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Critique de GODON


Au début sur un rythme de lecture très paresseux, je m'ennuyais… Les scènes érotiques me semblaient bien fades… le thème des vieux impuissants… Pas bandant!
Très intriguant comment le dégoût peut être le début de l'admiration.
Mon destin qui a un sens de l'humour cruel et que je trouve bien souvent de mauvais goût, tourne bien souvent mes désirs en dérision. S'est-t-il ce jour-là, emmêlé les crayons? Voulait-il méchamment crucifier ma solitude? Toujours est-il qu'il a raté son tour : Tandis que je lisais «Les belles endormies», il s'est trouvé que j'ai passé la nuit à côté d'une belle endormie, comme si la frontière entre la fiction et le réel était devenue infiniment poreuse. Pour les ceusses qui pensent que j'affabule ou que je déraille… Je n'ai rien à dire, mais avouez que vrai ou pas vrai, j'en fais des tonnes pour ce commentaire!
Je reprends : Auprès de ma belle….
Comme une mélodie de Chopin que l'on croyait avoir compris et que soudain on entend vraiment quand une génie la joue et que chaque note devient un abîme de jouissances inconnues, j'ai commencé à capter ce que Kawabata a voulu communiquer. Quelle subtilité et quelle révélation! le désir nous masque une vérité enfouie au plus profond de nos esprits : notre souvenir numéro zéro. Ce contact avec la peau et l'odeur de la mère qui est contact avec la vie, c'est la plus grande émotion imaginable, celle qui nous donne la force de vivre, de supporter cet arrachement, cette solitude qu'est la naissance.
Ce ne peut être le souvenir d'une idée, c'est un souvenir des sens et la mémoire doit toucher et sentir pour se rappeler ce moment. On ne peut l'imaginer ni le penser sauf à construire quelque chose comme ce subtil roman fabriqué comme un rêve qui outrance pour dire l'indicible, qui est scabreux pour parler de toucher les corps, qui nous envoute en évoquant les odeurs des femmes qui ont ce pouvoir de nous plonger toujours plus loin dans le passé.
Cette étrangeté est au plus près de ressusciter cet évanescent engramme, pourtant ce n'est qu'au contact réel de la belle que la décharge se fait, submergeant l'esprit : une joie élémentaire extrêmement troublante mêlant des sensations inanalysables qui pourraient être des impressions de l'avant naissance, cette mort d'avant.
Les femmes, me semble-t-il, ressentent consciemment cette anamnèse au moment où elles sont mères, au contact de leur bébé. Pour les hommes c'est un point presque inaccessible qui distille une nostalgie sans fond…
Sans doute le roman de Kawabata peut paraitre «décevant» si l'on ne lui donne pas un leitmotiv… Pourquoi pas ce point fuyant de l'instant zéro? La question de savoir si l'auteur en a été conscient me semble bien difficile, ne dit-on pas que le lecteur fait partie du livre avec son interprétation.
En tout cas de la grande sensibilité et du grand art! Dommage que la traduction efface sans doute une maitrise de la forme qui doit être à la hauteur de l'inspiration.
Évidemment je dédie ces lignes à ma belle endormie qui n'a nullement besoin d'écouter ces salades. Son corps sait! Merci au poète et à la belle… Sans eux j'aurais manqué un secret.
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