Une autre pièce de théâtre de Heinrich von
Kleist. Et cette fois encore, il revisite l'histoire. Il nous fait remonter jusqu'à l'Antiquité romaine. Et dans le plus esprit des tragédies. Hermann, prince des Chérusques (Arminius pour les Romains), reçoit un ultimatum du prince des Suèves, Marbod. le général romain Quintilius Varus, gouverneur de la Germanie, lui offre son soutien. Mais Hermann voit derrière son double jeu, les Romains espèrent diviser les Germains pour mieux les asservir alors il décide secrètement de s'allier son ancien rival. Donc, Hermann envoie en secret un émissaire auprès de Marbod et, ensemble, ils préparent le guêt-apens : la Bataille de Teutoburg. Ce sera une des pires défaites de l'histoire romaine, trois légions seront anéanties. À la fin de l'engagement, Hermann, qui se préparait à rendre hommage à son ancien rival, se voit plutôt offrir la suprémacie des Germains.
On a vrament affaire à une pièce d'une autre époque. D'abord, l'intrigue, qui est très classique dans sa construction et lente à s'installer. Ensuite, tous les personnages, incluant les très nombreux Germains, barbares, s'expriment avec fluidité, dans le même langage : grandiloquent et démontrant une grande culture. Et ça m'a agacé ! Bon, Arminius a vécu une partie de sa vie dans l'Empire romain, ça s'explique un peu, mais les autres ? Un chef barbare ne devrait pas s'exprimer ainsi. Mais bon, si on met de côté tout ce genre de détails, qu'on les accepte, on peut se concentrer sur l'histoire, on a affaire à une intrigue intelligente finement. Ajoutons à cela des combats épiques, des doubles trahisons, et même un peu de romance et nous nous retrouvons avec une grande oeuvre. Autrement dit, la pièce a quelque chose de très Shakespearien.
Hermann / Arminus est une figure historique importante, libérateur des Germains, l'incarnation de la fierté de tout un peuple. Bref, le héros par excellence. À l'époque de la présentation de la pièce, au tout début du XIXe siècle, on assiste à l'éveil du nationalisme allemand ou pan-germanique. Très important alors que les troupes napoléonniennes malmènent les Allemands et les Prussiens sur tous les fronts… La Bataille d'Arminius arrive à point nommé et beaucoup de parallèles peuvent s'appliquer entre les deux situations. Cette pièce de
Kleist demeure un grand classique du genre.