s'exprimer) a produit sur moi beaucoup d'effet : à leur suite je m'interroge sur toute expression inhabituelle lue ou venue sur mon clavier. Exemple volontaire : l'expression normale est « écrite », le cliché habituel est « sous ma plume » ; « sur mon clavier » a donc une valeur rhétorique consciente ou non, dont il est sain de critiquer l'utilité, après avoir souri des excès de style des auteurs brocardés.

Quand la pâte littéraire leur semble molle, ils l'amincissent au rouleau à pâtisserie, la roulent et la replient, la découpent à l'emporte pièce.
Quand la matière est dure, le grattoir, la roulette et la fraise insistent sur les caries.
Et de la matière il y en a : du simple manque d'idée jusqu'à la faute de syntaxe évidente en passant par le tirage à la ligne, les exemples qu'ils prétendre encenser sont hallucinants, ils ont pourtant été écrits, édités, lus.

J'attendais qu'ils s'en prennent à Houellebecq, qui me semblait une cible désignée, et je me suis demandé si la peur d'un procès les avait arrêtés. Mais non : Naulleau lui a déjà consacré une ouvrage entier.
Au contraire, je craignais qu'ils ne s'en prennent à des auteurs que j'admire, j'aurais probablement moins ri, mais j'ai la chance d'avoir de grosses réticences envers leurs victimes, du moins pour celles que j'ai lues.

On trouve dans les premières pages des critiques faites sérieusement sur une précédente édition de ce livre, elles sont hilarantes : « absence totale de drôlerie », « la confusion constante entre citation et parodie est insupportable d'étourderie » (celui-là n'a pas du lire le même ouvrage que moi). Elles soulignent quand même un aspect polémique : Jourde et Naulleau ne s'en prennent pas qu'aux auteurs qu'ils pensent valoir plus par le marketing que par le style. Ils dénoncent aussi des coteries, des renvois d'ascenseur dans des groupes d'auteurs, de critiques et d'intellectuels. Et ces pages sont pour moi moins drôles, d'autant que, loin de ce milieu et un peu ignare, je ne sais pas si elles sont justifiées.
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Eric Naulleau s'est fait connaître par le grand public en s'attaquant à Michel Houellebeq, bien lui en a pris au vu de la notoriété qu'il a acquise depuis même si ses arguments étaient assez faibles face à l'écrivain le plus dépressif de France.
Ici, il s'allie avec le dénommé Pierre Jourde pour démonter et, par la même occasion, démontrer la médiocrité de certains écrivains d'aujourd'hui pourtant très souvent encensés par la critique.

Ils cisaillent, avec humour et je dois l'avouer une certaine cruauté, l'un des plus gros vendeurs actuel de l'hexagone, Marc Lévy, ce qui n'est pas très difficile quand on regarde son oeuvre au microscope littéraire (le roi du cliché à l'eau de rose).
Bien d'autres y passent comme BHL (que l'on ne présente plus), Philippe Sollers (l'écrivain le plus imbu de sa personne), Anna Gavalda (qu'on ne me reprendra plus à lire), Christine Angot (au style tellement dynamité qu'il n'en reste presque rien, que du vide) etc...

A lire tout ceci, on se demande comment cela est possible, que les critiques littéraires laissent passer tant de fautes de goût et de plume à la trappe de la bienséance qualitative.

Je me suis même amusé à réécrire à ma façon un paragraphe d'Anna Gavalda. Voici le sien :

« Telle que vous me voyez, là, je marche dans la rue Eugène-Gonon.
Tout un programme.
Quoi, sans blague ? Vous ne connaissez pas la rue Eugène-Gonon ? Attendez, vous me faites marcher, là ?
C'est une rue bordée de petites maisons en meulière avec des petits jardins en pelouse et des marquises en fer forgé. La fameuse rue Eugène-Gonon.
Mais si ! Vous savez, Melun... Sa prison, son brie qui gagnerait à être mieux connu et ses accidents de train.
Melun.
Sixième zone de carte orange.

J'emprunte la rue Eugène-Gonon plusieurs fois par jour.
Quatre en tout.
Je vais à la fac, je reviens de la fac, je mange, je vais à la fac, je reviens de la fac.
Moi à la fin de la journée je suis crevée. »

Et voici ma version :

« J'ai arpenté tant de fois la rue Eugène-Gonon de Melun que j'en connais ses moindres recoins. Ses maisons en meulière aux petits jardins en pelouses et ses marquises en fer forgé que je connais par cœur.
Je l'emprunte quatre fois par jour pour me rendre à la fac pareil à un yoyo ne cessant mécaniquement de descendre et de remonter, à n'en plus finir.
À tel point qu'à la fin de la journée je suis exténuée, fatiguée. »

On pourrait faire de même avec chaque écrivain cité dans ce livre.

Gilles Deleuze disait, dans son abécédaire enregistré aux alentours de 1988, que la littérature contemporaine ne l'intéressait pas, parce que pour lui, elle était corrompue par le marketing et les prix littéraires. Je suis tout à fait de son avis.
C'est une bonne chose de lire, encore faut-il lire des livres de qualité, autrement lire et ne pas lire reviendraient au même, ce livre me montre l'évidence de ce que j'avance.
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Un ouvrage d'une exceptionnelle lucidité sur la littérature contemporaine. Les meilleurs auteurs y figurent, des extraits choisis permettent d'apprécier la fluidité du style et la profondeur psychologique des personnages qui défilent devant nous.
Un véritable enchantement comme cet extrait peut en témoigner:
" le maçon est en train de carreler le sol des WC. Pendant tout l'après-midi, pas de pipi. J'irai en bas, dans la cour il y a des WC un peu sales. J'abime mes chaussures. le maçon s'appelle M. Ahmed. Il est en plein ramadan. Lui, toujours très discret, ce matin m'a regardée. Peut-être à cause des WC, il sait que c'est là que je vais. A nouveau je suis seule dans l'appartement, sauf lui et elle. Je ne sors pas, s'il bande et la viole.....Il la fore jusqu'au fond, accroché aux petits muscles, il entre et se retire. Impulsivement elle se dégage...j'arrête avec les trucs sexuels".
La poésie brutale de ce passage éclate et révèle le génie de son auteur, son sens du détail, son lyrisme ahurissant, son riche vocabulaire qui nous transporte dans l'Orient mystérieux. Flaubert et Hugo sont relégués aux oubliettes devant un tel flot d'images fabuleuses.
Ce manuel s'adresse à tous ces lecteurs un peu incultes qui ont du mal à apprécier la prose moderne et persistent à préférer les auteurs poussiéreux des siècles passés, les écrivains prise de tête qui refusent de passer à la télé.
Pour ne pas passer à côté de ces chefs d'oeuvre, gardez le Jourde et Naulleau dans votre poche, et vivez des coups de coeur à chaque chapitre.
Une lecture dont on ne sort pas indemne!
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... Grammaire, vocabulaire.
Marc Lévy écrit dans Et si c'était vrai :

1) Quand il lui demanda comment connaissait-elle son prénom, elle répondit qu'elle était déjà là bien avant qu'il n'emménage.

2) ... imposant bâtiment de style néoclassique construit au début du siècle où, dans des dizaines de salles aux voûtes majestueuses, règne une atmosphère si différente à bien d'autres lieux semblables.

3) Il avait près de quatre-vingts suspects, dont l'un d'entre eux était peut-être en attente d'un don d'organe ou avait l'un des siens dans la même situation.

4) Green Street est une jolie rue bordée d'arbres et de maisons.

I - Rétablissez la syntaxe normale. Profitez-en pour réviser les règles de l'interrogation indirecte.

II - Trouvez quelque chose pour arranger la fin de la phrase.

III - Supprimez la redondance de la relative, puis tentez de comprendre la fin de la phrase.

IV - Imaginez ce que pourrait être une rue qui ne serait pas bordée de maisons. Ne cédez pas au vertige métaphysique. ... [...]
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[...] ... "Telle que vous me voyez, là, je marche dans la rue Eugène- Gonon.

Tout un programme. (1)

Quoi ? Sans blague ? Vous ne connaissez pas la rue Eugène-Gonon ? Attendez, vous me faites marcher, là ?

C'est une rue bordée de petites maisons en meulière avec des petits jardins en pelouse et des marquises en fer forgé. La fameuse rue Eugène-Gonon de Melun.

Mais si ! Vous savez, Melun ... Sa prison, son brie qui gagnerait à être mieux connu et ses accidents de train.

Melun. (2)

Sixième zone de carte orange."

(1) : Cette magistrale entrée en matière constitue une démonstration de l'art consommé avec lequel l'auteur sait capter l'attention bienveillante du lecteur. Tout d'abord, prendre le personnage en pleine action, in media res. Mais faire en sorte que cette action soit banale, afin de favoriser l'identification. Ne pas omettre un petit clin d'oeil complice au lecteur. Il est toujours content qu'on le prenne à témoin. Pimenter par une figure de style, ironie ou paradoxe. Ici, il s'agit d'une sorte d'antiphrase : "tout un programme" ironise sur la banalité de marcher dans une rue banale, et anticipe sur le développement ultérieur de l'ironie. Faire en sorte tout de même que cette figure soit aussi un cliché. Ici, en quatre lignes, quatre expressions toutes faites : "telle que vous me voyez", "tout un programme", "sans blague", "vous me faites marcher." Le cliché est important pour appâter la sympathie du lectorat. Il a l'air d'un trait d'esprit, d'une invention verbale, mais c'est un trait devenu si courant qu'il peut appartenir à n'importe qui. L'important est que le lecteur puisse faire en sorte de s'attribuer le langage du texte. Il ne s'exprimerait pas autrement. Il s'identifie.

(2) : Tirer à la ligne constitue le b-a-ba réthorique dans les techniques d'appât du lecteur. Plus le mot ainsi détaché est banal, mieux cela vaut. On crée ainsi un effet de constraste très seyant. ... [...]
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Entre-temps, Bernard-Henri Lévy avait lui-même fait, en à peine quelques minutes, des débuts et des adieux sur scène très remarqués dans la capitale libyenne. Une représentation soigneusement préparée par plusieurs mois d'une imitation si parfaite du ministre des Affaires étrangères que Nicolas Sarkozy, alors président de la république, s'y laisse prendre et suit son conseil d'entrer en guerre contre la Libye, croyant avoir eu affaire à Alain Juppé. Le 15 septembre 2011, dans Benghazi libéré, Nicolas Sarkozy est acclamé sur une estrade par la population locale. C'est alors que débute le show BHL. Lequel, tout en prenant à témoin les millions de téléspectateurs de son manège comique (tout juste s'il ne décoche pas des clins d’œil à l'intention des caméras), tente de se glisser derrière le président français pour figurer à l'écran. Mis dans la combine, un membre du service d'ordre, faussement autoritaire et riant sous cape, le ramène hors champ. Bernard-Henri Lévy chausse alors des lunettes noires et tente à pas feutrés de regagner la place d'où il a été chassé, nouvelle intervention du gros bras, etc. Impayable. […] A noter que, quelque temps plus tard, Nicolas Sarkozy lui rendra hommage en reprenant au pas près cette chorégraphie de la resquille lors du défilé d'hommage aux victimes de l'attentat contre Charlie Hebdo.
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[...] ... L'excellence de la forme répond dans cette oeuvre à l'originalité du fond. Marc Lévy maîtrise parfaitement un passé simple d'une grande distinction et se risque parfois, mais moins souvent, à des subjonctifs imparfaits avec lesquels on ne le sent pas complètement à son aise. Il fait bien attention aussi à employer de jolis synonymes, pour ne pas répéter les mots, comme on l'explique en quatrième pour faire des rédactions.

En mars 2053, Marc Lévy publie son oeuvre testament, L'Amour au delà de l'Amour. Il s'éteint quelques mois plus tard en murmurant : "Je me demande comment l'éternité sera-t-elle possible à vivre, mon amour, sans que je peux te serrer dans mes bras, mais crois-moi, nonobstant, un jour, nous serons réunis pour toujours", sous les torrents de larmes de l'assistance. ... [...]
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"Là, le souffle brûlant dissipe les vapeurs du désespoir, rompt les amarres, dessine un chemin ailleurs quand toutes les issues semblent fermées. Au sommet des cratères de glace, l'aiguille de la poésie jaillit des flancs troués de famines et de tempêtes." (Dominique de Villepin)
Ce souffle qui d'une main dissipe les vapeurs, d'une autre rompt les amarres, d'une autre encore dessine un chemin, tandis que des aiguilles jaillissent de flancs troués par des famines au sommet de cratères trahit deux influences majeures de Dominique de Villepin : Henri Monnier ("le char de l'Etat navigue sur un volcan" " Ce sabre est le plus beau jour de ma vie") et Pierre Dac (le scalpel de vote perspicacité a eu vite fait de faire un vol piqué dans le velours de ma belle âme"). (Jourde et Naulleau)
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Vidéo de Eric Naulleau
Judith Godrèche à Eric Zemmour "J'ai réalisé un film et pas vous !" - On n'est pas couché 27/03/2010
On n'est pas couché Judith Godrèche Film "Toutes les filles pleurent" 27 mars 2010 Laurent Ruquier avec Eric Zemmour et Eric Naulleau France 2 #ONPC
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