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EAN : 9782267025224
276 pages
Christian Bourgois Editeur (22/08/2013)
  Existe en édition audio
3.67/5   2001 notes
Résumé :
En ce matin de Noël, Holly se réveille, en retard, hantée par un funeste pressentiment : l'impression que, quand elle est partie en Russie avec son mari treize ans plus tôt pour adopter Tatiana, quelque chose les a suivis jusque chez eux.

Tandis qu'Holly tente de dissiper cette angoisse inexplicable, son mari, Eric, part en hâte pour l'aéroport où il doit retrouver ses parents venus fêter Noël avec eux.

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Critiques, Analyses et Avis (580) Voir plus Ajouter une critique
3,67

sur 2001 notes
Ce devait être un Noël comme les autres pour Holly et sa famille : la préparation du repas, l'arrivée des invités, l'impatience d'ouvrir les cadeaux. Mais ce matin-là, tout va mal. Holly se lève trop tard. Alors que son mari file en râlant récupérer ses vieux parents à l'aéroport, Holly reste seule avec sa fille adoptive Tatiana, ramenée de Sibérie 15 ans plus tôt. Elle essaie de rattraper son retard mais un malaise sourd l'empêche d'avancer dans ses tâches. Et puis, Tatiana n'est pas comme d'habitude, elle ne fait rien pour l'aider, multiplie les reproches et les remarques acerbes. Dehors, le blizzard se renforce. Effrayés par la tempête de neige, les invités se décommandent, laissant Holly seule avec une inquiétude lancinante et une adolescente revêche.


Une situation banale qui insidieusement devient cauchemardesque, un huis-clos angoissant, un suspense psychologique…tout le talent de Laura Kasischke qui sait si bien distiller des touches de noirceur dans une ambiance froide et aseptisée.
De l'histoire, il ne faut rien dire sous peine de déflorer l'intrigue mais la tension monte tout au long des pages, il est quasiment impossible de lâcher le livre et ce n'est qu'à la toute dernière page que tout prend sens.
Oscillant entre conte de Noël et thriller psychologique, entre banalité et folie, l'Esprit d'hiver ne finira de hanter ceux qui s'y frotteront. A lire absolument!!

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J'aime cet auteur et cet "Esprit d'hiver" est dorénavant mon préféré parmi tous les romans de Laura Kasischke.
L'histoire est simple, c'est le matin de Noël dans une famille américaine moyenne, il neige, la famille et des amis sont invités à venir partager le repas mais dès le réveil, rien ne va. Holly va donc passer plusieurs heures à la maison en compagnie de sa fille adolescente en attendant le retour de son mari, parti chercher ses parents à l'aéroport, et l'arrivée des invités.Mais il y a des jours comme ça où on a l'impression que tout se ligue contre nous, que le quotidien devient un fardeau et qu'il ne faudrait finalement qu'une goutte d'eau pour faire déborder le vase.

En même pas 300 pages, l'auteur a su créer une atmosphère particulière et surtout il règne un suspense à couper au couteau entre ces pages.
La tension est telle qu'on a envie de lire à toute vitesse pour comprendre enfin de quoi il retourne mais on se retient car on sent bien que chaque ligne est importante, que chaque détail a une signification.
J'ai donc pris mon temps, j'ai savouré chaque mot, chaque ligne et je suis une fois de plus conquise par cet auteur époustouflant.
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C'est le matin de Noël. Après une soirée qui s'est prolongée, Holly se réveille trop tard. Elle s'en veut déjà en voyant l'heure car elle sait que cette journée va être très occupée. En effet, elle reçoit la famille de son mari et quelques amis pour venir fêter Noël. Elle n'a pas préparé le repas et la table n'est pas encore mise. Comble de malchance, son mari, lui aussi à la bourre, s'empresse de quitter le lit conjugal pour aller chercher ses parents à l'aéroport. Elle espère pouvoir compter sur l'aide de sa fille adoptive, Tatiana, qu'elle a ramené de Sibérie 13 ans plus tôt. Mais, cette dernière un peu contrariée par le fait qu'elle tenait à ouvrir ses cadeaux dès l'aube, semble reprocher à sa mère l'heure tardive à laquelle elle s'est levée. La jeune fille est d'humeur maussade, n'attache aucune importance à sa maman et encore moins au fait qu'elle sollicite son aide. Son comportement devient de plus en plus bizarre. le blizzard souffle, la neige tombe abondamment et la maison se retrouve soudain comme enveloppée d'une sorte de torpeur...

Laura Kasischke nous plonge dans une ambiance oppressante, nous enferme dans cette maison en compagnie d'Holly et Tatiana et nous glace le sang avec toute cette neige qui semble arrêter le temps. Elle décrit à merveille cette relation entre cette mère aimante, possessive, choyant son enfant qu'elle a tant espéré et cette fille habituellement si tendre et avenante mais dont le comportement étrange et troublant semble l'inquiéter. le lecteur est confronté à l'angoisse d'Holly, dès son réveil, qui ne la lâchera pas de la journée. Ce huis-clos étouffant et angoissant, alternant les événements de la journée de Noël et les souvenirs de Holly lors de l'adoption de sa fille, devient de plus en plus mystérieux au fil du temps, le comportement de Tatiana soulevant de multiples questionnements et cette neige drue renforçant le sentiment d'enfermement des deux femmes. L'écriture de Laura Kasischke est envoûtante et étourdissante.

Esprit d'hiver... glacial...
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Nous sommes le jour de Noël et Holly doit préparer le repas car elle reçoit ses beaux-parents, deux amies et leur fille et un autre couple. Seulement, elle est en retard, car la veille, elle et son mari Eric se sont couchés tard.
Eric part en catastrophe chercher ses parents qui sont déjà arrivés à l'aéroport. Dehors, il y a le blizzard, la neige qui tombe en abondance.
Holly s'est réveillée avec une sensation de malaise, une angoisse avec une phrase qui la hante : « quelque chose les avait suivi depuis la Russie jusque chez eux ». Elle a besoin de noter cette phrase lourde de signification pour elle dans le cahier où elle écrivait des poèmes autrefois, phrase qui va revenir souvent de façon lancinante tel un leitmotiv.
On apprend ainsi qu'Eric et Holly ont adopté une petite fille qu'ils sont allés chercher dans un orphelinat en Sibérie. Ils l'ont appelée Tatiana, alias Tatty, pour qu'elle conserve un lien avec le pays où elle est née.
Rien ne se passe comme prévu, d'abord Tatty se lève en faisant la tête et s'oppose sans arrêt à sa mère, car elle a maintenant treize ans et elle est à fond dans l'adolescence. Donc elles se chamaillent sans arrêt.
Eric appelle car sa mère est malade et il a dû aller à l'hôpital. Dehors les routes sont impraticables donc les invités annulent chacun à leur tour. Ce qui désole Tattie et Holly qui aurait aimé parler de leur mauvaise entente avec son amie Thuy qui elle aussi a adopté une petite fille et qui semble de bon conseil et surtout Tatty s'entend bien avec elle.
Peu à peu, les souvenirs remontent et Holly qui se culpabilise de ne pas être une bonne mère, évoque tout ce qui va mal depuis l'arrivée de bébé Tatty à la maison : la bosse qui pousse sur la main d'Eric, les verres que Tatty a cassés de façon étrange comme si quelque chose de maléfique les avait suivis au retour de l'orphelinat, les CD neufs qui se sont tous retrouvés rayés avant d'avoir servi, l'ordinateur portable qui a disparu, etc..
Elle repense à l'opération qu'elle a dû subir car elle est porteuse d'une mutation génétique qui se traduira par un cancer du sein dont sa mère et sa soeur sont mortes très jeunes. Elle a décidé sur les conseils du médecin de se subir une double mastectomie et une ablation des ovaires.
Elle se demande, ce qui s'est passé pour que la petite fille adorable devienne une adolescente à ce point exécrable, car en ce jour de Noël, elle devient un mur et plus aucune communication n'est possible. Et je vous laisse découvrir la suite...

Ce que j'en pense :

Le titre de ce livre est inspiré d'un vers du poète et avocat Wallace Stevens qui écrivait : « il faut posséder un esprit d'hiver ».
On est donc dans un huis clos. Holly et sa fille sont bloquées dans la maison, isolées de tout par la tempête de neige et ce jour de Noël tout va de travers.
L'ambiance est glaciale à l'intérieur comme à l'extérieur. La mère et la fille s'agressent mutuellement sans qu'il y ait de vrais motifs de dispute. Tatty multiplie les allers et retours de la cuisine à sa chambre dans laquelle elle finit par s'enfermer. Holly avait fait installer un verrou pour que sa fille puisse avoir son intimité quand elle le voulait mais le verrou va servir pour la première fois. Comme s'il y avait un renforcement de leur éloignement l'une de l'autre et une matérialisation de rancoeur et d'opposition.
Chaque fois qu'elle redescend de sa chambre, elle a changé de tenue, alternant une robe rouge et une robe noire.
On assiste aussi au bilan qu'Holly fait de sa vie de femme et de mère. Quelque chose s'est cassé tout d'un coup, elle se regarde sans complaisance, fait le bilan de sa vie : elle est poétesse, elle a une certaine notoriété et a publié des recueils. Depuis l'arrivée de Tatty, elle n'a jamais pu écrire une ligne, toute l'inspiration s'est tarie et ce matin avec cette phrase qui revient en leitmotiv, elle sent que c'est urgent de la noter et que l'inspiration va revenir et c'est vital pour elle.
L'auteure pose des questions essentielles. Depuis son opération, Holly est-elle encore une femme car elle a été mutilée, (double mastectomie et ovariectomies à l'âge de 22 ans) et rendue incapable de procréer ? Est-elle une mère, n'ayant pas porté un bébé dans son ventre ? Y a-t-il une différence entre un enfant biologique et un enfant adopté ? Elle a peur que Tatty lui dise un jour, après une dispute, « tu n'es pas ma mère ». Je la comprends très bien je suis une mère adoptive (adoptante ?)
Elle dévoile peu à peu, au fil des tensions avec Tatty, le parcours terrible de l'adoption, car fait-on jamais le deuil de la stérilité ? À force de vouloir tout bien faire, est-ce qu'on ne fausse pas la donne ? Comme toute mère, et peut-être même encore plus, on veut faire le mieux possible pour cet enfant qui vient de si loin, mais l'enfant ne prend-il pas cela pour un excès d'exigence ? Il y a l'enfant adopté et l'enfant fantasmé…
Elle décrit très bien l'horreur des orphelinats où ils enfants ne sont pas bien traités (en Sibérie, on est carrément dans la maltraitance), les dessous de l'adoption avec l'argent à verser pour que le bébé qu'ils ont choisi lors du premier voyage survive et soit mieux traité…
Le fin est sublime, à mon avis, car je m'attendais à un clash entre la mère et la fille (encore un écho avec ma propre histoire) et c'est autre chose qui se passe qu'on n'imagine pas. Je vais donc faire une deuxième lecture de livre, orientée par la fin que je connais maintenant.
Un conseil : ne regardez sous aucun prétexte l'avant-dernière page sinon, vous allez passer à côté de ce livre qui va toucher le lecteur en fonction de sa propre histoire.
En tout cas, c'est la première fois que je lis un roman de cette auteure est j'ai bien l'intention de continuer car j'aime son écriture belle, déliée et en même temps directe, donnant parfois l'impression de recevoir un coup de poing dans le plexus, la façon dont elle entretient le suspens, l'angoisse même parfois. Elle nous entraîne avec elle, on la suit dans des méandres parfois en se demandant ce qui va arriver, et ce qui va nous arriver car j'ai eu l'impression de vivre en même temps qu'elle, probablement parce que l'adoption résonne en moi de façon parfois douloureuse.

Note : 8/10


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La fameuse angoisse des fêtes de fin d'années, je la connais, chaque année je la vis. Pas celle causée par le souci des cadeaux de dernières minutes qu'il reste à trouver, je vous parle de la véritable angoisse, celle qui s'amplifie plus les jours approchent, plus le soir du premier réveillon se précise. Celle qui vous prend aux tripes, qui vous tenaille l'estomac, qui vous oblige à vous allonger, à vous forcer à respirer calmement avant d'entrer dans l'arène et de sourire en faisant comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

"Prendre connaissance des horreurs de ce monde et ne plus y penser ensuite,
ce n'est pas du refoulement. C'est une libération."

C'est également avec un indéfinissable sentiment d'angoisse qu'Holly se réveille en ce matin de Noël. Ayant un peu abusé du bon vin, elle se réveille en retard, son mari déjà parti chercher ses parents à l'aéroport. Plus que quelques heures avant que tous les invités ne débarquent et rien n'est prêt. Sa fille Tatiana aurait pu la réveiller mais semble de pas l'avoir fait comme pour mieux pouvoir la mettre dans l'embarras et le lui reprocher ensuite. Tatiana ne semble d'ailleurs pas dans son état normal mais impossible d'en connaitre la ou les véritables raisons. Une tension aussi soudaine qu'inexpliquée semble s'être insidieusement glissée entre les deux femmes. Ajoutez à cela, une tempête de neige phénoménale qui bloque tous les accès de la ville et des invités qui, du coup, ne viendront pas, rien dans cette journée ne semble vouloir se dérouler comme prévu.

Tout au long des pages de son roman, Laura Kasischke distille au compte-gouttes une ambiance inquiétante à souhait, une atmosphère pesante, cotonneuse. L'aspect huit-clos de cette confrontation entre une mère et sa fille adoptive est accentué par la neige qui les entoure. Elles semblent coupées du monde, sans vue sur l'extérieur. L'image de la baie vitrée opacifiée par la chute perpétuelle des flocons de neige contribue à cette sensation d'isolement, d'étouffement. Aucune intervention extérieure ne semble possible.

"Quelque chose les avait suivis depuis la Russie jusque chez eux."

L'utilisation répétée de phrases ou mots en italiques, pour appuyer le côté inquiétant, et les incessants flashbacks permettent d'ajouter à la confusion et au questionnement du lecteur. Qu'est-ce qui a bien pu les suivre ? Un démon ? Un esprit ? Esprit d'hiver. Esprits divers... Holly, Holy Bible… Que de drôles de questions qui me viennent à l'esprit pendant ma lecture, que d'associations d'idées fumeuses!... Et cette enfant ramenée treize ans plus tôt d'un orphelinat de Sibérie aussi glacial qu'effrayant, qu'est-ce qui ne va pas chez Tatiana ?

Je me retrouve le 31 décembre 2009, je me suis réfugié dans une salle de cinéma après avoir esquivé toutes les invitations possibles et imaginables, l'angoisse des fêtes, vous vous souvenez… Esther, Orphan, en Version Original, l'histoire d'une enfant sortie de son orphelinat par une famille américaine qui va chèrement payer ce geste désintéressé. Et perpétuellement, l'accroche du film, sur l'affiche, qui me revient en tête tout au long de ma lecture :

"Quelque chose ne va pas chez Esther… "

Il est 5h30, dans la nuit noire, le vent souffle fort, la pluie cingle sur les volets, je ne dors plus, je dois savoir, il le faut. Il me reste moins de cent pages, je ne refermerai cet Esprit d'hiver qu'une fois ma lecture achevée.

Lien : http://bouquins-de-poches-en..
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critiques presse (9)
LaPresse
17 février 2014
Distillant un malaise subtil, jusqu'à la révélation de la dernière page, Esprit d'hiver est en effet un voyage sans ratés dans les méandres de l'âme d'une mère, entre amour, culpabilité et angoisse.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Lhumanite
04 novembre 2013
Laura Kasischke instaure une atmosphère anxiogène, tramée de culpabilité inconsciente, dans un quotidien banal de ménagère américaine moyenne. L’impression d’isolement due à la tempête de neige accentue le sentiment d’asphyxie du lecteur qui finit par privilégier la piste de la maladie mentale.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
Actualitte
24 septembre 2013
Un roman sur la famille, la filiation adoptive, le déni, l'adolescence, le poids du passé, des origines, incessibles dont la fin, effarante, ramassée en quelques lignes seulement, déroute et perturbe violemment le lecteur comme la lecture, d'ailleurs. Et sème le doute. Après « Les Revenants », « Esprit d'hiver » confirme la place au sommet de Laura Kasischke parmi les écrivains américains contemporains.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Bibliobs
13 septembre 2013
Ca catche, on le voit, dans le nouveau roman maniaco-dépressif de Laura Kasischke, une sonate d'hiver bergmanienne pour violoncelle et âmes blessées.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Telerama
11 septembre 2013
Sans doute la romancière signe-t-elle là son livre le plus personnel, confidence sur la douleur de l'enfantement littéraire, source d'épouvante et de plénitude.
Lire la critique sur le site : Telerama
LaLibreBelgique
10 septembre 2013
Laura Kasischke est une maître du suspense dans la vie quotidienne, sans autres meurtriers et démons que nos peurs et nos amours frustrées.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LesEchos
06 septembre 2013
L'écrivaine américaine nous offre un Noël blanc d'une noirceur absolue, un conte d'hiver rougi par les feux de l'enfer. Son roman est diaboliquement construit, comme un suspense à la Hitchcock, mâtiné de Freud. Laura Kasischke sait admirablement jouer des ambiguïtés : rêve ou réalité, angoisse ou folie… jusqu'à la fin on ne sait sur quel pied danser.
Lire la critique sur le site : LesEchos
Lexpress
06 septembre 2013
Avec Esprit d'hiver, huis clos oppressant, l'Américaine Laura Kasischke livre le récit magistral d'un séisme familial.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Culturebox
23 août 2013
Esprit d'hiver", le dernier roman de Laura Kasischke, est une stupéfiante incursion dans l'âme humaine, servie par une merveille de mécanique romanesque.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Citations et extraits (193) Voir plus Ajouter une citation
Holly baissa les yeux sur ses pieds [...] et c'est alors qu'elle remarqua, tout autour de ses pieds, quelque chose de sombre, ou du sable, répandu sur le sol.
Poussière? Cendre? Qu'était-ce donc?
Holly souleva un pied et en reposa la plante pour voir si elle était mouillée, si elle se tenait au milieu d'une flaque de quelque chose. Ce n’était pas le cas. [...] Elle prit une éponge dans l'évier, s'agenouilla et essuya le sol:
Rien.
Elle ne ramassa rien avec l'éponge, et quelle que pût être cette tâche foncée, elle n'était pas ni collante ni crasseuse. Elle fit courir sa main autour de la tâche et découvrit que rien ne semblait s'être répandu à cet endroit, du moins récemment. Ce cercle était simplement d'un noir plus foncé que le reste du carrelage.
Merde.
Les carreaux de céramique [...] avaient-ils commencé à se décolorer? [...]
Elle frotta plus fort avec l'éponge mais rien n'y fit.
Ou bien si?
Était-ce son imagination ou le cercle sombre s'élargissait-il, s'épanouissait-il, alors qu'elle passait l'éponge sur sa surface?
"Mais qu'est-ce que tu fiches?"
[...]
""Seigneur, s'exclama Holly. Tu m'as surprise. Je te croyais dans ta chambre.
- Maman, qu'est-ce que tu fais? redemanda Tatiana, avec la même expression de surprise agacée.
- Eh bien, on dirait qu'il y a quelque chose sur le carrelage, répondit Holly. Mais je n'arrive pas à l'éponger. Tu vois comme c'est sombre, tout ce cercle? On dirait une tâche ou une décoloration ou peut-être...
- C'est toi."
Holly leva les yeux vers sa fille.
" C'est toi, maman."
Holly ne voulut pas demander à Tatiana ce qu'elle entendait par là. Elle ne lui faisait pas confiance. Il semblait qu'elle était capable de critiquer sa mère, quoique Holly fasse ou dise. [...] Puis elle trouva le courage de demander à Tatty: "C'est moi, que veux-tu dire par là?
- Maman, tu ne vois pas ce que tu es en train de faire?"
Holly secoua la tête. Son regard passa de Tatiana à l’éponge qu'elle tenait dans sa main, puis de l'éponge au rond sombre par terre autour d'elle.
" Maman, tu essaies d'effacer ton ombre.
- Quoi? " fit Holly.
Pourquoi ces larmes soudaines dans ses yeux?
Pourquoi, une fois encore, éprouvait-elle ce sentiment d'abandon total, d'avoir été rejetée, abandonnée par tous?
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[...] ... - "Voici le bébé," avait dit une infirmière, apparaissant soudain dans l'encadrement d'une porte. Holly s'était attendue à passer tout d'abord par une heure de paperasse, ou bien une longue marche dans un couloir. Elle les avait imaginés, Eric et elle, debout devant la porte d'une chambre forte pendant qu'un garde poussait un verrou. Au lieu de quoi, à peine avaient-ils passé les colliers d'ail par-dessus tête et s'étaient-ils installés dans la salle d'attente, qu'ils avaient entendu ces mots, prononcés avec un fort accent mais d'une voix musicale et féminine : Voici le bébé.

Holly avait levé les yeux vers l'embrasure de la porte pour découvrir qu'un flot étonnant de lumière se déversait d'une fenêtre, ou bien d'un mur entier de fenêtres, quelque part dans le dos de cette infirmière, et que les cheveux de celle-ci, clairs et coupés presque à ras, rayonnaient tel un halo. Cette infirmière (qu'ils ne revirent jamais plus bien qu'ils l'aient demandé) avait un visage de chérubin, un sourire éblouissant - dents bien rangées et lèvres luisantes. Elle aurait très bien pu descendre d'un nuage ou sortir d'un écran de cinéma, avec cet enfant dans les bras. Elle aurait pu incarner quantité de créatures surnaturelles - ange, fée, déesse - ou bien passer pour une actrice engagée pour jouer le rôle de l'une de ces créatures, ce jour-là. Difficile de détourner le regard de son visage, pour contempler ce qu'elle tenait dans ses bras.

Eric a toujours prétendu que Tatty était enveloppée dans une couverture bleue, mais Holly savait que ce n'était pas le cas. Leur fille était enveloppée dans une couverture d'un gris sale, et Holly avait eu l'impression que le soleil essayait de la laver, de la blanchir, de la bénir. Le soleil essayait de faire rayonner le bébé. Le soleil désirait que Holly aime l'enfant, qu'elle la prenne en pitié, qu'elle la ramène chez elle. Comment le soleil aurait-il pu savoir qu'aucun effort n'était requis de lui ? Son regard passant du visage de l'infirmière à celui du bébé enveloppé de gris dans ses bras, Holly avait dû se retenir pour ne pas tomber à genoux, pour ne pas se mettre à hurler à gorge déployée. Au lieu de cela, elle avait agrippé Eric si fort que, plus tard, alors qu'ils s'éloignaient de l'orphelinat après cette première visite, ils avaient ri du fait qu'elle ait pu le meurtrir et le contusionner - et, de fait, c'était le cas. Quand Eric avait ôté sa chemise ce soir-là, ils avaient découvert, juste au-dessus de son coude, une trace violette en forme de petite conque.

Quand l'infirmière avait été complètement entrée dans la pièce, Holly s'était levée et on avait déposé le bébé dans ses bras. ... [...]
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En fait, quand l’agence d’adoption s’était occupée de leurs billets d’avion, Holly avait peut-être pensé que, par « Sibérie », on devait juste entendre « hors des sentiers battus » ou « sauvages ». Pas que l’orphelinat était réellement situé en Sibérie.
Mais c’était bien en Sibérie qu’ils s’étaient retrouvés. La Sibérie existait. Il y avait des bouteilles de vodka et des projecteurs et des fils barbelés, comme Holly s’y était attendue, et il y avait également des femmes portant des foulards, des charrettes chargées de paille, des hommes lugubres en uniforme, quelques superbes jeunes filles arborant des chapkas - rien de tout cela ne l’avait surprise. Bien que Holly fût surprise par tout le reste. Tout. Et plus particulièrement par les superstitions. À l’orphelinat Pokrovka n°2, comme les bébés toussaient et avaient de la fièvre, les infirmières avaient demandé à Holly et à Eric de porter des colliers de gousses d’ail. Elles leur avaient tendu de véritables gousses d’ail suspendues à des bouts de ficelle grise. Pour repousser les microbes ? Ou… ?
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Pour son anniversaire, elle lui avait offert un iPhone qu'il avait rapporté à la boutique. Il s'était excusé, disant que c'était un cadeau attentionné mais qu'il ne souhaitait pas transporter sur lui une minuscule et puissante unité centrale sur laquelle il pouvait calculer des algorithmes astronomiques ou bien consulter Facebook. Il voulait simplement un téléphone.
"Eh bien, avait rétorqué Holly, plus blessée que de juste, puisque cela n'était pas un cadeau très romantique - malgré tout, elle avait été excitée à l'idée de le lui offrir ! C'était aussi un téléphone, même si c'est plus qu'un téléphone." Elle se rendit compte, au moment où les mots quittaient ses lèvres, à quel point sa réponse était proche d'un slogan publicitaire.
"Et Steve Jobs est plus qu'un être humain, avait dit Eric. C'est pourquoi les esclaves chinois qui travaillent pour lui sont heureux de se jeter du haut des toits de ses usines comme sacrifices humains aux iDivinités." Eric détestait Steve Jobs.
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A l'intérieur du four, le rôti émettait le bruit de la graisse qui crépite et, Holly en ouvrit la porte, l'odeur succulente fondit sur elle, ainsi que la chaleur qui transforma la chaîne en argent autour de son cou en un filet brûlant de conduction thermique. Le rôti, éclairé par l'ampoule du four, était encore saignant, mais à présent brunissait au moins un peu à chaque extrémité. Bien que l'odeur déclenchât l'interrupteur de la carnivore primitive en elle, la vision de la viande dégoûtait encore Holly. Elle avait vu pas mal d'animaux écrasés ressemblant à ça sur le bord de la route - et aussi des photos de carnages, des scènes horribles dans des films violents avec des moignons de jambes, des cadavres de bébés, des restes humains.
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