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Critique de Ode


Ode
11 juillet 2013
« Un jour, sans doute, on pourrait rattraper une comète, mais qui vient à laisser filer la vraie chance de sa vie, toutes les gloires de la terre ne sauraient l'en consoler. » Ayant vu récemment le très beau film d'Alexandre Arcady, je n'ai eu de cesse de lire le roman original. C'est désormais chose faite et ce premier contact avec Yasmina Khadra a sonné pour moi comme une révélation.

Dans l'Algérie rurale des années 30, la famille du jeune Younes a tout perdu avec l'incendie de ses récoltes. le père va tenter sa chance à Oran, mais le mauvais sort s'acharne... Confié à son oncle pharmacien, Younes devenu Jonas est sauvé de la misère ; il ne reverra plus jamais les siens.
C'est à Río Salado, bourg fertile proche d'Oran, où son oncle et sa tante déménagent, que Jonas va grandir, nouer de solides amitiés, puis s'éveiller à l'amour sans se douter des conséquences de cet élan de jeunesse...

L'écriture de Yasmina Khadra – de son vrai nom Mohammed Moulessehoul – est intense et poétique, pleine de sagesse et de bienveillance, à la gloire de l'amour et d'une terre : l'Algérie. Grâce à des personnages réalistes, dont certains, comme l'oncle de Younes, véritable humaniste, sont très attachants, l'auteur fait passer un message d'ouverture et de tolérance. Il rappelle aussi la place primordiale des femmes dans la société, à l'heure où l'islamisme cherche à les exclure. Choisir pour pseudonyme littéraire les prénoms de son épouse est un symbole fort qui montre son attachement à cette cause.

Livré aux caprices du destin, Younes / Jonas est le spectateur de sa propre vie et de la guerre qui déchire l'Algérie. En amour comme en politique, il retarde le moment de l'engagement, s'embourbant dans une situation ambigüe qui le frustre et le fait souffrir. Dans cet homme presque étranger à lui-même, sous le soleil de plomb d'Oran la luxuriante, on pourra déceler un clin d'oeil à Camus. Mais le parallèle s'arrête là, car sous cette apparente retenue, l'attirance de Younes pour Émilie a la force de la passion entre Solal et Ariane dans Belle du Seigneur. Sauf qu'ici le héros n'ose pas braver les interdits pour enlever sa belle, causant un gâchis à la démesure de leur amour.

Sur fond d'histoire coloniale, "Ce que le jour doit à la nuit" appréhende la complexité de l'être humain, le poids du passé et des origines dans la construction d'une personnalité, la part d'ombre et de lumière en chacun de nous. Une pépite à lire, et certainement à relire, tant on y trouve de vérités pour chaque âge de la vie.
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