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EAN : 9782810703678
166 pages
Presses universitaires du Midi (24/04/2015)
2.5/5   2 notes
Résumé :
Cette édition est dédiée à Tadeusz Kantor à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance. Il s’agit de la conversation à bâtons rompus entre l’artiste et Mieczysław Porębski, historien et théoricien de l’art, enregistrée à la charnière des années 1989-1990. Les interlocuteurs, amis de longue date, se plongent dans leurs souvenirs et partagent leurs réflexions sur la peinture, le théâtre, la littérature, dans le contexte polonais et universel. Leurs ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
J'ai reçu Conversation de Tadeusz Kantor à l'occasion de la dernière opération masse critique. Une surprise. Cette édition a été réalisée à l'occasion du centième anniversaire de sa naissance. Il s'agit de la conversation à bâtons rompus entre l'artiste et Mieczysław Porębski, quatre entretiens enregistrés les 5 et 8 décembre 1989 et les 30 et 31 janvier 1990.
Ces entretiens font partie d'un ouvrage publié en 1997 par Mieczysław Porębski « la planche. Tadeusz Kantor », un défi lancé au critique d'art par Kantor, lui demandant d'écrire un ouvrage sur l'objet le plus simple de la création, la planche.
Les interlocuteurs, amis de longue date, se plongent dans leurs souvenirs et partagent leurs réflexions sur la peinture, le théâtre, la littérature, dans le contexte polonais et universel.
Un ouvrage plutôt difficile à lire en raison des clins d'oeil, « private jokes » et autres facéties, entre amis, qui peuvent laisser de glace les témoins passifs.
Les moments marquants du livre :
- Les créations de Kantor ont été imposées par lui dans un contexte de glaciation de la création artistique en Pologne, ce qui démontre sa pugnacité et sa ténacité.
« On me demande à l'étranger pourquoi restez-vous là-bas ? Alors je réponds : quand on se trouve à l'intérieur d'une réalité, on a vis-à-vis d'elle un rapport tout à fait différent de quelqu'un qui se trouve à l'extérieur. Moi – au milieu des communistes- je les détestais tous. »
- Son oeuvre s'inspire de l'histoire de la Pologne anéantie par le nazisme puis contrainte sous le joug communiste. Il précise au cours des entretiens que le non-respect de la mémoire est à l'origine des crises de civilisation.
A cette époque, j'avais une planque à Kazimierz, dans l'atelier théâtral rue Kupa. (………………) Alors il (Grajewski) vient chez moi et dit : «Barrez-vous il y a un type qui veut vous voir. Mais il était déjà trop tard, l'autre était déjà entré. »
- le nom qu'il donne à son théâtre Cricot - palindrome de to cyrk (c'est le cirque, en polonais) -montre, outre sa pugnacité son sens de l'humour et de la dérision.
- Kantor faisaient des emballages d'objets bien avant que l'on nous bassine avec le génie de Christo présenté de façon unanime comme le premier emballeur de l'humanité. Chez Kantor l'emballage prend une signification précise, il est synonyme de mort, de silence imposé, de fin.
« Après il y avait l'affaire Christo. Un journaliste a écrit que j'avais emprunté les emballages à Christo. Ahrenberg voulait même m'intenter un procès. »
- « La réalité dégradé » précise Kantor, pour lui l'occupation nazie puis le stalinisme en Pologne, est source de prise de conscience, ainsi sous les emballages on devine une réalité suggérée, alors que l'on a sous les yeux quelque chose d'informe et d'innommable.
« MP : Eh bien, oui. du temps d' »Ulysse », nous étions tous la « réalité du rang le plus bas ». Ce qui est resté et ce dont nous nous souvenons. Presque de manière palpable.
TK : Il fallait tout ramener à cette pauvreté. Je l'ai bien précisé en formulant mes instructions pour « Ulysse ». Pour l'art, c'est la pauvreté qui est la plus signifiante, non la richesse. Même s'il y a des tableaux riches, ils sont très pauvres à l'intérieur. »
« On ne peut parler de mon théâtre sans donner l'image de cette époque inhumaine. Guerre mondiale, dieux meurtriers, camps d'extermination, assujettissement, génocides comme idéologie dominante, et plus tard, pouvoir entre les mains d'hommes aux statuts intouchables des premiers secrétaires, qui faisaient montre d'un primitivisme sans bornes et cela pendant un demi-siècle, au vu et au su du monde entier, civilisé et totalement indifférent. »
- Kantor est « passé » au théâtre, art en mouvement, pour s'affranchir du côté figé et définitif de la peinture. Il admet avoir été admiratif de ces tableaux classiques qui suggèrent le mouvement notamment les Torches de Néron de Henryk Siemiradzki : (http://www.mediterranees.net/romans/quo_vadis/III_21.html)
« Eh bien, j'ai commencé à peindre au collège sous l'influence (il rit) des « torches de Néron. »
« Je me promenais alors dans le rue Krakowska à Tarnów – il y avait pas mal d'animation là-bas – et je me demandais comment faire un tableau avec du mouvement. »
- Une partie de la conversation est consacrée à l'histoire de l'art et à sa dimension idéologique, les deux interlocuteurs s'accordent sur la nécessité d'écrire une nouvelle l'histoire de l'art qui prenne en compte autre chose que « l'esthétique pure ». Les deux hommes regrettent que la vision occidentale de l'art polonais, par exemple, s'arrête à cette dimension esthétique sans prendre en compte la réalité dans laquelle ces oeuvres ont été créées.
« C'est pourquoi, selon moi, il faudrait réécrire l'histoire de l'art. (………….) L'important n'est pas la source où l'on puise. Ce qui est important, ce sont les causes et il est évident que là, nous avions des situations extraordinaires, je le répète, des situations extraordinaires. »
En réponse à une question sur une filiation possible avec les tableaux de Marcel Duchamp :
« Oui, en effet, mais c'était en Suisse, aux Etats-Unis, dans des endroits où il n'y avait pas de danger, n'est-ce pas ? »
Conclusion :
Un livre difficile à lire mais dont je ne regrette pas de l'avoir lu, poussé par mon obligation vis-à-vis de masse critique.
À conseiller ?
Jetez-y un oeil si vous en avez l'occasion. Ce recueil des 4 conversations a le mérite de nous faire toucher du doigt une réalité d'un pays proche de la France, que nous avons abandonné en 1945, mais qui a continué à vivre (ce que nous ignorons souvent) en développant ses propres concepts artistiques qui sont loin de la perception que nous en avions.
Ainsi, Kantor, en réaction à l'exposition de 1983 à Beaubourg, intitulée « Présences polonaises » répond que pour lui cette exposition aurait dû s'appeler « Absences polonaises » tant ce qui y était exposé et la façon dont cela était présenté, ne correspondait en rien avec la réalité de l'art polonais.

Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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2015 est le centenaire de la naissance de Tadeusz Kantor, et l'occasion de publications le concernant, ainsi parallèlement ses écrits, aux « Solitaires Intempestifs ». Mais qui est Tadeusz Kantor ? Ce nom n'a probablement d'écho que pour les lecteurs qui s'intéressent à l'histoire du théâtre. Et là, le nom s'impose avec force. Tadeusz Kantor est polonais, né donc en 1915, élève des Beaux-arts de Cracovie, peintre, inspiré à la fois et successivement par le constructivisme, le dadaïsme (Duchamp en particulier) et le surréalisme. Et de là, après avoir créé une oeuvre originale, avec avant Christo, la technique des « emballages », il a consacré sa vie au théâtre, avec toute son expérience plastique , donnant priorité à la scénographie et avec ce qu'il est convenu d'appeler la théâtralité, théâtre total incluant la création d'objets originaux (par exemple le berceau automatique ou la machine à accoucher), introduisant des mannequins sur scène, des musiques originales, et tout cela dans une intention de théâtre pauvre, proche de Grotowski, avec des amateurs… La vision est souvent politique (en lien avec la souffrance de son peuple), et métaphysique, dans une familiarité avec la mort, dans une expression bouffonne (Théâtre de la mort). En réalité : bouffonnerie métaphysique, destinée par contraste à montrer la vie, sans pessimisme… On ne sera pas surpris, choisissant des espaces de théâtre originaux de le voir s'orienter vers des happenings ou des « performances » qui ont marqué le théâtre contemporain.

Invité à Paris au festival de Nancy, en 1975, puis au festival d'automne avec un spectacle devenu mythique : « La classe morte », représentée plus de quinze cent fois, il a été reconnu comme l'un des grands maitres de l'Art du théâtre, avec une grande cohérence de son parcours qui s'est poursuivi jusqu'en 1988, où un spectacle « Je ne reviendrai jamais » venait conclure cet itinéraire très original du « Cricot 2 », la compagnie qu'il dirigeait. Il a pu faire apparaitre, en mettant en scène de façon récidivante des personnages clefs, comme la femme de ménage ou les jumeaux qu'il avait ainsi créé un style nouveau, proche de la Commedia dell'arte. Grand homme de théâtre donc, d'autant que ses créations étaient accompagnées d'un discours théorique rigoureux, à l'instar de ses contemporains Bob Wilson ou Julian Beck.
C'est dire tout l'intérêt de ces quatre entretiens qui datent de décembre 1989 et de Janvier 199O, avec un grand critique polonais (Porebski). Il y a cependant quelques points d'ombre : l'absence pour le grand public français d'une introduction à visée pédagogique, (malgré de nombreuses notes en bas de pages), une présence du « Moi » questionneur excessive, centrée sur sa propre biographie anecdotique, avec une voix « off » surajoutée, tout cela entrainant un peu de confusion, au détriment de l'essentiel. Enfin, il manque des illustrations pour ce théâtre de l'image…, et on peut se demander, à l'inverse si le texte en polonais apporte quelque chose de vraiment utile pour le lecteur français.
Au total, une excellente contribution à l'hommage rendu à Kantor, pour des initiés.
Hugues Rousset
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Je me suis intéressé à ce livre car il m'a semblé être une bonne façon d'entrer dans le travail de Tadeusz Kantor que je ne connaissais pas. Autant le dire tout de suite, il n'a pas répondu à mes attentes car il ne constitue pas une entrée accessible vers la démarche de Kantor. En effet, il se distingue des entretiens d'artistes, plus classiques, en ce qu'il tente de retranscrire une véritable conversation. Tout le problème de cette conversation est justement son rythme, qui oscille entre "à bâtons rompus" et des successions de monologues.

Lorsque la conversation se déroule "à bâtons rompus" une forte confusion s'en dégage. Chacun des interlocuteurs entrecoupe le récit de l'autre et le dialogue est vraiment saccadé, au point qu'on perd souvent le fil et que les paroles de chacun deviennent indiscernables. À ceci s'ajoute le fait que Porębski a souvent tendance à détourner la conversation de son cours sans qu'elle n'ait atteint son plein développement. La saccade se trouve alors autant dans le rythme que dans le contenu de la discussion.

Pour ce qui est des monologues, ils démontrent le défaut le plus important de ce livre, à savoir la distribution du temps de parole. le problème est que Kantor n'est pas assez présent dans la conversation. La plupart du temps, il ne sert qu'à donner la réplique. À l'inverse, Porebski accumule les monologues. Cette disparité fait que, tout le long du livre, ce ne sont pas les thèses de Kantor mais de Porebski qui sont présentées. Ceci se retrouve également dans les ajouts que fait Porebski, le plus souvent des considérations, questionnements ou développements personnels, qui n'ont pas vraiment d'utilité réelle pour le déroulement de la conversation. Pourtant, ils sont bien présents et s'ajoutent à la tendance au monologue. Ainsi, si l'ouvrage est censé être une conversation, Porebski a constamment l'ascendant et l'oeuvre de Kantor n'est pas présentée par Kantor lui-même. Alors qu'à la lecture d'un entretien d'artiste l'attente principale est une présentation de son travail par l'artiste lui-même, ici, la voix de l'artiste est complètement étouffée.

Tout ceci fait qu'au final, la conversation ne traite pas du travail de Kantor dans son aspects général. Il y a surtout deux thèmes très développés. le premier thème apparaissant dans la conversation, après l'idée de tableau vivant qui est très vite écarté par une digression, est l'art contemporain polonais. Dans la mesure où les deux protagonistes ont évolué au sein de ce milieu, ils se remémorent ensemble leurs études aux Beaux-arts. Si cette conversation autour des autres artistes qu'ils ont fréquenté durant leur étude est parfois incompréhensible car trop personnelle, elle permet cependant d'en apprendre plus sur l'art polonais. Kantor et Porębski passent un long moment à réfléchir sur ce qui fait la spécificité de l'art polonais et en quoi la culture polonaise pousse ses artistes vers une esthétique propre. Ce qui s'avère au final être une des parties les plus intéressante bien qu'elle ne soit pas à première vue l'objet du livre.
La deuxième partie de la conversation se tourne plus vers le travail de Kantor, mais pas de façon générale. En fait, on entre dans des récits très précis concernant la genèse et la mise en place de sa première pièce le Retour d'Ulysse. Il est forcément plus aisé de comprendre la conversation autour du Retour d'Ulysse lorsque la-dites pièce est connue car elle n'est jamais vraiment décrite. Il est par contre intéressant de voir comment s'est créer ce projet de la première idée à la première représentation et comment il a évolué au fil du temps. Surtout que le théâtre de Kantor est connu pour être en constante redéfinition. Mis à part ces deux grands thèmes qui composent la quasi-totalité de la conversation il y a également de rares allusions à Balladyna et à quelques concepts de Kantor comme l'art vivant ou l'emballage sans qu'elles soient développées plus que ça.

Tadeusz Kantor : conversation est un livre déroutant car il peine à remplir son rôle. En effet, il se détache trop de la présentation des entretiens pour parvenir à résumer l'oeuvre de Kantor. le plus grand problème de ce livre est que la conversation n'a aucun intérêt puisque ce n'est pas Kantor qui présente son travail mais Porebski. Enfin, il ne permet pas une bonne entrée dans le travail de Kantor car il est trop précis et ne cherche jamais à alléger son propos. En revanche, il permet d'en apprendre plus sur l'art polonais, cette fois-ci d'une manière générale et sur le Retour d'Ulysse à condition que, paradoxalement, la pièce soit préalablement connue. C'est pourquoi il semble préférable de découvrir Kantor par le Théâtre de la mort, de Kantor lui-même, ou La Planche, de Porebski sur Kantor. Cette conversation qui n'est ni de Porebski sur Kantor (mais qui n'en est pas loin (et c'est là le problème)) ni par Kantor lui-même n'arrive finalement à rien.

Remarque : Même si cela ne m'a pas servi, je trouve la volonté de l'éditeur de publier la conversation dans une édition bilingue vraiment intéressante.
Lien : http://bookshowl.blogspot.fr..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Non, pas Blok. Blok, c’était en trente-huit, à l’Académie, quand j’étais amoureux de Wanda Baczyńska, qui se mariera bien plus tard avec Tadeusz, scénographe et ami des capistes (groupe de peintres fondé en 1923). J’ai conservé cette pièce de Blok, que nous avons traduite ensemble, elle connaissait le russe et moi, j’écrivais et je faisais des dessins en même temps. Sur du papier bleu. Plus tard, Tadeusz est parti à la guerre avec l’armée d’Anders. Wanda est partie, elle aussi, en vacances, non loin de Lvov. Nous nous sommes séparés à Błonia (parc de Cracovie) où étaient installées des caravanes de gitans. Je suis rentré complètement soûl à l maison, ma mère m’a mis au lit. C’était fini. Elle a ensuite été déportée avec sa sœur en Sibérie, et c’est donc là-bas, en Sibérie, qu’elle a connu ce gars, Tadeusz qui était dans l’armée d’Anders. Ils sont partis ensemble (elle était infirmière, me semble-t-il), en passant par l’Iran et la Palestine, en Italie pour s’installer définitivement en Angleterre. Quand nous sommes arrivés à Londres avec « la classe morte » (titre d’une pièce de théâtre de Kantor), elle est venue voir le spectacle. Lui, au début, essayait de faire quelques scénographies pour un théâtre polonais, mais ça n’a pas marché et ils ont acheté une boucherie. Elle enseignait le polonais. Lui est mort le premier, puis c’est elle qui est partie. Quand, il n’y a pas longtemps, nous sommes allés là-bas, je pensais qu’elle était encore en vie. Mais non, elle est morte d’un cancer. Alors voilà, on traduisait ensemble ce « Bałagańczyk », mais le spectacle n’a jamais eu lieu, c’était seulement quelques projets, quelques idées.
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Videos de Tadeusz Kantor (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Tadeusz Kantor
?La Classe morte? (extrait) .Extrait de la captation audiovisuelle de ?La Classe morte? de Tadeusz Kantor réalisée par Nat Lilenstein, distrait pour Mediapart par Antoine Perraud.
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