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sur 629 notes
Il se fait appeler Turambo du nom du village où il était né dans les années 1920. Adolescent, sa famille s'installe à Oran. Turambo traîne dans les rues, fait des petits boulots jusqu'au jour où, remarqué dans le milieu de la boxe, il entame une carrière de boxeur et pourrait être le futur champion d'Afrique du Nord.
J'ai vibré avec Turambo, j'ai vécu avec lui, ressenti toutes ses émotions que l'écriture de Yasmina Khadra a révélé parfois avec pudeur, parfois avec violence mais toujours avec beaucoup d'humanité.
Dans son roman, il dépeint l'ambiance de l'époque, le racisme, le fossé entre Algérois et Français avec justesse et à-propos. Arrivée au terme de ma lecture, « Les anges meurent de nos blessures » resteront bien vivants dans ma mémoire. A lire !
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"Je m'appelle Turambo et, à l'aube, on viendra me chercher." Et vu ce qui suit, on comprend très vite qu'on ne va pas l'emmener en promenade Turambo.
C'est à l'échafaud qu'on l'emmène.
Quelle entrée en matière ! Yasmina Khadra ne perd pas une seconde et nous plonge tout de suite dans le vif du sujet. Les quatorze pages de l'introduction sont percutantes, brillantes, saisissantes.
S'ensuit un long flashback dans lequel Turambo raconte sa vie. Et quelle vie !
La vie de Turambo n'est pas un long fleuve tranquille, loin s'en faut. Certaines personnes sont douées pour le bonheur, elles enchaînent les heureuses coïncidences, tout leur sourit. Pour Turambo, c'est tout le contraire.
Comme pour bien signifier qu'il sera sans arrêt le jouet des éléments et des hommes, qu'il ne maîtrisera rien dans sa vie, Yasmina Khadra n'a même pas donné de nom à son héros : Turambo est le surnom qu'un boutiquier lui a donné car c'est le nom du village dont il est originaire.
Le lecteur ne peut que s'attacher à ce personnage qui ne possède même pas ce que tout être humain, même le plus démuni, possède : un nom. D'autant plus qu'il n'a pas grand-chose d'autre.
Il est attachant ce Turambo dans sa quête de réussite sociale, sa quête d'amour, sa quête de gloire. Pur et naïf, il est une victime facile : victime du sort et victime de personnes sans scrupules.
Il essaie de toutes ses forces de s'élever, mais ses efforts ne sont jamais payés en retour : Turambo retombe invariablement, jusqu'à la chute finale.
Yasmina Khadra est un auteur que j'aime particulièrement. J'aime le lire et j'aime entendre ses interventions télévisées ; il y a, je trouve, une grande intelligence dans ses propos.
Les anges meurent de nos blessures est un roman surprenant. S'il paraît à première vue plus léger que d'autres ouvrages du même auteur tels que L'attentat ou Les hirondelles de Kaboul, sa force est certaine, et il laissera en moi une trace durable.
Au-delà du héros, Yasmina Khadra a mis en scène une belle galerie de personnages : DeStefano l'entraîneur de boxe, l'ami Gino, le grand amour Irène, l'infâme Zane ("De l'avis d'un marabout, lorsque Zane rendra l'âme en gardant ses péchés, il n'ira ni en enfer ni au paradis puisque le Seigneur niera en bloc l'avoir créé.") et bien d'autres.
Le tout dans l'Algérie coloniale des années trente, dont l'auteur nous donne un bel aperçu.
Un beau tableau, un beau roman.
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Yasmina Khadra a une plume délectable, il me le prouve à nouveau dans son titre "Les anges meurent de nos blessures", et dont on ne comprend le sens qu'à la toute fin (ou presque). Il est de ces auteurs vers qui je reviens régulièrement, parce que son style me charme à chaque fois.

Yasmina Khadra aime à nous parler de son pays natal, à des époques différentes. Cette fois-ci, c'est dans l'Algérie française des années 1920 et 1930 qu'il a campé son personnage. Turambo qu'il s'appelle, et au moment où débute le livre, il a 27 ans, est en prison et attend qu'on vienne le chercher... Il a rendez-vous, pour un ultime combat, avec Dame Guillotine...

Dans le couloir de la mort, l'attente est longue et Turambo peine à faire remonter les souvenirs. Mais alors qu'on le pousse vers son dernier adversaire et qu'il lui fait désormais face, qu'il réalise qu'il vit ses derniers instants tellement le combat sera inégal, « les flashes fulminent dans [sa] tête »... Son village natal qui disparaît dans un éboulement de terrain, avec son père... La vie miséreuse à Graba... Son rêve qui s'écroule à Sidi Bel Abbes... Son arrivée à Oran... Son direct du gauche qui le fait sortir de la précarité... le ring, les victoires, les trophées... Les femmes aussi : Nora, Louise, Aïda, Irène... Et puis le drame, la chute...

Turambo n'a que 11 ans quand débute son histoire, que l'on va suivre sur une quinzaine d'années. L'auteur nous laisse donc le temps de bien le connaître, ce "bougnoule" du ghetto, qui décoche son gauche plus vite que son ombre mais avec la tête plein de rêves et le coeur tendre. Est-ce que je m'y suis attachée à ce jeune homme qui prend et donne les coups pour manger et non par passion ? Est-ce que je m'y suis attachée à ce jeune homme qui tombe amoureux sur un simple regard ? Est-ce que je m'y suis attachée à ce jeune homme qui fonctionne à l'affectif dans un monde de requins – et dont on comprend, grâce au prologue, que ça ne lui portera pas chance... ? À votre avis ?

Encore une fois, je ressors charmée et chamboulée grâce à Yasmina Khadra, qui écrit merveilleusement bien, qui sait trouver les mots justes pour nous percuter et nous faire frémir. Tout est si bien dépeint : la psychologie de son personnage principal, ses ressentis et ses réactions, le contexte historique, les croyances, traditions, mentalités et préjugés de l'époque, tout ce qui a trait au monde de la boxe également (les matches, les entraînements, les enjeux, les séquelles, etc).

J'y étais, dans cette Algérie de l'entre-deux-guerres. J'étais là, avec Turambo, tout au long des événements qui ont scellé son destin. Impuissante que j'étais, je n'ai pu que le comprendre, compatir et ressentir ses propres émotions. L'auteur a su me faire partager les espoirs et les rêves de Turambo, son amertume et ses désillusions, ses sentiments amoureux et ses déceptions, son euphorie face à la victoire. J'ai vécu avec lui la misère, la faim et le racisme, j'ai traîné avec lui dans les rues d'Oran, je me suis pris de sacrés coups sur le ring et ai eu la satisfaction de pouvoir les rendre, j'ai eu le coeur brisé à plusieurs reprises, j'ai goûté à la gloire. Et j'ai vu le danger se profiler bien avant lui...

J'ai adoré ce roman où tout y est approfondi, où l'on ne fait plus qu'un avec le personnage, où l'on voit tout comme si on y était. Un roman qui raconte le destin tragique d'un homme intègre et perméable, que l'on prend en affection dès le début, alors même que l'on ne connaît encore rien de lui (si ce n'est qu'il est condamné à mort...) et que l'on peine à quitter à la toute dernière page... Un roman poignant et réaliste, tristement beau, intense, d'un auteur à la plume envoûtante, poétique, sensible et profondément humaine.
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De tous les livres de Y. Khadra que j'ai lus, celui-ci me semble le plus littéraire et d'une certaine façon le meilleur. Moins didactique que sa trilogie (Palestine, Bagdad, Kaboul) moins irréaliste que « Ce que le Jour doit à la Nuit », ce livre se dégage de la volonté de démontrer qui a jusqu'ici caractérisé YK jusque dans ses romans policiers, pour entrer dans le pur plaisir de narrer. Et pas n'importe quoi, rien de politique ou de moral : une histoire de boxe. Un petit « yaouled » (garçon de rues, titi algérien) qui crève la faim de petit métier en petit métier, se trouve avoir une gauche redoutable. Il échappera un temps à sa condition misérable, deviendra champion d'Algérie, avant de devenir criminel par amour et sombrer dans la déchéance – et les pigeons s'oublieront sur sa statue. Tout ceci dans le cadres de l'Algérie coloniale des années 1930, population traumatisée par la guerre qui vient de se terminer, misère, indigénat et flamboyance d'une ville faite pour l'été, riche et orgueilleuse. C'est d'ailleurs dans l'évocation de ces années trente que Khadra est le moins convaincant : ville brillante de néon ( !), bourgeoises en cheveux, tailles bien prise et robes en guipures, ce sont plutôt les années soixante et c'est un peu gênant. de même que la liberté ardente de la belle pied-noire à cheval qui traverse une fois encore l'imaginaire de Khadra : son mode de vie, ses propos, sont ceux d'une intellectuelle des années soixante plutôt que ceux d'une « garçonne » de l'époque choisie. En revanche, l'évocation de la situation coloniale me semble juste, tous ne sont pas des salauds, loin de là, mais sous l'effet de la colère ou de la frustration, les propos dérapent avec une violence, un mépris qui rendent bien mieux l'aliénation coloniale, les représentations sous-jacentes, que la scène de flagellation de « Ce que le jour doit à la nuit », très invraisemblable à mon avis. L'écriture est assez brillante, avec les bizarreries de style qu'on a notées ici et dont on ne sait pas si ce sont des maladresses ou des trouvailles ! Trouvaille aussi, que le nom du narrateur « Turambo » en hommage à Arthur Rimbaud, nom qui aurait été celui d'un village englouti par un glissement de terrain. Trois séquences, pour moi, font la qualité littéraire du livre : le début, sorte de fresque picaresque d'arabes, de berbères, de juifs, de gitans, de petits blancs européens qui cherchent à survivre et construisent leur menu bonheur au sons de leurs musiques. Puis les deux séquences finales :l'une est l'éblouissant dernier match, qui fera de Turambo le champion d'Algérie, séquence qui deviendra j'en suis sûre un morceau d'anthologie, la boxe n'est pas un sujet si souvent traité et sa violence impitoyable est montrée comme jamais. L'autre, la conclusion inattendue, déchéance du héros d'hier, ce vieillard dont la statue s'effrite dans la démence sénile, champion devenu dépotoir à pigeon, sur fond d'une indépendance sans joie. Entre, une longue histoire d'ascension sociale, de femmes, d'amour – un peu raide, un peu maladroite. Monsieur Khadra, il le dit dans ses entretiens, rêve d'écrire une inoubliable histoire d'amour, mais ce ne sera pas encore pour cette fois-ci.
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du peu de livres de Yasmina Khadra que j' ai eu à lire , " Les
anges meurent de nos blessures" est le plus beau , à mon
avis . La période où se déroule le récit correspond à l' ère
coloniale .
Il s' agit d' un jeune Algérien surnommé Turambo du nom
du bidonville où il habite .C' est un enfant misérable comme tous les Arabes de l' époque . Cet enfant est remarqué pour
son don de boxeur . Alors un manager s' intéresse à lui et le
forme pour devenir un véritable boxeur . Devenu boxeur ,
Turambo est adulé par le public .C' est la belle vie pour lui .
Il aime les femmes . Mais à l' époque la population n' est pas
homogène et il y a trois : les Arabes , elle est démunie de
tout et vit misérablement . Il y a la population juive et la
population la plus gâtée est celle des colons à qui tout est
permis .Turambo a rêvé et puis c' est la descente aux enfers . Car dès le départ tout est contre lui .
Dommage pour le jeune prodige .Un roman qui mérite
d' être lu . Bonne lecture à tous .
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Yasmina Khadra ne m'a jamais vraiment déçu.
On ne saurait constamment côtoyer l'excellence mais le présent roman se positionne incontestablement en haut du classement.
D'emblée l'auteur nous saisit à la gorge, nous invitant brutalement à partager l'attente anxieuse d'un condamné à la peine capitale.
S'ensuit un récit rondement mené où nous accompagnons pas à pas, sans jamais le quitter d'une semelle, Turambo, héros pathétique de ce drame, du misérable douar de ses 11 ans à ce lugubre couloir de la mort un quart de siècle plus tard.
Tour à tour, sans que cela soit contradictoire, le lecteur est amené à le percevoir : victime pitoyable d'une malédiction ancestrale, perpétuellement à l'étroit dans son corps, d'une naïveté abyssale, perclus de culpabilité, d'une incroyable capacité à rebondir, gladiateur des temps modernes fonctionnant en permanence à l'affectif, à l'instinct et ce jusqu'à l'aveuglement, Icare du ring se brûlant les gants au contact des cordes d'une arène aux fauves que nul gong ne viendra sauver d'un naufrage inévitable.
Yasmina Khadra excelle à user (sans en abuser) de toutes les ficelles de la tragédie classique, jonglant habilement avec les mots d'une langue française qu'il maîtrise à la perfection.
Le tout est finement ciselé, débordant fréquemment d'un humour décapant mais toujours judicieusement inspiré.
Rien ne m'a semblé excessif, stéréotypé ou caricatural.
Le regard qu'il porte sur l'Algérie de l'entre-deux-guerres est d'une lucidité féroce, implacable ce qui ne l'empêche pas de faire preuve d'une réelle empathie, dépourvue de tout angélisme, pour les damnés de sa terre natale.
Deux petits bémols cependant :
1) Les propos tenus par certains protagonistes sont quelquefois trop "littéraires" pour être vraiment crédibles au risque également de paraître un tant soit peu anachroniques ;
2) le tomber de rideau final m'a aussi laissé perplexe.
Je ne puis vous en dire davantage sans déflorer le roman mais je ne l'ai pas trouvé d'une grande valeur ajoutée ni particulièrement inspiré.
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Un beau livre! L'écriture de l'excellence de Yasmina Kadra s'est trouvée un langage à la taille de l'histoire pour nous emballer avec plaisir dans les méandres de la vie troublante de Turambo. Est-il que pour un boxeur qui n'a jamais été à l'école, qui n'a jamais eu de fréquentations susceptibles d'améliorer ses lacunes du point de vue culturel, nous livre une histoire dans un langage quand même soutenu avec des pensées poignantes rendues également très philosophiquement, on entendait plutôt la vie de l'auteur que celle du personnage...

Mais le livre est un vrai régal, le personnage de Turambo est très attachant qu'on le suit dans les vicissitudes de la vie où il a été, dans toute sa pureté à la quête de l'amour, que même la gloire ou les principes de la religion musulmane n'y pouvaient absolument rien pourvu que l'amour ait été au rendez-vous, dommage, quand ça vous sourit, la terre se creuse à l'instant.
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Yasmina Khadra…. voilà un homme particulier, courageux, plein d'humanité que j'aime beaucoup. J'avais vu son passage sur la Grande Librairie de France 5 pour présenter son dernier ouvrage « Les anges meurent de nos blessures »… et j'avais été enthousiasmée. Et puis rien que les titres de ses ouvrages sont déjà tout un programme, une invitation au voyage, une poésie des mots, … car avec Yasmina, c'est un bonheur pour ceux qui aiment la langue française… qu'il écrit bien ! c'est un délice de le lire…
Bref, mon envie de le lire était au maximum….
Pour être honnête, le début, voire une moitié du livre est bonne, toujours aussi bien écrit, un personnage attachant, Turambo… mais c'est lent… Yasmina prend son temps, peut être plus qu'à son habitude… je ne sais pas…
Non il faut que je dise tout… le tout début est très très fort….il arrache les tripes… nous prend d'emblée, le souffle court… j'aimerais vous dire comment, mais cela serait réduire un suspens, votre future découverte du livre… mais c'est fort, je peux vous le dire !
Donc après le début, on retourne dans le passé, et on suit Turambo, de son village natal jusqu'à Oran, dans son quotidien, ses galères, grosses galères, ses espoirs, ses rêves, ses amis, sa découverte de la vie… Et puis une sorte d'accélération se sent, une grosse intensité nous emmène comme sait le faire Yasmina…. et on est emporté jusqu'au final avec force….
J'aurais beaucoup de choses à dire encore, mais j'ai peur de « spoiler » comme on dit maintenant, vous révéler trop de détails.
La fin est dure… mais logique quelque part… Yasmina nous livre encore beaucoup de vérités, difficiles, sur la nature humaine… sur l'histoire de l'Algérie aussi, sur l'occupation de l'Algérie,… des vérités aussi sur le racisme, dégoûtant, inadmissible, mais qui était si commun, si quotidien dans cette Algérie française… qu'en est-il resté de nos jours ? Ça pose beaucoup de questions… ça remet les idées en place. Oui ça interroge. C'est ça aussi la littérature, et c'est tant mieux !
Bref, un livre à lire…. Laissez-vous emporter par la magie de la langue de Yasmina Khadra.
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Turambo, non je ne m'appelle pas Turambo. Simplement Turambo est le nom de mon village de naissance englouti un jour par les éléments, drame duquel mes parents se sortiront comme ils le pourront et dont il faudra bien que moi aussi je me sorte.
Et voilà issu de cet univers de malheur comment Turambo est devenu mon nom.
Echapper à ma condition, je ne pouvais compter que sur moi pour cela et le parcours allait être dur. J'étais prêt à tout pour gagner ma vie et effectivement ce fut dur.
La chance finit pourtant par me sourire un jour, par un hasard incroyable en me révélant un don qui me surprit moi-même, celui la boxe !
Ca y était, bien encadré par le Duc et Gino j'allais connaître le succès, l'argent, la gloire, tout ce dont un « Turambo » peut rêver quoi… Et le succès vint effectivement.
Mais pour autant je restais Turambo avec cette candeur que mes origines avaient dessinées dans mon être et en proie avec l'envie de sortir de ce nouvel univers sans savoir comment et qui allait finalement m'enfermer.
Malgré Irène ma tendre Irène, avec laquelle j'allais vivre heureux une vie à laquelle je n'aurais jamais pensé. Mais non quand on s'appelle Turambo, les choses ne se passent pas comme ça, pas comme on le voudrait. Irène le savait et elle avait raison elle voulait m'y aider, et ainsi les choses ne se passèrent pas du tout comme je l'imaginais.
Yasmina Khadra nous enchaine ici à un parcours humain à la foi attachant et terrible tout en nous faisant découvrir une Algérie que sans doute peu de lecteurs auront connue, c'est aussi l'autre grand intérêt de ce beau roman .

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Un roman lumineux profondément humain

Après une introduction forte, presque traumatisante, voici les tribulations, dans les années 30, de Turambo, jeune algérien arabe, à travers son pays colonisé. Ses rencontres plus ou moins heureuses, les chocs qui le marqueront et le forgeront, ses émois amoureux, ses choix, sa chute.

Yasmina Kahdra sait rendre le personnage principal particulièrement attachant par sa fraîcheur simple faite pour beaucoup d'ignorance et de jeunesse. Il a ce talent de nous immerger intensément dans cette époque et dans ces lieux.
Le style de l'ouvrage est nettement littéraire avec des descriptions profondes, épaisses.
Ainsi, je resterai marqué longtemps par cet odieux parcours qui mène Turambo vers la guillotine, cette montée de la peur qui envahit l'esprit, le corps, l'âme jusqu'à les tuer successivement.

Tout petit bémol : La fin de l'histoire m'a un peu surpris et déçu mais elle a le mérite de distiller de nouvelles belles vérités sur la nature humaine dont une conclusion plus attendue nous aurait privés.

Ce roman m'aura initié un peu à l'âme arabe ; sa façon de voir la vie, les traditions, la famille, les interdits, le Mektoub, les Roumis, le mélange subtile des cultures musulmane, juive et chrétienne qui imprégnait la vie du petit peuple.

Il m'aura aussi fait prendre conscience de ce que pouvait être la ségrégation dans l'Algérie française des années 30 et son lot de pensées et d'actes odieux.

Et surtout, surtout, l'auteur m'a rappelé combien la bêtise raciste est laide face à la finesse, la sensibilité, la fraîcheur, la noblesse de notre jeune héros.

Cela fait du bien à l'époque actuelle.


Petit résumé si ça vous tente :

Turambo a 27 ans et il va être guillotiné. Il nous raconte ses derniers instants et surtout cet improbable moment où sentant sa vie partir ou la mort venir, il revit, le temps d'un éclair, le temps de sa courte vie.
Il se revoit courir, pieds nus, sur les terres sèches du reg.
Il revoit son père, revenu « gueule cassée » de la guerre.
Il revoit sa mère berbère.
Il revit l'engloutissement de son village, Turambo, emporté par un glissement de terrain.
Il revoit la disparition de son père, sans doute ensevelit sous la boue.
Il revoit ce qui reste de sa famille fuir et s'installer dans un quartier sordide d'Oran et tenter de reconquérir un peu d'humanité.
Et puis les galettes que sa mère et ses soeurs confectionnent pour gagner quelques pièces, et puis cet étrange enfant qui le suit lorsqu'il parcourt la campagne ; un orphelin benêt.
Ils vont rencontrer Pedro, gitan, puis sa famille exubérante.
Bref les derniers moments d'insouciance d'une enfance déjà bien chahutée.
Il y a l'incident du train, une bêtise d'enfant : Turambo qui saute et l'orphelin qui reste dans le wagon et se perd.
L'enfant Turambo va se faire exploiter par beaucoup, projeté de gauche et de droite comme une boule de billard qui rebondit longtemps.
Mais il a un atout majeur : il sait cogner et à Graba c'est quelque chose !
La famille va quitter le bidonville et s'installer dans un lieu plus attrayant.
Sur ces entrefaites, Turambo découvre la ville Sidi bel abbes, son âpreté, sa ségrégation, ses injustices. Il l'a fuira aussi.
Un jour il rencontre Gino les deux jeunes gens se lient d'amitié.
Un autre c'est Pierre qu'il rencontre ; une sorte de maquereau qui lui propose des petits boulots en échange de la moitié de son salaire.
Le père de Turambo n'est pas mort, Turambo le retrouve gardien du cimetière juif. Il a fuit sa famille profitant de l'engloutissement du village. C'est le choc, l'effondrement de l'image du père héros de la guerre.
Jouant de malchance, il est incapable de garder une place.
Il finit par être remarqué par le directeur d'une salle de boxe, aux oreilles duquel est venue la promptitude aux bons coups que Turambo distribue lorsqu'il est acculé.
Cahin caha il gravit les échelons, est pris sous l'aile du Duc, un nabab de la boxe.
A partir de là beaucoup de choses vont basculer mais je n'irai pas plus loin dans ce résumé
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