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Michel Chandeigne (Traducteur)
EAN : 9782070329472
288 pages
Gallimard (05/11/1996)
4.2/5   15 notes
Résumé :
«Le fait d'écrire un poème n'a en soi rien de mystérieux, surtout pour ceux qui ont l'habitude du commentaire critique et de l'étude littéraire. C'est quelque chose qui accompagne l'histoire de l'homme, et qui, si on veut une explication approximative, est lié à la démarche humaine vers le sacré ou l'absolu. Ce qui est toujours étrange, cependant, est qu'un ensemble de mots prenne finalement ce sens entier et, tout de suite, commence à exister dans une dimension lib... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je connaissais très peu le poète portugais Nuno Júdice , né en 1949. Et son univers a été pour moi une très belle découverte.

Il a été longtemps critique littéraire, et a dirigé une revue poétique à Lisbonne. L'édition Gallimard réunit ici deux recueils , " Un chant dans l'épaisseur du temps" publié en 1992 ( magnifique titre...) et " Méditation sur les ruines" de 1994.

Dans l'introduction, on retrouve le double aspect du théoricien et de l'auteur car il s'interroge sur la conception du poème. Il analyse de façon fort intéressante le langage poétique. Pour lui, le poème permet de " retrouver la langue natale".

Cela se ressent à travers les textes, à la fois novateurs et nostalgiques. le poète expérimente, écrit des textes fort variés, d'ailleurs les titres reviennent, " Poème " ou " Image"," Quotidien", comme s'il voulait creuser un peu plus dans les mots, il utilise d'ailleurs l' expression" travail d'archéologue", par analogie.

Mais la saudade est présente aussi, une mélancolie plane, les souvenirs imprègnent sa poésie. Dans l'émouvant texte" Enfance", il écrit:

" Je me rappelle que (...)
le ciel de septembre apportait l'automne quand le
plomb des nuages descendait tant que nous pouvions presque
le toucher; "

C'est une oeuvre riche, profonde, qui demande à être lue progressivement, attentivement.



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Saudade.
Gallimard assemble puis édite dans sa collection de poche Poésie en 1996 deux oeuvres du poète lusitanien Nuno Júdice publiés séparément au Portugal en 1992 et 1994. L'écriture limpide imprégnée de nostalgie rend la lecture prenante, parfois poignante ainsi du poème intitulé « Photographie » ouvrant le recueil : « C'était bien ses paroles. Un mouvement qui parcourait la surface des rizières, qui ridait l'échine des dunes, qui repoussait les mouettes vers l'estuaire. Cependant, les vieux le comprenait ; et quelques innocents, dont l'esprit se confondait à la transparence de l'eau, répétaient ce qu'il disait en un murmure de ruisseau ». le sentiment de la nostalgie se loge dans le regret des temps révolus et des lieux inatteignables lié souvent à un désir insatisfait. le Portugal, ouvert aux dépressions atlantiques, à la monotonie des terrains vagues de l'océan, semble être un épicentre d'où luit la lumière sombre de la langueur. Toutefois, l'oeuvre de Nuno Júdice n'est pas réductible à la saudade même si elle en est imprégnée. le poète accorde son attention aux menus faits du quotidien et leur insuffle une vigueur que les métaphores légères aiguisent encore. Bien que référencée avec l'évocation de Pessoa, Camoens, William Blake ou James Joyce, Nuno Júdice produit une oeuvre originale, moderne qui ne renie pas le passé littéraire et historique mais l'assimile. Parfois le surréalisme est convoqué brièvement, tout comme la poésie japonaise. Les frontières entre les genres littéraires, entre le rêve et la réalité deviennent poreuses. le poète fait feu de tout et derrière une apparente simplicité, atteint les profondeurs de l'âme.
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L'auteur est né durant la dictature de Salazar qui prend fin en 1974 à la révolution des Oeillets.
"Un chant dans l'épaisseur du temps" date de 1992.
J'ai pris plaisir à lire ce recueil qui est tout en rondeur. C'est une fenêtre ouverte sur les saisons, la nature, les villes et leurs mystères. L'auteur est fixé sur l'autre côté des choses, à la frontière de plusieurs mondes.
Le sacré et l'absolue sont une musique avec ses secrets et ses rites silencieux.
La nuit exerce son art vers des destinations secrètes.
Le temps s'étire entre intérieur et extérieur.
La poésie de l'auteur a un rythme, un mouvement, une sorte de respiration. Et la lumière aussi. Les couleurs sont chaudes. Plusieurs thèmes se dégagent : la nature, la femme et la mort.
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Citations et extraits (60) Voir plus Ajouter une citation
BOTANIQUE

ll n’y a pas de différence entre la texture des mots
( je dis bien des mots, et non du tissu ou du cristal )
et l’impression que la surface de certaines feuilles
laisse sur les doigts : je me réfère à des feuilles comme celles des
platanes, des peupliers, et aussi des
cyprès. L’impression se transmet à l’âme,
ou à ceci, qui, en nous porte ce nom, et nous mène
vers un décor étrange d’idées et d’ombres où,
comme dans la caverne du philosophe, on ne voit pas la lumière
entrer : comme en songe, tout vibre dans le cœur
de l’obscurité. Alors, d’un geste brusque, j’arrache
ces feuilles. Pourtant, sur le sol, séparées de leur branche,
elles ne me disent rien, sinon que, dans le dictionnaire,
il est écrit : organe souvent en lame mince de couleur verte des plantes
à fleurs ou phanérogames...

MÉDITATIONS SUR DES RUINES ( 1994 )
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RECETTE POUR FAIRE LE BLEU

Si tu veux faire du bleu,
prends un morceau de ciel et mets-le dans une grande marmite,
que tu puisses porter au feu de l'horizon ;
puis mélange-le avec un reste de rouge
de l'aube, jusqu'à ce qu'il ait fondu ;
verse le tout dans une bassine bien propre,
pour qu'il ne reste rien des impuretés de l'après-midi.
Pour finir, tamise un reste d'or du sable
de midi, jusqu'à ce que la couleur attache au fond métallique.
Si tu veux, pour que les couleurs ne passent pas
avec le temps, jette dans le liquide un noyau de pêche brulé.
Tu le verras fondre, sans laisser la moindre trace comme si
tu ne l'y avais pas mis ; et le noir de cendre ne laissera
pas même un reste d'ocre sur la surface dorée.
Tu pourras alors porter la couleur à hauteur
des yeux, et la comparer au bleu authentique.
Les deux couleurs te paraîtront semblables, sans qu'il
te soit possible de les distinguer l'une de l'autre.
Voilà comment j'ai procédé - moi, Abraham ben Judas Ibn Haïm,
enlumineur de Loulé - et comment j'ai laissé la recette à qui voudrait,
un jour, imiter le ciel.

MÉDITATIONS SUR DES RUINES ( 1994 )
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Viatique -

La nuit, on se connaît par la voix, par la
respiration, par une noire tendresse des bras ;
on se connaît lentement comme si on ne s'était
jamais rencontré, ni échangé les mots
étranges d'un adieu.
On se connaît par le désespoir de l'ignorance, qui
aux uns at aux autres dérobe le sentiment, les laissant
livrés à la sécheresse d'un reflet.

Venez : de ce quai que l'hiver a dévasté
que les bateaux ne recherchent plus, ni les oiseaux, ni
la plus folle des prostituées d'autrefois ; et
apportez un refuge d'ombres sur
vos lèvres, une contagion de l'âme à la fatigue
des corps, le poids d'une lueur dans l'obscurité,
des yeux.

Communiez avec moi dans le désordre de la vie,
dans l'indécision des chemins,
dans la blessure d'un silence où s'écoulent,
comme les images d'un rêve,
un rire aimé, jadis, et
ton visage sans âge.

p.46
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CLEARLY CAMPOS
(citation)


Une seule fois
l’amour a suspendu sa phrase ;
une seule fois
le fleuve a débordé sur la berge ;
une seule fois
les astres se sont éteints ;
une seule fois
j’ai entendu le silence des vents.

Le hasard
ne conjugue pas les coïncidences :
il les résout
dans un échange de regards
que les amants avaient cru
éternel

Et je descend cette page
jusqu’au bout de la rue
— en vain.

Le bureau de tabac
a fermé ce soir,
seulement une fois

— la dernière fois.

p.152-153
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Un chat à la maison, seul, monte
sur le rebord de la fenêtre pour, de la rue,
être vu.

Le soleil frappe les vitres et
réchauffe le chat qui, immobile,
semble un objet.

Il reste ainsi pour susciter
l'envie-indifférent
même si on l'appelle.

Par je ne sais quel privilège,
les chats connaissent
l'éternité.
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Videos de Nuno Judice (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Nuno Judice
Nuno JÚDICE – Un anti-Pessoa ? (France Culture, 1999) L’émission « For Intérieur », par Olivier Germain-Thomas, diffusée le 10 octobre 1999 sur France Culture. Invité : le poète en personne !
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